Dans son compte-rendu bilan, le chef
du gouvernement centrafricain a évoqué les problèmes de sécurité, du
réaménagement du Gouvernement, des pouvoirs étendus du Premier ministre, du
Conseil national de transition, des relations bilatérales avec la République
d'Afrique du Sud et de la mise en place de la Cour constitutionnelle de
transition.
CONFERENCE DE PRESSE DE SON EXCELLENCE MONSIEUR LE
PREMIER, CHEF DU GOUVERNEMENT D'UNION NATIONALE DE TRANSITION
Déclaration liminaire
Bangui, le 08 mai
2013
Après le plaidoyer que j’ai fait
le 08 avril 2013 sur la situation en République Centrafricaine, à l’invitation
du Conseil Permanent de la Francophonie à Paris, j’ai entrepris, par la suite
plusieurs missions en Afrique et en Europe pour trouver des moyens et des
solutions à la grave crise que traverse notre pays. C’est ainsi que je me suis
rendu successivement au Tchad, en Belgique, en Afrique du Sud et au Congo, pour
solliciter l’aide de nos partenaires bilatéraux et multilatéraux.
Au Tchad,
A
l’invitation du Président en exercice de la Communauté Economique des Etats de
l’Afrique Centrale (CEEAC), Son Excellence Monsieur Idriss DEBY ITNO, j’ai
participé au 4ème Sommet extraordinaire des Chefs d’Etat et de Gouvernement,
tenu à Ndjamena, le 18 Avril 2013, à l’effet d’examiner la situation qui prévaut
dans notre pays.
A la suite de cette importante rencontre régionale,
plusieurs décisions ont été prises, à travers des recommandations destinées à
engager la République Centrafricaine sur la voie de sortie de crise.
Plusieurs questions ont retenu l’attention des Chefs d’Etat et de
Gouvernement, notamment :
la situation politique et institutionnelle
actuelle, c'est-à-dire :
la composition et le fonctionnement du Conseil
National de Transition (CNT) ;
l’élargissement des pouvoirs du Premier
Ministre ;
les dispositions relatives à l’élaboration du projet de
constitution et des textes structurants de la transition et de la sortie de
crise. A cet égard, le principe du consensus a été retenu comme règle d’adoption
des recommandations conformément aux décisions du 3ème Sommet extraordinaire des
Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEEAC, tenu le 03 Avril 2013 à N’Djamena.
la formation d’un nouveau gouvernement d’union nationale de transition ;
l’appellation officielle de l’autorité investie par le CNT pour diriger
l’Etat ;
la situation sécuritaire et humanitaire ;
la situation
économique et financière.
LA SITUATION POLITIQUE ET INSTITUTIONNELLE
Compte tenu de la nécessité de faire du CNT, le creuset d’une gestion
inclusive de la transition et de réunir les conditions d’une plus grande
participation à l’élaboration de la constitution et des textes législatifs
indispensables au processus législatif et à la restauration de l’ordre
constitutionnel, les Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEEAC ont recommandé
que le nombre des sièges au sein du CNT soit porté à un total de cent trente
cinq (135). Les trente (30) nouveaux sièges seront attribués aux régions, aux
formations politiques, y compris l’ancienne majorité présidentielle, aux groupes
politico-militaires qui n’ont pas encore renoncé à la lutte armée, ainsi qu’à la
société civile, aux femmes et à la jeunesse.
La répartition de ce quota
sera gérée sous ma responsabilité, pour éviter de tomber encore dans le
tripatouillage qu’a connu la liste constitutive du CNT dans sa composition
actuelle.
Le Conseil National de Transition dispose de la plénitude du
pouvoir législatif. Il est chargé de préparer le projet de constitution qui sera
soumis au suffrage populaire.
La Cour Constitutionnelle de transition
sera chargée de veiller à la constitutionnalité des lois, de connaître du
contentieux électoral, de proclamer les résultats définitifs des consultations
électorales, et de recevoir le serment du Président de la République
démocratiquement élu. La durée de la transition est fixée à dix - huit (18)
mois.
Le Chef de l’Etat de transition, le Premier Ministre et les
membres du Gouvernement d’Union Nationale de Transition ainsi que le Président
et les membres du bureau du CNT ne peuvent se présenter à la prochaine élection
présidentielle.
Le Premier Ministre dispose de pouvoirs élargis. Il est
le Chef du Gouvernement. Il ne peut être révoqué par le Chef de l’Etat de
transition pendant la durée de la transition.
Il sera procédé à la
formation d’un nouveau gouvernement d’union nationale de transition, à travers
de larges consultations et sur la base de l’esprit de l’Accord Politique de
Libreville, pour rétablir un juste équilibre entre les diverses entités. Ce
gouvernement doit en conséquence être inclusif.
SUR LE PLAN
SECURITAIRE ET HUMANITAIRE
Depuis un mois, la ville de Bangui
est le théâtre de pillages, de vols, de viols et autres exactions perpétrés par
des éléments incontrôlés de SELEKA et des bandits de tous genres. Pour mettre un
terme définitif à cette situation inadmissible, Bangui fera l’objet d’un
traitement spécial, par le renforcement de la MICOPAX. L’effectif de la FOMAC
sera porté à Deux milles (2000) hommes d’ici la fin du mois de mai 2013. Ces
nouveaux contingents viendront renforcer la FOMAC afin de lui permettre de
remplir efficacement sa mission de sécurisation des biens, des installations de
l’Etat et des entreprises. J’ai également sollicité la participation et
l’implication effective des forces françaises présentes sur le territoire
national à la pacification du pays.
Sur ce plan précis, Bangui sera
déclarée « ville sans arme », sous la supervision de la MICOPAX, et du
détachement français de Boali, avec les implications suivantes :
aucun
élément des Forces Armées Centrafricaines (FACA) et SELEKA en divagation ne sera
autorisé à porter l’arme dans la ville de Bangui.
tous les FACA, les
milices et les populations civiles détenteurs d’armes, doivent dans un premier
temps, remettre volontairement les armes en leur possession ; en cas de refus ou
de résistance, il sera procédé au désarmement forcé. Cette opération nous
permettra de désarmer la population et de démilitariser la ville de Bangui ainsi
que celles des autres régions.
tous les éléments SELEKA et les FACA non
autorisés à porter des armes seront casernés hors de Bangui en vue des
opérations de formatage (identification, enregistrement, constitution en unités
militaires et organisation de vie en caserne en attendant leur insertion dans la
vie civile ou dans le service militaire), dans le cadre de la restructuration de
l’armée. La logistique leur sera fournie ainsi que l’organisation des activités
militaires.
Il sera mis en place des commissions mixtes (militaires et
civiles) et conjointes pour le rapatriement des militaires et civils
centrafricains réfugiés dans les pays voisins.
Les éléments armés
étrangers qui se trouvent sur le territoire centrafricain seront désarmés et
rapatriés de gré ou de force dans leur pays respectif.
Il est fait
interdiction à toutes les initiatives d’hostilité armée de groupes
politico-militaires qui n’ont pas encore renoncé à la lutte armée ou toute autre
forme d’hostilité politique qui proviendrait des partis politiques et
organisations de la société civile, susceptibles de nuire à la réconciliation
nationale pendant la période de transition. Les médias nationaux tant publics
que privés doivent s’abstenir de servir de support aux déclarations ou de relais
à ce genre d’activité de conflit.
Toutes les actions que je viens
d’énumérer s’inscrivent dans le cadre d’un vaste programme. Et cela demande un
soutien effectif de la communauté internationale et des partenaires stratégiques
potentiels, par la mobilisation des ressources matérielles et financières
conséquentes.
En Belgique
C’est pour cela que je me
suis rendu à Bruxelles pour solliciter de l'Union Européenne un appui budgétaire
d'urgence en vue de sortir très rapidement notre pays de la situation dramatique
qu’il traverse,
Notre administration est totalement paralysée, suite à
la destruction de ces installations, aux pillages et saccages des bureaux, des
documents et du matériel bureautique. Une insécurité généralisée caractérisée
par la destruction de l’essentiel des infrastructures socio-économiques, avec un
impact aux effets incalculables sur les entreprises, une situation humanitaire
catastrophique. Devant l’ampleur de cette calamité, j’ai sollicité auprès de
l’Union Européenne une aide exceptionnelle d’urgence en vue de couvrir nos
besoins financiers, surtout pour la période d’avril à juin 2013 afin de créer
les conditions d’une stabilisation de la situation.
Situation économique et financière
La situation
que traverse notre pays sur le plan économique et financier est particulièrement
difficile. La destruction de l’essentiel du tissu économique limite
considérablement les capacités de l’Etat à faire face aux engagements urgents.
C’est pourquoi, le financement sollicité de nos partenaires servira à :
assurer le règlement des dépenses de sécurité, notamment le cantonnement
des éléments de SELEKA, leur casernement, le redéploiement des FACA etc.).
régler les salaires, les bourses, les pensions et les frais de vacation afin
de limiter les risques éventuels d’explosion sociale ;
assurer le
fonctionnement et l’équipement des organes de transition à savoir, le Conseil
National de Transition et la Cour Constitutionnelle de transition ;
l’apurement d’une partie de la dette commerciale des entreprises nationales
et étrangères victimes des actes de vandalisme en vue de relancer le plus
rapidement possible, le secteur productif, en vue de préserver les emplois
existants et soutenir la consommation ;
Réhabiliter les bâtiments détruits,
rééquiper l’administration, particulièrement les hôpitaux, les écoles, objets de
pillages systématiques, fournir des médicaments et du matériel médical afin de
créer les conditions minimales d’une reprise du fonctionnement de l’Etat.
Ainsi, il s’agira de répondre aux besoins les plus urgents des
populations sur l’ensemble du territoire. A cet effet, il sera mis en œuvre des
mécanismes avec l’appui des partenaires, qui permettent d’identifier avec les
populations concernées, les infrastructures et les actions prioritaires, tant en
termes d’accès aux services sociaux essentiels, qu’en termes d’amélioration de
leurs conditions de vie et de reprise des activités socio-économiques.
Sur tous ces points, l’Union Européenne a exprimé sa disponibilité à
appuyer financièrement la RCA. La contribution de l’Union Européenne est liée à
la normalisation de la situation sécuritaire, au respect des engagements
politiques réalisables à partir d’une feuille de route crédible pour faciliter
une intervention rapide. Elle pense que le rétablissement de la sécurité est une
condition indispensable pour favoriser efficacement son intervention.
Elle considère que le rétablissement de la sécurité est essentiel pour
garantir une plus grande mobilisation de l’aide en faveur de la RCA. La
détermination du Commissaire Chargé de la Coopération Internationale, de l’aide
humanitaire et de la réaction aux crises à ne pas abandonner la RCA nous assure
des lendemains meilleurs.
Pour sa part, la Belgique, nous a assuré de
son engagement à se joindre à l’Union Européenne pour accompagner la RCA dans
ses efforts de redressement. Les questions sur le fonctionnement du CNT, le
respect de l’Accord Politique de Libreville et les recommandations du Sommet du
03 Avril 2013 à Ndjamena, l’insécurité persistante dans la ville de Bangui et à
l’intérieur du pays ont fait l’objet d’échanges fructueux.
La mission de
Bruxelles a permis non seulement la reconnaissance par l’Union Européenne de la
légitimité du Gouvernement d’Union Nationale de Transition, mais surtout la
disponibilité de nos partenaires à appuyer les efforts du Gouvernement pour
rétablir la sécurité et la paix dans notre pays.
En Afrique du
Sud,
A l’invitation du Président Jacob ZUMA, j’ai effectué une
visite de travail au cours de laquelle, je lui ai remis un message de paix et de
condoléances du Chef de l’Etat de Transition, du Gouvernement d’Union Nationale
de Transition, ainsi que du Peuple Centrafricain au Gouvernement et au Peuple
d’Afrique du Sud, pour les incidents militaires entre les troupes survenus de
SELEKA et celles d’Afrique du Sud, dans notre pays. J’ai saisi cette occasion
pour clarifier avec le Président ZUMA, l’état des relations entre nos deux pays
en vue d’ouvrir une nouvelle page dans notre coopération bilatérale.
Ces
relations devront désormais s’inscrire dans un cadre conventionnel d’Etat à
l’Etat, mutuellement avantageuses à nos deux peuples.
A l’issue de cette
visite, le Président ZUMA a annoncé la nomination d’un Ambassadeur d’Afrique du
Sud en République Centrafricaine avec résidence à Bangui. Cette décision
constitue un succès diplomatique indéniable.
Une conférence de presse
conjointe a été organisée à l’initiative du Président Jacob ZUMA afin d’apaiser
les esprits de nos deux peuples et dissiper les malentendus.
Je vous
annonce qu’une mission sud – africaine arrivera à Bangui, dans les prochains
jours pour jeter les bases d’une nouvelle coopération.
Enfin, au
Congo,
j’ai participé à la réunion inaugurale du Groupe
International de Contact sur la situation en RCA (GIC – RCA) qui s’est tenu les
2 et 3 mai 2013 à Brazzaville. Cette rencontre s’inscrit dans le cadre de
l’accompagnement de la République Centrafricaine, conformément au communiqué
final du 4ème Sommet extraordinaire des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la
CEEAC, organisé à N’Djamena, le 18 avril 2013.
L’exposé que j’ai fait à
cette occasion, portait sur la situation sécuritaire, politique, humanitaire et
économique. Ainsi, j’ai informé nos partenaires sur les principales mesures
prises par le Gouvernement pour restaurer au plus vite, la sécurité et la paix.
Sur ce point, nous avons obtenu que :
L’effectif de la FOMAC
passe de 750 à 2 000 hommes. L’incidence financière est de 47 milliards de F
CFA. Ce coût prend en compte les volets formation et équipements.
En ce qui
concerne le renforcement des effectifs de la FOMAC, l’Union Européenne maintient
son engagement de financement. La RDC s’est engagée à apporter sa contribution.
Les Etats membres de la CEEAC ont promis de mettre en place, rapidement, le
complément d’effectif au courant de ce mois de mai 2013.
Les effectifs du
Tchad, du Congo sont d’ores et déjà disponibles.
Les Ministres des
Affaires Etrangères, membres du Groupe International de Contact, exhortent les
autres forces en présence en RCA (troupes françaises, unités de l'initiative
régionale déployées dans la zone infestée par la LRA) à contribuer également à
la sécurisation du pays.
Conformément à la feuille de route décidée au
Sommet de Ndjamena, j'ai échangé avec les partenaires sur le chronogramme des
textes (chartes de la transition, la constitution) à élaborer, les organes de la
transition à créer et sur le déroulement du processus électoral.
J’ai
mis l’accent sur les conséquences dramatiques de cette crise dans les domaines
de la santé, de l'éducation et de la sécurité alimentaire ; chiffres à l’appui,
et pour rassurer nos partenaires que le Gouvernement mettra tout en œuvre en vue
de faciliter la circulation des ONG.
Le Système des Nations Unies a
promis d’accroître sa contribution pour assister les personnes éprouvées et
rechercher en même temps, des financements supplémentaires pour répondre aux
besoins sans cesse croissants des populations.
La situation économique
est si désastreuse qu’elle a entrainé le ralentissement économique et la
paralysie de l'administration fiscalo-douanière. Cela se traduit par une faible
mobilisation des ressources publiques.
Une réévaluation des objectifs
budgétaires est plus qu'impérative. L’élaboration d'une loi de finances
rectificative permettra de recentrer les priorités sur les mesures d'urgence.
La réunion de Brazzaville a décidé la création d'un Fonds fiduciaire ou
Fonds spécial de solidarité pour, non seulement répondre aux mesures d'urgence
mais également, financer le processus électoral.
L'Union Européenne, la
BAD et la Conférence internationale sur les régions des Grands Lacs, se sont
engagées à étudier d'autres mécanismes économiques et financiers pour
accompagner la transition.
Je vous remercie.
Ci-dessous l'intégralité de sa
conférence de presse
Fichier audio à télécharger à partir de Bêafrika Sango
point de
presse tiangaye 7 052013.WMA (9.71 Mo)
Mercredi 08/05/2013 - bêafrika Sango
(beafrika.net)
Document audio en WMA à partir de sangonet.com : Conference de presse du premier ministre Nicolas Tiangaye, 07 mai 2013