Les détenus centrafricains prochainement incarcérés dans une vraie prison

AFP, Bangui, BANGUI, 2 fév 2002 - 9h24 - Les détenus centrafricains, entassés dans des conditions terribles dans les commissariats et gendarmeries de Bangui depuis la destruction de sa prison, devraient connaître une amélioration - relative - de leur sort avec la réhabilitation de cet établissement.

Mais ils n'abandonneront leurs sordides cachots que pour intégrer les cellules de la Maison Centrale de N'Garagba, à l'est de Bangui, une prison de sinistre mémoire en Centrafrique, détruite pendant les mutineries de l'armée en 1996 et 1997.

Environ 31 millions de francs CFA (47.000 EUR) ont été dégagés par le gouvernement centrafricain pour une première phase de travaux de réhabilitation, dont le montant total se chiffrera à 250 M FCFA (380.000 EUR).

Initialement prévue pour s'achever en novembre dernier, cette première phase n'est pas encore totalement terminée.

"A l'allure où vont les travaux, les cellules des commissariats de police et des brigades de gendarmerie pourront être décongestionnées d'ici un mois", croit toutefois savoir la Radio nationale.

Une réhabilitation qui devenait urgente, à en croire le directeur des maisons pénitentiaires, Chrisostome Sambia, qui estime qu'actuellement, "le contrôle des détenus ne peut plus se faire".

Car depuis la destruction de la prison de N'Garagba, les conditions de détention à Bangui sont particulièrement inhumaines et dégradantes.

Sur les portes des cellules d'un commissariat de Bangui, on peut lire, tracées à la peinture rouge, les lettres P ou E: "P" signifie Purgatoire et "E", Enfer.

Les détenus enfermés au "purgatoire" sont autorisés à se soulager dans les toilettes du commissariat, et peuvent sortir de leurs cellules pour recevoir la visite de leurs parents qui leur apportent à manger.

En revanche, les prisonniers en "enfer" cohabitent avec leurs excréments, sont interdits de visite, et n'ont pas accès à l'eau potable.

Parfois, quand ils s'agitent en raison de la soif devenue insupportable, un geôlier arrose la cellule, à travers les aérations, avec un seau ou une cuvette d'eau.

Au début de l'année dernière, une dizaine de détenus sont décédés en quelques jours, après avoir contracté la méningite dans la cellule d'un commissariat, attirant l'attention des autorités politiques et judiciaires sur les conditions de détention.

L'amélioration du sort des détenus banguissois risque toutefois d'être toute relative, la sinistre réputation de la prison de N'Garagba n'étant plus à faire au sein de la population centrafricaine.

Capable d'accueillir plus d'un millier de détenus, elle est connue pour les exactions qui y étaient commises - tortures, exécutions sommaires, enlèvements, disparitions -, notamment sous le règne de l'ex-empereur Jean-Bedel Bokassa 1er (1966-1979).

En janvier 1979, environ 250 personnes, en majorité des jeunes, arrêtés après une manifestation d'élèves qui protestaient contre le port obligatoire de tenues scolaires payantes, avaient trouvé la mort, torturés ou asphyxiés dans les cellules surpeuplées de N'Garagba.


Les nouvelles brèves de Centrafrique (suite 2)