LES INCIDENCES DES DERIVES OLIGARCHIQUES ET DYNASTIQUES DANS LES DEMOCRATIES AFRICAINES

Partant de l’étude conjointe du PNUD et de l’Unicef New-York 26 juin 2002 , selon laquelle 35 des 45 pays africains au sud du Sahara,  ne sont pas en mesure d’atteindre les objectifs de développement pour le millénaire, fixés pour 2015 et que, si la situation actuelle se poursuit, l’Afrique sera le seul continent qui comptera plus de pauvres en 2015 qu’en 1990, nous avons décidé de sonder des travaux, qui élucideraient l’existence d’une éventuelle spécificité du politique en Afrique et de soutenir, avec hardiesse une thèse contraire à partir de l’interrogation suivante : les questions de significations sociétales, comprenant les constructions identitaires, les  processus de socialisation ( esprit de norme, des représentation) et nécessités existentielles de l’Afrique d’il y a 40 ans servent-elles encore de repère à l’Afrique d’aujourd’hui ?

L’actualité ; portant remise de la dette de certains PPTE (pays pauvres très endettés) nous a servi de fil rouge jusqu’à l’un de ces 35 pays, la Centrafrique . L’interprétation qui est faite, et par les médias et par les autorités en charge de ce pays confirme, à l’évidence, ce que faisait remarquer naguère Aimé Césaire dans « fragilité des modèles importés ». Ce père de la négritude notait, qu’il y a deux manières de se perdre, par ségrégation murée par soi-même ou par dilution dans l’universelle.

Faire un zoom sur le cas centrafricain présente,  trois intérêts pour la compréhension du phénomène qui nous préoccupe

1° C’est un pays où il est difficile d’appréhender les contours d’un modèle socio-économique depuis les indépendances nominales. Les structures et les infrastructures héritées de la colonisation ont été détruites par les coups d’Etat et autres mutineries. Pour un pays rural à 75 %, on ne parle guère de l’importance du capital humain ; c’est-à-dire le capital à mettre en œuvre pour exploiter les richesses naturelles, construire les équipements publics, réparer les machines, bref nous faisons allusion aux savoir-faire, aux connaissances et compétences humaines intermédiaires indispensables à la production de la valeur ajoutée dans une économie mêmes avec des méthodes rustiques et artisanales. Le discours sur les métiers, sur la mise en place des structures de concertation en vue d’apporter des améliorations est inexistant dans le langage des hommes politiques et des organisations de la société civile. A défaut de cap fixé et de capitaine trouvé, le pays est un réservoir génétique de l’informel dont la principale caractéristique est d’être ni un emploi (pas de rémunération) ni un débouché professionnel ( pas de qualification particulière) mais plutôt une nouvelle forme d’esclavage pour les enfants dans les villes

2° L’homme fort actuel, bien qu’il ait été élu au suffrage universel deux ans après un coup d’Etat, patauge dans l’obscurantisme et se complait dans le massacre à grande échelle de sa population, sous le regard complaisant des partis dits d’opposition et dans l’indifférence relative de la communauté internationale. L’audition du rapport de ce pays, tout récemment, par la Commission des Droits de l’Homme et les justifications alléguées, pour ne pas mettre en œuvre les recommandations des sages du Palais Wilson, est pitoyable. Malgré l’existence des déplacés,  et l’échec potentiel de mise en place du mécanisme de démilitarisation, démobilisation et réinsertion des enfants soldats, l’Etat nargue, sans pudeur et sans vergogne la communauté internationale, et argue qu’il lui manque des moyens.

3° L’Etat ne fait pas la nation, c’est-à-dire naître et s’affermir par l’effort de construction d’un socle de valeurs communes. Depuis les cinq dernières années, les liens familiaux sont fragilisés et fragmentés au Nord (Est et Ouest) nord-est et nord–ouest ? , induisant ainsi des zones de non droit et détricotant le lien social au niveau national, étant donné la prolifération des groupes et bandes armés. Néanmoins, la Centrafrique est entrée en campagne électorale. Les forces vives de la nation se bousculent derrière les leaders politiques sans leadership, pour avoir l’opportunité de prendre part au partage du gâteau.

A la lumière de ces trois éléments, on est en droit de soulever un certain nombre de questions.

Comment les 35 pays d’Afrique dont la Centrafrique endureront-t-ils les adversités dues à sa défavorable insertion dans le système monde et à ses dynamiques ? Se préoccupent-ils de se doter des capacités pour réinventer des sursauts complexes de créativité et d’adaptation, sources d’espoir ? Se donnent-ils les moyens et la volonté pour maîtriser les vecteurs d’influence de la modernité politique ?  L’imagerie et l’allégorie du Baobab suffisent-elles encore et toujours, pour faire comprendre aux partenaires internationaux,; à la fois l’environnement africain, son enracinement et son enchevêtrement, comme levier de développement de territoire de proximité?

I) Sociétés africaines, anomie et vitalité ; quelle Afrique pour atteindre les objectifs de développement du millénaire ?

L’examen du cas centrafricain reste au cœur de notre quelle ? observation étude ?. L’économie populaire ou perpétuation des systèmes informels et faibles syncrétismes de modernité est la caractéristique des sociétés centrafricaines ; constituées des 6 régions issues du mouvement de décentralisation. L’élan unitaire n’est que de façade, pour des raisons que nous évoquions précédemment.

En revanche, l’impunité et l’autocratie à caractère clientéliste, et patrimonial sont la marque de fabrique de l’administration. Le modèle de l’économie d’accumulation, de prédation et de redistribution ignore totalement d’impliquer les communautés humaines et les collectivités territoriales situées en milieu rural, alors que, çà et là, dans les administrations civiles et militaires se construisent des féodalités. La résignation et/ou  les résistances sociales de ces pauvres jeunes désœuvrés se traduisent par l’enrôlement volontaire dans les groupes et bandes armés. Cet enrôlement relève davantage de la recherche du gagne pain que d’une véritable révolte politique, voire d’un projet politique de société d’alternative. Les partis politiques et les organisations de la société civiles Centrafrique peinent à ajuster l’Afrique à la mondialisation. Ils ne parviennent pas à faire passer le message selon lequel la mondialisation induira des changements et qu’il vaut mieux pour l’Afrique, y prendre part que de subir. Ils instrumentalisent excessivement et/ou n’ont qu’une approche idyllique et messianique

du NEPAD, de l’Union Africaine, de la CEMAC et nous en passons. Les multiplications de référence et leur effacement, les nombreuses crises de légitimation ont fortement impacté les représentations qu’ont les jeunes de la capacité de leurs dirigeants à inventer des nouveaux repères. Ce qui est corrélé par la remise en cause du lien social et l’inversement des signes. Les systèmes signifiants stables sont désormais insuffisants et les systèmes instables deviennent désormais la référence..Le nouveau contrat social est désormais tramé par l’hétérogénéité. Il y a clivage entre l’Afrique de l’homogénéité et l’Afrique montante de l’hétérogénéité par le fait que la logique de la mondialisation et la rationalité instrumentale ; construite à partir de toutes les formes d’emprise des obscurantismes, de totalitarisme et autres manipulation, ont annexé toute la sphère sociale. [Séminaire Afrique Session Automne 2005 ; Département de Science politique Université du Québec Montréal]  

Quelle est la réponse des sciences sociales à ces interrogations ?  Dit autrement, la recherche en sciences de gestion, dont le management, a-t-elle des instruments pour mettre en lumière les facteurs qui paralysent, voire sclérosent les possibilités pour les 35 pays d’atteindre les objectifs du millénaire pour le développement ? Le diagnostic des institutions Onusiennes au sujet de la difficulté pour l’Afrique d’atteindre le premier pallier de réalisation des objectifs du millénaire pour le développement n’est pas un invariant ; c’est-à-dire qui interdirait l’exploration d’autres logiques explicatives de l’emprise de la pauvreté.

Pour ce qui est de la Centrafrique, notre questionnement nous a amenés à retenir un faisceau de causes ; la construction de la société sur le déni de l’implication de la base et la pratique de l’apologie de la politique sécuritaire. Nous regroupé ces faisceaux de causes en deux ordres : 

1° L’instrumentalisation du désordre en sociologie des organisations. Comme pointé du doigt par une étude de deux auteurs [ Patrick- Chabal, Jean-Pascal Daloz ; rapporté par Claude Wauthier  Sept 1999 Journal Le Monde ] le dirigeant politique de n’importe lequel des 35 pays n’acquiert pas sa légitimité par une bonne gouvernance, mais par sa capacité à faire bénéficier des retombées de son pouvoir la communauté ethnique le plus souvent qui l’a fait élire et de laquelle il est issu. Car, à l’opposé du modèle de l’Etat non patrimonial de Max Weber, où la redistribution est égalitaire et horizontale, cette forme de redistribution s’effectue verticalement au bénéfice d’un électorat particulier.

S’agissant des Présidents-Militaires, c’est la communauté des militaires, co-auteurs du coup d’Etat et l’oligarchie civile formée de hauts cadres frustrés, qui bénéficient de ces retombées. Ce n’est qu’après avoir incrusté son régime que le leader fait entrer sa tribu ou ethnie dans la redistribution. Dans ce système l’opposition n’a pas de place, car les vainqueurs raflent toute la mise. On ne parlera même pas d’opposition dans le cas centrafricain. Il s’agit plutôt de mécontents, de frustrés ou de menacés dans leur existence s’ils tentent de se montrer actifs. C’est une des raisons de la faillite du modèle de démocratie parlementaire à l’occidentale dans la plupart des 35 pays africains. Sous des dehors de démocratie formelle des élites, une oligarchie se construit.

Les partis politiques, les gradés de l’armée et des différentes composantes de la force publique, les hauts magistrats, se transforment en organismes oligarchiques et, pour conserver leurs prestiges et autres immunités, impulsent insidieusement des orientations dynastiques .Le goût prononcé pour l’aristocratie aboutit à une dénégation de toute rationalité politique et donc, on traite avec snobisme l’intérêt vital des communautés humaines et des collectivités territoriales.  L’Etat étant le seul pourvoyeur de travail, donc de source de revenu, il suffit d’être performant en allégeance et excellent en courtisanerie, pour conserver très longtemps ses privilèges.

 

2° La duperie des idéaux démocratiques et la psychologie sociale des pauvres affamés.

Nous nous souvenons la ferveur avec laquelle les foules ont accueilli le coup d’Etat du 15 mars 2003 à Bangui. Un peuple dans la défaite mais fêtant l’arrivée de nouveaux héros. Les concepts de « Conseil national de Transition » fusent pour signaler que l’on passait d’un modèle à un autre. Les icônes des luttes démocratiques se sont laissés piéger par un régime en quête de virginité politique. Les leaders politiques, qui ont appelé à soutenir le nouvel homme fort, ont déchanté quelques jours après.

Le concept de transition n’était qu’un   miroir aux alouettes, un numéro d’illusionnisme pour rester dans le champ lexical du cirque. Patiemment et sûrement, le Général-Président a installé son cirque et s’est débarrassé de mauvais trapézistes et autres jongleurs de la duperie des idéaux démocratiques. Le besoin de vénération de leader chez les masses a induit la montée fulgurante et les ascensions sociales de tout genre.

Entre temps, le mécanisme accélère le déclin des anciens aristocrates et construit la montée de la nouvelle oligarchie. 

Deux ans plus tard, le Général-Président autoproclamé remporte sans coup férir les élections et l’effet oligarchie se poursuit dans son aspect redistribution verticale.

L’économie africaine, contrairement aux économies socialistes aux lendemains de l’éclatement du pacte de Pacte de Varsovie ne sait pas ce que c’est que la transition. Les ex pays communistes ont vécu une transition d’une économie de type socialiste à une économie de marché. Les économies africaines sont restées dominées par l’informel et le capitalisme d’Etat. Des auteurs complaisants aident les loups à hurler mais se passent royalement des questions de régulations du conflit séculaire entre le Capital et le Travail.

Or, le désordre que représente la dictature de l’informel et que les dirigeants africains, avec la complicité, voire l’indifférence de certaines organisations de solidarité internationale lesquelles ? , instrumentalisent à volonté, cache une limite des capacités de gouvernance des oligarchies dynastiques. L’économie dite informelle est assignée par la nomenklatura à demeurer sans nomenclature et donc échappe aux évaluations statistiques. Elle est loin d’évoluer dans le sens de ce qu’Alfred Sauvy appelle « la théorie du déversement ».

Ce n’est un secret pour personne, qu’il n’ait est pas facile de mobiliser les capitaux dans n’importe lequel des 35 pays.

Ce n’est pas qu’il manque des richissimes en Afrique. Ils le sont devenus, non pour avoir été entrepreneurs mais pour avoir fait partie, tout au moins la grande majorité, de la baronnie d’Etat ou de l’oligarchie civile et militaire. Statut qui les met à l’abri de toutes obligations fiscales et douanières et leur confère toutes les immunités imaginables. Ainsi, ils ne savent pas ou perçoivent mal les enjeux des investissements dans l’outil de production et de transformation ; bref, dans l’entrepreneuriat de longue durée. La  sécurisation des transactions qui pourrait être une solution à la lutte contre la corruption n’intéresse personne ; pire encore la question de qualification professionnelle ne fait pas débat puisque la contre partie du travail dans le secteur informel reste et demeure la fourniture du repas quotidien et de temps à autre de l’habillement..

A l’observation, les populations des 35 pays ont une représentation messianique du développement, à telle enseigne qu’elles l’attendent fiévreusement, alors que les conditionnalités de réalisation des 8 objectifs de développement du millénaire sont loin de poindre à l’horizon. La pauvreté devient alors une maladie orpheline pour les communautés humaines et les collectivités territoriales en milieu rural. On aurait tout essayé, vaccins et/autres mesures de prophylaxie mais vainement. Il se trouve que la recherche n’a pas dit son dernier mot. Pour lutter contre la pauvreté et favoriser l’accès du plus grand nombre à l’autonomie et à leur émancipation, d’autres régions du monde, en Amérique latine et en Asie du Sud-est ont, par des mesures incitatives, fait émerger une classe d’entrepreneurs qui a fait propager, telle une tâche d’huile ou une traînée de poudre,  l’esprit d’entreprendre dans le tissu social. Ce ne sont pas les orientations oligarchiques et dynastiques, de type doctrine de la jungle Birmane , aidées de l’humanitaire d’urgence, qui outilleraient les communautés humaines et les collectivités territoriales en vue de la croisade contre la pauvreté et participer ainsi à la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement.

 

II) La problématique de l’insertion dans la mondialisation polarisante échappe aux 35 pays d’Afrique.

A l’aune de certains principes séculaires qui servent de trame à l’autorité de chef dans l’histoire de l’humanité, l’Afrique au sud du Sahara ne saurait prétendre être la seule région du monde à se prévaloir d’une grande tradition de domination individuelle ayant sa racine dans la volonté collective. Dit autrement, ce n’est point la sublimation du chef par les affamés que nous considérons comme source d’insurrection potentielle mais la montée du népotisme, l’insécurité des transactions et le mépris des droits humain. La conjonction de ces facteurs constitue le phénomène oligarchique le plus grave, qui maintient les communautés humaines et les collectivités territoriales en zones rurales, à la périphérie de l’humanité et, est de nature à compromettre irrémédiablement leur chance de réinsertion dans la mondialisation. Comment comprendre et expliquer la menaçante relégation des populations des 35 pays à la périphérie de la mondialisation ? Leur non participation à la mondialisation est-elle la cause ou l’effet ? Quel est le degré d’implication des populations vivant de l’économie populaire ou économie formelle dans la lutte contre la pauvreté ?

Quelles sont les fonctions politiques de la société civile et quel est l’impact du renouveau culturel et religieux dans la lutte contre la pauvreté, notamment en matière de renforcement des capacités humaines et   organisationnelles des communautés et des collectivités territoriales ?

 

1° Quel avenir les 35 pays d’Afrique réservent-ils à leur jeunesse à la lumière de la définition que l’on donne du développement durable ?

Le rapport Brundtland de 1987  définissant  le développement durable insiste bien sur la satisfaction des intérêts de la génération présente sans sacrifier ceux des générations futures.

Il nous paraît inimaginable de séparer ce rapport de l’esprit même des 8 Objectifs du Millénaires pour le Développement.

Représenté sous forme d’un triangle pour bien marquer l’articulation et les interdépendances entre l’économique, le social et l’environnemental mais dans une logique de paradigme, les pratiques en Afrique laissent entrevoir plutôt une vision antagoniste qu’une approche protagoniste des composantes du paradigme, par  exemple la peu ou prou implication du social et l’absence de fertilisation croisée entre secteur formel où le secteur parapublic est en quasi monopole et le secteur informel, sans nomenclature, en tant que modèle économique. Ce secteur cache-misère sert de repaire pour les oligarchies corrompues alors qu’il constitue potentiellement un levier de développement territorial au niveau local. Malheureusement, force nous est donnée de constater, que la construction antagoniste est la plus répandue et servie à la sauce, soit de l’absence de moyens soit de la théorie du complot et/ou des africains, parias de la mondialisation. L’exemple, qui crève les yeux est celui de la Centrafrique. Bof !! il y en a d’autres .L’exemple centrafricain est criant à cet égard.

Pour peu que l’on s’efforce de décrypter les politiques publiques mises en œuvre, on se rend très vite compte que ces mesures d’organisation économiques et sociales sont de nature à enraciner davantage les communautés humaines et les collectivités territoriales dans la pauvreté que de les en arracher. Rien de ce qui est fait  a vocation à durer. Le précaire est la trame des de toutes les politiques publiques Le postulat dominant est que, plus les populations sont tyrannisées par la misère et l’ignorance, mieux elles dépendront de la miséricorde de la baronnie et de l’oligarchie.

La vision d’alternance se substitue à la vision d’alternative, plus créatrice et créative.

Les théoriciens des africains,  parias de la mondialisation font involontairement le lit à la montée du mouvement des dynasties dans les démocraties balbutiantes. La progéniture des anciens dirigeants serait mieux outillée pour garder le temple des intérêts et des oligarchies montantes, avec les mœurs et pratiques politiques que l’on sait et les intérêts des acteurs extérieurs. La problématique à construire est celle du type de modèle économique permettant aux populations exclues de la mondialisation d’y participer à nouveau. Dit autrement, il ne s’agit plus pour les oligarchies et la baronnie militaro-politiques de continuer à servir des VRP des complexes militaro-industriels ou de fournisseurs de diamant, d’uranium, de pétrole et autres, à ceux qui les incrustent au pouvoir, pour les victoires par anéantissement de l’autre soit par asservissement soit par des pratiques humiliantes et dégradantes.

La mondialisation ne livre pas de guerre particulièrement aux africains. La guerre qu’elle mène est une guerre asymétrique, une guerre d’intelligence économique. Pardonnez nous cette métaphore plus ou moins triviale. Si les 35 pays veulent attraper le fauve qu’est la mondialisation, ils doivent parvenir à attacher la proie sur un arbre, leur baobab. C’est-à-dire, qu’ils doivent s’efforcer de participer à la mondialisation, en investissant dans les outils de production et de transformation, en créant les conditions propices à la sécurité des transactions.

C’est cette capacités d’appropriation des instruments, cette aptitude  à capter des externalités technologiques venant du secteur formel qui permettrait aux acteurs du secteur informel de croiser les savoirs locaux et les savoirs scientifiques,  susceptibles de générer de nouveaux modes et méthodes de production, de transformation, le tout se fixant comme objectif, à court, moyen et long termes, de faire de l’accès à l’autonomie et  à l’émancipation, la nouvelle régulation socio-économique.

 

Conclusion.

Les codes et les valeurs spécifiques que revendiquent les oligarchies et baronnies continueront-elles de tenir debout face aux exigences d’ouverture à la mondialisation et à la nécessité de lutter contre la pauvreté ? La thèse de l’Afrique ; victime de pillage apporte-t-elle des améliorations quant au sort des communautés humaines et des collectivités territoriales non aménagées ? Nous soutenons avec hardiesse que les communautés humaines et les collectivités rurales sont davantage soumises à rude épreuve par l’absence de preuve de volonté de l’oligarchie à les émanciper de l’emprise de la pauvreté. La posture de méthode de gouvernance vise à penser pour les pauvres et posant aristocratiquement le regard sur ces entités au lieu de penser avec eu, en intégrant leur regard et leur représentation.  

Sauf erreur ou prétention débordante de notre part, la mission de l’Etat dans le champ du développement est de créer les conditions et les mécanismes favorables à la combinaison des facteurs de production qui engendre la création de richesses. Les 35 pays africains vivent depuis cinquante ans dans une erreur monstrueuse selon laquelle la seule injection massive du capital financier suffirait à transfigurer leurs performances économiques et que leur dotation en capital financier apporterait automatiquement efficacité, croissance et prospérité accrue. Pour ce qui est du cas centrafricain, cette injection serait la baguette magique qui désenclaverait par miracle les six régions et ferait tomber du ciel des ports maritimes, ? des aéroports ? des routes et autoroutes, des pôles structurants de tout genre.

 A notre humble avis, la sortie de la pauvreté, et donc de ce sophisme de cinquante ans, ne requiert pas un haut niveau de formation du capital, ni une théorie sophistiquée de « l’Afrique ; parias de la mondialisation. Une telle sortie requiert l’impulsion et l’inspiration de changement d’attitude et de mœurs qui s’opposent , au nom de la singularité culturelle au progrès, une sorte de mésonéisme  

Il s’agit d’impulser une dynamique de disposition à produire pour le marché interne et externe plutôt que pour la subsistance et la refondation de politiques publiques appropriées La formation de capital, pour une part essentielle, n’est pas une condition préalable au progrès matériel mais un élément concomitant . C’est le seul fétiche, fait remarquer un auteur [Peter Bauer ; 1981]

Les mots d’ordre officiels du genre la jeunesse est l’avenir du pays et autres phraséologies creuses et insipides sont perçus par les populations laissées pour compte, comme étant désormais vides de sens. L’enjeu réside dans l’éducation et la formation au développement qui induit ouverture aux autres cultures et prise en compte des interdépendances entre pays et régions du monde en rejetant certains archaïsmes culturels qui handicapent l’émancipation et brident et figent l’authenticité culturelle. La citoyenneté reste à inventer.. Elle devrait structurer la recherche des voies de sorties par l’inventivité organisationnelle des communautés humaines et des collectivités territoriales, par l’inspiration et l’impulsion de questionnement constant venant des partis politiques et des organisations de la société civile. Or, ces acteurs s’installent dans les poncifs et les sentiers battus de la déploration, sont de connivence avec l’oligarchie et la baronnie plutôt d’interpeller, par le concept de citoyenneté, les snobes au respect des droits civiques et à la revendication d’être des artisans d’une société, ayant l’idéal de l’hétérogénéité.

 Le chantier de la localisation et du repérage des leviers de développement territoriaux est loin d’être à l’ordre du jour, dans un pays comme la Centrafrique.

Le premier pas de cette longue marche vers la réalisation des objectifs du millénaire pour le développement consiste à trouver la cléf dans l’expérimentation de l’aménagement de territoire, le croisement des savoir-faire locaux et des savoirs scientifique dans différentes couveuses, la valorisation des métiers et des savoir-faire dans les fertilisations croisées [ Entrepreneuriat, Travaux de Douba ;G. NDR Cahier AUF ]

L’Afrique produit plutôt qu’elle ne transforme. Paradoxalement cette capacité productive est artisanale et rustique à tel point que la mondialisation de l’absorbe pas [règne du secteur informel] alors que les communautés humaines et les collectivités territoriales [acteurs de l’informel] consomment avec avidité ; voire addiction, la moindre technologie moderne présente sur le marché ; téléphone portable haut de gamme, appareils photos numériques, les DVD et CD ; tous les produits made in China.

Enfin, nous réfutons la posture de victimisation ou de l’Afrique ; paria de la mondialisation, car, ce n’est ni d’un management d’injonction ou de prescription que viendra l’insertion du continent dans les échanges internationaux pour un modèle économique fondé sur l’échange juste mais d’un management d’incitation.

 

Gervais Douba (03 octobre 2009)

- Université de Rouen

- Membre de l’académie de l’Entrepreneuriat et du réseau de recherche en entrepreneuriat de l’AUF

- Président de Symbiose Ingénierie