Sécurisation et tension entre armée française - nouveaux rebelles en Côte d'ivoire


L'armée française a évacué 160 étrangers en Côte d'Ivoire
par Hilaire Zon

DUEKOUE, Côte d'Ivoire (Reuters), 01 décembre 2002 10:23 - L'armée française a indiqué avoir terminé dimanche matin l'évacuation de 160 ressortissants étrangers menacés par de nouveaux foyers de rébellion dans l'ouest de la Côte d'Ivoire.

Les étrangers ont embarqué à bord d'avions militaires de Danané et Man, deux villes capturées jeudi par un mouvement rebelle et situées à environ 650 km à l'ouest de la capitale économique Abidjan.

"Les rebelles ont volé mes deux voitures, mon argent, mes téléphones portables", a témoigné un homme d'affaires français qui a passé 19 ans dans la ville de Man. Il n'a pas donné son nom par crainte que ses employés ivoiriens restés sur place ne subissent des représailles.

"J'ai tout laissé derrière moi, mais je suis content d'être sain et sauf", a-t-il dit à Reuters dans un hôtel d'Abidjan.

Les troupes de l'ancienne puissance coloniale ont affronté des forces rebelles samedi alors qu'elles sécurisaient l'aéroport de Man. Les corps de huit rebelles ont été relevés après l'accrochage, qui a fait également un blessé côté français, a précisé l'armée française.

Dans le cadre de l'opération Licorne, les troupes françaises avaient déjà évacué plusieurs centaines de ressortissants étrangers dans le nord du pays après le soulèvement militaire du 19 septembre dernier et les combats qui ont suivi. Ceux-ci ont fait plusieurs centaines de morts en un mois.

RENFORTS DE TROUPES

Depuis la conclusion d'une trêve mi-octobre, les soldats français ont pris en charge la supervision de ce cessez-le-feu globalement respecté le long d'une ligne de front coupant le pays en deux, entre Nord à majorité musulmane et Sud chrétien.

Mais les affrontements qui ont éclaté cette semaine dans l'ouest du pays, revendiqués par un mouvement inconnu jusque-là, le Mouvement pour la Justice et la paix, les ont conduites à procéder à ces nouvelles évacuations.

Les nouveaux rebelles appartiennent à la tribu Yacouba de l'ancien général putschiste Robert Gueï, tué au premier jour du soulèvement à Abidjan. Ils disent vouloir venger sa mort, imputée aux soldats loyalistes du président Laurent Gbagbo, originaire du Sud-Ouest chrétien.

De nombreux témoins soulignent cependant que beaucoup d'assaillants viennent du Liberia voisin, tout proche, et qu'ils s'expriment en anglais, et non en français comme la plupart des Ivoiriens.

L'armée loyaliste a envoyé des renforts lourdement armés vers Man depuis Duekoué, à quelque 80 km au sud, mais les combats ont éclaté samedi dans une zone épargnée jusque-là, encore plus au sud, où les rebelles disent progresser.

Cette nouvelle révolte intervient en plein blocage des négociations entre les rebelles du Nord (Mouvement patriotique de Côte d'Ivoire, MPCI) et le gouvernement à Lomé, capitale du Togo, et menace de faire sombrer le pays, désormais coupé en trois, dans le chaos.

Le Haut Commissariat pour les réfugiés de l'ONU (HCR) a indiqué que près de 50.000 réfugiés en provenance d'autres pays ouest-africains en guerre étaient pris au piège dans les zones touchées par les affrontements.


Côte d'Ivoire: évacuation de Français après de violents accrochages

ABIDJAN (AFP), samedi 30 novembre 2002, 23h16 - L'armée française était engagée samedi dans une opération d'évacuation des Français dans l'ouest de la Côte d'Ivoire, après de violents accrochages avec des rebelles dans lesquels un militaire français a été blessé et 8 rebelles ont été tués, selon un bilan partiel de l'armée française.

L'opération d'évacuation a commencé officiellement dès la nuit tombée et après le début du couvre-feu (fixé de 18h00 à 08h00, heure locale et GMT), dans cette zone déclarée "zone de guerre" après avoir été prise jeudi par deux groupes rebelles.

L'évacuation des ressortissants français de Danané, à 80 km de Man, était terminée samedi soir, a indiqué à l'AFP le porte-parole des troupes françaises de l'opération Licorne, le lieutenant colonel Ange-Antoine Leccia.

"L'évacuation de Danané est terminée, 15 personnes ont été évacuées. Au total sur la région de Man, dont l'évacuation est en cours, nous avons évacué plus de 80 personnes, 80 ou 90 personnes devraient encore être évacuées dans le courant de la nuit", a expliqué le lieutenant colonel Leccia, joint par téléphone.

L'aéroport de Man, qui sert de base pour effectuer l'opération d'évacuation, a été sécurisé dans l'après midi par des hommes du 2ème Régiment étranger parachutiste (REP) et du 1er Régiment d'infanterie de marine (RIMa).

Un poste de commandement opérationnel (PC) dirigé par un lieutenant colonel a été mis en place à l'aéroport, directement sous les ordres du général Emmanuel Beth, chef de l'opération Licorne.

Soldats français et rebelles ont échangé à plusieurs reprises des tirs dans la région de Man depuis vendredi après-midi et "un sergent de la 13è DBLE (Demi-brigade de la Légion étrangère) de Djibouti a été blessé. Ses jours ne sont pas en danger, il a été évacué sur Abidjan et sa famille a été prévenue", a indiqué le lieutenant colonel Leccia.

Concernant les pertes chez les rebelles, un bilan partiel de l'armée française a décompté huit morts.

L'opération militaire française "Licorne" a débuté le 22 septembre pour assurer la protection des ressortissants étrangers en Côte d'Ivoire après l'insurrection de militaires rebelles, le 19 septembre.

Le Mouvement populaire ivoirien du Grand Ouest (MPIGO) et le Mouvement pour la justice et la paix (MJP), deux mouvements apparemment distincts mais qui se réclament tous les deux du défunt chef de la junte militaire, le général Robert Gueï, lui-même originaire de la région de Man, ont revendiqué la prise de Man et de Danané.

Le MPIGO a mis en garde les soldats français contre toute attaque de leurs positions.

"La France doit s'en tenir à son rôle d'observateur, vouloir nous imposer quoi que ce soit sera perçu comme une volonté manifeste de la France de vouloir s'opposer au MPIGO et au MJP", a déclaré le porte-parole du MPIGO Guillaume Gbatto.

Selon ce mouvement rebelle, "la population civile de Danané a été bombardée par un hélicoptère" jeudi après-midi, et 59 personnes, dont 15 femmes et 20 enfants, ont été tués.

Selon un bilan communiqué par le CICR, une vingtaine de blessés ont été soignés à Danané et un mort a été enregistré à l'hôpital de la ville. Les rebelles qui ont pris la ville ont également commis des pillages, a-t-on appris de bonne source.

Aucun combat n'a en revanche été signalé samedi dans la région de Daloa-Vavoua (130 km à l'est de Man) où les troupes du gouvernement avaient lancé deux jours auparavant une offensive contre des positions du Mouvement patriotique de Côte d'Ivoire (MPCI), qui contrôlent le nord du pays.

Une rencontre entre le président ivoirien, Laurent Gbagbo, et son homologue du Burkina, Blaise Compaoré, pourrait être prochainement organisée au Mali pour tenter de trouver une issue politique à la crise, qui s'est compliquée avec l'apparition du nouveau front dans l'ouest du pays.

Un conseiller du président Gbagbo a annoncé vendredi soir à l'AFP que le chef de l'Etat ivoirien se rendrait mardi à Bamako pour une éventuelle rencontre avec M. Compaoré.

Le ministre burkinabè des Affaires étrangères, Youssouf Ouédraogo, a indiqué samedi que son gouvernement "réfléchissait" encore à la date et aux modalités d'une telle rencontre.


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