La colline Bas-Oubangui retrouve ses couleurs vertes

 

La colline Bas-Oubangui, qui avait perdu ses espèces végétales suite aux nombreux feux de brousse allumés par les paysans et à l'abattage des arbres, reverdit à nouveau grâce à une action vigoureuse de reboisement et de déguerpissement menée pas les autorités centrafricaines.

La colline Bas-Oubangui est un espace de verdure de 24.000 mètres carrés, qui surplombe Bangui, la capitale centrafricaine, sur environ six kilomètres, et arrose la ville de sa fraîcheur. D'aucuns diraient que c'est le poumon de Bangui.

Malheureusement, cette colline a amorcé une grave dégradation avec la crise politico-militaire qui a divisé en deux la capitale centrafricaine entre 1996 et 1998. Le nord, l'ouest et le centre étaient tenus par les forces régulières, alors que l'est et le sud étaient contrôlés par les militaires mutinés.

Les activités socio-économiques étant presque bloquées pendant cette période dans la capitale, plusieurs centaines de femmes et d'hommes n'ont trouvé pour seul refuge que la colline Bas-Oubangui, encore verte en ce moment, qu'ils ont commencé à défricher, labourer, pour faire des champs et obtenir du bois de chauffe qu'ils vendaient pour subvenir aux besoins de leurs familles.

"En l'espace de deux ans, la colline Bas-Oubangui a connu une dégradation rapide à cause des brûlis faits par les paysans et des abattages sauvages d'arbres pour des besoins d'énergie", explique à IPS René Poudakpa, directeur de la protection de la nature au ministère de l'Environnement.

La dégradation de la colline a provoqué notamment une hausse des températures à Bangui, la capitale centrafricaine, ont constaté les spécialistes en climatologie.

Pour y remédier, les autorités nationales, en partenariat avec l'Organisation centrafricaine pour la Forêt (OCF), ont alors lancé, vers la fin de l'année 1998, une vaste opération de protection et de récupération de la colline.

Cette opération est marquée par plusieurs actions de reboisement où environ 1.800 arbres ont été plantés sur la colline. Parallèlement, des patrouilles mixtes des éléments des eaux et forêts et de la police parcourent la colline afin d'y repérer et empêcher toute activité illégale.

"La première action que nous avons menée consistait à sensibiliser la population sur les dangers environnementaux que représentait la dégradation de la colline et la nécessité de la protéger", a indiqué Poudakpa.

En partenariat avec l'OCF, les autorités ont ensuite regroupé les femmes vivant sur la colline dans une association dénommée Association Wali Bas-Oubangui (AWBO), c'est-à-dire, l'association des femmes de la colline Bas-Oubangui, et les ont aidées à entreprendre d'autres activités comme la vannerie et la fabrication artisanale du savon.

L'Etat centrafricain a également entrepris de rendre publics les textes réglementant l'accès à la colline afin que les actions de déguerpissement et d'évacuation se déroulent avec plus ou moins de compréhension de la part des évacués, explique Poudakpa.

Hortense Kossio, chargée des relations publiques de l'AWBO a déclaré à IPS qu'avant la création de leur association, elles n'avaient pour seule source de revenu que les activités champêtres sur la colline Bas-Oubangui.

"C'est sur la colline que nous faisions nos petits champs et cherchions du bois que nous vendions pour nourrir nos familles", explique-t-elle à IPS.

Mais les choses ont changé depuis lors. "La seule occasion à laquelle nous pouvons nous rendre désormais sur la colline est la période de reboisement", indique-t-elle à IPS.

Et les résultats n'ont pas tardé à naître. Les populations installées sont reparties, la colline a retrouvé sa verdure perdue

Mieux, la température au niveau de la ville de Bangui a progressivement baissé. De 42 degrés Celsius en 2000, en pleine saison sèche, elle a chuté à 39 degrés en 2005, puis à 37 degrés en cette année 2007, annonce en juillet le ministère de l'Environnement, d'où la satisfaction actuellement exprimée des autorités centrafricaines.

"C'est la reconstruction de l'environnement de la colline du Bas Oubangui qui explique ce changement climatique positif au niveau de la ville de Bangui", explique Poudakpa.

Toutefois, même si ces résultats donnent satisfaction à la population, ce n'est pas le cas des spécialistes de l'environnement, comme Robert Guéto, géographe et professeur à l'Université de Bangui, qui déplore et dénonce la violation des textes faisant interdiction de toute construction privée sur la colline Bas-Oubangui.

"Il n'est pas normal que certaines personnalités politiques profitent de leur position politique actuelle pour y construire des logements privés alors que la loi l'interdit", indique-t-il à IPS.

Car, quelques années plus tôt, une quinzaine de proches de l'ancien président Ange Félix Patassé, qui avaient entamé des travaux de construction de domiciles privés sur la colline, avaient été dépossédés de ces propriétés à la chute du régime, en 2003.

Chantal Boyé, Secrétaire générale de l'OCF dénonce également cet entêtement des nouvelles autorités centrafricaines qui risque de saper tous les efforts entrepris jusque-là.

"Il est inacceptable et incompréhensible qu'on retire aux dignitaires de l'ancien régime des permis de construction pour ensuite les attribuer à des personnalités de l'actuel régime", dit-elle.

Source : Inter Press Service (Johannesburg). Publié sur le web le 31 Juillet 2007 [allafrica.com]
Jean-Louis Gondamoyen et Michée Boko
http://fr.allafrica.com/stories/printable/200707310236.html