Auto-détermination des préfectures et développement auto-centré.

Dans un article précédent, nous écrivions ce qui suit: "Et si ce débat profond, qu’ensemble l’on recherche, ne profite pas à ceux qui veulent le pouvoir et les postes ministériels à Bangui, peut-être que le peuple et les partis politiques devraient revoir respectivement leurs aspirations et leurs stratégies, et, accepter le moment venu l’option qui serait de donner à chaque région géographique ou à chaque préfecture du pays son indépendance administrative et son autonomie, afin que ces habitants mènent, de leurs propres chefs, leurs propres initiatives économiques et actions de développement, à l’écart des tâtonnements et des incompétences politiques, chroniques, en cours à Bangui. C’est peut-être seulement à ce prix que le développement réel des régions se fera et qui pourrait profiter à la nation toute entière. Face à l’immobilisme des politiques et à la confusion des militaires, le peuple devrait peut-être regarder vers de nouveaux horizons pour se sortir de l’emprise de ces chefs de guerre centrafricains et autres aspirants au pouvoir". Que ces propos ne vous méprennent point! Nous restons un fervent partisan de l’unité nationale, même si cette notion de nation avait commencé à s’effriter depuis l’apparition du népotisme dans l’administration des affaires de l’état, et, depuis l’institution du tribalisme comme mode de recrutement des hommes et des femmes au sein de l’armée nationale. Le peuple avait été témoin de l’affectation de personnes incompétentes à des postes de haute responsabilité au sein des structures de l’administration centrale ou dans les régions. Le peuple avait également observé l’exercice de la loyauté par le seul mécanisme de l’appartenance d’un individu à une tribu particulière, ngbaka, yakoma, kaba ou gbaya-bo-zangoa. Ces pratiques avaient contribué au dysfonctionnement de l’administration par l’intrusion d’éléments opportunistes qui n’attendaient que de nuire aux intérêts de l’état, et, qui étaient cependant assurés de se savoir au dessus de la justice et des lois du pays. Ces mauvaises pratiques avaient petit à petit sapé le moral au sein de l’armée où les promotions ne se faisaient plus en fonction du mérite ou de l’ancienneté, mais étaient plutôt liées à l’appartenance ethnique. Sans le prédire, l’administration des affaires de l’état et l’armée nationale était devenue un domaine qui appartenait à l’ethnie de l’homme fort du moment au pouvoir à Bangui. Mais dites-moi donc! Si chaque fois que l’occasion était donnée ces ethnies devraient apporter la division, a-t-on encore des raisons de considérer la centrafrique comme une nation? Et comme toute cette zizanie n’avait pas suffi; le pays avait eu besoin d’alliances douteuses avec des partenaires d’origines togolaises, lybiennes, démocrato-congolaises, et maintenant tchadiennes pour, soit gérer les affaires louches et lucratives du pouvoir, soit protéger le pouvoir en place, ou encore piller et détruire le pays. Quelles autres surprises le peuple devrait attendre de ses politiciens et militaires centrafricains? Est-ce que Bozizé ne pense pas que la Centrafrique avait déjà suffisamment vécu toutes ses malédictions, à l’instar des sept maux d’Egypte de la Bible?

Dans ce contexte, ces mêmes politiciens avaient et ont toujours beaucoup de mal à faire la part des choses et à préciser les objectifs de leurs politiques qui n’avaient pas changé d’un pouce, quel que soit le camp politique choisi. Faute de vision, le pays ne fera aucun progrès, malgré les aspirations légitimes de son peuple. Et comme ces politiciens d’où qu’ils viennent, ne rêvent que d’aller et de rester ad eternum au pouvoir pour y déguster le plaisir de l’argent du trésor publique, du luxe et de l’aisance, le statu-quo de la misère durera aussi longtemps qu’ils le voudront. Et comme ce statu-quo dure depuis trop longtemps, l’on pourrait prédire sans risque de se tromper que tous les signes d’évolution vers un semblant de développement continueront à se dissiper. La Centrafrique est en train d’effectuer sa descente en enfer, si ce n’est pas déjà l’enfer pour ses enfants qui y résident.

Mais est-ce que les coups d’état des généraux et leurs règnes devraient à jamais condamner le peuple à rester dans la misère? Est-ce que parce des militaires et autres politiciens voudraient s’arroger à jamais le pouvoir à Bangui, le peuple devrait accepter leurs politiques de destruction du pays et continuer à en subir les conséquences? La réponse serait très certainement un non sans équivoque. Quelle(s) alternative(s) y aurait-il donc? L’on pourrait suggérer au peuple de donner aux généraux libérateurs une parcelle de terrain où ils pourraient établir leurs chefferies et exercer leur pouvoir. Puisque c’est la ville de Bangui par exemple qu’ils veulent avec le palais présidentiel et le trésor publique, le peuple devrait peut-être accepter l’idée de leur louer les communes de Bangui, de Bimbo et de Bégoua, afin que ceux-ci puissent y faire monter leurs enterprises de développement qui correspondraient à leurs visions politiques, et, y exercer leur gouvernance en compagnie de leurs mercenaires et autres compagnons de lutte. Mieux encore, puisque les partis politiques centrafricains avaient été incapables de proposer des plans de développement réel pour le pays dans son entier, le peuple devrait alors décider de se prendre entièrement en charge et gérer ses propres affaires. Il reviendrait par exemple aux populations de chaque préfecture de se réunir en assemblée générale dans son chef lieu, d’élire ses représentants indépendemment de la couleur du parti politique et de préciser au sein de cette assemblée l’ensemble des stratégies pour le développement immédiat et durable de la préfecture. Le peuple sera informé et comprendra enfin que la préfecture devra compter sur ses propres forces et sur ses propres ressources; elle devra lever des impôts qui seront les contributions de chaque habitant au développement socio-économique de sa préfecture. Les représentants établiront un plan d’actions et un budget pour le fonctionnement des services qui auront été déterminés pour une période de 5 ans par exemple, dans les secteurs du ré-aménagement des infrastructures routières, de la réhabilitation des établissements scolaires et des centres de santé, de la ré-organisation de l’administration locale, de la formation professionnelle, de la production électrique, de la diffusion radiophonique, des communications, etc. Les habitants feraient des erreurs et cependant apprendraient rapidement à gérer leurs propres affaires sans avoir à attendre de directives de Bangui. Ils pourront localement lever les troupes nécessaires pour défendre leurs familles et leurs biens, s’il y a lieu. Ils sauront également choisir parmi eux, ceux ou celles qui sont compétents et aptes à motiver et à mettre en route des activités commerciales, agro-pastorales ou artisanales qui soient lucratives. C’est cela que l’on appellerait une auto-détermination, face aux incuries à Bangui. C’est à mon humble avis la seule voie du salut pour le peuple centrafricain, si celui-ci veut retrouver la paix et son dynamisme et commencer de manière effective des activités dites de développement. Faites donc savoir si vous voyez d’autres alternatives qui soient plus appropriées!

 Jean-Didier Gaïna (Virginie, Etats-Unis d’Amérique)

Regards et points de vue des partis politiques