Fin d’une crise mettant en lumière les rapports controversés du Vatican, du Nonce, et des prêtres en République Centrafricaine


Les prêtres reprennent leurs activités en RCA

Retour à la normale au sein de l’Eglise catholique de Centrafrique. Les prêtres centrafricains ont décidé de reprendre leurs activités, après un jour de boycott.

Les prêtres de Centrafrique qui ont protesté contre la démission voulue par le Vatican de Mgr Paulin Pomodimo, l’archevêque de Bangui, ont annoncé la reprise de leurs activités pastorales.

La reprise des activités des prêtres résulte d’un certain nombre de pressions émanant de certains membres du clergé qui étaient hostiles à la décision d’arrêt de travail et des chrétiens mécontents d’être privés de messes et de sacrements.

La démission de l’archevêque de Bangui et la réaction hostile des prêtres mettent en exergue la crise qui couvait déjà plusieurs mois entre l’église locale et le Vatican.

Le Vatican reproche notamment au clergé centrafricain de ne pas respecter la loi du célibat, et aux évêques de ne pas sanctionner cet état de fait.

En revanche, les prêtres locaux reprochent au Vatican de se laisser instrumentaliser par le Nonce et par les missionnaires en poste dans le pays.

Le nouvel administrateur apostolique de l’archidioscèse de Bangui est le Père Dieudonné Nzapalainga.

http://www.bbc.co.uk/french/news/story/2009/05/090528_rca_priests.shtml
Junior Linguangue - BBC Afrique, Bangui, 28 mai 2009

 

 

 

 

Les curés mettent fin à leur grève mais protestent toujours

BANGUI (AFP), 28 mai 2009 - Les prêtres centrafricains ont décidé de reprendre leurs activités pastorales jeudi, au lendemain d'une grève dénonçant le choix sans concertation par le Vatican d'un archevêque intérimaire à Bangui, a affirmé leur porte-parole à l'AFP.

"Les messes ont repris depuis ce (jeudi) matin, tout comme les sacrements, mais notre lutte continue, ce sont toujours les mêmes exigences", a déclaré l'abbé Mathurin Pazé Lékissan, du diocèse de Bangui, porte-parole des prêtres diocésains centrafricains.

Les prêtres avaient annoncé mercredi la cessation de "toutes (leurs) activités pastorales" jusqu'à nouvel ordre, pour protester contre la nomination par le Vatican, sans concertation préalable, du père Dieudonné Nzapa-La-Ayinga comme administrateur apostolique de Bangui en remplacement de Mgr Paulin Pomodimo.

La démission de Mgr Pomodimo, qui n'a fait l'objet d'aucune explication, est effective depuis mardi, selon l'Eglise catholique de Centrafrique.

Les prêtes ont suspendu leur grève pour "ne pas prendre les chrétiens en captivité, (les) priver de la parole divine et du corps du Christ, (...) mais nous contestons toujours la nomination du père Nzapa-La-Ayinga", a expliqué l'abbé Mathurin Pazé Lékissan.

"Nous avons écrit au nonce apostolique (à Bangui) et aussi à l'intéressé" au sujet de cette protestation, a-t-il ajouté, sans plus de détails.

Aucun commentaire n'avait immédiatement pu être obtenu auprès de la nonciature apostolique et du nouvel archevêque intérimaire, prêtre de la paroisse Notre-Dame d'Afrique de Bangui.

La démission de Mgr Pomodimo est intervenue quelques semaines après celle de Mgr Xavier Yombaïndjé, évêque de Bossangoa (nord-ouest), pour des motifs également non expliqués, et après une mission du Vatican dans le pays en mars conduite par Mgr Robert Sarah, secrétaire de la Congrégation pour l'évangélisation des peuples.

Lors de sa visite, Mgr Sarah avait notamment fustigé les prêtres "qui mènent une double vie" et avait invité ceux qui étaient dans une telle situation à abandonner "le ministère sacerdotal".

Certains prêtres centrafricains avait condamné ces propos, estimant par ailleurs être victimes d'une campagne de dénigrement à l'intérieur du pays et en dehors.

Selon le porte-parole des prêtres, le mouvement d'humeur de mercredi n'est pas lié à la personne du père Dieudonné Nzapa-La-Ayinga, crédité d'une bonne réputation auprès des catholiques.

"Nous avons contesté sa nomination parce que l'ensemble du clergé (centrafricain) n'a pas été associé aux consultations (par le Vatican). Normalement, dans ce genre de situation, l'ensemble du clergé est consulté", avait-il assuré mercredi à l'AFP.

 

 

 

L’Eglise centrafricaine secouée par une grave crise

Des prêtres diocésains, mis en cause par une récente enquête du Vatican et déstabilisés par deux démissions épiscopales, ont décidé de se mettre en grève, avant d’y renoncer

Depuis des années, entre les rives de l’Oubangui et du Chari, le feu couvait sous la cendre. Notamment depuis la nomination de deux évêques européens, le spiritain allemand Peter Marzinkowski à Alindao en 2004 et le salésien belge Albert Vanbuel à Kaga-Bandoro en 2005. À chaque fois, le clergé diocésain de la République centrafricaine (RCA), en pleine expansion, avait manifesté un ressentiment certain.

 

Car cette Église, au rôle essentiel face au délabrement de ce pays d’Afrique centrale, vit un tournant de son histoire : en 1990, elle comptait 175 prêtres européens pour 83 prêtres centrafricains. En 2003, les premiers étaient 139, les seconds 138 et aujourd’hui, le rapport est de deux à trois.

 

Rome s’était alarmée de rumeurs circulant sur la rectitude de certains membres du clergé local. Une visite apostolique a été effectuée à Bangui en 2008 par Mgr Robert Sarah, secrétaire de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples, ancien archevêque de Conakry. Suite à cette visite, le cardinal Ivan Dias, préfet de la Congrégation, a adressé le 18 mai une lettre aux prêtres, les mettant en cause : « Votre conduite morale n’est pas toujours conforme à vos engagements à la suite du Christ chaste, pauvre et obéissant. (…) On ne peut plus nier ce que tout le monde connaît en profondeur. »

Climat local délétère

Et il menace les coupables de sanctions. Peu avant, le 7 mai, la Conférence épiscopale centrafricaine, dans un appel aux prêtres diocésains, s’était fait l’écho du climat local délétère : « Nous sommes tristes, consternés et nous ne savons pas comment retrouver le chemin de vérité, de justice et de pardon. »

 

Les conditions étaient réunies pour qu’éclate l’orage. Lundi, Benoît XVI a accepté la démission de Mgr Paulin Pomodimo, archevêque de Bangui, âgé de 54 ans. Une démission survenue après celle de Mgr François-Xavier Yombadje, évêque de Bossangoa, âgé de 52 ans, acceptée le 16 mai. La crise est alors à son comble. Dans un « message au peuple chrétien » publié dans la presse locale le 26 mai, un groupe se nommant « les prêtres diocésains » réuni en assemblée extraordinaire, tonne : « Religieux, religieuses, évêques européens se sont lancés dans la médisance, la calomnie et les délations en tous genres contre le clergé autochtone. (…) Nous déplorons la main basse de certains missionnaires pour récupérer toutes les instances de responsabilité. N’est-ce pas du néocolonialisme ecclésiastique ? » Ils concluent : « Nous ne sommes pas ce qu’on dit de nous. »

Mots d'ordre de grève avec "arrêt des messes"

Finalement, mercredi 27 mai, ces prêtres lancent un mot d’ordre de grève avec « arrêt des messes en public et arrêt des sacrements dans les paroisses ». Une consigne annulée jeudi 28 mai. La pomme de discorde porte sur la nomination d’un administrateur apostolique à Bangui, le P. Dieudonné Nzapalainga, en attendant le remplacement de Mgr Pomodimo. Centrafricain mais religieux spiritain, le P. Nzapalainga, originaire de Kaga-Bandoro et formé chez les jésuites à Paris, a vécu dans les quartiers nord de Marseille. Rentré au pays en 2007, il y préside la Conférence des religieux et religieuses centrafricains.

 

Plus que sa personne, c’est l’origine romaine de sa nomination, et son appartenance à une congrégation missionnaire, qui semblent contestées. Dans ce contexte tendu, un espoir de sortie de crise pourrait être la nomination d’un médiateur. L’axe de la crise se déplacerait, ne donnant plus prise à l’accusation de « néo-colonialisme », pour rejoindre le terrain, plus adapté, de la palabre.

 

Frédéric MOUNIER

http://www.la-croix.com/article/index.jsp?docId=2374970&rubId=4078

28/05/2009 21:03

 

Le père spiritain Dieudonné Nzapalainga, Archevêque de Bangui, par intérim, en remplacement de l’Archevêque Paulin Pomodimo, démissionnaire. Grève des prêtres

 

Actualité Centrafrique – sangonet