4,5 milliards détournés à la Fondation Follereau en Côte d'Ivoire
Par Seidik Abba, Correspondant de la PANA (Paris, 3 janvier 2002)

Quelque 4,5 milliards FCFA (plus de 6 millions de dollars) destinés à la lutte contre la lèpre ont été détournés de la représentation de la Fondation Raoul Follereau en Côte d'Ivoire, a révélé dans son édition de mercredi, l'hebdomadaire satirique français 'Le Canard enchaîné'.

La somme incriminée aurait été dissimulée sous la forme d'un virement au profit de l'archevêque d'Abidjan avant d'être investie dans des plantations de palmiers et d'hévéas par le représentant local de l'organisation non gouvernementale française spécialisée dans la lutte contre la lèpre en Afrique.

Selon une bonne source, la répétition de tels manquements dans les interventions de l'ONG en Afrique avait motivé en 2001 une enquête de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) qui a révélé des irrégularités en Guinée et à Madagascar.

Dans leur rapport, les enquêteurs du ministère français de la Santé indiquaient que les sommes normalement destinées à la lutte contre la lèpre avaient servi sur la Grande île à financer, à hauteur de 12.300.000 FCFA, "un centre de production de vidéos religieuses", tandis qu'en Guinée, la Fondation prenait en charge le salaire mensuel de la secrétaire de l'évêque de Conakry.

Interrogé sur ces pratiques, le président d'une association de médecins africains vivant en France les a qualifiées de "tout à fait préjudiciables" à l'action de lutte contre la lèpre en Afrique.

"La Fondation Raoul Follereau fait un travail immense de soutien aux malades atteints de lèpre sur le continent africain, il va de

soi que si les faits incriminés sont établis, ils sont de nature à entacher la noble action de cette ONG de réputation mondiale", a déclaré à la PANA, sous couvert de l'anonymat, ce médecin africain travaillant dans un hôpital parisien.

Les enquêteurs de l'IGAS critiquent également l'utilisation, dans les campagnes de collecte, de fonds d'images de personnes arrivées à un stade très avancé de la maladie.

Selon eux, "ces dures images", même lorsqu'elles sont destinées à faire toucher au plus près la réalité à l'opinion publique, ne sont pas respectueuses de la dignité des personnes atteintes par la lèpre.

Sur ce point, leur jugement est partagé par des organisations internationales et divers courants de l'opinion publique qui estiment que les "actions de sensibilisation doivent se situer au juste milieu entre la dignité des malades et le souci de sensibiliser sur l'ampleur de la maladie".

La lèpre, qui avait fait d'énormes ravages dans le monde en particulier en Afrique, est considérée aujourd'hui par l'OMS comme étant une maladie en voie d'extinction grâce aux progrès de l'antibiothérapie.

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