Sangonet, fil d'Ariane pour la communauté

La République Centrafricaine et les centrafricains étaient peu connus à l'étranger. Les Centrafricains n'avaient pas de raison de sillonner le monde à la recherche du pain ou de l'aventure pour l'aventure. Ils avaient un pays béni des dieux.

Aussitôt les études terminées à l'étranger, ils rentraient au bercail où la question du chômage ne se posait pas tant dans le secteur public que privé de 1960 à 1973. Cependant, ils intégrèrent massivement les services publics d'Etat dans la joie et la bonne humeur sans considération d'appartenance ethnique, unis par l'histoire, une langue nationale et décidés à apporter leurs contributions à la construction de la nation.

Voilà que des malins venus d'Europe comprirent vite l'avantage à exploiter l'image extraordinairement forte de la France à cette époque parmi la population pour se propulser. Mais étant dans l'incapacité de se saisir du pouvoir suprême de l'Etat, ces "munzu vuko" ou "blanc à la peau noire" (quolibet donné par les Yakoma aux supplétifs noirs fidèles serviteurs des coloniaux. Ce quolibet fit fortune dans les discours de B. BOGANDA, grand pourfendeur de tout ce qui portait atteinte à la dignité des africains) s'investirent dans Jean-Bedel Bokassa, ancien sous officier de l'armée coloniale française au point d'en faire un monstre (*).

On connaît la suite.

La débrouille, le "rentrisme" ou "kobè ti yanga" se poursuivit de plus belle sous les régimes ultérieurs avec les mêmes résultats

A quelque chose malheur est bon. Aujourd'hui on compte des Centrafricains un peu partout dans le monde. De Houston à Tokyo en passant par le Canada, les Antilles, l'Europe sans oublier l'Amérique du sud, l'Afrique, du nord au sud.

On trouve partout des compatriotes talentueux, discrets parfaitement intégrés à la vie. La réussite intellectuelle, professionnelle et sociale ne rime pas avec la fanfaronnade.

Ils se distinguent des arrivistes en costume mal taillé, couleur pourpre qui croient pouvoir attirer l'attention des politiques en usant de leurs techniques y compris les plus éhontées, tribalistes notamment.

Internet, ce prodigieux outil de communication peut rendre un grand service à notre communauté dispersée à travers le monde si on veut s'en servir comme trait d'union, comme fil d'Ariane.

Sangonet offre un espace de partage. Je suis de ceux qui le soutiennent à fond malgré ses débuts difficiles et ses imperfections.

Aujourd'hui des compatriotes de la diaspora s'y connectent des quatre coins du monde, à la recherche des informations sur notre pays.

Puisse l'esprit qui gouverna naguère nos aïeux dans le choix du Sango, cette belle langue qui fait notre fierté et contribue à notre unité dans une Afrique en proie aux difficultés de tous genres, fortifier tous ceux qui pensent comme moi, que notre avenir passe par l'indépendance nationale véritable dans l'interdépendance librement consentie, la démocratie, la bonne gouvernance, la dignité, la liberté d'entreprendre et l'égalité des citoyens devant la loi.

Paris, le 29 octobre 1999

J.B. PELEKET

(*) Mam Ita, héro d'un roman centrafricain à paraître, s'exclame amère "40 ans d'échec, de médiocrité et d'indignité, quoi de plus normal ? L'homme blanc aura choisit parmi nos enfants, les plus vils pour lui succéder à la tête de ce pays afin de continuer de l'exploiter à moindre frais".