Zimbabwe: Mugabe victorieux au Commonwealth harcèle son opposition

AFP, lundi 04 mars 2002 -17:31:39 - Fort de sa victoire au sommet du Commonwealth qui ne l'a pas sanctionné, le président zimbabwéen Robert Mugabe, à cinq jours de la présidentielle, continue à harceler son principal rival Morgan Tsvangirai dont une réunion avec des diplomates a été interrompue lundi par la police. M. Tsvangirai, président du Mouvement pour le changement démocratique (MDC, opposition), avait prévenu les autorités qu'il rencontrerait lundi matin dans un grand hôtel d'Harare plusieurs ambassadeurs en poste dans la capitale, ainsi que des observateurs à la présidentielle des 9 et 10 mars. La réunion avait débuté depuis une demi-heure, lorsqu'un policier est entré dans la salle et a fait savoir au chef de l'opposition que ce rassemblement était "illégal" et qu'il devait être annulé. "Si des réunions peuvent être interrompues dans un hôtel 5 étoiles, à quoi peut-on s'attendre dans les zones rurales ?", s'est interrogé le porte-parole du MDC, Learnmore Jongwe. Pour justifier son attitude, la police a affirmé que le MDC n'avait pas respecté les conditions qui avaient été posées pour autoriser la tenue de cette rencontre. Le parti d'opposition devait dire à l'avance à la police quels étaient les diplomates participant à la rencontre, de quelle nationalité, s'ils avaient répondu favorablement à l'invitation et accepter en outre la présence dans la salle d'un policier en uniforme. "C'est totalement ridicule que des diplomates étrangers ne puissent pas rencontrer les leaders politiques d'un pays", a déclaré à l'AFP Javier Sandomingo, ambassadeur d'Espagne à Harare, dont le pays assure la présidence tournante de l'Union européenne. "Afin d'obtenir des informations, les diplomates étrangers ont le droit de rencontrer des leaders politiques, du pouvoir et de l'opposition", a-t-il ajouté. Selon lui, M. Tsvangirai voulait juste "expliquer la situation alimentaire" du Zimbabwe et exposer "quels étaient ses plans pour la transition" en cas de victoire à la présidentielle. Une nouvelle loi sur la sécurité et l'ordre public, votée le 10 janvier, interdit tout rassemblement politique sans autorisation préalable de la police. Elle a permis d'empêcher plusieurs dizaines de meetings électoraux et réunions du MDC depuis le début de la campagne électorale. L'annulation de la rencontre entre M. Tsvangirai et les diplomates est survenue peu après la décision des dirigeants du Commonwealth, réunis à Coolum (Australie) de reporter au-delà de la présidentielle leur décision sur d'éventuelles sanctions contre le Zimbabwe, similaires à celles imposées par les Quinze et les Etats-Unis qui accusent M. Mugabe de dérive autoritaire. Tout en exprimant leur "profonde préoccupation devant les actes de violence et d'intimidation qui accompagnent la campagne électorale", les 54 dirigeants des pays membres du Commonwealth n'ont pas réussi à se mettre d'accord sur des sanctions immédiates contre le régime de M. Mugabe. Il s'agit pour lui, absent d'Australie pour cause de campagne électorale, d'une incontestable victoire remportée grâce au soutien des pays africains, au nom du respect de leur indépendance et de leur souveraineté. Une porte-parole du MDC présente en Australie, Sekai Holland, a condamné l'inaction du Commonwealth. "Nous sommes venus au sommet du Commonwealth en espérant une action de sa part et tout ce que nous obtenons ce sont des mots qui confortent Mugabe. Cela va conduire à de nouvelles violences", a-t-elle souligné. Des violences qui, selon les défenseurs des droits de l'Homme, ont fait 31 morts depuis le début de l'année. Soit presque autant que pendant la campagne des législatives de juin 2000, au cours de laquelle les violences politiques liées à celles survenues lors des occupations de fermes de propriétaires blancs, avaient fait 32 morts. Des représentants des partis politiques ont commencé à travailler lundi à la mise au point d'un "code de conduite" pour tenter d'éviter ces violences. "Oui, cela arrive peut-être un peu tard, mais nous espérons que ce sera utile", a reconnu un porte-parole de la Commission électorale du Zimbabwe (ESC).


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