Laurent Nkunda, le chef de la rébellion en République démocratique du Congo (RCD), veut prendre Goma. Les troupes de l’UE hésitent pour une éventuelle intervention

 


 

RD Congo: le chef de la rébellion Laurent Nkunda veut des négociations directes avec le gouvernement

Michelle Faul

Kinshasa, AP, Jeudi 30 octobre 2008 - Le chef des rebelles tutsis en République démocratique du Congo (RDC) Laurent Nkunda a déclaré jeudi vouloir des négociations directes avec le gouvernement de Kinshasa, qu'il a de nouveau accusé d'association avec des miliciens hutus rwandais réfugiés dans l'est du pays après le génocide de 1994. Des coups de feu ont éclaté au coucher du soleil près du lac Kivu.

Laurent Nkunda, chef du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) s'exprimait dans un entretien par téléphone à l'Associated Press dans les faubourgs de Goma, la capitale du Nord-Kivu située dans l'est du Congo-Kinshasa. Le CNDP a décrété mercredi un "cessez-le-feu unilatéral" dans la périphérie de Goma, qui restait pour le moment sous le contrôle de l'armée régulière congolaise, selon un de ses commandants, le colonel Jonas Padiri.

Des soldats patrouillaient dans la ville en camions. Un autre, assis bord de la route, portait un masque de Dark Vador. Des soldats de la Mission de paix de l'ONU en RDC (MONUC) patrouillaient aussi, en blindés, salués par les habitants, alors que quelques jours plus tôt la population leur jetait des pierres en leur reprochant de ne pas arrêter l'avance des rebelles. Sur les 17.000 hommes de la force onusienne, la plus importante déployée dans le monde, seuls 6.000 sont postés dans l'Est du pays étant donné la persistance de violences dans d'autres provinces, et ces troupes sont débordées.

Laurent Nkunda, lors de son interview à l'AP, a accusé le gouvernement de RDC -qui dément- d'association avec les anciens miliciens hutus rwandais. "Il n'est pas acceptable que les soldats du gouvernement combattent aux côtés des génocidaires", a-t-il lancé. Pendant le génocide de l'été 1994 au Rwanda, au moins 800.000 Tutsis et Hutus modérés ont été massacrés.

"A partir du moment où le gouvernement congolais ne veut pas négocier la paix avec son peuple, où le gouvernement congolais utilise les forces négatives étrangères (les Hutus rwandais) contre son peuple, la seule chose qu'il lui reste à faire, c'est de partir", a-t-il par ailleurs déclaré dans un entretien à la chaîne France 24.

Il a également accusé l'armée congolaise de poursuivre les combats malgré un cessez-le feu unilatéral décrété la veille par ses forces, qui comptent environ 10.000 hommes. "Nous avons décidé un cessez-le-feu unilatéral (mercredi) afin de permettre une soirée apaisée", a-t-il déclaré. "Malheureusement, elle s'est transformée en une soirée de sang car ce matin, nous avons appris qu'il y avait plus de soixante morts", a-t-il affirmé. Ce bilan n'a pas été confirmé de source indépendante.

Le colonel Padiri a de son côté fait état de cinq morts lors au cours de la nuit de mercredi à jeudi. Selon des témoins, des soldats congolais se sont livrés au pillage de maisons et de boutiques dans la nuit. En pleine déroute, ces soldats à bord de voitures, de taxis ou encore à moto battaient en retraite, rejoignant les dizaines de milliers de civils terrifiés qui fuyaient les zones de combat et l'avancée des troupes rebelles.

Le colonel Padiri n'a pas dit que ses soldats étaient responsables des morts de la nuit, se contentant de déclarer que cinq personnes avaient été tuées au cours de ce "siège".

Laurent Nkunda a expliqué à l'AP qu'il souhaitait des discussions directes avec le gouvernement de Joseph Kabila sur divers dossiers, mais a déploré en particulier la conclusion d'un contrat de 9 milliards de dollars (7 milliards d'euros) donnant à la Chine l'accès aux ressources minières du pays, en échange de la construction d'une autoroute et d'une ligne de chemin de fer.

Un rapport d'enquête de l'ONU réalisé en 2001 a établi que les conflits en RDC avaient principalement pour objet "l'accès, le contrôle et le commerce" de cinq principales ressources minières: coltane, diamants, cuivre, cobalt et or. L'exploitation des ressources naturelles par des armées étrangères s'est révélée "systématique", et les dirigeants ougandais et rwandais ont particulièrement oeuvré dans ce sens, selon le rapport.

L'ONU estime ainsi que la vente de coltane, un minerai utilisé dans la fabrication de téléphones et ordinateurs portables, a rapporté au moins 250 millions de dollars (193 millions d'euros) en un an et demi. La guerre, résume le rapport, "a créé une situation dans laquelle tous les belligérants sont gagnants. Le seul perdant de cette vaste entreprise affairiste est le peuple congolais".

Le Haut commissariat de l'ONU aux réfugiés (HCR) a estimé mercredi qu'environ 45.000 personnes avaient fui le camp de Kibati au nord de Goma en quelques heures, alors que 30.000 environ n'étaient arrivés que depuis la veille depuis les zones situées plus au nord, fuyant devant l'avancée des rebelles. Depuis le regain d'affrontements au Nord-Kivu fin 2006, les agences humanitaires estiment le nombre de déplacés internes à près d'un million dans la province.

Sur le plan diplomatique, la secrétaire d'Etat américaine adjointe aux Affaires africaines Jendayi Frazer devait rencontrer jeudi le président Joseph Kabila et d'autres hauts responsables congolais afin de tenter de mettre fin aux affrontements dans l'est de la RDC. AP

 


 

La rébellion respecte la trêve, l'UE étudie une mission militaire

Albert KAMBALE

AFP, jeudi 30 octobre 2008 - La rébellion congolaise qui a pris le dessus sur les troupes de Kinshasa dans l'est de la République démocratique du Congo a proposé jeudi de sécuriser les déplacements des civils chassés par les combats, et l'Europe étudie l'envoi d'une mission militaire humanitaire.

Goma, capitale de la province du Nord-Kivu et objectif du chef rebelle tutsi congolais Laurent Nkunda, est restée paralysée jeudi, avec ses rues vides et ses commerces clos. Des habitants ont continué à fuir la ville.

Au lendemain du cessez-le-feu décrété par la rébellion, la situation dans cette région où les affrontements ont repris fin août était considérée comme "stable" par la Mission de l'ONU en RDC (Monuc).

En revanche, la situation humanitaire est "catastrophique", selon le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), et l'Unicef redoute des épidémies.

Des dizaines de milliers de déplacés sont pris entre les lignes de feu, aux portes de Goma, et Laurent Nkunda - chef du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) - a proposé à la Monuc "l'ouverture de couloirs humanitaires d'urgence" pour permettre aux déplacés de rentrer chez eux.

Les habitants de Goma redoutaient de nouvelles violences à la faveur de la nuit. Dans une maison du quartier de Katindo, un journaliste de l'AFP a vu sept cadavres de civils tués la nuit précédente, selon les habitants, par des militaires gouvernementaux en débandade.

"Pour l'instant, le cessez-le-feu décidé par le CNDP est respecté par toutes les parties", a indiqué le chef des opérations militaires de la Monuc, le colonel Samba Tall.

Nkunda, général déchu de l'armée congolaise, a néanmoins prévenu que les Casques bleus ne pourraient pas "l'empêcher" de prendre Goma.

L'Union européenne (UE) a annoncé qu'elle étudiait l'envoi d'une mission militaire et que des pays membres étaient prêts à mettre à disposition des avions pour acheminer de l'aide humanitaire, "priorité numéro un" des Vingt-Sept.

La France a évoqué "une assistance aux populations civiles", sous la forme d'un contingent de 400 à 1.500 militaires en soutien "technique et humanitaire" à la Monuc. Une réunion du Comité politique et de sécurité de l'UE est prévue vendredi.

Le chef rebelle a jugé l'envoi d'une force européenne inutile, mais ne s'y est pas opposé à condition qu'elle vienne "appuyer la paix".

Paris a toutefois souligné que la solution à la crise au Kivu, déjà berceau des rébellions qui ont entraîné l'ex-Zaïre dans les guerres dévastatrices de 1996-1997 et 1998-2003, était "politique".

A Kinshasa, les députés congolais ont d'ailleurs réclamé à l'unanimité jeudi l'ouverture par le gouvernement d'un dialogue direct avec la rébellion et l'abandon de l'option militaire.

Nkunda affirme vouloir défendre les Tutsis congolais victimes, selon lui, d'exactions. Il accuse l'armée régulière d'utiliser comme supplétifs les rebelles hutus rwandais hostiles au régime de Kigali et installés dans l'est de la RDC, dont certains sont accusés d'avoir participé au génocide de 1994 au Rwanda essentiellement dirigé contre la minorité tutsie.

De son côté, Kinshasa accuse le pouvoir rwandais, dominé par les Tutsis, de soutenir les rebelles de Laurent Nkunda, ce que Kigali dément.

Le commissaire européen au Développement Louis Michel a affirmé qu'il ne croyait "pas à l'option militaire". Après avoir rencontré le président congolais Joseph Kabila à Kinshasa, il a appelé la communauté internationale "à bouger (...) pour trouver des solutions".

Alors que la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice a téléphoné au président rwandais Paul Kagame, son adjointe aux Affaires africaines, Jendayi Frazer, a insisté dans la capitale congolaise sur l'instauration d'un dialogue permanent entre Kigali et Kinshasa "pour que la paix revienne".

Elle a annoncé l'envoi d'une équipe "de réaction rapide" pour évaluer les besoins des déplacés, avant de se rendre, comme Louis Michel, à Kigali.

La ministre rwandaise des Affaires étrangères, Rosemary Museminali, a également été reçue par M. Kabila, alors que les deux pays s'accusent mutuellement d'avoir bombardé leurs territoires.

Comme lors des deux précédentes guerres du Congo, ce conflit encore local n'est pas à l'abri d'une régionalisation. Selon une source diplomatique, Kinshasa pourrait demander "l'intervention" de l'Angola.


 

Congo-Kinshasa: l'ONU doit profiter du cessez-le-feu pour faire avancer le processus de paix

Nations Unies, AP, Vendredi 31 octobre 2008 - L'ONU et la communauté internationale doivent tirer parti du cessez-le-feu dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC) pour avancer sur le processus de paix le plus rapidement possible, parce qu'aucune solution militaire au conflit n'est possible, a déclaré jeudi Kevin Kennedy, responsable de la communication de la MONUC et spécialiste de la région des Grands Lacs

"Il y a beaucoup d'activité diplomatique actuellement", a précisé Kevin Kennedy, qui se rendra ce week-end à Kinshasa.

Alan Doss, chef de la Mission des Nations unies en RDC (MONUC), a parlé avec le gouvernement congolais, a ajouté Kevin Kennedy et tous conviennent qu'il s'agit d'un "problème politique qui doit être traité politiquement".

Les Nations unies ont organisé le déplacement du ministre rwandais des Affaires étrangères à Kinshasa jeudi, pour qu'il puisse discuter avec le gouvernement congolais.

Malgré des divisions notables sur la question, les nations européennes ont également évoqué la possibilité d'envoyer des troupes en RDC tandis que l'Union africaine s'est également impliquée dans la résolution du conflit.

Les efforts diplomatiques se sont intensifiés, la secrétaire d'Etat américaine adjointe aux Affaires africaines, Jendayi Frazer, s'est entretenue jeudi à Kinshasa avec le président Joseph Kabila et d'autres hauts responsables congolais, pour tenter de mettre fin aux affrontements dans l'est de la RDC.

Sur le terrain, le calme était revenu à Goma, la capitale du Nord-Kivu, pendant une bonne partie de la journée de jeudi, après le cessez-le-feu décrété par le chef des rebelles tutsis, Laurent Nkunda.

Jeudi, Laurent Nkunda a déclaré vouloir des négociations directes avec le gouvernement de Kinshasa, qu'il a de nouveau accusé d'association avec des miliciens hutus rwandais réfugiés dans l'est du pays après le génocide de 1994. Toutefois, des coups de feu ont éclaté au coucher du soleil près du lac Kivu. AP

 

une carte de la RDC


 

RDC : "trop tôt" pour envoyer des troupes de l'UE

Source : NOUVELOBS.COM | 31.10.2008 | 09:50

Si Londres n'écarte pas la possibilité d'envoyer une mission militaire européenne en République démocratique du Congo, elle estime qu'il est encore "trop tôt" pour envisager cette éventualité, a déclaré le secrétaire d'Etat britannique aux Affaires étrangères.

 

Londres n'écarte pas la possibilité d'envoyer une mission militaire européenne en République démocratique du Congo (RDC), mais estime qu'il est encore "trop tôt" pour envisager cette éventualité, a déclaré jeudi 30 octobre le secrétaire d'Etat britannique aux Affaires étrangères.

"Nous devons garder à l'esprit la perspective que la paix pourrait ne pas être restaurée et nous ne pouvons donc pas exclure un déploiement supplémentaire, que ce soit un renforcement de la Monuc (Mission des Nations unies en RDC) ou une force européenne supplémentaire", a déclaré Mark Malloch-Brown devant la chambre des Lords.

 

"Demande de nouvelles troupes"

 

"Mais, je pense qu'il est trop tôt pour dire si c'est nécessaire, et il n'est pas sûr non plus que (ces troupes supplémentaires) arriveraient à temps", a-t-il ajouté, précisant s'être entretenu avec le chef de la Monuc, Alan Doss, qui lui a "réitéré sa demande de nouvelles troupes".

Face aux risques de catastrophe humanitaire, l'Union européenne a annoncé jeudi que son Comité politique et de sécurité allait se réunir vendredi matin à Bruxelles pour étudier l'envoi d'une mission militaire.

Le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, a évoqué "une assistance aux populations civiles", sous la forme d'un contingent de 400 à 1.500 militaires, qui apporteraient à la Monuc un soutien "technique et humanitaire".

Mark Malloch-Brown a souligné avoir répondu au chef de la Monuc qu'avant d'étudier l'envoi de nouvelles troupes, il fallait voir comment la situation politique allait évoluer et si le cessez-le-feu décrété par la rébellion du chef rebelle tutsi congolais Laurent Nkunda allait tenir.

 

"Situation humanitaire déjà épouvantable"

 

"La solution au cœur du problème est la mise en œuvre de l'accord politique déjà existant", a-t-il ajouté, dans une allusion à l'accord de paix signé à Goma en janvier 2008 par toutes les parties.

Le ministre britannique des Affaires étrangères David Miliband a, de son côté, réitéré son appel à un règlement politique d'urgence dans la région.

"Le Royaume-Uni continue d'être très inquiet de l'impact que les récents combats ont eu sur la situation humanitaire déjà épouvantable dans la région", a-t-il dit dans un communiqué diffusé jeudi par son bureau.

"Il y a un besoin urgent de rétablir la stabilité à long terme", a ajouté le ministre.

Des affrontements entre armée et rebelles dans la région de Goma, ville située dans l'est de la RDC, ont poussé plusieurs milliers de personnes sur les routes, provoquant l'inquiétude de la communauté internationale sur la situation humanitaire.

Actualité internationale et africaine de sangonet