Youssouf Togoïmi, chef rebelle tchadien, président du MDJT,  est décédé


Mort de Togoïmi: "la fin de la rebellion?", se demande Le Progrès

N'DJAMENA, 25 sep (AFP) - 14h27 - Le quotidien tchadien Le Progrès a consacré mercredi une pleine page au décès du chef rebelle Youssouf Togoïmi, survenu mardi à l'hôpital central de Tripoli, en se demandant si cette disparition signifiera la fin de la rébellion.

"Le président du MDJT (Mouvement pour la démocratie et la justice au Tchad) s'est éteint. Est-ce la fin de la rébellion, s'interroge dans un éditorial le seul journal tchadien paru mercredi à N'Djamena.

"Togoïmi est mort", titre en Une ce quotidien indépendant réputé proche du pouvoir, publiant une photo de l'ancien ministre de la Défense entré en rébellion en octobre 1998, et qui avait été blessé fin août par l'explosion d'une mine dans le Tibesti (extrême-nord).

Le quotidien, qui relate le décès du chef rebelle à partir de dépêches d'agence, rappelle dans son éditorial que "le MDJT est la rébellion armée qui aura duré le plus longtemps au Tchad et attiré l'attention sur le pays pendant l'ère démocratique".

Dans son éditorial titré "les exigences d'une amnistie", le quotidien tchadien rappelle les efforts du gouvernement, qui après la signature d'un accord-cadre de paix avec le mouvement rebelle, le 7 janvier à Tripoli, avait décrété l'amnistie général pour les combattants du MDJT.

"Si la lutte continue et que le mouvement s'effrite de lui même par la disparition pure et simple ou l'éclatement en plusieurs ailes, chacun aura à assumer personnellement ses actes du passé", écrit Le Progrès.

La télévision et la radio nationales de N'Djamena ont annoncé le décès du président du MDJT sans faire de commentaires.

Aucune autre réaction n'a été enregistrée à N'Djamena, en dehors de celle du porte-parole du gouvernement, Moctar Wawa Dahab, qui avait déclaré mardi soir à l'AFP que M. Togoïmi était le "seul obstacle à la paix" au Tchad.


Youssouf Togoïmi est mort d'une embolie cérébrale (sources hospitalières)

TRIPOLI, 25 sept (AFP) - 13h49 - Le chef rebelle tchadien Youssouf Togoïmi, dont le décès a été annoncé mardi par un de ses conseillers, est mort d'une embolie cérébrale à l'hopital de Tripoli, a-t-on indiqué mercredi de sources hospitalières.

Le chef du principal groupe rebelle tchadien, le Mouvement pour la démocratie et la justice au Tchad (MDJT) "est décédé mardi d'une embolie soudaine", a-t-on indiqué, sous couvert de l'anonymat, soulignant que "sa mort avait été rapide".

Les médecins ont été "surpris" par sa mort, car Togoïmi, âgé de 49 ans, "se portait bien et ne souffrait que de fractures" des fémurs, a-t-on ajouté de même source.

N'Djamena avait annoncé le 29 août que le chef rebelle avait eu "les deux jambes broyées" par l'explosion d'une mine" dans le nord du Tchad, près de la frontière avec le Niger.

Le MDJT avait au contraire assuré que Togoïmi n'était que "légèrement blessé au pied" et que sa vie n'était "pas en danger".

Togoïmi était soigné à l'hôpital central de Tripoli depuis qu'il avait été blessé fin août par l'explosion d'une mine dans le Tibesti (nord du Tchad).

Au moment de sa mort, il était entouré par son frère, d'autres membres de sa famille ainsi que des amis, selon les sources hospitalières.

La mort de Togoïmi avait été annoncée mardi par l'un de ses proches conseillers, Youssouf Barkaï.

Le porte-parole du gouvernement tchadien, le ministre de la Communication Moctar Wawa Dahab, avait réagi en déclarant : "Togoïmi était le seul obstacle à la paix" au Tchad.

La Libye a parrainé le 7 janvier 2002 un accord cadre de paix entre le gouvernement tchadien et le MDJT, assorti d'un cessez-le-feu.

Cet accord, rapidement conclu à la surprise générale, avait mis fin, au moins provisoirement, à la guérilla meurtrière menée par M. Togoïmi et ses guerriers toubous, depuis octobre 1998.

Les négociations issues de cet accord ont toutefois été suspendues début mai et depuis cette date, N'Djamena et le MDJT s'accusent mutuellement de violer le cessez-le-feu décidé par les deux parties.

Même affaibli, Togoïmi constituait une menace pour le président tchadien Idriss Deby, qui a longtemps soupçonné la Libye de l'aider en sous-main.


Youssouf Togoïmi, un ministre devenu chef de guerre

LIBREVILLE, 24 sept (AFP) - 19h50 - Le chef rebelle tchadien Youssouf Togoïmi, décédé mardi à l'hôpital central de Tripoli, constituait une menace pour le régime du président tchadien Idriss Deby, qu'il avait longtemps affirmé vouloir renverser.

Retranché dans le Tibesti (extrême nord du Tchad), aux confins tchado-libyens, le président-fondateur du Mouvement pour la démocratie et la justice au Tchad (MDJT), avait été transporté pour soins à Tripoli fin août, après avoir sauté sur une mine à l'extrême nord du Tchad.

Né le 26 mars 1953 à Zouar (Tibesti), Youssouf Togoïmi était un nordiste musulman, comme l'actuel chef de l'Etat.

Ministre de la Justice (1990-93), de la Défense (95-97) puis de l'Intérieur d'Idriss Deby durant quelques jours en mai 1997, il démissionne bruyamment du gouvernement le 3 juin 1997 pour, dit-on à N'Djamena, une "question d'honneur".

"Il a quitté le gouvernement parce qu'il s'était vu refuser l'accès du palais présidentiel pour une raison encore assez obscure", avait affirmé à l'époque un journaliste tchadien.

Pour ce journaliste, qui a gardé l'anonymat, il s'agit d'une "histoire de turban". Youssouf Togoïmi est un Toubou de pure souche tandis qu'Idriss Deby, originaire de Berdoa, sous-préfecture de Fada (nord-est), est issu de la tribu des Zaghawas, regardés avec hauteur par les Toubous.

Youssouf Togoïmi assure avoir démissionné pour protester contre la "dérive dictatoriale du régime".

Réfugié au Tibesti, il créé le MDJT le 12 octobre 1998. Son mouvement ne cesse ensuite de harceler l'armée régulière tchadienne dans cette région montagneuse et quasi-désertique, où l'absence de source indépendante ne permet pas de savoir qui contrôle quoi.

Diplômé de l'Ecole nationale de magistrature française (ENM), section internationale de Paris, le chef rebelle réussit à faire parler de lui en informant par téléphone satellitaire ses représentants basés à Paris. Une démarche payante puisque N'Djamena finit par admettre l'existence de cette rébellion.

Cette guérilla, qui a fait au moins plusieurs centaines de morts, à en croire les innombrables communiqués du MDJT et du gouvernement, semble perdre son souffle en 2001.

Mais le président Deby est obligé de puiser dans les premières avances sur recettes du projet pétrolier de Doba (sud du Tchad) pour financer l'effort de guerre.

Plusieurs cadres du MDJT quittent le navire quelques mois avant la réélection de M. Togoïmi à la tête du mouvement, à l'occasion d'un congrès organisé en Libye en décembre 2001, qui consacre l'apparition d'une nouvelle direction, avec la nomination comme deuxième vice-président d'Adoum Togoï, un ancien ambassadeur du Tchad en Libye.

Après avoir réclamé pendant des années la démission du "despote" Idriss Deby, le chef rebelle amorce à la surprise générale un important virage en acceptant la signature, le 7 janvier 2002 à Tripoli, d'un accord-cadre de paix avec le gouvernement tchadien, sous l'égide de la Libye, assorti d'un cessez-le-feu.

Les négociations vont finalement échouer début mai sous l'intransigeance d'une ligne dure du MDJT qu'il incarne, opposée au clan d'Adoum Togoï, prêt à des concessions.

Cette rupture n'entraîne pas la reprise officielle des hostilités, mais gouvernement tchadien et MDJT s'accuseront mutuellement fréquemment d'être à l'origine de divers accrochages violant le cessez-le-feu.

N'Djamena a souvent soupçonné la Libye de soutenir en sous-main la rébellion de Youssouf Togoïmi.


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