Les ressorts invisibles des évènements mortifères pour la vulnérable population de Centrafrique.

Les récents évènements dont le dénouement est momentanément étouffé dans l’œuf, ont mis le comble aux deux questionnements qui me déroutent et m’envoûtent depuis un ¼ siècle. Pourquoi l’ancien territoire de l’Oubangui-Chari est-il réduit, depuis son accession à la souveraineté internationale à n’être qu’un réceptacle, une fabrique de pouvoirs autocratiques, patrimoniaux et à caractère paternaliste et clientéliste ? Le deuxième questionnement porte sur les circonstances qui ont conduit l’Etat à n’être que ce que les régimes civiles et militaires successifs ont voulu qu’il soit. A part le nombre de coups d’Etat, quels sont les défis socio-économiques d’envergure dont cet Etat peut se targuer en tant que membre de la communauté régionale et internationale ?

Faute de réponse et refusant de m’enliser dans le dilemme du ni révolté ni satisfait, je me suis lancé dans une aventure ; celle d’une entreprise d’élucidation de cette gagrène, par la quête d’une grille de lecture.  Dans ce cheminement, j’avais  eu du plaisir à signer une Tribune, une semaine après le coup d’Etat du 15 Mars 2003, qui interpellait l’auteur de la notion de «Transition». Je m’attendais à de la réfutation, à de la confrontation épistémologique. Mais, je n’avais eu droit qu’ à la riposte de quelques redresseurs de tort, car, une telle démarche n’est pas « couleur locale » ; c’est ce que j’appelle la récusation .  En me récusant soit on me refuse le droit de donner mon opinion sur les problèmes socio-économiques et politiques de mon pays, soit on m’accuse de crime de lèse majesté .  A l’aune des évènements qui font vaciller le pouvoir de l’auteur du concept de transition devenue transition chaotique et appelé « Général-Président auto-proclamé », je suis encouragé à poursuivre mon entreprise puisque l’histoire des mœurs politiques de mon pays, semble me donner raison. Ni prémonition ni prophétie, j’avais fait le choix du prisme pertinent d’analyse et avais affleuré le tropisme le plus déterminant mais négligé jusqu’alors .

L’histoire des mœurs politiques en Centrafrique ; c’est-à-dire les bonnes pratiques des différentes oligarchies civiles et militaires qui se sont recrutées depuis 50 ans, ne peut se comprendre qu’à la lumière de la lettre de l’apôtre Paul à Tite, que rapporte le Nouveau Testament. En l’occurrence, Paul pointait du doigt, ce qui est caractéristique du comportement des « Crétois » de son temps. Les Crétois sont des fourbes, des imposteurs, des menteurs, des paresseux qui vénèrent le Dieu du profit immédiat. Pourquoi je considère que le chapitre 1er de l’épitre de Paul à Tite est une bonne clé de lecture ? Ainsi que j’aurai l’occasion de m’en expliquer dans les développements ultérieurs de cette tribune, Bozizé est le concentré  et la résultante de quatre dirigeants politiques ; Bokassa dont il a été l’aide de camp, Dacko dont il a été Secrétaire d’Etat, Kolingba dont il a été un des officiers supérieurs le plus écouté et Ange Patassé dont il a été le chef d’Etat major des Forces armées. Ce monsieur est l’émanation du sérail des bonnes pratiques politiques dominatrices en Centrafrique depuis plus d’un ½ siècle.

Au lendemain de son coup d’Etat ; euthanasie du moribond régime précédent, il a réussi à ne s’entourer que des frustrés des différents régimes et a eu, comme opposition un ancien Premier ministre déchu et de surcroît devenu parricide par rapport à sa filiation politique. Le plus grand succès politique de Bozizé est d’avoir réussi à bâcler le DPI, nommer Binguimalé ; Président de la CEI et remporter les élections au nez et à la barbe d’une opposition ; sans projet politique alternatif. Bozizé sait, mieux que quiconque, qu’il a un capital : les différentes oligarchies civiles et militaires, qui se sont incrustées dans les administrations civiles et militaires ont en commun de souffrir d’amnésie collective. Pour peu qu’on mène une politique sécuritaire ; fondée sur la peur et inspirée de la crainte, on  ne sera entravé par rien ; l’affaire du Colonel Massi en est un des corollaires. La Centrafrique a-t-elle vocation à n’être qu’une mine à ciel ouvert de la connivence, de la coercition et de la cruauté des mœurs politiques en vigueur ? Pourquoi ce pays fonctionne sans repaire et sans référence et n’offre aucune perspective d’avenir pour les générations futures ? Quel est le bon Samaritain ou l’organisation humanitaire et philanthropique qui accepterait d’investir à fonds perdus dans un pays que les mœurs et pratiques politiques se sont ingéniées à travestir et pervertir : On fait allégeance ou le larbin pour être rémunéré alors qu’on a travaillé, on fayotte ou on s’aliène pour que ses aspirations soient reconnus, on ritualise et folklorise systématiquement les indigents.(I)

Les mœurs politiques Birmanes et ses dérélictions de tout genre sont les mœurs de référence en Centrafrique, que Bozizé se contente de révéler. L’accueil dans la fête et l’euphorie, que la population a réservé aux évènements du 15 Mars 2003, bien que son visage soit défait par les années Patassé, n’étaient pas une légitimité accordée ni aux auteurs de l’évènement ni aux commentateurs. Ces populations désespérées savaient, que le coup d’Etat était une sorte d’invitation à sauter entre le vide et le creux, que la notion de « Conseil National de transition » ne portait en elle que les germes d’une transition chaotique et les gènes des entités chaotiques ingouvernables car, si l’on procède au séquençage de l’ADN des mœurs politiques en Centrafrique, deux voire trois anneaux sont défectueux ; le gène d’esprit de projet de société, d’identification de tropisme en vue de bâtir un pacte socio-économique. Ce qui serait une insulte à la moyenne des intelligences humaines ailleurs en Afrique, est érigé en défi en Centrafrique ; toutes les composantes de la société civile ont interprété l’avènement du 15 Mars 2003, avec une approximation déconcertante, au point d’établir des parallèles avec la sortie d’Egypte des hébreux sous la direction de Moïse et y faire des allusions théologiques.(II)

            Centrafrique ! je t’interroge, réponds moi s’il-te-plaît. Pourquoi n’es-tu que le territoire où coule l’indigence et où ne se bousculent que des indulgents, des philanthropes ! Et pourtant tu t’étends sur 625 000 km2, compte 7 régions et 16 Préfectures. Tout laisse penser que tu te satisfais de ton rang d’avant dernier des pays pauvres très endettés. Le fait que 80 % de ta population est paysanne et vit dans les zones rurales où même les pistes cyclables sont quasi inexistantes peut-il expliquer cette situation ? Tu es enclavée tant de l’intérieur que de l’extérieur.

Tes conditions sociales et économiques, sous l’égide de tes mœurs et pratiques politiques font de toi le deuxième Tahiti mais d’Afrique. Ce n’est pas rien si les journalistes traitaient Bokassa de « Tonton macoute» Ta capitale Bangui dit « La coquette » n’a de coquetterie que les immondices. Si elle se disait démagogiquement coquette, elle désormais rongée de partout par la gale. Elle devenue « Bangui l’obcure  galeuse » en termes d’aménagement du territoire, d’urbanisation et de cadastre.

C’est une gageure de penser que tu sortiras indemne de ce nième coup d’Etat qui menace d’effilocher ton tissu social déjà en lambeau. As-tu un avenir régional, continental et mondial ?

Loin d’être un pamphlet ni un réquisitoire contre Bozizé ; le pompier- pyromane de Décembre 2012, l’objectif de cette tribune est d’amener en débat et à la lumière de l’analyse de l’apôtre Paul du comportement des Crétois, le postulat suivant :  L’indigence est-elle la seule cause du positionnement socio économique et politique de la Centrafrique ? Dit autrement, comment amener l’ensemble des communautés humaines et territoriales en Centrafrique à faire passer leur territoire de fabrique de pouvoir autocratique, patrimonial, à caractère paternaliste et clientéliste,  en creuset pour prémunir les indigents afin qu’ils entrent dans la dynamique de transformation, qu’ils s’impliquent, non à marche forcée mais en captant les externalités positives de la mondialisation. Je postule que les changements socio-économiques et politiques peuvent émerger si les mœurs et pratiques politiques favorisent l’émergence et la propagation des mécanismes en recourant, avant tout aux instruments de remédiation cognitive d’une part et que d’autre part, les composantes de la société civile et l’opposition démocratique se persuadent, qu’il est possible d’impulser des changements socio-économiques profonds, sans prendre nécessairement le pouvoir politique. L’alternative à la montée en puissance de l’indigence réside dans le fait de catalyser l’accès du plus grand nombre des indigents à leurs droits fondamentaux, aux biens publics puis, de garantir l’accès et l’exercice de ces droits, au lieu de sanctuariser les droits de propriété et le slogan creux de la lutte contre la corruption.

I : Gisement à ciel ouvert de connivence, de coercition et de cruauté politiques

En décryptant les causes et les circonstances de la victoire de Bozizé au dialogue politique inclusif et aux élections présidentielles, on se retrouve quasiment dans le contexte de l’épitre de Paul à Tite. Une question émerge ; De quelle crise d’identité souffrent les mœurs et pratiques dominantes en Centrafrique et/ou quelle est l’identité de cette crise multiforme ?

            De cette interrogation, s’imposent à l’évidence les causes du règne de la connivence et de la coercition. Depuis toujours et particulièrement depuis l’avènement du 15 Mars 2003, la Centrafrique est le marché captif des indulgents pour l’abondance de l’indigence. Comment expliquer que ce territoire soit si fertile et propice aux coups d’Etat ?

Que la durée de vie moyenne d’un régime politique est de 10 ans pour les civils [David Dacko et Ange-Félix Patassé ] et de 12 ans pour les militaires [ Jean-Bedel Bokassa et André Kolingba] Bozizé cherche à entrer dans cette filiation ; c’est pourquoi, sous la menace du coup d’Etat, il promet de ne plus briguer un mandat après 2016 ; ce qui ferait que de 2003 à 2013, il aurait ainsi, à l’exemple de ses deux prédécesseurs militaires, fait exercé le pouvoir pendant 13 ans. [Le gars a de la suite dans les idées et de la stratégie de conservation du pouvoir]

Continuons d’user de la clé de lecture de l’épitre de Paul à Tite pour élucider une réalité. De nombreux signataires Centrafricains de tribunes considèrent que seul un changement de mentalité provoquerait des transformations. Cette thèse m’a amené à interroger la notion de don, de capital dont la nature aurait doté les Centrafricains.

Dit autrement quels sont les talents dont Dame nature a bien voulu doter les communautés humaines et territoriales de Centrafrique et que ces communautés ignorent ? Il me semble que c’est de la parabole des talents et de l’utilisation pertinente qui peut en être faite que naîtra le dit changement de mentalité. Le changement de mentalité cache la thèse d’une sorte de damnation.

Par le prisme de la parabole des talents, on en vient à se demander pourquoi la terre Centrafricaine est propice aux coups d’Etat, c’est avant tout parce que les chaines des oligarchies civiles et militaires qui s’enchevêtrent, résultent toutes d’une part d’autocratie du Président de la République. La vie d’un agent de l’Etat ; civil et/ou militaire change, se transforme au rythme, plutôt de décrets, arrêtés et autres actes administratifs, que par créativité ou capacité d’entreprendre. Les hautes sphères de l’Etat, des partis politiques au pouvoir sont truffées davantage des obséquieux, de fourbes, de colporteurs de propos mensongers, des réseaux de fieffés menteurs, qui n’ont recours qu’à l’astuce et à la trahison.  Les succès aux examens scolaires et aux diplômes universitaires ou professionnels ne sont pas le fait d’effort mais la contrepartie d’un fait de corruption, de népotisme et/ou de favoritisme. L’instrumentalisation de l’indigence et utilisation de l’indulgence comme méthode de construction des partenaires de développement n’est pas la solution appropriée. La mise en œuvre de la parole des talents induit l’édification des conventions ; véritables socles de valeurs communes qui admettent les actes qui contribuent à l’émancipation de tous et bannissent tout ce qui est porteur de nuisance pour le bien-être et freinent la circulation des personnes et des biens. Personnellement je prétends que de telles conventions doivent figurer, non ex-cathédra mais comme la vocation, le dogme des partis politiques dans le cheminement de la construction ; toujours perfectible, de la communauté nationale. Concrètement, interdire à tout leader politique d’ôter la vie à un autre contradicteur politique, sans décision de justice doit être un exemple de telle convention. Ainsi que le refus de tout traitement inhumain, avilissant, humiliant et dégradant doit être délibéré et adopté au niveau des communes rurales, de toutes les composantes de la société civile, des organisations syndicales et des partis politiques.

Les communautés territoriales et humaines ont besoin d’entretenir, pour leur vie et survie, la culture de délibération. En Centrafrique, les mœurs et pratiques politiques ont une connotation ésotérique et la mission de la politique s’apparente davantage au charlatanisme et à celle d’un détrousseur de grand chemin, qui ne rentre jamais bredouille de ses sorties qu’à l’exploration des voies pour permettre aux communautés vulnérables de s’émanciper.

Les acteurs de l’action politique ont, de concert, bifurqué et dévoyé les objectifs de la politique, dans son sens le plus noble. La classe politique se considère en lévitation et prétend avoir la solution à tout, même face à des situations ressemblant à des quadratures du cercles, voire à la recherche du sexe des anges. Elle ne scrute rien qui serait susceptible d’être un tropisme . Me référant à Mandé Djapou,  qui, dans sa thèse comparait le système judiciaire Centrafricain à un édifice où, il y a la fondation certes mais les magistrats les mieux formés sont tous au sommet alors que les étages intermédiaires sont vides, je soutiens- histoire d’adapter cette réflexion qu’il y a un déficit de résistance à l’enlisement dans des postures surannées et à l’indifférence en termes de d’exploration des voies d’alternative, pour sortir les communautés les plus vulnérables de l’indigence. Cette logique plonge ses racines profondes dans  la manière snobe de traiter les problématiques socio-économiques du pays. Or ces problématiques sont traitées ailleurs, avec méthodes et profondeur.

Les mœurs et pratiques politiques en Centrafrique sont insulaires, en ce sens qu’elles sont singulières et insolentes par leur approche ethnocentrique des prismes d’élucidation des problèmes. Du sommet de l’Etat en passant par les corps intermédiaires et les composantes de la société civile, on fait le culte de la prescription, de l’injonction et de la coercition au détriment de la culture l’incitation et de la mise en place des instruments d’émancipation.. Quel sera le carburant qui alimentera le moteur de la mosaïque, voire du patchwork de la cobelligérance, qui projette de renverser le roublard et le fourbe de Bangui, histoire de rester dans l’orthodoxie Paulinienne de Tite.

II : Confessionnalisation du politique et obscurantisme régnant mais travail d’analyse vacillant et/ou complaisant.

L’instrumentalisation de l’indigence comme stratégie d’ouverture à l’extérieur  tend à prendre la saveur d’une apologie de l’indigence pour spolier les fieffés indulgents du l’univers de l’Humanitaire. Cette réflexion m’est inspirée lors d’un séminaire de notre réseau à HEC-Montréal. Intervenant sur l’étendue et les limites du concept de solidarité, on pouvait lire en filigrane du texte d’un communicant, ce proverbe Inouit. « Le don est au bénéficiaire, ce que le fouet est au chien »  Ce proverbe est plein d’inspiration pour qui veut des clés de lecture des mœurs et pratiques politiques en Centrafrique. Par exemple : La politique de remise « d’enveloppe », de « pagne », de sucre, de savonnette et en j’en passe s’est substituée à la notion de redistribution. Au lieu de penser l’organisation de sortie de l’indigence, on préfère recourir massivement à l’humanitaire d’urgence, pour panser les blessures infligées aux indigents par les choix politiques hasardeux , on ravale les façades.

Deux ans plus tard, je devais intervenir au 10è Congrès internationale du Comité de liaison des ONG à Paris sur le Co-développement. En quête des théories de référence, j’ai lu Exode chapitre 23 . Le verset 8 m’a particulièrement interpelé. Ce verset met en garde les enfants d’Israél contre la dépendance aux « présents » selon certaines versions et les « cadeaux » selon d’autres. Quelle que soit la version, l’avertissement contre cette dépendance voire cette addiction à tendre la main, a pour objectif de signaler les effets pervers, à moyen et/ou long terme du cadeau sur le bénéficiaire. Le cadeau corrompt, le cadeau rend aveugle même les plus clairvoyants et pervertissent les décisions des gens honnêtes.

            Pourquoi ces deux références et quel est le rapport avec mon sujet à ce stade de sa progression ! Beaucoup a été fait et se fait en Centrafrique en prenant appui sur l’indigence.

L’une des singularités des mœurs et pratiques dominantes en Centrafrique est non seulement l’instrumentalisation de l’inépuisable indigence comme source d’appel aux indulgences dont s’enrichissent les hauts perchés mais pire encore la spéculation de cette indigence comme vecteur de communication à tous les niveaux de l’Etat. L’Etat communique sur la scène internationale par l’indigence. Les partis politiques d’opposition communiquent par l’indigence en faisant passer les communautés territoriales et les entités humaines pour des victimes de mauvaise gouvernance. Toutes les composantes de la société civile ne jurent que par l’indigence notamment la branche religieuse.

La Centrafrique est l’un de rare pays d’Afrique où du sommet de l’Etat en passant les corps constitués de l’Etat, on ne trouve que des religieux aux manettes des institutions . Le Chef de l’Etat est un des Grands Gourous de sa secte, le Ministre de l’Administration est un Pasteur, Le Président de la CEI est un Pasteur, Le Médiateur de la République est un Archevèque, pour ne citer que ces icônes. Quant à la recherche et à l’enseignement, haut lieu de la réflexion, ces situations ne donnent aucunement lieu à confrontation sur le plan épistémologique. Cette réalité n’est pas explorée sur le plan épistémologique. Quant aux organes de presse, chaque rédaction apporte sa contribution en fonction de sa ligne éditoriale à l’irrigation des réflexions même si cela se limitait aux en anecdotes ; ce qui est déjà pas mal

Finalement, la confrontation épistémologique est-elle aussi atteinte par la peste de l’indigence ? Dans quel pays du monde on remporte  la victoire sur l’indigence en se contentant d’idolâtrer l’indigence ! Une autre interrogation, est-il normal pour la santé d’une démocratie balbutiante qu’il n’y a que par la confessionnalisation que les mœurs et les pratiques politiques entretiennent des rapports avec les citoyens ; leurs ouailles ? Cette forme de « Raspoutinisation insidieuse et rampante » des rapports n’est-elle pas symptomatique de l’aliénation forcée des indigents, de l’inféodation subtile et sinueuse, des communautés associatives , par leur utilisation comme courroie de transmission de l’idéologie de la dépossession et de l’expansion du culte de l’obséquiosité et, sans exagération, faire entrer tout un peuple dans la spirale du Syndrome de Stockholm ! .

Attention, je n’insinue pas ici , une campagne anticléricale. Eriger en institution l’arrosage des indigents, aussi bien les communautés humaines que les communautés territoriales en zones rurales, ne signifient rien d’autre que pérenniser une culture mafieuse du rite de l’allégeance aux pontes politiques ( Demi Dieu) et de l’aliénation de l’indigent. 

Depuis les années 2000, le nombre de sites web s’affichant sites d’information ou d’opinion sur la Centrafrique a explosé. Personnellement cette évolution me ravit. En revanche, je relève, pour la déplorer, la montée simultanée de deux phénomènes- à caractère aussi bien vertiginogène et qu’accidentogène depuis la même période : le déficit de la confrontation épistémologique autour de la notion de la balbutiante démocratie depuis l’échec du DPI et le déficit de mise en perspective des problématiques liées à l’implication du pays dans les Objectifs du Millénaire pour le Développement. Ces deux champs peuvent catalyser la réflexion et l’action face à l’ampleur de l’indigence et offrent des opportunités d’élaboration d’instruments politiques.

J’implore mes lecteurs de ne pas me faire dire ce que je n’ai pas écris. Je ne confonds pas « dénonciation » et « élaboration d’instruments pertinents permettant de décrypter les manœuvres de spéculation sur l’ignorance ; au sens « non accès à l’alphabétisation », de nature et d’objet à maintenir ces indigents dans l’obscurantisme et en état permanent de résignation. Dans mon esprit, il est question d’élaboration de grille de lecture et de la faisabilité politique de cette grille tel que l’on peut déceler dans l’épitre de Paul à Tite.

A)   Le déficit de débat au sujet de la balbutiante démocratie.

La démocratie se réduit-elle à la prolifération des partis politiques - aussi obscurantistes – les uns que les autres, notamment par leur tendance à l’approximation et leur cécité politique à identifier les tropismes porteurs de changements ; parfois violents pour les indigents les plus vulnérables. Même avec les meilleurs instruments démocratiques qui soient, un peuple ignorant est un peuple esclave, faisait remarquer Condorcet. On décèle à l’évidence l’approche Paulinienne dans Tite.

Les circonstances dans lesquelles les dernières élections Présidentielles puis législatives en Centrafrique se sont déroulées font affleurer, non seulement  l’épitre de Paul à Tite mais met en exergue la réflexion de Condorcet. Les électeurs Centrafricains sont traités en esclaves par ceux là même qui sollicitent leur suffrage. Puisque qu’on traite ces indigents en esclaves davantage qu’en citoyens, le débat ne saurait se réduire au rythme ou à la cadence de convocation du corps électoral mais à l’exigence de sa formation politique. La formation politique ici n’est pas à confondre à l’agitation ou à la gesticulation, voire à la propagande. Les mœurs et politiques ont, dans leur ensemble infligé aux Centrafricains, le même traitement, à savoir le déni de la citoyenneté.

            Une Convention républicaine digne de ce nom aurait-elle éviter que le Pasteur Bozizé et son complice le Pasteur Binguimalet accomplissent leur forfait.. Ces deux prédicateurs ne savent rien à l’épitre de Paul à Tite. Quant à l’opposition démocratique, en privilégiant la théâtralisation de ses interventions dans les provinces plutôt que la multiplication des séminaires de formation tout public- et non d’endoctrinement fumeux, elle dénie à l’électorat indigent de devenir auteur de son propre devenir et d’être avec cette opposition co-auteur de son histoire sociale. 

Il faut relever un autre haut fait d’escroquerie intellectuelle, que cache le phénomène de coups d’Etat successifs. Les générations futures, les enfants des indigents ne connaissent que l’histoire falsifiée de Centrafrique, la pratique d’une démocratie édulcorée par des braqueurs qui ne savent que la récusation et non la réfutation du discours politique. Sauf mauvaise lecture de l’exégèse du mot « démocratie », ce concept signifie que les citoyens ont tous, potentiellement vocation à accéder au pouvoir et de pouvoir l’exercer. Je ne suis ni angélique ni dogmatique en rappelant cette caractéristique du concept de démocratie.

L’opposition comme le parti au pouvoir, habités par l’esprit de rédemption collective des indigents, n’a pas jugé opportun d’organiser des moments de formation et d’éducation citoyenne. Je ne prétends être ni le plus révolté ni le moins satisfait des ressortissants Centrafricains mais c’est navrant de constater que rares sont les travaux d’analyses ou des réalisations d’artistes , même vivant à l’extérieur sur le concept de «  Bienfaiteurs ». Sous ce chapeau de « bienfaiteur », les mœurs et pratiques politiques Centrafricaines ont affublé l’armée Tchadienne, venue installer le régime de Bozizé.

Le concept de «  bienfaiteur » est chargé de symbole sur le plan politique. Par rapport aux indigents, l’armée Tchadienne est devenue l’armée tutélaire de celle de Centrafrique, l’armée indulgente, qui est venue sauver les indigents en proie à la division.

            Enfin, par rapport à mon postulat, sans tomber dans le syndrome du prophète Elie, aucun organe ne rapporte qu’on peut éduquer, former, impulser des actions de changements sociaux sans faire de l’accès au pouvoir, une condition sinéquanon de transformation socio-économique. La menace qui plane sur le régime Bozizé générera des règlements de compte. Les forces de l’ordre seront transformées, en agents de bâillonnements et de coercition ; donc faire régner l’ordre sécuritaire par la force. Attendons- nous au pire aux lendemains de ce calme précaire venu d’ailleurs et sans garantie ! [Quel vaste et inépuisable champ d’investigation laissé pour compte par la recherche, aussi bien en sciences sociales qu’en sciences humaines et en sciences de gestion en Centrafrique]

 

 

 

 

B)   Le déficit de la réflexion sur l’exploration des voies d’insertion à la mondialisation dont les OMD.

Les mœurs et pratiques politiques sont tellement engluées, enchevêtrées dans leurs mesquineries quotidiennes et leur prétention à provoquer la rédemption collective des indigents qu’elles se sont enlisées dans des postures très longtemps surannées .Depuis l’échec du DPI, les mœurs et pratiques politiques, ainsi que la composante religieuse de la société civile sont prises au dépourvues. Leurs préconisations rappellent soit, celles des années soixante et dix –début quatre-vingts, soit celles qui sont des poncifs ou des sentiers battus plus usés et obsolètes

            Au lieu de prôner le marché des corbillards flambants neufs pour les indigents, marché très fleurissants et potentiellement très porteur au rythme où va le taux de mortalité des indigents, je suggère qu’on s’accorde à inverser la logique. Marcher derrière les corbillards c’est bien mais s’accorder à favoriser la prolifération des charrettes pouvant permettre à l’indigent de construire son autonomie c’est mieux. C’est désormais une lapalissade que de soutenir que la majorité des pays pauvres très endettés dont la Centrafrique se situe à l’avant dernière place, cherche obstinément à capter les externalités positives de la mondialisation, comme voie d’alternative de lutte contre l’inexorable montée de l’indigence. Des expériences sont initiées çà et là pour outiller les communautés humaines et les collectivités territoriales en zones rurales.

Alors que des politiques publiques s’élaborent pour faire reculer l’indigence par l’accès du plus grand nombre aux biens publics, l’exploitation de l’indigence est en Centrafrique, ce que la manie du recours aux armes à feu de petit calibre est aux américains, en plagiant David Bowie dans « Mettre en scène la maladie mentale des américains  »

Sachant que la mondialisation des modes de production induit de la part des pays pauvres très endettés, non pas de se cantonner dans la dénonciation mais d’inventer des petits modèles économiques capables de s’imbriquer et de catalyser leur intrication dans les économies mondialisées au niveau interrégionales et continentale, les mœurs et les pratiques politiques Centrafricaines  sont plus que stériles. Sans décret de nomination, sans mesures administratives confiscatoires, sans ostracisme et bannissement de certains et stigmatisation des autres, sans légendes urbaines et anecdotes sur le droit de cuissage, rien d’autres n’a du sens en Centrafrique. Les valeurs humaines les plus négatives ont triomphé au détriment des valeurs de compétition saine. On sélectionne les sportifs non sur la base de critérium de performance mais par décret. Les avancements dans les fonctions civiles et militaires se font par décret.

           

 

Où en sont les mœurs et les bonnes pratiques politiques en Centrafrique sur la question des OMD ?[ Objectifs du Millénaire pour le Développement] dont l’échéance est fixée en 2015. Le coup d’Etat de 2003 a entraîné une forte recrudescence du phénomène des enfants-soldats, aussi bien du côté des forces armées loyales que des groupes armés. La quasi-totalité des enrôlés forcés ou volontaires sont des enfants des indigents, sans écoles, sans perspective d’avenir. L’édifice se fissure à nouveau et le seul tort des victimes, qui sont sous les décombres est d’être nées Centrafricaines.  

Conclusion :

Dans la perspective des OMD et alors que les rencontres post-conflit se prépare à se tenir à Libreville (Gabon), la thérapie pour la pathologie dominante dont souffrent les mœurs et pratiques politiques en Centrafrique, ne saurait se réduire à un cénacle pour le partage du gâteau. Je lance – comme une bouteille contenant mon postulat de départ, à la mer et considère que le mode opératoire de ce postulat se résume en un mot : Délibération. «Sans délibération, le peuple se meurt » Il faut délibérer au sens « débattre et agir ensemble en vue de faire émerger des facteurs ou leviers pour transformer, créer des conditions propices à de nouvelles régulations pour que les indigents et les indulgents coopèrent à la fois dans les rapports de production et des échanges .

Je m’autorise un gros mot : acceptons de contribuer à la métamorphose de ces communautés humaines et collectivités territoriales en zones rurales et à moyen ou long terme, l’adage selon lequel « les hommes vont naturellement là où se trouve l’argent » se renversera. C’est-à-dire, si l’on identifie les leviers de métamorphose des territoires ruraux ; lieux d’ancrage des indigents, c’est l’argent qui viendra là où se trouvent les hommes » Participer à la métamorphose de l’Etat en Centrafrique,  pour qu’il ne reste pas indéfiniment le réceptacle et la fabrique des pouvoirs autocratiques, patrimoniaux, à caractère paternaliste et clientéliste mais le creuset des  transformation des intérêts de tous ; intérêts humains de proximité, les intérêts des collectivités locales et de l’intérêt général.

Gervais Douba

Enseignant en Sciences de gestion (Université de Rouen)

Consultant en ETD « Entrepreneuriat-Territoire et Développement »

Symbiose Ingénierie Internationale..

09012013