Les Français évacués de Centrafrique racontent "le chaos" à Bangui

PARIS, 19 mars 2003 (AFP) - 12h12 - Arrivés tôt mercredi matin à l'aéroport parisien de Roissy, une centaine de Français évacués de Centrafrique par l'Armée française ont raconté "le chaos" et "les pillages".

Fuyant la Centrafrique après le coup d'Etat éclair du général François Bozizé, les Français ont débarqué d'avions Air France en provenance de Libreville à 05H35 GMT et 06H20 GMT. Ils avaient auparavant été évacués en avion de transport militaire Transall de Bangui vers le Gabon par l'Armée française, ont-ils raconté à l'AFP.

A Roissy, leur arrivée a provoqué pleurs, cris de joie et embrassades avec leurs familles venues les accueillir.

"Les pillards sont venus en nuées, des centaines, des milliers. L'horreur. Ils m'ont tout pris", a raconté un homme d'une cinquantaine d'années en étouffant un sanglot avant de se détourner.

Débarquant avec sa femme et sa fille, Olivier Picard, 35 ans, a retrouvé à Roissy amis et parents. "Ca va? Pas trop secoué", s'enquièrent-ils, inquiets. M. Picard tente de prendre les choses avec philosophie: "On se calme. Personne n'est blessé, non ?", lance-t-il.

"Dimanche, les pillards m'ont collé une Kalachnikov sur le front en me demandant ma voiture. Je l'ai donnée. Ils ont aussi pris tout le reste dans ma maison. Ce qui les intéresse surtout, c'est l'argent. Que je sache, il n'y a pas eu de blessures par balles chez les Français là-bas", a-t-il ensuite raconté.

Habitant Bangui depuis trois ans, M. Picard, qui y retourne dans 15 jours "pour le boulot", se dit "habitué aux coups d'Etat". "C'est le quatrième que je vis. Mais c'est le pire scénario qui pouvait arriver. La ville est mise à sac".

Une femme d'une quarantaine d'années, qui témoigne anonymement par peur de représailles car elle aussi devra bientôt retourner à Bangui pour son travail, a remarqué parmi les pillards "des soldats tchadiens et des soldats centrafricains, en plus des habitants de Bangui".

"Ils ont pillé toutes les villas, les magasins, les administrations. Ils ont brûlé les ministères. J'ai des amis dont la maison a été rasée en quelques heures", raconte-t-elle, visiblement sous le choc.

Selon elle, "il n'y a pas eu de massacres". "J'ai juste vu quelques cadavres dans les rues" sur le chemin de l'aéroport, d'où des Transall de l'armée française ont ramené "environ 25O Français à Libreville".

Arrivée avec ses deux enfants, une autre femme, anonyme pour les mêmes raisons, s'inquiète pour son mari "resté là-bas à cause du travail".

"Samedi et dimanche, après le coup d'Etat, on nous a tout pris, tout arraché, démoli, explique-t-elle. Nous vivions tout près de la villa Adrienne, la résidence du président (centrafricain Ange-Félix) Patassé. Il y a eu des cris de joie, les pillages ont commencé dans ce coin-là".

"C'est le chaos", estime-t-elle, soulignant que "ce ne sont pas les rebelles qui pillent, c'est la population".

Aucun des rapatriés interrogés n'a fait état de violences physiques à son encontre. Mais tous ont entendu des tirs, des explosions, et vu des armes braquées sur eux à plusieurs reprises.


Actualité Centrafrique de sangonet - Dossier 15