Fin de la tournée en Afrique du président américain George W. Bush, juillet 2003


Tournée de Bush en Afrique: relations publiques ou vrai engagement ?

ABUJA (AFP), dimanche 13 juillet 2003, 10h30 - L'Afrique a-t-elle pris une place permanente dans l'agenda politique américain ou retombera-t-elle dans des années d'oubli maintenant que le président George W. Bush a bouclé son sprint de cinq jours à travers le continent ?

La président Bush a souligné qu'il avait passé une "merveilleuse semaine" à compatir aux victimes du sida, à rappeler quel crime cruel avait été la traite des esclaves et à mettre en relief le potentiel économique de ce qu'il a appelé un "continent de possibilités"

"Nous n'êtes pas tout seul. L'Amérique a décidé d'agir", a-t-il assuré aux Africains alors qu'il se trouvaient dans un centre de traitement du sida en Ouganda. "Je crois que Dieu nous a appelé à l'action ... Nous avons la responsabilité d'aider un voisin dans le besoin, un frère et une soeur en crise", a-t-il lancé.

On peut comprendre toutefois que les Africains, après de longues années de crises et de souffrances, préfère toutefois attendre des preuves concrètes de l'engagement américain avant de descendre manifester leur liesse dans la rue.

Le voyage de George W. Bush au Sénégal, en Afrique du Sud, au Botswana, en Ouganda et au Nigeria a en fait été dominé par deux pays où il ne s'est pas rendu.

Sur le Liberia, il a calé sur la nature de la contribution américaine à une force de maintien de la paix dans ce pays d'Afrique de l'Ouest ravagé par la guerre civile et les signes perceptibles font penser qu'il s'agira plus d'un rôle de soutien que de la présence effective d'unités américaines sur le terrain.

Le Niger également s'est glissé dans son ordre du jour avec Bush harcelé de questions sur la mention dans son dernier discours sur l'état de l'Union d'informations des services de renseignement, maintenant discréditées, sur des tentatives de Saddam Hussein d'y acheter de l'uranium.

Les premiers signes ne plaident pas en faveur d'un engagement américain soutenu en Afrique avec la décision d'une commission de la Chambre des représentants de tailler dans le financement de la première année d'un plan de cinq ans et de 15 milliards de dollars d'aide à la lutte contre le sida, alors même que le président américain en faisait l'article en Afrique.

Mais des membres de l'administration Bush ont estimé qu'ils pourraient rattraper le retard au cours des quatre autres années du programme.

Les critiques ont estimé que la tournée éclair du président américain n'était pas beaucoup plus qu'un voyage d'agrément relevant des relations publiques, fort en rhétorique mais faible en substance.

Ils relèvent que la première priorité de Washington peut bien avoir été de raccommoder des relations mises à mal par la guerre en Irak et font valoir que les professions de foi de George W. Bush recouvre un appétit glouton pour de nouvelles sources de pétrole, spécialement au Nigeria.

Les critiques soulignent également que le voyage, et plus particulièrement le discours dans l'île de Gorée au Sénégal, ancienne base de départ des esclaves pour le nouveau monde, paraissait plus être une tentative de se concilier les électeurs de la minorité noire américaine dans la perspective de la bataille de Bush pour sa réélection l'année prochaine qu'un véritable engagement à aider les Africains.

"Ce voyage peut bien renforcer l'image des républicains au sein de la communauté africaine-américaine avant les élections", soulignait cette semaine une lettre au Président américain d'une coalition de syndicats africains.

Mais "il a fait très peu pour renforcer la confiance des Africains qu'ils seront capable de convaincre l'administration américaine de la nécessité de changer sa politique et ses pratiques envers l'Afrique", ont ajouté les syndicats.

Toutes ces critiques sur les motivations du voyage de Bush ont été rejetées par le secrétaire d'Etat Colin Powell. "Le président n'est pas venu en Afrique afin de prendre le pétrole de quelqu'un ou d'imposer notre volonté à qui que ce soit", a-t-il dit. "La raison d'être de ce voyage n'était pas de faire un exercice politique et n'a pas pour but d'influencer les élections (présidentielles américaines) de l'année prochaine. Il a été conçu pour traiter des vrais problèmes auxquels sont confrontés les gens dans le besoin en Afrique."


George W. Bush quitte l'Afrique avec des mots d'espoir et une promesse d'être «actif» au Liberia - par Darlene Superville

ABUJA (AP), 12 juillet 2003 16:48 - Le président américain George W. Bush a achevé samedi au Nigeria sa tournée africaine avec la promesse d»'être actif» au Liberia, sans toutefois préciser si cela impliquait le déploiement de soldats américains, et des mots d'espoir dans la lutte contre l'épidémie de sida.

«Nos équipes d'évaluation sont toujours sur place», a-t-il rappelé à la presse à l'issue de sa rencontre avec son homologue nigérian Olusegun Obasanjo concernant l'envoi de troupes américaines au Liberia. «J'ai dit au président que nous serions actifs. La définition en sera connue lorsque nous connaîtrons tous les paramètres», a-t-il ajouté.

Le président américain attend les rapports des experts militaires dépêchés dans ce pays d'Afrique de l'Ouest ravagé par la guerre civile pour évaluer la situation et discuter avec les responsables régionaux, avant de décider d'une mobilisation de ses troupes.

MM. Bush et Obasanjo ont abordé les détails d'un départ en exil du président libérien Charles Taylor, selon un responsable de l'administration Bush. Le président nigérian a offert de l'accueillir, mais Taylor a jusqu'à présent répété qu'il ne quitterait pas son pays avant le déploiement d'une force internationale de maintien de la paix dans le pays.

Pour sa cinquième et dernière étape sur le continent africain, durement touché par l'épidémie de sida, George W. Bush a également abordé cette question avec une note d'espoir. «Les progrès que nous constatons déjà dans certaines parties de l'Afrique prouvent que le sida peut être vaincu en Afrique», a-t-il déclaré lors d'un sommet annuel consacré au développement en Afrique subsaharienne. Près de 30 millions de personnes ont été contaminées par la maladie sur le continent.

Lors de ses rencontres avec les dirigeants du Sénégal, d'Afrique du Sud, du Botswana et de l'Ouganda, Bush a salué leurs efforts pour lutter contre le sida, mais les a exhortés à faire plus pour aider leurs pays et le continent africain à surmonter l'épidémie.

Il a confié samedi à Olusegun Obasanjo «apprécier son honnêteté, son ouverture d'esprit et sa franchise quand il s'agit de combattre la pandémie de sida». Le taux d'infection de la maladie est situé à environ 5% au Nigeria, mais selon des experts cités par la Maison Blanche, il pourrait grimper à environ 25% d'ici dix ans.

George W. Bush a par ailleurs visité, en compagnie de sa femme Laura, l'hôpital national d'Abuja. L'établissement bénéficie d'un programme financé par les Etats-Unis visant à éviter que les femmes ne transmettent le VIH à leurs enfants pendant l'accouchement.

Le président a également présenté la nouvelle législation qui va lui permettre de fournir jusqu'à 15 milliards de dollars sur cinq ans dans quatorze pays africains et des Caraïbes. Il a appelé le Congrès américain à débloquer les fonds pour financer ce plan de lutte. «La Chambre des représentants et le Sénat américain doivent financer cette initiative en totalité pour le bien de la population du continent africain», a-t-il déclaré avant de rentrer à Washington.

Cette visite du président américain a contrasté avec celle de son prédécesseur Bill Clinton, en 2000. A l'époque, le gouvernement nigérian avait affrété des bus afin que des milliers de personnes puissent venir le saluer lors du passage du convoi présidentiel. Trois ans plus tard, les rues étaient vides. Quelque 2.000 policiers avaient été déployés pour protéger la venue du chef de l'exécutif américain.

Des habitants ont regretté que George W. Bush n'aperçoive que les aspects positifs du Nigeria, et non la pauvreté qui submerge le pays malgré ses importantes réserves pétrolières. «Je souhaitais rester le long de la route pour voir Bush, mais des hommes de la sécurité nous ont délogé», a raconté Bernard Agie, un ingénieur civil. «S'il ne rencontre que l'élite, comment saura-t-il que nous souffrons?» AP

La tournée africaine de George W. Bush du 08-12 juillet 2003