Le gouvernement persiste et signe ... dans l'erreur

L'annonce faîte par le Ministre de l'Education nationale relative au recrutement de 1000 enseignants dans le but d'éviter " une année blanche " à la jeunesse centrafricaine, à défaut d'être salutaire, marque une véritable rupture dans le dialogue avec les mouvements syndicaux et confirme la déroute engagée depuis deux ans. Et comme le Ministre Eloi Anguimaté le reconnaît lui-même, cette solution transitoire ne peut pas résoudre le problème : bien au contraire, elle réduit les chances de notre pays à sortir de l'impasse.

Le rôle d'un gouvernement n'est d'encourager le moindre conflit dans la pays mais plutôt de contribuer à l'apaisement des esprits. Cela se passe par la recherche de solutions capables d'améliorer le quotidien de chaque citoyen. Le bras de fer désormais intensifié entre le gouvernement et les syndicats centrafricains laisse présager un sombre avenir quant à la volonté du pouvoir de répondre aux attentes des travailleurs centrafricains. Ce genre d'attitude laisse place à au moins deux interprétations possibles : le gouvernement tente de casser un mouvement qu'il a lui-même qualifié de légitime ou il y'a deux capitaines dans le bateau centrafricain (d'un côté le chef de l'Etat qui veut une reprise du dialogue et de l'autre le gouvernement qui veut mettre à genoux toute protestation).

La volonté d'éviter une énième " année blanche " ne doit pas nous conduire à prendre des mesures sans lendemain tout en durcissant la tension sociale déjà forte. Ce n'est pas avec de telles mesures que l'on pourrait rassurer les partenaires internationaux d'une quelconque volonté d'ouverture.

Il est plus qu'important que nos dirigeants comprennent que le but des Centrafricains n'est pas d'hypothéquer l'avenir de leurs enfants (combien de ministres aujourd'hui peut dire qu'il a des enfants qui ont connu les années blanches de 1990 à 1993 qui ont contribué au départ du pouvoir de l'équipe Kolingba ?) mais de leur assurer un cadre cohérent dans lequel ils puissent nourrir l'espoir de lendemains stables.

A peine, le FMI montre un signe d'espoir que l'on se permet déjà de brader le capital de la jeunesse à qui l'on veut faire éviter une année blanche. Car comment expliquer que le gouvernement va payer ses nouvelles recrues lorsqu'il n'arrive pas à trouver de véritables solutions aux arriérés des salaires des anciens. N'oublions pas que la ligne de crédit que le FMI nous autorise à tirer (avec l'accord à venir de la Banque Mondiale) ne fait qu'accroître notre service de la dette, bloqué depuis déjà trop longtemps. Ce qui veut dire que nos futures recettes, lorsqu'elle n'alimenteront des comptes privés à l'étranger ou financer des voyages improductifs, iront au remboursement de ces dettes. C'est là le choix que fait ce gouvernement d'hommes prétendus compétents et intelligents.

Si effectivement, le budget permettait une telle marge de manœuvre, pourquoi dans ce cas avoir si tardivement pris conscience du manque d'enseignants pour une formation de qualité dans nos écoles ? Et que vaut la santé aux yeux du gouvernement qui, en panne d'idée, pense qu'un enfant peut apprendre le ventre vide et avec des maux de tête ?

 

Dans l'annonce faîte par le Ministre Eloi Anguimaté, une précision m'a quelque surpris : environ 500 contrats ont déjà été signés.

Cela voudrait dire qu'il s'agit-là d'une mesure prise de longue date mais rendue sans doute publique seulement par manque d'effectifs pour sa mise en œuvre. C'est la démonstration pure et simple d'une gestion partisane, discriminatoire du ministère. Et une telle politique nous conduit à nous poser des questions quant à la répartition et à l'affectation de ces enseignants, sur le territoire centrafricain.

L'annonce n'a permis pas aux Centrafricains d'avoir une vision même de court terme sur le devenir de leurs enfants. Si ce n'est de constater que le gouvernement a décider de reculer devant la difficulté.

Une telle mesure, lorsqu'elle répond à une crise, doit répondre à un plan précis et clair et non à un calcul politicien dont les bases ne répondent à aucune vision honorable de la part de son initiateur.

 

A notre humble avis, le gouvernement devrait se pencher vers des solutions d'ensemble et réalistes afin de remettre tout le pays en marche. A vouloir casser le mouvement des travailleurs, personne n'y gagne. Et les récents évènements intervenus en République Démocratique du Congo ne sont pas pour arranger de tels égarements.

A bon entendeur, salut.

 

17 janv. 2001,

Ngou

Regards et points de vue des partis politiques et mouvements centrafricains