51 années d'éternels recommencements : 1er décembre 1958 – 1er décembre 2009

 

« Chaque génération doit payer le prix pour vivre ses rêves. » CBM

 

 

Cinquante une années que la république fut proclamée aux lendemains de l'échec du projet fédéraliste de B Boganda. Son âge dépasse largement l'espérance moyenne de vie du centrafricain.

Cette année, son anniversaire coïncide avec la période d'animation pré-électorale dans laquelle nous nous trouvons et dont l'objectif est de renouveler le mandat de nos représentants.

 

Je voudrais d'abord exprimer mes condoléances aux familles de nos compatriotes civiles et militaires lâchement assassinés à Ndélé il y a quelques jours. Rien, absolument rien ne justifie l'agression dont a été victime cette localité. En l'attaquant, en y tuant nos compatriotes; c'est la république dans sa forme institutionnelle et éternelle qui fut agressée à la veille de ses cinquante un ans. Ces condoléances que je formule à l'endroit des familles éprouvées et de la république agressée est teintée de colère. Elle est l'expression de cette exaspération contre cette élite : partis politiques (opposition), journalistes, leaders d'opinion dont le silence contre l'agression de Ndélé est condamnable. Notre communauté de destin s'exerce et existe exclusivement au travers de la république dans son expression territoriale et institutionnelle. Je ne comprends donc pas le silence de ceux qui d'habitude, l'ouvrent pour des considérations secondaires. En se taisant, en refusant ou en omettant de condamner les évènements de Ndélé, cette élite s'est faite complice de la mort de nos compatriotes et de la paralysie née de ces événements.

 

L'actuelle séquence politique est le fruit du 15 mars 2003 dont la période charnière fut les élections de 2005. En se légitimant lors de celles-ci, le défi de Bozizé était de faire du centrafricain, le sujet de son histoire. L'anniversaire de la proclamation de la république correspond donc avec le temps du bilan qui nous conduira aux prochaines élections. Faire le bilan de la république, est-ce faire celui du mandat de 2005? La tentation est grande, mais l'exercice serait malhonnête.

Cependant, lorsqu'on regarde les cinquante une dernières années ou les cinq dernières; le constat est presque identique:

-Les rues de notre pays sont encombrées de désespérance.

-Les chambres de nos hôpitaux sont devenus des mouroirs;

-Les bancs de nos écoles n'offrent plus le rêve;

-Les foyers de nos maisons ne répondent plus à nos besoins vitaux;

-Notre démocratie a été ravie et notre espérance trahie;

- etc.

 

Ces deux bilans qui se ressemblent malgré l'alignement sur un demi siècle nous emmènent à nous poser deux questions : est-on une république? Quel était le projet (promesse) de la proclamation (fondation) de la république?

 

Je serai tenté de proposer une réponse groupée pour les deux: la RCA notre pays est un embryon républicain de cinquante un ans. Sur fond d’instabilité politique, de faillite économique et de misère sociale; nous avons fait d'elle un «État-néant», un «Pays en perdition», ou encore un «État fantôme».

 

L'actualité de ces cinq dernières années et l'histoire des quarante six années précédentes doivent nous interpeller et nous obliger en toute humilité à nous interroger sur la nécessité de fonder une nouvelle république instruite des erreurs du passé. En agissant de la sorte, nous nous doterons des moyens institutionnels forts et justes qui nous permettront d'éviter la répétition de l'histoire. Nous sérions alors, avec des institutions fortes, stables et responsables; capables de bouter hors de notre espace républicain, les prochains Miskine, Damane, Sabone, Massi...qui jouent impunément avec nos existences.

La fondation de cette nouvelle république passe obligatoirement par la construction d'un énoncé politique clair, lui même issu d'une structure politique cohérente, porté par une nouvelle génération de femmes et d'hommes non atteint par l'usure, l'impunité, la gabegie...qui président à nos destinées depuis la proclamation(fondation) de cette république sans projet et sans objet qu'est la

RCA.

 

Il ne s'agit pas ici d'une vue de l'esprit, exclusivement. Il s'agit à mon humble avis de l'unique alternative à l'ensemble du système en place dont les connexions et déconnexions justifient à elles seules l'état dans lequel se trouvent notre pays. Il nous faut donc une nouvelle ambition nationale capable de jeter de nouvelles perspectives et de nous faire sortir de nos ghettos-refuges (ethnie, région, religion, habitude...) pour passer de la juxtaposition à la communauté.

 

Jusqu'ici, pour faire face aux principaux défis, on nous a vendu de dangereuses illusions dont les limites sont sues de tous et les principaux auteurs encore présents dans la place sur la séquence post-empire à quelques exceptions. Or le bilan de ces cinquante une dernières années nous confère une triple mission: réparer les erreurs du passé, construire et préparer l'avenir. Telle est la mission, telle est notre mission. Si nous ne l'accomplissons pas, ce sera une abjuration citoyenne d'abord et politique ensuite; que nos enfants, nos petits enfants voire notre vieillesse ne nous pardonneront pas.

Cette mission multiforme qui passe par la réappropriation de notre destin commun nous emmènera à relever le défi de l’Organisation, de la Structuration et de la Gestion de la RCA dans sa double dimension Unique c'est-à-dire comme Territoire et Nation.

 

Cinquante une années n'auront donc pas suffi aux fondateurs de notre république et à leurs héritiers de nous faire entrer dans la modernité. Durant cette longue agonie l'accessoire l'a toujours emporté sur l'essentiel. Que ce 1er décembre 2009 et par delà, les élections de l'année prochaine soient pour nous l'occasion d'inaugurer une nouvelle ère en fondant une nouvelle république.

Bonne fête à tous les Centrafricains aux quatre coins de la planète.

 

Clément BOUTE-MBAMBA (30 Novembre 2009)

Actualité Centrafrique de sangonet

Version PDF du texte: 51 années d'éternels recommencements : 1er décembre 1958 – 1er décembre 2009 (République Centrafricaine)