JEAN-MARC SIMON PARTIRA, PARTIRA PAS ? - "Je t'aime moi non plus"

L'Ambassadeur Jean-Marc Simon haut représentant de la France auprès du gouvernement centrafricain est donné partant depuis 1998.

Cette année-là, à l'occasion du 14 juillet, ''l'incontournable'' Jean-Marc Simon a lui-même indiqué qu'il partait pour la République Démocratique du Congo de Laurent Désiré Kabila la même année après ses adieux aux autorités centrafricaines comme le veut les ''us et coutumes'' en diplomatie. Deux (2) années franches se sont écoulées, Jean-Marc Simon parait inamovible dans la Résidence de France à Bangui avec vue superbe sur le fleuve Oubangui et la Ville de Zongo voisine de la Capitale centrafricaine.

Les raisons de son maintien à Bangui serait que le Président Kabila le trouverait indésirable sur les conseils semble-t-il de son ami Ange Félix Patassé. Du moins du temps où Kabila et Patassé vivaient encore leur éphémère lune de miel. Les autorités françaises ont du remplacer Jean-Marc Simon à Kinshasa par l'Ambassadeur français en poste au Cameroun (Yaoundé).

De sources diplomatiques, nous venons d'apprendre que l'inamovible Jean-Marc Simon est de nouveau donné partant mais pour la France. Son remplaçant déjà désigné viendrait de Bogota en Amérique Latine. Bogota étant la capitale bien connue de la Colombie ...

En principe, après ses vacances méritées dans l'exagone, Jean-Marc Simon devrait plier bagages au plus tard le 10 septembre 2000 pour Paris. Peut-être qu'ainsi le nouvel ambassadeur affecté à Bangui, pourrait mettre sa riche expérience au pays de la drogue, du blanchiment de l'argent sale et de la mafia au service du gouvernement centrafricain confronté aux scandales politico-financiers et à la mafia.

Il nous aiderait sans doute beaucoup à combattre la corruption généralisée, la fraude, et la mauvaise gouvernance qui privent le Trésor public des ressources nécessaires à la résorption des graves problèmes sociaux auxquels est confronté le pays depuis 1993 et singulièrement depuis la réélection du Président Patassé avec la bénédiction des ''amis français'' de ce dernier ...

Seulement voilà, Jean-Marc Simon n'a pas du tout l'intention de quitter les douces et poisseuses rives de l'Oubangui qui inspirent rêves et poésie. Il serait en train de profiter de ses vacances parisiennes pour activer ses lobbies du Quay d'Orsay, faisant valoir l'idée selon laquelle la situation de la République Centrafricaine est pour le moins confuse et incontournable et qu'elle demande un doigté pour son apaisement. Il se verrait donc bien maintenu à Bangui jusqu'à janvier 2001 parce que détenant le doigté qui manquerait à d'autres diplomates français. Jean-Marc Simon serait le parfait diplomate irremplaçable donc ! ... Discutable.

En vérité, Jean-Marc Simon est décidé à aider le Président Patassé jusqu'au bout quoiqu'il arrive. De plus, il craint de se retrouver au Quai d'Orsay sans grandes fonctions. Il préfère jouer donc sa carrière diplomatique sur le dos des relations franco-centrafricaines qui a tant besoin d'un souffle nouveau et d'une meilleure lisibilité que ce n'est le cas depuis l'arrivée à Bangui de l'Ambassadeur Jean-Marc Simon que les Centrafricains ont de plus en plus tendance à considérer comme le ''SUPER DIRECTEUR DE CABINET'' du Président Centrafricain. Un titre flatteur mais agaçant quand on connaît la personnalité du Président Patassé incontournable et versatile à souhait. Jean-Marc Simon le connaît trop bien en effet ...

Alors, Jean-Marc Simon, partira ou partira pas ? C'est là la question !

Mais la réponse dépend de la sagacité des autorités françaises qui on peut-être une autre vision de la situation réelle qui prévaut en République Centrafricaine où certains intérêts occultes prennent le pas sur les intérêts mêmes du peuple centrafricains et des relations franco-centrafricaines.

Ikonga

(LE DEMOCRATE Nº 327 du 17 au 18 Août 2000, page 6)

 


Ce que je pense

LA FRANCE ET NOUS
''Je t'aime. Moi non plus ...''

Je ne comprends pas que les Centrafricains ne comprennent pas que la RCA continue de faire partie de ce qu'il est convenu d'appeler le ''pré-carré français'' en Afrique Sub-saharienne. Peu importe si du point de vue des réalisations économiques d'envergure dans le monde, la France, en fonction de ses enjeux et de ses intérêts de toute nature, a les yeux plutôt tournés vers d'autres zones d'influence au rendement sans doute plus palpable et bénéfique à l'hexagone.

On n'oubliera jamais que depuis le Général De Gaulle qui avait une vision claire de la grandeur et du rayonnement de la France dans le monde, pour n'importe quel dirigeant français (qu'il soit de gauche ou de droite) : " la France n'a pas d'amis dans le monde, elle n'a que des intérêts ". Point n'est besoin de gloser sur cette doctrine politique gaulliste de la France toute entière qui a largement fait le tour du monde, sauf chez les naïfs qui s'imaginent encore que la " philanthropie " serait à la base de la doctrine de la coopération française dans le monde, jamais claire mais toujours opportuniste.

A l'époque de la fameuse " guerre froide " marquée par le conflit Est-Ouest sur fond d'antagonisme idéologique et politique entre le communisme représenté par " l'Ours Soviétique " et ses pays satellites du " Pacte de Varsovie ", la Chine, l'Albanie, les intérêts géo-stratégiques et politiques en Afrique étaient manifestes et se traduisaient par la présence militaire française dans des " zones tampons " comme la Corne de l'Afrique (Djibouti), le Sénégal (Dakar), la Côte d'Ivoire (Abidjan), le Gabon (Libreville), le Tchad (N'Djaména), la République Centrafricaine (Bangui). Ces positions éminemment stratégiques permettaient à la France d'avoir un droit de regard direct sur tout ce qui pouvait se passer au Nord, au Sud, à l'Est et à l'Ouest de l'Afrique avec un réel contrôle sur l'Océan Atlantique et la Mer Rouge notamment.

Ainsi donc, la République Centrafricaine se trouvait au cœur du dispositif militaire et stratégique français en Afrique pour les raisons évoquées plus haut. Depuis la chute du mur de Berlin, suivie de l'écroulement de l'Empire Soviétique, les données ont changé et non sans pratiquer un certain " cartierisme ", (la France d'abord ...). La France, pour les besoins de son rayonnement, a trouvé une nouvelle ère d'expansionnisme représentée par les pays de l'Asie du Sud-Est et les orphelins du communisme de l'Europe de l'Est.

Ainsi, l'Inde, le Pakistan, la Thaïlande, la Chine, le Cambodge ... pour l'Asie du Sud-Est et la Russie, la Pologne, la Slovaquie, la République Tchèque, la Roumanie ... pour l'Europe de l'Est, représentent aujourd'hui pour la France des zones d'intérêts à la fois politiques, économiques et stratégiques. Il en découle que l'Afrique francophone est quasiment délaissée au profit de nouvelles zones d'influence, même si la France garde les liens ombilicaux évidents avec la plupart de ses ex-colonies d'Afrique.

Ce sont là des données objectives dont il faut tenir compte dans l'appréciation des relations franco-centrafricaines en ce début du 3è millénaire. Certes, de De Gaulle à Chirac en passant par Pompidou, Giscard d'Estaing et Mittérand, les relations franco-centrafricaines ont eu des hauts et des bas en fonction de l'équipe dirigeante en Centrafrique. Ainsi, si le jeune David Dacko passait pour un homme d'Etat débonnaire et manipulable, mais gênant quand même pour avoir reconnu la Chine populaire avant la France et avoir entretenu des relations économiques avec Israël sans autorisation préalable du pays colonisateur, Bokassa son " tombeur " agaçait le Général De Gaulle par ses frasques et autres bouffonneries. Sachant souffler le chaud et le froid dans les relations franco-cantrafricaines, l'ancien soudard Jean-Bedel Bokassa parvenait parfois à obtenir ce qu'il voulait notamment d'un Valéry Giscard d'Estaing qu'il considérait comme son " très cher parent ". Parties de chasse et de safari dans l'Avakaba et couronnement coûteux d'un Empereur sanguinaire et tueur d'écoliers, sont les meilleurs souvenirs de l'ère Giscard auréolée des diamants de Bokassa.

Bokassa et Kolingba ont eu l'honneur de recevoir en visite officielle les Présidents Giscard pour le premier et Mitterand pour le second.

Il faut dire que les relations particulières entre Christophe Mittérand, Conseiller aux affaires africaines et le chef de cabinet particulier du président Kolingba, M. Yando Martin, ont beaucoup servi le régime militaire de l'époque qui a pu bénéficier de quelques égards remarqués de la France. Mitterand a bien dansé la " Rumba de Bangui " dans les bras de Mireille Kolingba, la première dame centrafricaine de l'époque, sur les bords de l'Oubangui ...

Avec Patassé et Chirac, bien des choses ont changé. " Le président démocratiquement élu " un peu bokassiste dans l'âme, a plusieurs fois agacé les autorités françaises par ses déclarations fracassantes et agaçantes du genre " je ne tendrai jamais la main de mendiant ", qui est d'ailleurs la meilleure manière théâtrale de tendre la main de mendiant ... Il n'en demeure pas moins que Chirac qui est issu de la " cuvé gaulliste " aux relents colonialistes, n'a pas hésité un seul instant à voler au secours de Patassé ébranlé par trois (3) mutineries qui étaient à un micron de l'emporter et son fauteuil présidentiel.

Il n'en demeure pas moins également que le locataire du Palais de la Renaissance qui a l'art de la manipulation de type bolchevik, a maintes fois accusé la France d'avoir chercher à le renverser par un coup d'Etat militaire en armant et en soutenant les ex-mutins. L'ambassadeur Jean-Marc Simon honni du camp patassiste et des extrémistes du MLPC, passait à leurs yeux comme un " putschiste " spécialement chargé de renverser Patassé afin de ramener au pouvoir le général Kolingba. Affabulations ou pitreries politiques, il s'est trouvé que le " honni Jean-Marc Simon " s'est employé depuis la fin des mutineries à rentrer dans les bonnes grâces de celui qui, hier encore, le soupçonnait d'être la source de tous ses malheurs.

Ainsi vont les relations franco-centrafricaine au rythme permanent de " Je t'aime, moi non plus ... ". Quoi de normal que Jean Marc Simon fasse aujourd'hui partie du Lobbie français pro-patassiste qui a tout fait pour l'imposer aux Centrafricains comme le " moindre mal " alors qu'à l'évidence, Patassé n'est plus ni moins " le mal absolu " de la République Centrafricaine ? D'autant que malgré la grave crise de confiance que traverse le pays sur fond de tension sociale criante, l'ambassadeur de France se fait toujours indispensable et capable d'atténuer une situation qu'il ne contrôle d'ailleurs plus. Controversé dans les milieux du pouvoir et de l'opposition qu'il s'emploie à torpiller avec cynisme au niveau de l'Elysée et du Quai d'Orsay, il chercherait encore a faire prolonger sa mission en Centrafrique, histoire d'accompagner durablement le président Patassé et son régime plus que jamais impopulaire et anti-social. Toute chose à une fin, il devra bien se résoudre à s'en aller d'ici au mois de septembre. La République française n'est pas en manque de diplomates talentueux et au-dessus du soupçon ...

Il est urgent que le peuple centrafricains voit enfin clair dans les relations entre l'Etat centrafricain et l'Etat français. Il aimerait justement savoir où se trouvent ses intérêts dans ces relations de " coterie diplomatique " à la Jean-Marc Simon.

Le Citoyen.

(LE CITOYEN Nº 903 du Jeudi 17 Août 2000, Page )2


Actualité Centrafrique - Dossier 2