Culture de l'impunité

Culture d'impunité

Le jeu de mémoire et le boomrang

Culture de l'impunité

Partout dans le monde et même en Afrique, les états spoliés par leurs dirigeants et présidents indélicats ont engagé des procédures judiciaires pour recouvrer les biens mobiliers et immobiliers soustraits frauduleusement du patrimoine national.

Le dernier en date est le Nigéria à l'égard de Sani Abacha.

Le Nigeria a réussi la semaine dernière à faire mettre sous séquestre les comptes bancaires du feu général président. Comme quoi, même après la mort, les dirigeants doivent des comptes à leurs peuples.

Mais voilà, tout ce qui est normal ailleurs ne l'est pas en République Centrafricaine.

Chacun se souvient en effet comment Jean-Bedel Bokassa jouait avec les richesses de son pays, en particulier les diamants et l'or. Cet homme sans scrupule, sans foi ni loi a planqué dans des banques européennes des ressources inestimables pendant que son peuple tirait le diable par la queue. Il s'est offert de nombreux châteaux en France alors que les Centrafricains vivaient et continuent de vivre dans des huttes et des cases, à la merci des intempéries et des fauves.

Partout ailleurs, les nouveaux gouvernements en poste font tout ce qui est en leurs pouvoirs pour récupérer les biens mal acquis des régimes déchus. Partout sauf en RCA où les mêmes leaders politiques Dacko-Bokassa-Patassé-Kolingba-Patassé font plus la pluie que le beau temps depuis 40 ans.

Ainsi, chacun d'entre eux peut faire les pires exactions, détourner les fruits des durs labeurs des Centrafricains sans la moindre crainte(*).

Bokassa a acquis plusieurs châteaux et villas de prestige en France sur le dos des Centrafricains. Pas un seul des gouvernements qui se sont succédés depuis 1979 ne s'en est vraiment préoccupé. Des hommes d'affaires véreux en France ont même tenté de s'en approprier. Le Front National, le parti de Le Pen occuperait un des châteaux !!!

La presse française fait régulièrement état de la misère du peuple centrafricain et, de temps en temps, de celle des enfants de Bokassa. Aujourd'hui, 25 octobre 1999, "Le Parisien" consacre une pleine page à Georges Bokassa, fils aîné du dictateur, qui, avec l'aide de maître Sando son avocat, cherche à "sauver les meubles " du château d'Hardricourt où il est expulsé.

Comme il est loin, le temps où M. Patassé battait le pavé avec nous autres, combattants des droits de l'homme et de la dignité du peuple centrafricain, en 1979 à Paris. Criant plus fort à chaque présence de journaliste pour bien se faire entendre et se faire voir. M. Patassé ne cessait de répéter : "nous ferons rendre gorge à Jean-Bedel Bokassa qui a spolié le peuple centrafricain" !

 

Paris le 25 octobre 1999

J.B. PELEKET

(*) Les chantres de Patassé trouveront peut être à redire s'agissant de la chasse aux sorcières menée contre Kolingba et ses partisans en 1994/1996. Les honnêtes gens témoigneront sûrement que si la justice avait été régulièrement saisie des indélicatesses et détournements prouvés et si elle avait été laissée libre de toutes investigations, de tous jugements, personne en Centrafrique ne se serait plainte. Et si bien évidemment les détournements des deniers publics n'étaient érigés en sport national depuis l'avènement de Ange Félix Patassé en 1993.

Le jeu de mémoire et le boomrang

Les dignitaires et gouvernants africains sont-ils sans mémoire? C'est l'éternel recommencement. Hier splendeur, gloire, dictature, aujourd'hui c'est la risée de tout le monde. Ces personnages deviennent de facto pour le monde extérieur à l'Afrique et surtout pour l'Occident des prototypes qui sont souvent cités : c'est le cas de Amin Dada, Bokassa, Mobutu, Tshombé, Haïlé (après ses moments de gloire et de reconnaissance internationale)... Il y a aussi ceux qui viennent régulièrement avec des valises pleines visiter les capitales européennes et américaines et s'amuser sur ses célèbres boulevards.

Que deviennent, les lingots d'or, les rubis, les carats de diamants, les pétro-dollars, les couronnes, les comptes bancaires , les châteaux, les propriétés à l'étranger ?. Comment vivre et jouir de tous ces biens ici et là, hors de chez soi, et vouloir se faire passer pour un "nationaliste" ou un "patriote" ? Et en face, les peuples meurent, se meurent . C'est la misère, le dénuement, le lot quotidien de maladies, des atrocités, des tracasseries en tous genres, des décès sans compter. De surcroît la jeunesse est sans avenir : pas d'école, pas de formation; il n'y a que ce que l'on nomme par éphémisme "les années blanches" - l'avenir est simplement hypothéqué.

Y a-t-il encore matière à réflexion ? L'intelligentsia a pris des risques majeurs en se détournant de son rôle. Elle devient complice de l'asservissement et des maux qui s'abattent sur le peuple . Le jeu est trop dangereux; attention à ceux qui prennent plaisir à voir nos populations souffrir.

Victor BISSENGUE (webmaster@sangonet.com)

(25 octobre 1999)

Points de vue . Actualité centrafrique

Regards et points de vue des partis politiques et des mouvements centrafricains