Quelle voie de développement pour l’Afrique?

 

L’Afrique, indépendante depuis 50 ans, est le seul continent dont la voie de développement de la plupart des Etats est encore vacillante. Au lendemain des indépendances en 1960, le choix d’une voie de développement économique et social s’est imposé aux pays africains comme un impératif. Le retard qu’ils accusaient sur les pays dits développés et la volonté de le rattraper les fit opter pour la voie libérale ou la voie socialiste de développement.

 

En cette période de pleine guerre froide, seules deux voies de développement étaient possibles : le capitalisme ébranlé par ses contradictions internes et le socialisme fascinant par ses résultats économiques, ses prouesses scientifiques et techniques, dont le premier vol de l’homme dans l’espace en avril 1961, vol préparé et organisé par les savants soviétiques. En moins de 50 ans donc (1917-1960), le socialisme a réalisé ce que le capitalisme n’a pas su, ni pu faire après plus de 200 (deux cents) ans de révolution industrielle.

 

Ces choix ainsi opérés, des accords bilatéraux et multilatéraux furent établis. L’Afrique devint, suivant des régions un vaste chantier pour les deux camps, socialiste d’un côté et capitaliste de l’autre.

L’un comme l’autre permirent au continent de se doter à des conditions différentes, d’infrastructures publiques, parapubliques et privées nécessaires à son développement : routes, hôpitaux, écoles, usines ... ; formation de personnel dans divers domaines, sans oublier des conseils pour le développement.

 

Plus de 40 ans après, pour des raisons diverses, aucune des deux voies empruntées n’a débouché, surtout par la faute des Africains, sur les attentes, ni comblé l’espérance des peuples. Il y a quelques mois, lors d’une rencontre internationale, après l’intervention d’un ancien fonctionnaire de la Banque Mondiale, qui a fustigé les politiques de l’Institution financière en direction de l’Afrique, un Consultant malien a chuchoté à l’oreille de son voisin: «La situation de l’Afrique est dramatique. Les cadres africains ont été formés et formatés pour détruire l’Afrique ».

 

Que d’accords, de contrats, Programme d’Ajustement Structurel (PAS) ont nui et profondément entravé pendant près de 30 ans (1981-2010) l’essor du continent. Aujourd’hui, à la lumière des expériences des 50 années d’indépendance et de la conduite par nous-mêmes de nos affaires, quelle voie de développement faut-il pour l’Afrique? Le capitalisme dont le fondement est l’entreprise privée a vécu. Il a connu un développement prodigieux des forces productives, avec des inégalités sociales criantes, accompagnées de chômage, de famine et de déversement dans les villes et les campagnes d’un nombre toujours croissant de prolétaires.

 

Que de situations répugnantes, heurtant la conscience humaine, lorsque dans ces sociétés dites développées, on voit très souvent dans des stations de métro des faits comme celui-ci : une jeune femme, dans un état qu’on ne saurait décrire, assise du matin au soir, donnant dos aux passants, demandant du secours par ces phrases écrites sur le pan du mur auquel elle fait face : J’ai 27 ans. J’ai 2 enfants. Mon mari m’a abandonnée. Aidez-moi! Dans ces conditions, où est le développement ? Quel est son sens, lorsqu’à cette dame, il fallait seulement un travail salarié décent pour lui éviter cette situation humiliante ?

 

Des contradictions internes et antagonistes du capitalisme, est né le socialisme, qui a aplani les inégalités sociales, en résorbant le chômage, en donnant aux populations le droit au travail (obligatoire), à l’éducation et la consultation médicale gratuites, aux soins de santé, au logement, l’égalité en droit. En donnant les mêmes droits aux citoyens, le socialisme a ouvert la voie au savoir pour tous, en brisant les chaînes de la stratification sociale, en permettant aux enfants du bas de l’échelle sociale d’accéder à l’instruction et à de hautes fonctions d’Etat. Société avec des classes non antagonistes, les contradictions entre les classes de la société socialiste devraient trouver leurs justes solutions dans la société communiste.

 

Mais les bouleversements politiques survenus dans les pays de l’Est à la fin des années 80, avec l’appui de l’Occident (qui a toujours combattu le communisme) sonnèrent-ils la fin du communisme en construction à travers le monde? La réponse à cette question appartient à l’histoire. Ce séisme, sans analyse critique approfondie de la part de la classe politique africaine, devrait-il conduire l’Afrique, presque partout et dans un simplisme total au choix du libéralisme sauvage en 1990, pour sauter dans l’inconnu et se trouver 20 ans après, dans de telles crevasses ? Non je pense. Que de temps perdu! Fidel CASTRO, pour sa part, de son Cuba natal, qualifiait à juste raison je pense, ces événements de « Perte de pouvoir par la classe ouvrière” dans ces pays.

 

Le 15 avril 2010

Sékou KEITA

Contribution lue dans « malikounda.com/nouvelle_voir.php?idNouvelle=25267 » (17 mai 2010)