Le premier voyage officiel de Goumba en Europe et en Afrique valait la peine (point presse)
par Patrick Bakwa 
 
Bangui - République Centrafricaine, 26 mai 2003 - Au cours d'une conférence de presse organisée le samedi 24 mai 2003 à l'Immeuble Petroca, le Premier Ministre, chef du gouvernement a expliqué aux journalistes présents, les raisons qui ont motivé son dernier périple africain et européen.C'est à l'étranger, déclare le Professeur Goumba, que nous avons pris conscience des enjeux réels et de l'intérêt de la mission. Pour la communauté internationale, le changement opéré en Centrafrique est une prise de pouvoir de manière anti-constitutionnelle.
 
 Au cours d'une conférence de presse organisée le samedi 24 mai 2003 à l'Immeuble Petroca, le Premier Ministre, chef du gouvernement a expliqué aux journalistes présents, les raisons qui ont motivé son dernier périple africain et européen.

Abel Goumba a d'abord étonné par sa ponctualité. La rencontre avec les journalistes a commencé comme prévue à 11 h 00.

La plupart des questions orientées sur les motivations réelles du déplacement du Premier Ministre et les résultats n'ont pas manqué de toucher le chef du gouvernement qui a par ailleurs reconnu leur pertinence. Des questions qu'on qualifierait de subsidiaires ont également égayé l'assistance par les réponses parfois humoristiques apportées par le Pr. Goumba. Par exemple quand un journaliste lui demande comment il juge son sobriquet de Professeur Tournesol. Avec un léger sourire au coin des lèvres, le Premier Ministre déclare que cela ne lui fait ni chaud ni froid. Ceux qui le qualifient ainsi se sont trompés de temps et de personne. Pour le Premier Ministre, seuls les actes leur démontreront le contraire.

C'est à l'étranger, déclare le Professeur Goumba, que nous avons pris conscience des enjeux réels et de l'intérêt de la mission. Pour la communauté internationale, le changement opéré en Centrafrique est une prise de pouvoir de manière anti-constitutionnelle. Les hommes politiques, les diplomates et différentes personnalités de tout bord, nous ont félicité d'avoir entrepris cette tournée d'explications, a affirmé le Premier Ministre. A ses interlocuteurs, M. Goumba a déclaré que ce qui s'est passé en RCA n'est pas un coup d'Etat. C'est plutôt une insurrection populaire, car les centrafricains sans exclusive se sont soulevés contre le pouvoir honni de Patassé. Puis il a expliqué qu'en RCA, il n'y avait plus d'Etat. Il n'existait que de nom. Quand on dit que le mouvement du 15 mars a été conduit par un militaire, le général Bozizé, Goumba répond qu'après novembre 2001, François Bozizé avait été cassé de son grade et renvoyé dans sa famille.

Ces explications selon les membres de l'Assemblée  ACP liée à l'Union Européenne constituent au moins 90% des efforts à déployer par le nouveau régime pour la reconnaissance de la RCA par la communauté internationale.

Cette reconnaissance primordiale doit commencer par nos voisins membres de la CEMAC. C'est d'ailleurs pour cela qu'à la fin de sa visite, il a tenu à faire le détour de Libreville d'abord et Brazzaville ensuite. C'est d'ailleurs dans la capitale congolaise que le Premier Ministre a appris la grogne des conducteurs de taxi et de bus. Loin de s'affoler, le Pr. Goumba a qualifié cette action de signe de maturité et de compréhension.

Les relations avec les institutions de Bretton Woods n'ont pas manqué d'être évoquées. Le Premier Ministre a déclaré qu'en sa connaissance, aucun protocole d'Accord n'a été signé avec le FMI et la Banque Mondiale en vue de payer les salaires. Selon le Pr. Goumba, la RCA a les moyens pour payer les salaires. L'argent  des institutions de Bretton Woods doit servir à développer le pays et non à payer les salaires qui sont des charges de souveraineté.

Les difficultés de l'heure sont créées par les réseaux mafieux. Un fonctionnaire par des artifices réussit à percevoir deux (2) salaires sans que l'Etat ne s'en aperçoive. D'autres profitent des salaires des fonctionnaires décédés. Et le Pr. Goumba d'expliquer qu'on ne peut pas balayer en deux (2) mois des réseaux tissés depuis trente (30) ans. Enchaînant sur les réseaux mafieux, le Premier Ministre a donné un coup de pied dans la fourmilière. Ce n'est pas parce qu'on a été élu démocratiquement qu'il faut faire souffrir son peuple. La démocratie centrafricaine n'était que de façade. Depuis douze (12) ans, a fait remarquer M. Goumba, il n'y a jamais eu d'élections municipales, le dialogue et la tolérance qui favorisent l'alternance faisaient défaut. La bonne gouvernance et le respect des droits de l'homme n'étaient que des vœux pieux. A partir de tous ces manquements, il fallait réfléchir à une sortie de crise. Dans notre cas, dit le chef du gouvernement, le mode de sortie de crise est assez original. La conjonction d'efforts entre civils et militaires a débouché sur les événements du 15 mars 2003. Le Premier ministre a ainsi clos ce chapitre : `'Nous n'avons pas voulu affronter les banyamulengués et les libyens pour éviter un carnage au sein de la population''. Abel Goumba a reconnu que le pays souffre en ce moment. Tous les projets sont suspendus et sont liés à cette épineuse question de la reconnaissance. Les efforts qui sont entrepris en ce moment, a déclaré le Premier Ministre, et qui sont diversement interprétés ne visent que cette reconnaissance. Cette reconnaissance permettra de drainer des projets et de réactiver les anciens (suspendus qui profitent énormément à la population). Il a cité le cas du Japon dans divers domaines et de l'Union Européenne qui est un partenaire privilégié qui intervient dans le domaine de l'entretien des routes.
 La RCA doit  présenter un nouveau visage où la transparence doit être de mise. Il ne faut plus tomber dans les travers de l'époque Patassé. Ce dernier par ironie était appelé le grand `'Boubanguéré'', car il s'accaparait de tout. Le diamant, l'or, le bois et nos richesses étaient bradées. S'agissant de la durée de la transition, Abel Goumba a expliqué les difficultés actuelles. Le Conseil National de Transition ne pose pas problème, puisque sa première séance a été convoquée le 30 mai 2003. Pour organiser les élections, a expliqué le Premier Ministre, il faut effectuer le recensement administratif et établir la liste électorale. Cela a besoin du temps et de l'argent. Ce qui réconforte et qui augure des lendemains meilleurs, c'est que les partis politiques ne sont pas dissouts, la liberté d'aller et de venir est garantie. Si le délai est fixé à dix huit (18) mois, c'est vrai, mais il faut aussi tenir compte de certains paramètres telle que l'introduction du bulletin unique qui avait été adopté par l'Assemblée Nationale que Patassé a rejeté pour des raisons qui lui sont propres. Le Premier Ministre a rassuré la presse que personne ne peut se passer à l'heure actuelle d'élections comme mode de désignation des responsables à la tête de l'Etat.

Evoquant la déclaration des biens des Ministres qu'il avait annoncé à son entrée en fonction, le chef du gouvernement a expliqué le retard pris par les ennuis judiciaires de Maître Mbokani qui avait été choisi comme Notaire. L'Etat est en train de rechercher un autre Notaire.

Une question, il faut l'avouer, a mis le Premier ministre dans un embarras certain. Pourquoi avait-il effectué son voyage sans une équipe de la presse ? Franc et direct, Abel Goumba a reconnu la faille. Il a expliqué qu'il n'y avait pas pensé et ses collaborateurs non plus.Si ce voyage avait été suivi par une équipe de la presse, les nombreuses interrogations que se posait la population auraient pu être balayées par une couverture correcte et exacte de ce périple africain et européen du Premier Ministre, chef du gouvernement.
Sereze
(document: Kodro)

NB : Une rencontre entre les nouvelles autorités de Bangui et l'Union Européenne est prévue le 12 juin à Bruxelles pour discuter de la reprise de la coopération.


Actualité Centrafrique de sangonet - Dossier 16