HARO SUR LA CENTRAFRIQUE !

الغارة  غزو, autrement dit le raid, l’invasion, la conquête en arabe sont autant d’actes de guerres qui sont menés par une bande armée, souvent sur un territoire étranger d’un Etat failli. Ici, celui de la république centrafricaine. Le mot d’ordre est de  répandre vaille que vaille la terreur afin de semer une politique de la terre brûlée depuis le 24 mars 2013, date à laquelle les coalisés à la gâchette facile ont mis en débandade puis chassés les très décevants et les pas du tout regrettés « libérateurs », coupables également en leur temps d’innombrables exactions des droits humains sur nos concitoyens. Le diable est mort ! vive le diable ! Haro sur la Centrafrique ! Les sinistres « libérateurs » sont partis pour céder la place aux affreux coalisés. On se croirait dans les  films de western du début de siècle au titre évocateur qui sont projeté nuitamment dans les mélancoliques salles des cinémas Etoiles, Apollo ou le Rex des années ’70 « les libérateurs contre les coalisés »à moins que ce soit l’inverse. Sauf que là, nous ne sommes pas dans le  scénario d’un film produit par Hollywood sur les hauteurs hyper sécurisées de Los Angeles mais dans le chaudron explosif d’une réalité amère d’un peuple qui se meurt. Si le bourreau a changé de nom, le calvaire pour l‘immense majorité des centrafricains est demeuré le même, voir pire et dangereux, parce qu’il intègre une dimension radicalement dogmatique. Rien a vraiment changé pour le peuple de Centrafrique qui est passé de « trépas à mort » pour ne pas plagier les propos de l’un de nos illustres contemporains qui s’est fondu quelques vingt années auparavant d’un mémorable et non moins révélation « kwa a ékè kwi ».

Ainsi donc, sur l’ensemble du territoire national, des hommes sont quotidiennement massacrés, des femmes sont transformées en esclaves sexuelles et les enfants abandonnés à leur triste sort par la coalition séléka bien qu’officiellement dissoute par le chef de l’Etat de la transition. L’objectif premier de la séléka était de renverser le régime devenu impopulaire du général Bozizé, aujourd’hui, chose faite,  ensuite, celui de  piller tout ce qui pouvait l’être en semant le désordre et le chaos dans le pays afin de soumettre entièrement la population. L’ultime but inavoué est d’instaurer un régime islamique. Tout un programme, une planification…un véritable pogrom qui ne dit pas son nom s’abat sur la population médusée, majoritairement chrétienne et animiste. Cela ne fait plus de doute, disons les choses comme elles sont au regard des évènements qui continuent à se dérouler sur tout le territoire et notamment dans les églises, dans certaines villes et quartiers de Bangui, Bohong, Berbérati, Bossangoa, Benzambé, Markounda, Bouca, Bangassou, M’baïki, Paoua, Boguila, Binima, yaloké, Boy-rabé, Gobongo, Bimbo, Boeing… La litanie des noms de villes et des exactions est tellement longue qu’il est plus simple de dire que tout le territoire est touché.

Ces actes sont les réminiscences d’une pratique au service d’une idéologie ô combien ! Multiséculaires dont les origines remonteraient à l’Egypte antique. Elles ont  été  récupérées et reproduites à l’identique par les arabes pendant les razzias islamistes tout au long du XVIIIe et XIXe siècle pour enfin ressurgir récemment au Mali, puis dans une Centrafrique en déliquescence. En toile de fond un djihad rompant teinté d’un pseudo revendication « politique ». Contre les hésitations, les esquives et les  dénégations conformistes où lâches de nos hommes politiques qui ne voient-là qu’un léger problème passager de cohabitation entre communauté chrétienne et musulmane, nous voyons une césure durable entre elles. Appelant un chat, un chat. Tel un médecin qui a établi un mauvais diagnostic, il ne saurait prescrire la thérapie appropriée pour guérir définitivement le malade. Reconnaissant aujourd’hui que notre pays est menacé tout simplement par la faction radicale et islamiste de la coalition séléka qui veut instaurer un Etat islamiste. La querelle confessionnelle n’est qu’un préalable et un prétexte à un projet global. Les hommes politiques doivent ici et maintenant prendre leur responsabilité, car la Centrafrique, terre de refuge par excellence depuis le XVIIIe siècle est en majorité composée de peuples proto-bantus et nilotiques, de croyance animiste, pratiquants la religion chrétienne.  La majorité de la population ne veut pas d’un Etat islamiste bien que la minorité musulmane comme il en existe des dizaines d’autres dans le pays fait parti de la nation centrafricaine. Une communauté quelconque ne saurait imposer ses règles, ses coutumes, sa religion à la nation toute entière. Sinon, quel sens donner à la république, à la nation, à la laïcité. Dire cela, ce n’est pas être contre une communauté quelconque mais opter pour une république, Une et indivisible.

La tentative d’imposer par la terreur en République centrafricaine, Etat laïque par excellence, un dogme politico-religieux par une frange radicale de la coalition séléka au pouvoir depuis le 24 mars 2013 a étalé au grand jour une problématique qui est restée jusque-là en état latent, bien que réelle mais refoulée à tort d’une manière pudique, celle de la cohabitation des communautés chrétiennes qui sont majoritaires dans le pays et de la minorité musulmane. Ce, malgré le bricolage confus, les faux arrangements politiciens, les atténuations maladroites et conformistes des hommes politiques et d’une certaine intelligentsia. Désormais, il y‘aura un avant et un après 24 mars 2013. Seule la vérité vraie par une justice ferme, intransigeante et réparatrice que le peuple ne cesse de réclamer pourra absoudre le sang qui a coulé et les autres violations des droits humains qui sont perpétrés à l’endroit de nos concitoyens afin de réconcilier la nation avec elle même. L’on ne peut pas se satisfaire seulement et seulement de « pardon » comme le suggère nos « hommes politiques » toujours en décalage complet avec les attentes de notre population. La lâcheté, le bégaiement de nos hommes politiques n’ont trop que durés face à l’histoire qui se répète. Invitons nos hommes politiques à revisiter l’histoire du peuplement du territoire centrafricain depuis le 18è et 19è siècle pour comprendre le danger auquel la nation centrafricaine est aujourd’hui confrontée. Il parait que l’histoire n’est que perpétuelle recommencement, celle des razzias islamiques dont ont été victimes les peuples chrétiens et animistes des royaumes de Kordofan, de gaoga, d’Aloa, de la région de l’Adamawa, du Barh-el-ghazal. Elles ont provoqué l’exode puis le  refuge de ces peuples dont nous sommes aujourd’hui les produits de la féconde matrice en territoire centrafricain.

Aux hommes politiques en premier lieu et à chacun d’entres-nous de s’en souvenir afin de faire en sorte que l’histoire ne se répète pas.

                                                                   Franck SARAGBA


Texte version pdf : HARO SUR LA CENTRAFRIQUE !