L'évacuation des étrangers se poursuit en Centrafrique

BANGUI (Reuters), 18 mars 2003 19:53 - Les opérations d'évacuation se sont poursuivies mardi en Centrafrique, où la France a envoyé quelque 300 militaires à cette fin après le coup d'Etat qui a renversé ce week-end le président élu Ange-Félix Patassé.

Environ 330 expatriés français et étrangers ont déjà été exfiltrés de Bangui, capitale de l'ex-colonie française où le général François Bozizé, ancien chef d'état-major en disgrâce, s'est proclamé chef de l'Etat. Le président Ange Patassé, qui était au Niger lors du putsch, s'est réfugié au Cameroun voisin où les autorités essaient de lui trouver un asile permanent.

Les ministres des Affaires étrangères du Gabon et de la République du Congo sont arrivés mardi à Bangui pour des discussions avec les responsables d'un contingent de maintien de la paix régional dont trois soldats ont péri dans les troubles. Le chef de la diplomatie congolaise Rodolphe Adada doit aussi rencontrer Bozizé, a déclaré un porte-parole de celui-ci.

La capitale centrafricaine a été le théâtre de pillages à grande échelle depuis le week-end. C'est pourquoi une partie des troupes françaises venues en renfort de Libreville (Gabon) a été déployée autour de l'ambassade de France à Bangui, où se sont réfugiés de nombreux étrangers souhaitant quitter le pays.

Les hommes du général Bozizé sont passés à l'attaque samedi, déclenchant une vague de pillages dans toute la ville. Le bilan des victimes du putsch s'établit à 50 morts et environ 150 blessés, indiquait-on mardi de sources médicales.

Trois soldats du contingent de maintien de la paix de la Communauté économique et monétaire d'Afrique centrale (Cemac), ainsi que deux insurgés et une trentaine de civils, ont péri dans les affrontements et les pillages.

PROTECTION DES ETRANGERS, SECURITE DE L'AEROPORT

Dimanche, le nouvel homme fort de Bangui a dissous l'Assemblée nationale, suspendu la Constitution et promis de préparer avec les partis politiques de futures élections à une date non précisée. Il a également lancé un appel pour la fin des pillages, qui ont surtout visé les administrations, les villas des expatriés et des institutions religieuses, et décrété un couvre-feu du crépuscule à l'aube.

Les personnes rapatriées ont été conduites à Libreville.

"Notre société a été saccagée et tout le mobilier a été emporté", a raconté Philippe Castella, directeur d'une société d'électricité qui a été évacué dimanche. "Pendant le couvre-feu, le calme revenait à peine et tout reprenait dans la journée. Des personnes armées et assimilées à des rebelles faisaient partie des malfrats."

"Je me suis réfugié à l'ambassade de France, car (...) les pilleurs emportaient tout ce qu'ils trouvaient et (...) je n'ai pu retourner à mon domicile", a déclaré un pasteur américain arrivé mardi au Gabon.

Le colonel français Frédéric Beth a déclaré à Reuters à Libreville que "les soldats déployés à Bangui assurent la protection des ressortissants étrangers ainsi que la sécurité de l'aéroport pour permettre de les évacuer facilement".

Parmi les évacués figurent des Français, des Américains, des Togolais, des Camerounais et d'autres Africains. Un porte-parole du camp militaire français a dit qu'un Japonais gravement blessé avait été transféré dans un hôpital de la capitale gabonaise.

L'Union africaine (UA, ex-OUA) a condamné le coup d'Etat du général Bozizé et recommandé de suspendre la Centrafrique des groupes politiques de l'Union jusqu'au retour à la légalité constitutionnelle.

Lundi, le président gabonais Omar Bongo n'a pas exclu un retour du contingent de la CEMAC, la Communauté économique et monétaire des Etats d'Afrique centrale. Ce contingent est constitué de militaires gabonais, congolais (Brazzaville) et équato-guinéens, une fois l'évacuation des étrangers terminée.

A Paris on indique de source diplomatique que les chefs d'Etats de la CEMAC, qui doivent se réunir samedi, pourraient différer une telle décision pour tenter de contribuer au retour au calme dans la capitale centrafricaine.

par Biti Molomo - BANGUI (Reuters), 18 mars 2003