FAO : communications et points de vue exprimés à l'ouverture du Sommet de Rome, 03 juin 2008 (dépêches)

 


 

Ban Ki-moon: la production alimentaire mondiale doit augmenter de 50% d'ici 2030

Par Frances d'Emilio et Ariel David

ROME; AP, 03 juin 2008 - La production alimentaire mondiale doit augmenter de 50% d'ici 2030 pour faire face à la crise actuelle, a estimé mardi le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon, en ouverture du sommet organisé jusqu'à jeudi à Rome sous l'égide de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO).

"Le monde doit produire plus de nourriture (...), 50% de plus d'ici 2030, afin de répondre à la demande croissante", a fait valoir M. Ban. Les Etats, préconise-t-il, doivent alléger les restrictions sur les exportations et les tarifs douaniers frappant les importations.

Certains pays ont "pris des mesures limitant les exportations et imposant des contrôles sur les prix. Ils n'ont fait que fausser les marchés et pousser les prix vers le haut", a déploré le secrétaire général des Nations unies.

Il est nécessaire "d'améliorer l'accès des personnes vulnérables à la nourriture et prendre des mesures immédiates en ce sens" dont la fourniture de semences et d'engrais aux petits producteurs et la levée des restrictions sur la circulation des biens agricoles.

Dans un message, le pape Benoît XVI a de son côté souligné combien "la faim et la malnutrition sont inacceptables dans un monde qui, en réalité, dispose de niveaux de production suffisants, des ressources et du savoir-faire pour mettre un terme à ces tragédies et leurs conséquences".

Les chefs d'Etat et de gouvernement réunis à Rome pour chercher des réponses à la flambée des prix alimentaires doivent favoriser le développement des agricultures locales, notamment en Afrique, s'ils veulent éradiquer la faim chronique dans le monde, estiment les experts.

Le développement agricole dans les pays pauvres a été "horriblement négligé", a déclaré Duncan Green, directeur de l'organisation non gouvernementale (ONG) britannique Oxfam, avant l'ouverture du sommet.

L'aide d'urgence d'un milliard de dollars (625 millions d'euros) collectée récemment par l'ONU pour faire face à la crise alimentaire pourrait indiquer que la communauté internationale est plus disposée à prendre des mesures ponctuelles de court terme que d'investir pour aider les pays pauvres à se nourrir dans la durée.

"Nous progressons sur les situations d'urgence, mais les choses se détériorent dans la lutte contre la faim chronique", souligne M. Green. "Même en 2006, qui a été une bonne année pour les récoltes, 850 millions de personnes ont souffert de la faim", précise de son côté Raj Patel, un économiste auditionné en mai par le Congrès américain sur la crise alimentaire. "Cela s'inscrit dans une crise chronique qui est récemment devenue aiguë", en raison de la hausse des prix des denrées, ajoute-t-il.

La spéculation sur les prix des produits alimentaires, l'utilisation croissante de cultures pour la production de biocarburants, l'augmentation des prix du pétrole ont également contribué à aggraver la crise, jugent des spécialistes. Les chiffres d'organisations internationales comme le Fonds monétaire international (FMI) montrent que la demande accrue en biocarburants contribue à hauteur de 15 à 30% dans la flambée actuelle des prix, selon Frédéric Mousseau d'Oxfam.

"Les réserves alimentaires sont à leur plus bas niveau depuis 25 ans, et le marché est dès lors vulnérable à tout changement de politiques" comme les aides accordées par les Etats-Unis ou l'Union européenne à la production de biocarburants, a ajouté M. Mousseau.

Le chef de la délégation américaine, le secrétaire à l'Agriculture Ed Schafer, a pour sa part déclaré lundi que les biocarburants ne représentent que 2 à 3% dans l'augmentation prévue cette année, 43%, des prix alimentaires. AP

 


Les barrières commerciales en accusation au sommet de la FAO

Reuters, mardi 3 juin 2008, mis à jour à 14:04

 A l'occasion du sommet de la FAO qui s'est ouvert ce mardi, les Nations unies ont recommandé aux dirigeants internationaux réunis à Rome de lever les barrières commerciales et les embargos sur les exportations afin de contribuer à enrayer la famine qui menace de se propager dans le monde.

"Rien n'est plus dégradant que la faim, surtout quand elle est le fait de l'homme", a déclaré le secrétaire général de l'Onu, Ban Ki-moon, à des chefs d'Etat et de gouvernement qui risquent notamment de s'opposer sur le lien entre la production de biocarburants et l'envolée des prix alimentaires.

Jacques Diouf, directeur général de l'Organisation de l'Onu pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), a noté quant à lui que les pays riches consacraient des milliards de dollars aux subventions agricoles, à une consommation alimentaire marquée par l'excès et le gaspillage, et aux armements.

"Les excès de consommation des personnes obèses coûtent 20 milliards de dollars par an, à quoi il faut ajouter des coûts indirects de 100 milliards de dollars résultant de maladies qui s'y rattachent et de décès prématurés", a-t-il dit.

Selon la Banque mondiale et des organisations humanitaires, la flambée des prix alimentaires peut faire basculer 100 millions de personnes dans la famine. Environ 850 millions souffrent déjà de la faim.

Ban a jugé nécessaire de débloquer entre 15 et 20 milliards de dollars par an pour surmonter la crise alimentaire, en ajoutant que les réserves alimentaires devraient augmenter de 50% d'ici à 2030 pour répondre à une demande croissante.

"Certains pays ont réagi en limitant les exportations ou en imposant des contrôles en cours d'élaboration", a-t-il dit.

Ces initiatives "faussent le fonctionnement des marchés et poussent les prix encore plus à la hausse", a poursuivi Ban. "J'engage les pays à résister à de telles mesures et à débloquer sans délai les exportations répondant à des objectifs humanitaires."

Selon des ONG humanitaires, le Japon et la Chine contribuent à la forte hausse des prix du riz - qui a provoqué des émeutes jusqu'en Haïti - en limitant leurs stocks. Le Premier ministre japonais Yasuo Fukuda a promis à la conférence de débloquer au moins 300.000 tonnes de riz d'importation stocké afin de combattre la crise.

DÉBAT SUR LES BIOCARBURANTS

La conférence de la FAO donne le coup d'envoi d'une série de consultations sur la pauvreté, la faim dans le monde et le développement prévues dans les prochains mois, notamment un sommet du G8 au Japon en juillet et des pourparlers de l'OMC sur les moyens de réduire les distorsions commerciales.

Un projet d'accord au sein de l'Organisation mondiale du commerce prévoit notamment de réduire barrières commerciales et subventions agricoles.

Le coût des principales denrées a doublé au cours des deux dernières années et les prix du riz, du maïs ou du blé affichent des niveaux record. Certains prix atteignent, en termes réels, leur plus haut niveau depuis trente ans et des "émeutes de la faim" ont éclaté dans plusieurs pays en développement ou le budget consacré à l'alimentation dépasse la moitié des revenus.

La hausse des prix pétroliers a renforcé l'intérêt pour les biocarburants, mais beaucoup s'en émeuvent. Justifiée par certains pays (Etats-Unis, Brésil) pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre et leur dépendance énergétique, l'expansion des biocarburants conduit aussi à une réduction des surfaces agricoles favorisant la hausse des prix.

Les Etats-Unis comptent réorienter d'ici 2022 un quart de leur récolte de maïs vers la production d'éthanol et l'Union européenne prévoit que 10% du carburant automobile seront produits à partir d'énergies biologiques d'ici 2020.

Dans une lettre adressée aux dirigeants internationaux présents au sommet de Rome, les producteurs de biocarburants plaident en faveur d'une diversification des sources d'énergie par le biais des biocarburants.

Le secrétaire américain à l'Agriculture, Ed Shafer, a déclaré avant le sommet que les biocarburants ne représentaient qu'environ 3% de la hausse totale des prix alimentaires. Mais pour l'ONG Oxfam, l'impact réel s'élève à 30%.

Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva a présenté "l'intolérable protectionnisme" des pays riches comme la cause principale de la montée des prix alimentaires.

"Les subventions créent la dépendance, détériorent l'ensemble des systèmes de production et entraînent la faim et la pauvreté là ou pourrait régner la prospérité. Il n'est que trop temps d'en finir avec elles", a dit Lula.

Quarante-quatre chefs d'Etat et de gouvernement ont fait le déplacement à Rome. Mais la présence de deux visiteurs, le président iranien Mahmoud Ahmadinejad et son homologue du Zimbabwe Robert Mugabe, suscite l'embarras.

Mugabe, critiqué pour la dérive autocratique de sa présidence, est interdit de séjour par l'UE mais il a obtenu une dérogation pour le sommet de Rome. Ahmadinejad, lui, vient de prédire la disparition prochaine d'Israël.

Version française Jean-Stéphane Brosse, Philippe Bas-Rabérin

http://www.lexpress.fr/actualite/depeches/infojour/reuters.asp?id=72292

 


 

Sarkozy demande de "mettre le paquet" sur les cultures vivrières

Reuters,  mardi 3 juin 2008, mis à jour à 14:39

Le président Nicolas Sarkozy a invité à Rome à mettre le paquet sur l'agriculture vivrière dans les pays en développement pour contrer l'actuelle crise alimentaire mondiale.

Invité du sommet de la FAO (Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture, qui rassemble 193 pays), le président français a qualifié d'"erreur stratégique historique" l'attitude consistant à empêcher les pays pauvres de cultiver des produits de première consommation.

"Il faut mettre le paquet sur l'agriculture des pays en voie de développement", a déclaré le chef de l'Etat devant une cinquantaine de chefs d'Etat réunis au siège romain de l'organisation onusienne.

"Il faut aider les pays les plus pauvres à se doter d'agricultures modernes qui permettront la suffisance alimentaire. C'est le seul choix stratégique possible", a-t-il ajouté.

Les grandes institutions comme la Banque mondiale, le Fonds monétaire international ou la Banque africaine de développement ont encouragé ces dernières années les pays pauvres à abandonner les cultures vivrières au profit de denrées d'exportation comme le coton ou de l'achat de produits alimentaires au plus bas coût sur le marché mondial.

"Cette stratégie a échoué. Elle était généreuse mais elle a échoué", a dit Nicolas Sarkozy, pour qui une stratégie d'avenir "doit reposer sur le développement des agricultures locales.

"Il n'y aura pas de paix, il n'y aura pas de stabilité si nous ne mettons pas de l'argent au service du développement des agricultures des pays qui en ont le plus besoin", a-t-il insisté.

BIOCARBURANTS NOUVELLE GÉNÉRATION

Sur la question des biocarburants, accusés d'avoir prospéré au détriment des cultures vivrières , Nicolas Sarkozy a invité à donner "la priorité absolue" aux biocarburants de nouvelle génération "qui permettront sur la même surface agricole de produire cinq fois plus".

"Ainsi, on ne pénalisera pas les pays qui ont fait le choix des biocarburants et qui ne veulent pas être arrêtés (comme le Brésil, ndlr), et ainsi on réservera le maximum d'hectares à la production agricole", a-t-il expliqué.

Nicolas Sarkozy a par ailleurs proposé la création d'un "Giec" de la sécurité alimentaire calqué sur le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, réseau scientifique mondial créé pour mieux lutter contre le réchauffement de la Terre.

"Ça n'a finalement pas si mal marché", a-t-il fait remarquer. "Depuis que le Giec a été constitué, personne ne conteste les analyses".

Cette entité rassemblerait grandes institutions internationales, Etats, entreprises, ONG, scientifiques, etc et aurait notamment pour mission de poser un diagnostic en matière de sécurité alimentaire, d'analyser l'évolution possible par produit et par région et d'alerter sur les risques de crise.

Nicolas Sarkozy a, enfin, invité les institutions internationales à se réengager de manière durable dans l'agriculture, le développement rural et la sécurité alimentaire.

Il a aussi fait savoir que sur les 2,5 milliards sur cinq ans pour le développement de l'Afrique, dont il avait annoncé le déblocage fin février au Cap, un milliard serait consacré à cette question.

Le président a aussi estimé que les fonds souverains pourraient devenir des "acteurs" du financement des investissements dans l'agriculture des pays en développement.

Il a invoqué à leur égard un "impératif moral", avant de rappeler que ce genre d'investissement était très rentable.

Le président français devait quitter ensuite l'enceinte de la FAO pour un entretien avec le président du Conseil italien, Silvio Berlusconi. Les deux hommes ne se sont pas vus depuis le retour aux affaires du "Cavaliere" en avril.

http://www.lexpress.fr/actualite/depeches/infojour/reuters.asp?id=72300

 


 

Crise alimentaire: biocarburants et subventions sur la sellette au sommet de la FAO

ROME,  AFP, 03/06/2008 11h31 - La controverse sur les biocarburants et les subventions agricoles a dominé mardi l'ouverture du sommet de la FAO à Rome, alors que le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, rappelait que la production alimentaire devait augmenter de 50% pour faire face aux besoins d'ici 2030.

 


Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon lors de son discours au sommet de la FAO à Rome le 3 juin 2008
©AFP - Chris Helgren

 

M. Ban, qui dévoilait les principes du "cadre global d'action" contre la flambée des prix, élaboré par la "task force" (cellule de crise) rassemblant les chefs des agences onusiennes spécialisées, du FMI et de la Banque mondiale, a appelé à "un plus grand degré de consensus international sur les biocarburants.

Le président brésilien, Luiz Ignacio Lula da Silva, dont le pays est le deuxième pays producteur d'éthanol après les Etats-Unis, a rétorqué que "les biocarburants", qui sont soupçonnés d'aggraver la flambée des prix des denrées alimentaires, "n'étaient pas des bandits".

Le président brésilien, Luiz Ignacio Lula da Silva, dont le pays est le deuxième pays producteur d'éthanol après les Etats-Unis, a rétorqué que "les biocarburants", qui sont soupçonnés d'aggraver la flambée des prix des denrées alimentaires, "n'étaient pas des bandits".

 


Le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva salue la présidente de l'Argentine Cristina Kirchner au sommet de la FAO à Rome le 3 juin 2008
©AFP - Chris Helgren

 

Les biocarburants peuvent "au contraire devenir un outil important pour sortir les pays de l'insécurité alimentaire", a souligné Lula devant une cinquantaine de chefs d'Etat et de chefs de gouvernement présents à Rome pour cette conférence internationale de trois jours sur la crise alimentaire mondiale.

De son côté, le président égyptien, Hosni Moubarak, a déclaré qu'il fallait "freiner la production de biocarburants", en lançant un appel pour "un dialogue urgent entre importateurs et exportateurs de produits alimentaires et énergétiques".

Dans son discours d'ouverture, M. Ban a par ailleurs appelé les "nations à ne pas être tentées par des politiques alimentaires qui appauvrissent les voisins".

Le secrétaire général des Nations unies a souhaité en particulier que soient abandonnées "les politiques économiques qui créent des distorsions de marché", plaidant pour "un accord dans le cadre des négociations de l'OMC".

"Certains pays ont limité leurs exportations ou ont imposé des mesures de contrôle des prix. Ces politiques qui nuisent aux pays voisins ne peuvent pas fonctionner. Elles ne font que créer des distorsions de marché et contribuent à faire encore grimper les prix", a-t-il critiqué.

"J'appelle les pays à ne pas prendre de telles mesures et à mettre immédiatement fin aux restrictions à l'exportation pour des raisons humanitaires", a-t-il insisté.

M. Ban a aussi plaidé pour "des engagements fermes pour aller de l'avant" et a assuré qu'il "faudra augmenter les appuis financiers", sous forme d'engagements fermes et non pas via des prêts.

 

 


36 pays ont besoin d'une aide alimentaire urgente, selon la FAO
©AFP/infographie

 

"Les besoins urgents des populations ne doivent pas faire oublier la nécessité d'investir à long terme dans l'agriculture", a-t-il souligné.

"Nous construirons (une stratégie) sur les résultats de ce sommet, au sommet du G8 de juillet et à l'Assemblée générale de l'ONU en septembre", a-t-il expliqué.

Le pape Benoît XVI a pour sa part affirmé que "la faim et la malnutrition" étaient inacceptables dans le monde d'aujourd'hui dans un message adressé au sommet.

Les chefs de l'Etat français Nicolas Sarkozy, argentin Cristina Kirchner et le président iranien Mahmoud Ahmadinejad, ainsi que le premier ministre espagnol Jose Luis Rodriguez Zapatero devaient ensuite se succéder à la tribune.

 


Nicolas Sarkozy serre la main du Premier ministre japonais Yasuo Fukuda au sommet de la FAO à Rome le 3 juin 2008
©AFP - Eric Feferberg

 

Le sommet s'est ouvert sur fond de polémique avec la présence controversée des présidents iranien Mahmoud Ahmadinejad et du Zimbabwe Robert Mugabe.

Plusieurs associations et partis de gauche italiens ont appelé à une manifestation mardi devant la mairie de Rome contre leur présence.

La venue de Robert Mugabe a été condamnée par plusieurs pays, en particulier la Grande-Bretagne, l'Australie et l'Allemagne tandis que celle du président iranien a été dénoncée par Israël

 


Le président du Zimbabwe Robert Mugabe assiste au sommet de la FAO à Rome le 3 juin 2008
©AFP - Chris Helgren

Sommet de Rome : la FAO, la crise alimentaire et la fin dans le monde

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