Cameroun: un quotidien saisi pour un dossier sur la succession de Paul Biya

 

YAOUNDE (AFP), 14 avril 2003, 23:13 - Le quotidien camerounais privé Mutations n'a pu paraître lundi car la disquette permettant son impression a été saisie à l'imprimerie par des gendarmes avant le début des opérations d'impression, en raison d'un dossier de quatre pages consacré à la succession du président camerounais Paul Biya, a-t-on appris lundi au siège de ce journal.

"Le dossier sur la succession de Paul Biya semble être à l'origine de tous ces problèmes", a déclaré le directeur de publication de Mutations, Haman Mana. Dans ce dossier, "nous évoquions le problème de l'alternance et envisagions tous les scénarios de l'après-Biya", a expliqué M. Mana.

 

"Alternance : les scénarios de l'après Biya", pouvait-on lire à la une de la morasse de cette édition du lundi 14 avril qui n'a pas pu paraître et dont l'AFP a obtenu une copie. "Après-Biya: incertitudes de fin de règne", assure l'introduction du dossier. Pour le quotidien, "la vie politique s'est arrêtée" depuis peu au Cameroun car le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC, au pouvoir) attend que le président Biya "réponde à sa sollicitation" de se présenter à la prochaine élection présidentielle, en 2004.

 

"Qu'est-ce qui peut donc se cacher derrière ce qui apparaît comme une panique générale, si ce n'est la peur d'imaginer que Paul Biya décide de se retirer alors qu'il y a tellement de clans et, donc, tellement d'intérêts contradictoires que lui seul, sans être éternel, peut gérer ?", se demande Mutations.

 

Pour le quotidien, Paul Biya a instauré "le retour de fait du parti unique" avec, pour "seule vision politique, son maintien au pouvoir". Le scénario "d'un scrutin équitable et transparent, vu l'organisation actuelle en place, est une hypothèse à écarter", estime un autre article intitulé "les scénarios du chaos".

 

Mutations constate par ailleurs que "des milices existent (au Cameroun) qui menaceraient la paix en cas de crise politique" mais considère qu'il faut "rompre avec la fatalité de la violence". La question de la succession à la tête de l'Etat est davantage présente dans les débats et dans la presse depuis que le président Biya a célébré ses 70 ans, le 13 février dernier.

 

"Prenant l'opinion publique nationale et internationale à témoin, Mutations (...) condamne cette entrave à la liberté de la presse dans un pays où, en cette veille de présidentielle 2004, le harcèlement et les menaces sur la presse sont de plus en plus fréquents", indique un communiqué de la rédaction en réaction à la saisie de la disquette.

 

M. Mana avait été interpellé en août 2001 pour publication "illégale" de textes portant sur la réorganisation de l'armée. Le même journal a essuyé en 2002 les menaces des services de police pour un dossier portant sur les dysfonctionnements de ce corps


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