CENTRAFRIQUE : MAIN BASSE ETRANGERE SUR LE TERRITOIRE

 

La République Centrafricaine est en train de perdre sa cohésion nationale. Son tissu social se lézarde. Des forces contradictoires s’affrontent dans ses entrailles pour la mener à une situation insurrectionnelle. Sa cohésion jadis forte, son unité nationale, représentée par des gouvernements pluriethniques et une langue nationale, le Sango, vecteur de l’égrégore national, s’affaiblissent de jour en jour. Le rapport de forces actuel fragilise dangereusement l’équilibre géographique et ethnique qui existait, tant bien que mal, dans la composition des gouvernements successifs - il suffit de se souvenir de la consonance des noms pour remarquer que toutes les régions du pays étaient alors représentées. Même si ces gouvernements étaient autocratiques et, parfois, sanguinaires.


Aujourd’hui, avec les nouveaux maîtres provisoires de la Centrafrique, une terrible menace plane sur le pays, telle un feu de brousse menaçant la savane.


Le gouvernement provisoire de Michel Djotodia constitue un modèle d’accaparement de tous les pouvoirs par un groupe, dont les noms, d’origine tchado-islamo-arabe, font penser aux Centrafricains qu’ils ne sont plus tout fait dans leur pays. On dirait une sorte de camorra qui se serait emparée des rênes de la R.C.A.


La liste des membres du gouvernement autoproclamé de Michel Djotodia est édifiante : Justin Assane, son frère cadet, nommé Général de Brigade à la tête de la Sécurité Présidentielle ; Djoubaye Abazén, son cousin, Ministre des Transports et de l’Aviation civile ; Bertrand Mamour, son oncle retraité, Ministre délégué à la Défense nationale ; Herbert Gotron Djono Habba, son neveu, Ministre d’Etat aux Mines. Et la liste est incomplète. C’est une synarchie. L’état-major des Forces centrafricaines est truffé de citoyens tchadiens : Abdelkarim Moussa, Ibrahim Saladine, Yaya Bourna…On se croirait dans une contrée arabo-musulmane.


Il ne faut pas oublier les vassaux des ploutocraties successives. Les prébendiers, uniquement préoccupés par le sauvetage de leurs deniers mal acquis. L’appât du gain ayant ôté en eux toute dignité, tout sens de la chose publique, ils se sont formés grâce aux efforts financiers de tous les Centrafricains (bourses d’études…) et se sont enrichis, alors que la majorité de la population centrafricaine vit avec moins de un dollar par jour.


Et, pourtant, cette cabale, dont les Centrafricains sont victimes, s’opère dans l’indifférence totale des nations du monde entier. Le silence de la France et celui de l’Union Africaine, sont, en particulier, assourdissants. Accablés, déboussolés, ils en sont à se demander si le pays qui leur est cher, la République Centrafricaine, leur appartient encore. Blessés et humiliés, ils subissent en continu la cohorte des malheurs inhérente à toute occupation. Les propos de Michel Djotodia, recueillis par Patrick Fort pour Bêafrika Sango, laissent dubitatif : le souhait de régulation du marché du diamant, depuis des lustres accaparé par des ruffians étrangers ni foi ni loi avec la complicité des dirigeants corrompus du pays ? On attend de voir. Autrement, rien de concret, rien qui permette aux Centrafricains d’espérer sortir des bas-fonds de la mauvaise gouvernance. Rien qui laisse présager la mise en place d’une politique nationale dans l’intérêt du peuple.


L’urgence commanderait, pourtant, de prendre immédiatement toute une série de mesures :


· suspension dans les plus brefs délais, de ce gouvernement autoproclamé ;


· organisation d’élections générales sous l’égide d’une nouvelle Commission Nationale de Transition (C.N.T.) désignée par l’ensemble de la population ;


· établissement d’un programme clair de développement dans l’intérêt de la nation, avec la société civile et tous les partis politiques sans exclusive ;


· approbation de ce programme par le peuple. Sinon, rien ne sera possible. Il est temps, en effet, de le responsabiliser et de lui donner enfin la parole.


Ceux qui sont en train d’amener la République Centrafricaine à danser sur un fil suspendu au-dessus d’un précipice seront, demain, responsables des calamités qui se profilent à l’horizon. Messieurs du Gouvernement Provisoire, Membres de l’Union Africaine et de l’O.N.U., Etat français, à cause de votre implication particulière : prenez vos responsabilités ! Agissez ! Sinon, le peuple centrafricain, à bout, choisira inéluctablement la résistance sous toutes ses formes. Déjà nous parviennent, de l’ensemble du pays, des signes inquiétants…


A.De Kitiki (9 juin 2013)