CENTRAFRIQUE : LE RISQUE D’UN GENOCIDE

 

Par Marie-Reine Hassen

 

 

Le grand public ne savait rien du Rwanda, personne ne savait grand chose de sa population avant qu'il ne soit trop tard, avant le massacre d’environ 1.200.000 personnes en l’espace d’environ 6 mois … Aujourd’hui la République Centrafricaine est plongée dans une tragédie sans fin depuis décembre 2012 et vit dans l’anarchie totale. Tout indique que c’est l’hécatombe dans ce pays. Réagissons avant qu’il ne soit trop tard.

 

Les violations des droits de l'homme sont devenus des faits banals : les viols et toutes les formes de violences sexuelles envers les femmes et les enfants, filles et garçons, les assassinats, les tortures, les arrestations et détentions arbitraires, les recrutements d'enfants soldats…Le dernier rapport des Nations Unies du 05 août 2013 relève la situation humanitaire et sécuritaire tragique constatée par de nombreux observateurs. Plus récemment encore, le 20 août 2013, sous le prétexte d’une opération de désarmement, plusieurs localités du nord de Bangui (du quartier Boy Rabe au quartier Boeing près de l’aéroport) ont subi des attaques des troupes de la Séléka, avec leur cortège de violences : assassinats, pillages, destruction de maisons, viols… Selon des témoins, il y aurait plus de 40 morts et d’innombrables personnes en fuite.

 

Le nouveau pouvoir promet régulièrement de rétablir l’ordre, de cantonner les hommes en armes, et de lutter contre la prolifération des armes. Nous savons parfaitement que cela n’est pas réalisable dans le contexte actuel. Le pouvoir en place est incapable de prendre ses responsabilités pour mettre fin à l’insécurité qui règne sur tout le territoire, protéger les populations civiles et restaurer l’autorité de l’Etat. C’est un pays où l’Etat n’existe plus, où la pénurie alimentaire s’est installée, et où le taux de mortalité atteindra des sommets les prochains mois ; un territoire aujourd'hui livré au chaos et qui subit une crise humanitaire sans précédent. Dans ces conditions il sera impossible d’organiser des élections.

 

Nous affirmons que toute aide matérielle ou financière qui ne reposerait pas sur une perspective de sécurité et de paix durable dans le pays ne servirait qu’à remplir les poches des personnes qui ont saisi le pouvoir par la violence et qui continuent à perpétrer des atrocités sur d’innocents civils. Il est donc compréhensible que la majorité des investisseurs « conditionnent leurs financements à venir à une réinstauration de la sécurité". La décomposition avancée de la RCA risque de se répercuter au-delà de ses frontières et de déstabiliser encore davantage une région déjà plongée dans de grandes difficultés. D’ailleurs, l’on constate l’existence de nouvelles rebellions formées à la suite de dissidences au sein de la Séléka, qui grossissent le nombre des multiples rébellions déjà existantes dans le pays et dans la région.

 

Les génocides se produisent quand personne ne réagit à leurs signes avantcoureurs, comme ceux que l’on voit aujourd’hui en Centrafrique. Nous devons agir immédiatement pour prévenir la multiplication des atrocités perpétrées actuellement. Nous le savons, l’impunité dont bénéficient les criminels est génératrice de génocide. Les groupes de défense des droits humains parlent de «purification ethnique » pour décrire la brutalité des exactions en RCA.

 

Le monde a abandonné trop de peuples en chemin. Nous faisons donc un appel pressant aux dirigeants africains, européens, américains, et au monde entier afin qu'ils réagissent pour mettre fin à cette tragédie à huis clos. Les violences importées s’aggravent de jour en jour, comprenant certains radicalismes religieux très dangereux visant la déstabilisation de l’Afrique Centrale. Ce n'est qu'une question de temps avant que des massacres de plus grande ampleur ne soient perpétrés.

 

Le risque de génocide plane au-dessus de la RCA. Le monde entier est concerné et les dirigeants des principaux pays du monde disposent de leviers d'action puissants pour intervenir et sauver des vies. La sécurité sur tout le territoire et le retour à l’ordre constitutionnel s’imposent. La communauté internationale doit considérer la Centrafrique comme une de ses priorités car la situation est pire qu'elle n'a jamais été.

 

Paris le 22 août 2013

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