La Commission Mazeaud et le Pacte européen pour l’immigration : quel avenir?

Le débat est ouvert. Des analystes et des médias se penchent sur la question.


La commission Mazeaud juge les quotas d'immigration inefficaces (1)

L'Express.fr http://www.lexpress.fr/ du 7 juillet 2008

Les quotas d'étrangers prônés par le gouvernement sont jugés inefficaces dans un rapport qu'une commission doit remettre vendredi au ministre de l'Immigration Brice Hortefeux, rapporte la presse lundi.

Le 30 janvier, Brice Hortefeux avait confié à Pierre Mazeaud, ancien président du Conseil constitutionnel et gaulliste historique, la présidence d'un groupe de 13 sages - parlementaires, juristes, démographes, économistes - pour réfléchir au cadre constitutionnel de la nouvelle politique d'"immigration choisie" chère au président Nicolas Sarkozy.

Selon Le Figaro, la commission répond "trois fois non" aux interrogations gouvernementales - pas de quotas, pas de réforme des juridictions et pas de révision de la Constitution - et conclut qu'"une politique de contingents migratoires limitatifs serait sans utilité réelle en matière d'immigration de travail, inefficace contre l'immigration irrégulière".

"Voilà une formule qui semble enterrer définitivement un dispositif de quotas en France", commente le quotidien.

Libération ajoute que la commission déborde le cadre qui lui avait été fixé en formulant "un certain nombre de recommandations" qui reviennent à prôner une véritable politique d'immigration alternative "inspirée par trois soucis : la transparence, la simplicité et la solidarité".

La commission relève aussi qu'une politique de quota migratoire global ou par grand type d'immigration "n'est pratiquée nulle part en Europe", alors que le président Sarkozy, en septembre 2007 sur France 2, avait affirmé que "tous les pays démocratiques le font".

"Si les voisins de la France ne l'ont pas mise en place, c'est peut-être parce qu'elle est moralement condamnable", écrit Libération qui, comme Le Figaro, s'est procuré le rapport.

Pour la Commission, ajoute Libération, quota est synonyme de "fixation unilatérale et opportuniste de contingents d'entrées" et sur le fond les sages jugent que "des quotas migratoires contraignants seraient irréalisables ou sans intérêt".

 


Les quotas d'immigration contestés dans le rapport officiel de la commission Mazeaud (2)

LEMONDE.FR avec AFP | 07.07.08 | 09h13 • Mis à jour le 07.07.08 | 10h56

La commission Mazeaud, chargée en janvier par le ministre Brice Hortefeux de réfléchir à la mise en place de quotas d'immigration, estime qu'ils sont "sans utilité réelle en matière d'immigration de travail", inefficaces"contre l'immigration irrégulière", "irréalisables ou sans intérêt", rapportent, lundi 7 juillet, Libération et Le Figaro qui se sont procuré une copie du rapport avant sa remise officielle, vendredi.

Présidée par le gaulliste Pierre Mazeaud, ancien président du Conseil constitutionnel, et composée de parlementaires, de juristes, de démographes ou encore d'économistes de sensibilités diverses, la commission note d'abord que contrairement à ce qu'a affirmé le président Nicolas Sarkozy sur le sujet, "une politique de quota migratoire global ou par grand type d'immigration n'est pratiquée nulle part en Europe".

Le rapport estime notamment qu'établir des quotas par nationalité ou par région du monde pourrait contredire le "principe d'égalité" entre tous les citoyens, quelle que soit leur nationalité, garanti par la Constitution et les traités internationaux dont la France est signataire, relève Libération.

FACILITER LES VA-ET-VIENT DES MIGRANTS

Idem pour l'immigration familiale : "les pouvoirs publics nationaux ne disposent pas d'un pouvoir discrétionnaire pour déterminer les flux", expliquent les auteurs du rapport, la Constitution et les traités internationaux garantissant le droit de vivre en famille. Il n'est pas non plus possible de limiter le nombre de demandeurs d'asile. Ainsi, relève Le Figaro, seule l'immigration de travail serait susceptible d'être contingentée. Or, pour atteindre l'objectif d'une immigration à 50 % économique, il n'y aurait d'autre hypothèse que de "décupler" les arrivées, et cela,"la société française n'y est pas prête !", estime la commission. Sur l'immigration de travail, le rapport note encore que"des quotas (par branche ou par métier) sont envisageables au niveau national ou européen, mais ne sont pas indispensables à la maîtrise du flux", et pourraient avoir,"paradoxalement, un effet incitatif".

La commission, qui écarte la création d'une justice spécialisée dans le contentieux des étrangers, formule diverses propositions : améliorer la connaissance statistique sur l'immigration, notamment via des registres tenant à jour la liste des habitants de chaque commune ; la tenue d'un débat sur l'immigration au Parlement avec vote d'une loi de programmation ; ou encore la création d'une commission départementale pour examiner les recours des étrangers.

"Une meilleure maîtrise de l'immigration doit être recherchée par des voies empiriques et multiformes, en étroite concertation avec nos partenaires européens" et avec les pays d'origine, "plutôt que dans des recettes radicales purement nationales" ou des "remèdes spectaculaires mais illusoires", affirme la commission, qui va jusqu'à préconiser les va-et-vient entre le pays d'origine et la France, "qui sont souvent dans l'intérêt de tous", y compris du migrant.

 


 

Lire ci-après la version Libération citée:

http://www.liberation.fr/actualite/societe/337340.FR.php

Immigration choisie : la commission Mazeaud attribue un zéro pointé (3)

Selon le rapport que s’est procuré «Libération», les experts sont sceptiques. CATHERINE COROLLER QUOTIDIEN : lundi 7 juillet 2008

Nicolas Sarkozy pourrait regretter d’avoir confié à Pierre Mazeaud, ancien président du Conseil constitutionnel et gaulliste historique, la mission de réfléchir au «cadre constitutionnel de la nouvelle politique d’immigration». Les treize sages de sa commission ont bouclé vendredi leur rapport, que Libération s’est procuré avant qu’il ne soit officiellement remis à Brice Hortefeux, ministre de l’Immigration, le 11 juillet. Le moins que l’on puisse dire, c’est que leurs conclusions ne sont pas politiquement très correctes. Dans sa lettre de mission, Hortefeux leur demandait d’étudier «deux domaines de la politique d’immigration : la maîtrise des flux - particulièrement les quotas - et la simplification du contentieux des étrangers» (aujourd’hui confié à deux juridictions, administrative et judiciaire). Sur les deux points, les membres de la commission Mazeaud rejettent tout besoin de changement.

Depuis son élection, Sarkozy a martelé sa volonté d’établir des quotas d’étrangers admis à entrer en France. C’est la fameuse immigration «choisie». Sur France 2 en septembre 2007, il souhaitait que soit fixé, chaque année, «un chiffre plafond d’étrangers que nous accueillerons sur notre territoire». Et à l’intérieur, «un quota par profession, par catégorie». Et «naturellement, un quota par région du monde». Ajoutant : « Tous les pays démocratiques le font.»

Sauf que non, justement. « Une politique de quota migratoire global ou par grand type d’immigration n’est pratiquée nulle part en Europe», rétorquent les sages. Et si les voisins de la France ne l’ont pas mise en place, c’est peut-être parce qu’elle est moralement condamnable. Pour la commission, quota est synonyme de «fixation unilatérale et opportuniste de contingents d’entrées». Sur le fond, les sages jugent que «des quotas migratoires contraignants seraient irréalisables ou sans intérêt».

Famille. Sur la question précise et ultra sensible des quotas par nationalité ou région du monde, les fameux quotas ethniques, les sages rappellent le sacro-saint «principe d’égalité» entre tous les citoyens, quelle que soit leur nationalité, garanti par la Constitution et les traités internationaux dont la France est signataire. Ils considèrent toutefois que «les contingents par pays» peuvent être justifiés « par l’intérêt commun du pays d’accueil et du pays d’origine».

Concernant l’immigration familiale, principale porte d’entrée en France, «les pouvoirs publics nationaux ne disposent pas d’un pouvoir discrétionnaire pour déterminer les flux», expliquent les sages. La Constitution et les traités internationaux garantissant le droit de vivre en famille, le pouvoir ne peut pas s’arroger le droit de fixer le nombre d’étrangers autorisés à entrer en France, chaque année, à la suite d’un regroupement familial ou d’un mariage mixte. Par ailleurs, s’agissant de l’immigration de travail, «des quotas [par branche ou par métier, ndlr] sont envisageables au niveau national ou européen, mais ne sont pas indispensables à la maîtrise du flux». «d».

Enfin, une politique de quotas n’a pas de sens pour l’immigration irrégulière. Et risque même de l’encourager : «L’affichage d’un contingent pourrait avoir, paradoxalement, un effet incitatif.» Pour faire sauter les verrous législatifs, Brice Hortefeux avait demandé aux experts d’étudier l’opportunité d’une révision constitutionnelle. «Unanime», la commission invite «les pouvoirs publics à ne pas s’engager dans cette voie».

«Trois soucis». A l’autre question qui lui était posée, l’unification juridictionnelle du contentieux de l’entrée et du séjour des étrangers, la commission répond par la négative. Lourde puisqu’exigeant une révision constitutionnelle, elle aurait pour résultat un doublement de la charge de travail des magistrats chargés de ces dossiers. Débordant le cadre qui lui avait été fixé, la commission formule «un certain nombre de recommandations». En fait, il s’agit d’une véritable politique d’immigration alternative «inspirée par trois soucis : la transparence, la simplicité et la solidarité». Autant de qualités qui manquent à la politique plus idéologique que pragmatique de Sarkozy ? Pour les sages, il faudrait favoriser les va-et-vient entre le pays d’origine et la France «qui sont souvent dans l’intérêt de tous», y compris du migrant. Une r évolution qui va à l’encontre des «politiques conduites pendant une trentaine d’années». «Une meilleure maîtrise de l’immigration doit être recherchée par des voies empiriques et multiformes, en étroite concertation avec nos partenaires européens» et avec les pays d’origine, disent-ils. Et cela, suivez leur regard, «plutôt que dans des recettes radicales purement nationales» ou des «remèdes spectaculaires mais illusoires».

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