Tikrit sous contrôle, normalisation à Bagdad, Damas sous pression

TIKRIT (AFP), lundi 14 avril 2003, 23h59 - Le commandement américain a signalé lundi la fin des "opérations militaires les plus déterminantes", en annonçant la prise de Tikrit, fief de Saddam Hussein, tandis qu'un début de normalisation était perceptible à Bagdad et que la Syrie se rebiffait face aux accusations des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne et d'Israël.

Le porte-parole de la Maison Blanche Ari Fleischer a qualifié lundi le régime de Damas d'"Etat voyou" et le secrétaire d'Etat américain Colin Powell a évoqué la possibilité de sanctions "de nature diplomatique, économique ou autre" contre Damas. Le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld a affirmé que les Américains avaient "vu des tests d'armes chimiques en Syrie au cours des 12 à 15 derniers mois". La Syrie dément formellement détenir ce type d'armes.

 

Dernière grande ville irakienne à avoir échappé jusqu'à dimanche au contrôle des forces anglo-américaines, Tikrit, à 180 km au nord de Bagdad, était lundi aux mains des Marines qui s'y sont emparés du palais présidentiel et ont lancé la chasse aux partisans du régime de Saddam Hussein.

"Les opérations militaires les plus déterminantes s'achèvent", a commenté le général Vincent Brooks, au QG du Commandement central (Centcom) américain au Qatar. Les affrontements dans cette ville de 100.000 habitants ont constitué "les seuls combats notables au cours des dernières 24 heures" en Irak, a-t-il souligné.

 


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Un journaliste de l'AFP sur place avait rapporté auparavant que les Marines tenaient le centre de Tikrit, où la situation était calme et tous les magasins fermés, aucune présence de forces régulières irakiennes n'étant visible. Pour autant, un porte-parole du Centcom, le capitaine Frank Thorp, a jugé qu'il serait "prématuré de dire que la guerre est finie tant que la résistance se poursuit".

Au Pentagone, le général Stanley McChrystal a précisé qu'il n'y avait pas d'interruption dans l'arrivée des renforts militaires prévus dans la région. Toute la 4e division d'infanterie américaine, unité blindée la plus moderne de l'armée de Terre comptant quelque 30.000 hommes, est entrée en Irak depuis le Koweït.

 

"Aujourd'hui est le dernier jour où des avions des cinq porte-avions ont effectué des missions", a ajouté le général, en confirmant le départ prochain de deux des cinq porte-avions mouillant dans la région, le Kitty Hawk vers sa base au Japon et le Constellation vers les Etats-Unis. A Bagdad, des échanges de tirs ont eu lieu lundi matin dans la banlieue chiite de Saddam-City, rebaptisée al-Sadr City depuis l'entrée des Américains dans la ville. Des combattants ont assuré à l'AFP que ces tirs, qui ont duré plus d'une heure, avaient fait deux tués.

Cinq jours après l'effondrement du régime de Saddam Hussein, la vie retrouvait progressivement son cours normal dans la capitale. L'apparition des premiers policiers irakiens, en uniforme vert olive et coiffés d'un béret noir, a été favorablement accueillie. "Il y a davantage de gens dans les rues, nous pensons qu'il y a certains progrès en termes de sécurité", a confirmé un porte-parole du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à Bagdad.

 

A Kirkouk et Mossoul, à Bassorah comme à Al-Kout (sud-est de Bagdad), les forces de la coalition s'emploient désormais à rétablir l'ordre public après plusieurs jours de pillages et de règlements de compte.

 

Américains et Britanniques tournent désormais leurs regards vers la Syrie qu'ils accusent de détenir des armes chimiques et de donner asile à des dignitaires irakiens ayant fui l'offensive de la coalition. Selon le général Brooks, les Syriens représentent le gros des combattants étrangers venus en Irak pour défendre le régime de Saddam Hussein.

 

Le ministre israélien des Affaires étrangères Silvan Shalom a dénoncé de son côté le "rôle majeur" de la Syrie dans les activités des organisations terroristes. "C'est quelque chose qui doit cesser", a-t-il insisté. Damas a réfuté en bloc ce flot d'accusations. Une porte-parole du ministère syrien des Affaires étrangères, Boussaïna Chaabane, sur la télévision britannique BBC, a rejeté les "allégations infondées" adressées à son pays et plaidé pour "un dialogue constructif" avec Washington.

 

Au Caire, la Ligue arabe a exprimé sa "vive inquiétude", et le conseiller du président égyptien Hosni Moubarak a mis les Etats-Unis en garde contre la tentation de "viser un pays arabe après l'autre". A Moscou, un vice-ministre des Affaires étrangères a appelé les Etats-Unis "à plus de retenue dans leurs déclarations" concernant la Syrie. Les ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne réunis à Luxembourg pour parler de l'après-guerre en Irak ont aussi lancé des appels à la modération.

 

L'Allemand Joschka Fischer a dit craindre les dangers d'une "nouvelle confrontation" avec la Syrie dans la foulée de la guerre en Irak, tandis que son homologue français Dominique de Villepin préconisait "la retenue".

 

A Londres, où le soutien de l'opinion publique à la guerre est plus fort que jamais, selon un sondage du Guardian de mardi, le Premier ministre Tony Blair a déclaré qu'"il n'existait aucun plan, quel qu'il soit, d'invasion de la Syrie" et s'est dit confiant que Damas "refuserait" l'accès à toute personne en provenance d'Irak.

 

Le secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, devait s'envoler lundi soir pour Athènes discuter avec les dirigeants européens de la situation en Irak. Réunis dans la capitale égyptienne, les ministres des Affaires étrangères d'Egypte et de Jordanie, Ahmed Maher et Marwan Moasher, ont appelé au retrait des troupes étrangères d'Irak et à la formation d'un "gouvernement irakien représentatif".

 

Au siège des Nations Unies, lundi, plusieurs associations de juristes ont annoncé qu'elles allaient étudier la possibilité de saisir la justice internationale des crimes de guerre qui auraient pu être commis en Irak tant par le régime de Saddam Hussein que par les Etats-Unis et la Grande-Bretagne.

Source du document : Yahoo! - Actualités (14 avril 2003)


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