Plan de Relance du Centrafrique (2):

Les premiers pas sont les plus déterminants

Depuis quelques semaines, des réflexions arrivent de tous les côtés dans le but d’organiser la relance du Centrafrique dès la période nommée par beaucoup " l’après-Patassé ". Parmi ces propositions d’organisation, nombreuses sont celles qui suggèrent la mise en place d’organes capables d’accompagner la République centrafricaine dans une phase de transition avant une nouvelle ère avec des institutions censées être plus républicaines. Dans ce contexte, je voudrais également apporter ma contribution à la construction (ou reconstruction si vous préférez) de notre bel ensemble, suite à mon précédent [Plan de relance proposé la semaine dernière: Plan de relance pour le Centrafrique (Analyse RCA1) ]

 

La révolution à laquelle nous aspirons, celle qui permettra à notre Centrafrique de sortir du labyrinthe dans lequel il s’est engouffré, est celle qui consiste à changer les choses et non pas rompre avec les gages de liberté et de la démocratie à laquelle nous aspirons. Notre ambition à nous patriotes, comme l’a si bien rappelé Crépin MBOLI GOUMBA dans son dernier article (cf. www.sangonet.com), est de donner un autre sens à l’exercice des responsabilités publiques. Pour cela, il nous revient d’établir les priorités dès maintenant. C’est notamment le cas des dépenses publiques qu’il est impératif de maîtriser.

Notre pays a d’énormes difficultés financières qui ont été aggravées à cause des appétits mortels de nos dirigeants. Repartir aujourd’hui en remettant en cause la plupart des avancées institutionnelles que nous avons eues pour créer de nombreuses commissions ne consisterait, à mon humble avis, qu’à augmenter les charges de l’Etat. Or, il me paraît réellement urgent de réduire le train de vie de l’Etat afin de donner une priorité au relèvement du niveau de vie des Centrafricains. Tout cela pour dire que je pense qu’il n’est pas urgent de s’engager immédiatement dans un programme rempli d’échéanciers et de commissions ou conseils, etc. Ce sont des structures lourdes à mettre en place, difficile à gérer dans une situation de crise et, de surcroît, coûteuses.

Il est évident que le souci des compatriotes d’associer toutes les composantes de la nation à la reconstruction du Centrafrique est louable. Mais le moment n’est peut-être pas opportun. Nous disposons, actuellement, de structures dont la conception nous a déjà coûté suffisamment chère (assemblée nationale, cour constitutionnelle, conseil supérieur de l’audiovisuel, etc.) pour les remettre en cause aussi tôt. D’autant plus que l’on ne leur reproche rien de concret jusque-là, si ce n’est de ne pas faire leur travail d’une manière purement objective. Il reviendrait donc aux patriotes de revoir la composition de ces différents organes afin d’y intégrer des hommes et des femmes intègres qui ont convaincu par leurs expertises et parcours professionnels. De cette manière, ils pourront se mettre immédiatement au travail afin de parer au plus pressé. C’est par la suite que l’on pourra concevoir des structures, si le besoin se fiat ressentir, regroupant toutes les sensibilités dans le but de trouver un consensus sur les orientations définitives du pays, avec une constitution qui puisse tenir compte de nos aspirations réelles, comme le soulignent Henri Grothe, Serge Bozanga et Jean-Claude Lenga dans PROCESSUS STRUCTUREL ET NORMATIF : DE LA RENAISSANCE DEMOCRATIQUE EN CENTRAFRIQUE.

 

Mais que faire dans ce cas pour faire participer tous les Centrafricains à la reconstruction nationale. En fait, à mon avis le plus important est de faire profiter à tous des fruits de la reprise, la participation intervenant ultérieurement pour le maintien et l’orientation de nos institutions républicaines. C’est en cela, que la révolution conduite par les patriotes trouve toute son essence : conduire le peuple à une prise de conscience de ses capacités pour lui permettre de se prendre en main.

 

En effet, nous disposons d’un pays immense, à faible démographie et forte potentialité sans compter sur nos richesses naturelles. Dans ce contexte, rien que la rigueur et la transparence dans la gestion de la chose publique permettent de faire face aux difficultés rencontrées ces deux dernières décennies. Pour y parvenir, nous n’avons pas seulement besoin d’hommes diplômés mais surtout de compétences, c’est-à-dire d’hommes expérimentés. Des hommes qui n’ont qu’une ambition : participer aux grandes heures de leurs pays. Et ceux-là, le Centrafrique en compte à travers le monde. Ce n’est plus la fortune qu’ils chercheraient mais la satisfaction du travail bien fait. Ce qui n’est pas le cas de nos aventuriers du gouvernement et de la présidence. Dans ce cas de figure, il faut mieux confier un ministère à un chef de service municipal qu’à un docteur en droit français resté en Europe pour livrer des pizzas ou conduire des taxis (à comparaison égale, le taximan de Bangui connaît encore mieux les réalités de son pays que le pseudo-exilé).

 

En plus des hommes compétents, il faudrait une fermeté sans pareil quant à l’indépendance de la justice, notamment dans le traitement des dossiers relatifs aux détournements de deniers publics. A ce sujet, je pense qu’une bonne application de la loi sur la corruption suffit à dissuader les initiatives douteuses. Car rien ne sert de tenir des discours de fermeté lorsque l’on est soit même au centre de toutes les affaires de pot-de-vin.

 

Enfin, il est temps que nos hommes politiques prennent leurs responsabilités dans ce pays. Les patriotes veulent mettre un terme à ce marchandage de voix que nous vivons à chaque vote important au niveau de l’assemblée nationale. Il faudrait cesser de considérer tout groupement de personnes comme un parti politique. Sans vouloir limiter la liberté d’exprimer ses opinions, nous avons constaté que la multiplication des partis politiques dans le paysage centrafricain a suscité plus de manœuvres politicienne que n’a aidé à la consolidation de l’unité nationale. Pour autant, il ne nous revient pas de définir un nombre de partis politiques combien même nous ne sommes pas nombreux. Mais notre volonté de voir ces partis politiques participer autrement à l’animation des débats dans notre pays, tant à l’assemblée nationale que par leurs publications et interventions dans les médias. C’est dans ce but que des fonds publics seront mis à leur disposition selon des modalités à définir. De même, sans vouloir fermer la porte à la " société civile " et aux cadres centrafricains, le gouvernement est constitué essentiellement d’hommes politiques, la majorité devant si possible être issue des bancs de l’assemblée nationale ou des conseils municipaux. Ainsi, nous aurons affaire à des personnes dont la survie dépendra en grande partie de la confiance qu’elles auraient obtenu de leurs concitoyens.

 

Jeudi, le 11 janvier 2001.

Ngou,

Regards et points de vue des partis politiques et mouvements centrafricains