Les premiers mots du président François BOZIZE sur les antennes de la radio nationale centrafricaine, 16 mars 2003


 "Centrafricaines, Centrafricains, chers compatriotes,

"En cette journée mémorable et historique, qui met fin à 10 ans d'errements démocratiques, de souffrances et d'extrême pauvreté, je voudrais très sincèrement et du fond du coeur te remercier, pour le soutien inconditionnel et permanent que tu n'as cessé d'apporter à la lutte pour le retour de la paix, et de la véritable démocratie en Centrafrique.

"Est-il nécessaire de rappeler que le régime défunt n'avait de démocratique que l'onction légalitaire, au nom de laquelle tous les travers étaient permis? Le peuple était méprisé, notre vaillante armée, qui a été divisée par une politique d'exclusion et de tribalisation exacerbée, n'était plus que l'ombre d'elle-même, notre administration naguère performante, est désormais devenue un dépotoir pour les parents, épouses, ou enfants.

"Et malgré ses énormes potentialités, la Centrafrique n'arrive pas à faire face au strict minimum en matière de dépenses de souveraineté. Nos hôpitaux sont devenus de véritables mouroirs, nos écoles font la honte d'une Nation dont l'élite faisait naguère la fierté de tout un peuple.

"Le problème centrafricain est avant tout intérieur et appelle à des solutions nationales d'abord. Notre mission est celle de la paix et de la réconciliation nationale.

"Il faudra cependant procéder par étape. C'est pourquoi, afin de mettre debout notre pays, je crois devoir compter sur tous les vaillants fils et filles de ce pays.

"Il s'agit de mener dans une période qui sera définie ultérieurement, un programme d'urgence de redressement de la nation dont les principaux axes sont la poursuite des discussions avec les institutions de Bretton Woods afin de parvenir aux programmes post-conflit, la réunification et la restructuration de notre armée nationale, un vaste programme de désarmement de toutes les provinces du pays car la Centrafrique est désormais une véritable poudrière, la restructuration et la redynamisation de notre administration, l'assainissement des régies financières, l'accentuation de la lutte contre le VIH-Sida, la préparation et la tenue dans la transparence des différentes échéances électorales.

"Cette énumération exhaustive demande pour sa mise en oeuvre le rassemblement national et une cohésion de tous les instants, afin de nous mettre en conformité avec le contexte spécifique d'interruption temporaire du processus démocratique.

"Nous suspendons d'ores et déjà la Constitution et annonçons la dissolution de l'Assemblée nationale et du gouvernement. Toutefois, je recevrai le plus rapidement possible les partis politiques, ainsi que les forces vives de la Nation afin de nous accorder autour d'un programme consensuel pour la transition.

"A cet effet, nous mettrons en place un conseil national de transition, regroupant les forces vives de la nation.

"Les anciens chefs d'Etat y siègeront en qualité de membres d'honneur. Ce conseil servira entre autres à soutenir le gouvernement national de transition dans ses efforts en vue d'un redressement rapide de la Centrafrique, et à la préparation des échéances électorales à venir.

"En ce moment de joie, de retrouvailles et d'unité nationale retrouvée, nous assistons malheureusement à des actes indignes commis par des personnes mal intentionnées.

"Nous mettons en garde tous les fauteurs de trouble et qu'à partir de ce moment, tout acte de braquage, de vol de voiture, et autres pillages seront sévèrement sanctionnés et réprimés.

"De concert avec les forces soeurs de la Cémac, des patrouilles mixtes seront organisées de même que l'assistance et la contribution de la Cémac à la restructuration de l'armée centrafricaine seront la bienvenue.

"Nous proclamons notre attachement aux mesures d'austérité et d'orthodoxie administrative et financière.

"Sous notre impulsion, la RCA se soumettra à tous les traités et conventions auxquels elle a volontairement adhérés, sans oublier nos amis de toujours qui ont été de tout temps à nos côtés quelles que soient les circonstances.

Bonne chance et que Dieu nous bénisse".


Le général Bozizé se pose en président ferme et rassembleur

LIBREVILLE, 17 mars 2003 (AFP) - 8h49 - Le général centrafricain François Bozizé s'est efforcé dimanche d'endosser un costume de chef d'Etat de transition, ferme et rassembleur, soucieux de réconciliation et d'ordre, 24 heures après s'être emparé du pouvoir à Bangui à la faveur d'un coup d'Etat éclair.

Le "président" autoproclamé centrafricain a annoncé dimanche soir la dissolution de l'Assemblée nationale et du gouvernement, la suspension de la Constitution, lors d'une allocution solennelle à la nation sur Radio Centrafrique.

Mais, parlant "d'interruption temporaire du processus démocratique", il a aussitôt souligné qu'il recevrait "le plus rapidement possible les partis politiques et les forces vives de la nation" pour s'accorder autour d'un "programme consensuel".

Au rang de ses priorités, il a fixé "la préparation et la tenue dans la transparence des différentes échéances électorales à venir".

Avant cette première intervention publique, l'ancien chef d'état-major des armées, entré en rébellion en novembre 2001, avait fait annoncer par son porte-parole l'instauration d'un couvre-feu sur tout le territoire, alors que Bangui était encore le théâtre de scènes de pillage qu'il a fermement condamnées.

Affichant son souci de ne pas laisser s'instaurer l'anarchie dans la capitale centrafricaine et de lui rendre le plus rapidement une vie normale, le général Bozizé avait également appelé tous les éléments des forces de défense et de sécurité à rejoindre casernes et commissariats.

Il avait exhorté les fonctionnaires civils et militaires à reprendre le travail dès lundi matin, précisant que l'intérim des ministères serait assuré dans un premier temps par leurs secrétaires et directeurs généraux en fonction.

Le nouvel homme fort de Bangui a répondu aux condamnations de principe de son coup de force, qui s'exprimaient à travers le continent, par un vif réquisitoire contre les "10 ans d'errements démocratiques" du régime du président élu Ange-Félix Patassé, réfugié au Cameroun.

"Est-il nécessaire de rappeler que le régime défunt n'avait de démocratique que l'onction légalitaire au nom de laquelle tous les travers étaient permis?", a lancé le général Bozizé au début de son allocution.

Il a évoqué un "peuple méprisé", une "administration dépotoir" pour les familles du régime, des hôpitaux "mouroirs", une école "honte d'une nation", une armée "ombre d'elle même", "divisée par une politique d'exclusion et de tribalisation exacerbée".

Appelant les "dignes fils et filles du pays" à la "cohésion", le général Bozizé a affirmé que "le problème centrafricain" était "avant tout intérieur" et appelait "des solutions nationales d'abord".

Rassembleur, il a annoncé son intention d'associer à la transition les "anciens chefs d'Etat" du pays en tant que "membres d'honneur" d'un Conseil national de transition qui regroupera les "forces vives" du pays.

Mais il a aussi voulu donner des gages à la communauté internationale, notamment aux bailleurs de fonds, parlant d'"orthodoxie financière" et de poursuite des discussions avec les institutions de Bretton Woods, "afin de parvenir aux programmes post-conflit".

Le président auto-proclamé a aussi invité la force de paix d'Afrique centrale présente à Bangui à effectuer des patrouilles mixtes avec ses troupes et à participer à la restructuration de l'armée centrafricaine.

Il a enfin promis que sous son impulsion, la centrafrique se soumettrait "à tous les traités et conventions auxquels elle a volontairement adhérés, sans oublier nos amis de toujours qui ont été de tout temps à nos côtés", dans ce qui semblait être une allusion à la France, l'ancienne puissance coloniale.

Le président élu centrafricain Ange-Félix Patassé se trouvait lundi matin encore à Yaoundé et des discussions étaient en cours dimanche au Cameroun pour lui trouver un pays d'accueil provisoire.


Actualité Centrafrique de sangonet - Dossier 15