Une semaine agitée en Centrafrique où la grogne atteint les enseignants et le corps parlementaire

La semaine du 12 au 17 janvier 2004 est marquée par le faux pas du ministre délégué aux Finances, Mohamed Mahadi Marboua, la grogne des enseignants, la fin des travaux du Tribunal militaire permanent sur les affaires de meurtres et la note des évêques tour à tour rassurante et inquiétante au sujet de l'insécurité. Le syndicat des enseignants prône l'arrêt du travail d'autant plus que leur employeur dit clairement que "l'Etat est en cessation de paiement".  D'une manière inédite le personnel du parlement de transition (CNT) entre en grève, réclamant son dû.

Deux décisions politiques sont à noter :
1) M. Henri Maïdou (conseiller spécial à la présidence) devient conseiller présidentiel aux droits de l'Homme et à la bonne gouvernance ;
2) une "brigade mobile d'intervention et de vérification" est créée sous l'autorité du ministre des Eaux, Forêts, Chasse et Pêche.

Trois termes reviennent constamment aux lèvres des centrafricains : l'insécurité, les arriérés de salaires, la mortalité. Le jour où la République aura répondu véritablement à ces préoccupations, les centrafricains reparleront de la confiance, d'investissements, de la bonne santé économique. La bonne gouvernance aura bien son sens.

A la dernière minute, et plus souriant, M. Mohamed Mahadi Marboua, le délégué aux finances, annonce ce vendredi 16 janvier 2004 aux fonctionnaires le versement de leur salaire d'octobre 2003.


Versement du solde des salaires d'octobre aux fonctionnaires de RCA

BANGUI, 16 jan 2004 (AFP) - 20h18 - Les fonctionnaires centrafricains dont les salaires sont versés aux guichets des banques de Bangui ont touché vendredi leur paie du mois d'octobre 2003, comme promis par le ministre délégué aux Finances, Mohamed Mahadi Marboua, a constaté un journaliste de l'AFP.

Nombre d'entre eux se pressaient dans les établissements bancaires dès l'ouverture des portes dans la matinée, et quelques bousculades ont été constatées.

Au moins 3.000 fonctionnaires centrafricains, sur près de 20.000, sont payés par virement bancaire et attendaient de percevoir leur salaire d'octobre 2003, que leurs collègues payés aux guichets du Trésor avaient touché dès décembre 2003.

Mohamed Mahadi Marboua avait promis le 10 janvier que les derniers fonctionnaires à n'avoir pas touché leur mois d'octobre seraient payés sous huit jours.

Deux jours auparavant il avait annoncé que l'Etat n'était pas en mesure de payer les salaires à échéance contrairement aux engagements du régime de transition, mis en place par le président François Bozizé le 15 mars 2003.

Les salaires avaient été régulièrement versés entre avril et août 2003, date à laquelle les paiements avaient commencé à accuser du retard. Les salaires de novembre et décembre 2003 n'ont pas encore été payés.


Arriérés: le personnel du Parlement centrafricain de transition en grève

BANGUI, 16 jan 2004 (AFP) - 14h42 - Le personnel du Conseil national de transition (CNT), le Parlement de transition en Centrafrique, bloquait vendredi matin l'entrée du siège de l'institution, pour réclamer le versement de leurs arriérés de salaires, a constaté un journaliste de l'AFP.

Debout derrière le portail d'entrée du Palais du Parlement, près d'une cinquantaine de cadres, notamment des proches collaborateurs du président du CNT, des membres du bureau de l'organisme et des responsables administratifs, ainsi que des employés, ont empêché l'entrée de tout véhicule.

Les salariés du CNT, dont le régime est différent de celui des fonctionnaires cumulent jusqu'à cinq mois d'arriérés selon les catégories. Les Conseillers nationaux (parlementaires) supportent eux aussi des arriérés, a indiqué un cadre gréviste à l'AFP.

"Puisque le gouvernement veut maintenant réagir au coup par coup (dans la paiement des salaires, ndlr), nous allons procéder également au coup par coup pour qu'il réagisse", a expliqué à l'AFP un cadre sous le couvert de l'anonymat.

Il faisait référence aux déclarations début janvier du ministre délégué aux Finances, Mohamed Mahadi Marboua, annonçant que le gouvernement n'était plus en mesure de payer les salaires des fonctionnaires à échéance, comme le régime de transition, mis en place par le président François Bozizé depuis sa prise de pouvoir le 15 mars 2003, s'y était engagé.

Les salaires des fonctionnaires avaient été régulièrement versés entre avril et août 2003, avant d'accuser des retards de paiement. Ceux de novembre et décembre 2003 n'ont pas encore été payés.


Centrafrique: appel à venir "pleurer sur les ruines de la République"

BANGUI, 16 jan 2004 (AFP) - 14h19 - Un syndicat d'enseignants a appelé l'ensemble des salariés du secteur public centrafricain, à se rassembler samedi matin à la Bourse du travail à Bangui, "pour pleurer sur les ruines de la République".

"Camarades enseignant(e)s, camarades travailleurs, tous à la bourse du travail le samedi 17 janvier à partir de 09H00 (08H00 GMT) pour pleurer sur les ruines de la République", écrit l'Interfédérale des Enseignants de Centrafrique (IFEC) dans un "Appel aux travailleurs de l'Etat centrafricain".

Début janvier "le ministre délégué aux Finances déclarait à qui veut l'entendre que l'Etat centrafricain est en cessation de paiement (...) (et) qu'il était désormais difficile sinon impossible pour le gouvernement, de faire face au paiement régulier des salaires des fonctionnaires et agents de l'Etat", rappelle l'IFEC.

"Le concept (développé par le président François Bozizé, ndlr) +Kwa na Kwa+ (+le travail rien que le travail+) est désormais vidé de tout son contenu. Chacun doit travailler à son rythme car qui paye commande", poursuit le syndicat.

Le 8 janvier 2004, Mohamed Mahadi-Marboua avait annoncé que le gouvernement n'était pas en mesure de payer les salaires des fonctionnaires à échéance, comme le régime de transition, mis en place par le président Bozizé depuis sa prise de pouvoir le 15 mars 2003, s'y était engagé.

Les salaires avaient été régulièrement versés entre avril et août 2003, date à laquelle des retards de paiements avaient été constaté. Les salaires de novembre et décembre 2003 n'ont pas encore été payés.

Le problème du paiement des salaires des fonctionnaires est récurrent depuis les années 80 en Centrafrique. Les salariés de la fonction publique, tous secteurs confondus, y ont cumulé jusqu'à 36 mois d'arriérés sous les présidences d'André Kolingba (1981-93) et de Ange-Félix Patassé (1993-mars , renversé le 15 mars par François Bozizé.


Centrafrique: fin de la première session du Tribunal militaire depuis 1997

BANGUI, 16 jan 2004 (AFP) - 11h31 - Le Tribunal militaire permanent de Centrafrique (TMP), qui siège théoriquement tous les trois mois, a clos sa première session depuis huit ans après avoir jugé 24 dossiers sur les 27 qui lui étaient présentés, a annoncé vendredi la radio nationale.

Le TMP, compétent sur l'ensemble du territoire pour les infractions commises par des militaires, qui n'avait pu siéger depuis 1997 en raison des troubles militaro-politiques successifs qui ont agité le pays, a clos le 13 janvier ses débats entamés le 15 décembre.

Parmi les 24 dossiers jugés figuraient notamment des affaires d'assassinat, d'homicides volontaires et involontaire, de coups et blesssures volontaires, de viol, de détention et arrestation arbitraires.

La plus lourde peine, travaux forcés à perpétuité, a été prononcée contre un soldat reconnu coupable d'homicide volontaire et de vol d'arme de guerre.

Le TMP a également condamné à 20 ans de travaux forcés le soldat qui avait abattu le procureur Jean-Didier M'Baïnani en décembre 2002 dans un quartier de Bangui.

Cinq soldats ont également été condamnés chacun à cinq ans de prison ferme pour le viol d'une jeune femme le 28 octobre 2003, une affaire que le président François Bozizé avait personnellement suivi.

La plupart des militaires jugés lors de cette session étaient âgés de 18 à 25 ans et issus des rangs des "libérateurs" - nom donné aux soldats ayant accompagné 15 mars 2003 - sans connaissances et expérience réelles du métier des armes.

Le comportement de ces "libérateurs" a récemment provoqué l'exaspération de la population et a été dénoncé par des associations centrafricaines de défense des droits de l'Homme.

Trois dossiers, dans lesquels figuraient des civils, n'ont pu être jugés, en raison de l'incompétence du tribunal - qui ne juge que les militaires - et ont été renvoyés devant d'autres juridictions.

L'affaire des assassinats de Kembé (500 km à l'est de Bangui), fin 1999, a notamment été renvoyée devant la Cour criminelle, après l'inculpation dans ce dossier de l'ex-ministre centrafricain de la Défense, Jean-Jacques Démafouth.


Un conseiller présidentiel aux droits de l'Homme et à la bonne gouvernance en Centrafrique

BANGUI, 16 jan 2004 (AFP) - 9h30 - Le président centrafricain, François Bozizé, a nommé jeudi soir un conseiller présidentiel "chargé des droits de l'Homme et de la bonne gouvernance", a annoncé la radio nationale.

Il a nommé à ce poste Henri Maïdou, qui était jusqu'alors Conseiller spécial du chef de l'Etat.

Henri Maïdou, ancien Premier ministre de l'empereur Bokassa 1er, entre 1978 et 1979, puis vice-président de la République, entre 1980 et 1981, sous la présidence de David Dacko, avait été désigné par Ange-Félix Patassé Coordinateur adjoint du Dialogue national que l'ancien président projetait d'organiser en novembre 2002.

Ce Dialogue n'avait pu être organisé et a finalement été réuni en septembre et octobre derniers, par le régime Bozizé qui a renversé M. Patassé le 15 mars


RCA: L'affaire des assassinats de Kembé renvoyée devant la Cour criminelle

BANGUI, 15 jan 2004 (AFP) - 12h57 - Le Tribunal militaire permanent de Centrafrique a annoncé jeudi avoir renvoyé devant la Cour criminelle de la République centrafricaine (RCA) l'affaire des assassinats de Kembé, fin 1999, dans laquelle il a inculpé l'ex-ministre de la Défense, Jean-Jacques Démafouth.

"Le tribunal militaire permanent juge uniquement les militaires. En raison de l'implication dans l'affaire des assassinats de Kembé de M. Démafouth qui est un civil, le TMP se déclare incompétent, et renvoie l'affaire devant la Cour criminelle", a expliqué jeudi le commissaire du gouvernement (équivalent du procureur) auprès du TMP, Alain Ouaby Békaï lors d'un entretien à la radio nationale.

Le TMP a lancé mardi un mandat d'arrêt international contre l'ex-ministre, qui vit en France depuis fin 2002.

"A l'audition des témoins, le tribunal s'est rendu compte que le nom de M. Démafouth revenait à chaque fois, comme celui de la personne qui a préparé et orchestré l'assassinat. C'est ainsi que nous avons demandé son inculpation. Le tribunal nous a suivi et a décerné le mandat d'arrêt international contre lui", a-t-il ajouté.

Le TMP jugeait ses derniers jours l'affaire des assassinats de Kembékm à l'est de Bangui), commis dans la nuit du 18 au 19 novembre 1999 dans le village natal de l'ancien président André Kolingba, par un commando de l'unité de sécurité présidentielle (USP) de son successeur Ange-Félix Patassé, aujourd'hui déchu.

Ce commando avait assassiné un ex-lieutenant des Forces armées centrafricaines (Faca), puis enlevé, torturé et exécuté six autres personnes dont le commandant de la brigade de gendarmerie de Kembé.

"Les corps des victimes avaient été mutilés, ce qui démontre la gravité des crimes pour lesquels nous estimons que M. Démafouth doit être entendu. S'il ne se reproche rien, qu'il se mette à la disposition de la justice de son pays", a souligné M. Ouaby-Békaï.

Ministre de la Défense de M. Patassé entre 1999 et 2001, M. Démafouth, avait été arrêté, encore ministre, en 2001 pour son implication présumée dans une tentative de coup d'Etat puis jugé et acquitté au bénéfice du doute en


Création d'une brigade mobile forestière en Centrafrique

BANGUI, 14 jan 2004 (AFP) - 19h59 - Le gouvernement centrafricain a créé sous l'autorité du ministre des Eaux, Forêts, Chasse et Pêche, une "brigade mobile d'intervention et de vérification", selon un arrêté ministériel lu mercredi à la radio nationale.

Cette brigade est composé de deux unités ayant pour mission la vérification du respect des différentes dispositions légales, l'une en matière d'exploitation forestière, l'autre en matière de chasse et de pêche.

"Chaque unité est composée de quatre officiers des Eaux, Forêts, Chasse et Pêche (...) de deux agents des Finances, de deux agents de la Douane et d'un élément de la gendarmerie ayant la qualification d'officier de Police judiciaire (OPJ)", précise l'arrêté ministériel.

La création de cette brigade, qui "rend compte mensuellement de ses activités sur le terrain" au ministre de tutelle, correspond aux recommandations des Etats généraux du secteur forestier tenus en septembre dernier à Bangui.

La plupart des dispositions légales dans le domaine des Eaux et Forêts, de la chasse et de la pêche n'étaient pas appliquées en Centrafrique, faute d'une structure de contrôle.


Mandat d'arrêt international contre l'ex-ministre centrafricain Demafouth

BANGUI, 14 jan (AFP) - 14h16 - Le tribunal militaire centrafricain a lancé mardi un mandat d'arrêt international pour complicité d'assassinat contre l'ex-ministre centrafricain de la Défense, Jean-Jacques Démafouth (1999-2001), qui vit en France depuis fin 2002, a annoncé mercredi la radio nationale.

Jean-Jacques Démafouth est accusé d'avoir commandité le meurtre d'un ex-lieutenant des Forces armées centrafricaines (FACA), Antoine Gbodo, le 18 novembre 1999 à Kembé, village natal de l'ancien président André Kolingba (1981-1993) à 500 km à l'est de Bangui.

Six autres personnes, dont le commandant de la brigade de gendarmerie de Kémbé, avaient également été torturées et exéar un commando de l'Unité de sécurité présidentielle (USP) du chef de l'Etat de l'époque, Ange-Félix Patassé, et dont le procès à huis clos se déroule actuellement devant le tribunal militaire à Bangui.

M. Démafouth avait été arrêté en septembre 2001 après avoir été accusé d'avoir préparé un complot pour renverser M. Patassé, dont il était le ministre de la Défense, puis acquitté en 2002 par la Cour criminelle au bénéfice du doute.


Les évêques centrafricains dénoncent les exactions des "hommes en tenue"

BANGUI, 13 jan 2004 (AFP) - 13h34 - Les évêques centrafricains ont dénoncé les nombreuses exactions des "hommes armés et en tenue" depuis le coup d'Etat du général François Bozizé le 15 mars 2003, dans un message publié mardi à l'issue de la conférence épiscopale à Bimbo, au sud de Bangui.

"Dans les villes, sur les routes, dans l'arrière-pays, des hommes armés et en tenue imposent leur loi", ont déploré les évêques centrafricains après leur conférence qui s'est tenue du 2 au 11 janvier.

"Avec vous, nous avons pensé que les violences et les exactions subies pendant les évènements qui ont précédé et accompagné le changement de régime allaient cesser. Hélas, nous devons tous et tous les jours, faire face à de multiples tracasseries, sinon à de graves dangers", ont-ils ajouté.

"Il est temps d'ouvrir le pays à un avenir meilleur, quant à la sécurité, au développement intégral, au sens de la Nation, et à l'engagement civique", ont-il poursuivi tout en déplorant le manque de structures hospitalières et scolaires.

Lors de la présentation des voeux du clergé, le 9 janvier, l'archevêque de Bangui, également président de la conférence épiscopale de Centrafrique, avait estimé que des progrès notables avaient été faits pour endiguer l'insécurité généralisée en Centrafrique.

Mais Mgr Paulin Pomodimo avait tenu à rappeler que des violences "perpétrées contre la population, par les hommes en tenue" persistaient en province.

Le comportement des "libérateurs" - nom donné aux soldats ayant accompagné François Bozizé dans sa prise de pouvoir - a récemment provoqué l'exaspération de la population de Bangui et a été dénoncé par certaines associations centrafricaines de défense des droits de l'Homme.

Le 2 janvier, un adolescent avait notamment été mortellement blessé par un garde du corps de Mme Monique Bozizé, épouse du président centrafricain.

Le président Bozizé a ces derniers temps radié et ordonné le défèrement devant la justice de plusieurs militaires coupables d'exactions.

Cinq soldats ont ainsi été condamnés début janvier à cinq ans de prison ferme chacun pour le viol d'une jeune femme.

Le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, s'était déclaré le 8 janvier "gravement préoccupé par la recrudescence des actes de viols, de braquages et d'atteintes au droit à la vie perpétrés dans l'arrière pays (centrafricain) et à Bangui".

"La maîtrise de la situation sécuritaire demeure un préalable incontournable au fonctionnement normal de l'Etat, au bon déroulement de la transition et à l'organisation des prochaines consultations électorales", avait souligné le secrétaire général.

Actualité Centrafrique de sangonet - Dossier 18