Le mouvement entame sa deuxième semaine de grève: les wali-gara et d'autres corporations viennent lundi gonfler les rangs

La Bourse de travail a fait, samedi 4 novembre 2000, salle comble. Il y a eu deux fois plus de personnes que précédemment. Un mot d'ordre a été repris : le mouvement revendicatif doit se poursuivre. De surcroît, lundi 6 novembre, "pays mort" gagnera d'autres corporations restées silencieuses, entre autres les "Wali-gara" qui viendront s'ajouter aux grévistes de la semaine précédente.

Le syndicat des transporteurs de bus et de taxis - à l'exception des Bus Koffi - ne cachent pas leur crainte devant les menaces et les intimidations dont ils font l'objet; il leur est difficile d'exercer leur droit de grève ou d'apporter leur soutien aux manifestants des autres secteurs socio-professionnels. Cette crainte est fortement ressentie par les leaders politiques et syndicaux : certains parlent d'arrestation et d'enlèvement.

Les 17 mille agents de l'Etat attendent leurs émoluments ou salaires depuis un an à deux ans: précisent-ils, ils ne veulent plus continuer dans ces conditions, alors qu'une minorité affichent un train de vie insolent, des maisons et des véhiculent partout, et quand il y a un malade il va se soigner ailleurs... En un mot, la situation reste incertaine, la vie sociale très dégradée; le pays est en permanence endeuillé et on ne compte plus le nombre des morts. Les Centrafricains passent des veillées de maison en maison et tous les jours. Il est rare de trouver une personne la nuit chez à domicile.

 

Une l'analyse de Kodro :

CENTRAFRIQUE _SOCIAL_ GREVE DES FONCTIONNAIRES : DES MANRUVRES D'INTIMIDATIONS QUI ISOLENT BANGUI

Face à l'ampleur de la grève, à la détermination des travailleurs centrafricains et à l'effort enregistré dans la sensibilisation des instances internationales, le pouvoir centrafricain est en passe d'isoler Bangui.

Les autorités politiques et militaires s'activent afin d'étouffer la voix des travailleurs et de faire tout leur possible pour taire l'écho de leurs revendications.

A cet effet, une réunion au sommet s'est tenue hier, jeudi 02 novembre 2000, en début de soirée dans les locaux de la direction générale de la Gendarmerie nationale centrafricaine. En plus des personnalités de la Primature et de la Présidence, on notait la présence des directeurs généraux de la Gendarmerie et de la Police nationale.

De source militaire, l'objet de cette rencontre portait sur la définition ou le renforcement des dispositifs visant à l'endiguement de la grève générale des fonctionnaires et sur la redéfinition d'une nouvelle stratégie qui viserait à décapiter le mouvement de ses leaders.

Ainsi, "parallèlement à l'acte odieux d'intimidation que les fonctionnaires viennent de subir par l'arrestation et la détention arbitraire de M. Orneindji, des cadres syndicaux et politiques reçoivent des menaces de tous ordres ", constate un député centrafricain qui exige l'anonymat. " Des messages écrits représentant grossièrement les itinéraires souvent empruntés par ces personnalités sont balisés d'armes d'assaut ou de grenades. Le décryptage de tel message est simplifié par des légendes. A tel carrefour un kalachnikov suffirait pour éliminer la cible. Si celle-ci échappe à l'attentat, des grenades ou des miliciens la rattraperaient à tel autre endroit ou au domicile de M. ou Mme X& que la cible fréquente", soutient le parlementaire.

La recrudescence des lignes téléphoniques en dérangement et des délestages électriques orientés sur certains quartiers ou zones résidentielles de Bangui participent de la stratégie d'isolement concoctée par les autorités centrafricaines.

Depuis hier soir, les banguissois ont la mauvaise surprise de ne plus capter les radios Afrique n°1 et France internationale en modulation de fréquence (FM). L'accès en ondes courtes leur permet de passer entre les mailles du verrouillage radiophonique du pays par les autorités centrafricaines.

Le Bmia est en état d'alerte maximum. Basé au Camp Kassaï et commandé par le célèbre officier "katoss ", l'officier Touaguéndé, ce bataillon regroupe exclusivement les originaires de la région de Paoua, des anciens miliciens Karakos ou Balawa, nous confirme une autre source militaire.

La systématisation de la répression contre les travailleurs centrafricains, la société civile et politique témoigne de l'incapacité du président Patassé et du gouvernement d'honorer des promesses faites du bout des lèvres, "les mensonges du pouvoir centrafricain : les trois mois de salaires de Dologuélé, le faux espoir lié à la venue d'une mission du Fmi, le rêve allemand de Patassé ", précise un cadre syndical contacté en fin d'après-midi, "ne sauraient répondre réellement aux attentes des travailleurs, c'est-à-dire au versement des douze mois d'arriéré de salaires que nous ne cessons de réclamer. Ces promesses des autorités ne sont que des promesses sataniques ", complète t-il.

Face à cette campagne de terreur, l'opposition en Exil s'inquiète du comportement suicidaire du régime de Bangui et sensibilise actuellement l'opinion internationale (syndicats, OIT, FIDH, Amnesty) sur les sérieux risques que fait courir à la Centrafrique le régime dictatorial et antisocial de Patassé.

BANGUI ( CENTRAFRIQUE ) 03 novembre 2000 19h00 (kodro@egroups.fr)


Actualité Centrafrique - Dossier 3