Par Jean-Pierre
CAMPAGNE et Christian PANIKA | AFP – 28 janvier 2014
Le Conseil de sécurité de l'ONU a
donné son feu vert à l'engagement d'une force européenne en Centrafrique, pour
épauler les troupes françaises et africaines qui ont mené l'évacuation de deux
camps militaires stratégiques de Bangui par des combattants de
l'ex-rébellion.
Dans une résolution adoptée à
l'unanimité, le conseil menace de sanctions ciblées (gel des avoirs et
interdiction de voyager) tous ceux "qui menacent la paix, la stabilité ou la
sécurité en RCA (République centrafricaine) et qui font obstacle au processus
politique de transition, violent les droits de l'Homme", au moment où l'exécutif
centrafricain, au complet après la formation du gouvernement lundi, a engagé la
bataille de la pacification d'un pays dévasté par les
violences.
Les personnes à sanctionner seront
désignées ultérieurement par un Comité dépendant du Conseil. L'ambassadeur
français aux Nations unies Gérard Araud a assuré que Paris avait "des noms à
présenter".
Le Conseil a décidé de mettre sous
mandat de l'ONU les quelque 500 soldats européens qui doivent prêter main forte
aux plus de 5.000 militaires africains de la Misca (force de l'Union africaine)
et aux 1.600 soldats français de l'opération Sangaris.
A terme, l'ONU considère qu'il
faudrait déployer plus de 10.000 Casques bleus pour sécuriser la RCA "car la
situation est très, très grave et le pays immense", a expliqué M.
Araud.
La présidente centrafricaine
Catherine Samba Panza a abondé dans son sens, en indiquant sur une radio
française qu'elle allait demander une opération de maintien de la paix de l'ONU,
car "les exactions continuent aussi bien à Bangui qu'à l'intérieur du pays", ce
qu'il signifie qu'"il n'y a pas suffisamment" de soldats.
Un seul site de cantonnement pour
les Séléka
Depuis lundi, les deux principaux
camps de cantonnement à Bangui d'ex-rebelles Séléka - qui avaient pris le
pouvoir en mars 2013 - ont été évacués, et les combattants regroupés au camp
"RDOT", situé à la sortie nord de la ville.
Ces deux camps étaient situés à des
endroits stratégiques: le camp De Roux aux abords immédiats du palais
présidentiel et le camp Kasaï non loin de la résidence de Mme Samba Panza, élue
après la démission contrainte le 10 janvier de Michel Djotodia, le chef de la
Séléka.
"Aujourd'hui, le seul site de
cantonnement des ex-Séléka c'est le RDOT", a expliqué à Bangui le
lieutenant-colonel français Thierry Mollard. "Il y a plein de raisons de n'avoir
qu'un seul site, pour organiser la sécurité, le ravitaillement". "Et les
enregistrer pour amorcer le processus de DDR (désarmement, démobilisation,
réinsertion)", poursuit-il.
Du seul camp Kasaï, environ 400
combattants ont été transférés mardi, munis d'armes légères, sous les cris de
joie et les insultes des riverains chrétiens, ont constaté des journalistes de
l'AFP.
Depuis dimanche, d'autres
combattants ont quitté Bangui en direction du nord du pays, dont des généraux,
selon des témoignages d'habitants et Peter Bouckaert, directeur des urgences de
l'ONG Human Rights Watch.
Environ 200 d'entre eux sont arrivés
au Tchad par la route, a annoncé mardi N'Djamena.
Au camp RDOT, ils étaient "un peu
moins d'un millier" mardi soir, a déclaré à l'AFP le porte-parole de
l'état-major, le colonel Gilles Jaron.
"Effritement" du commandement des
Séléka
"Ce que l'on pressent, c'est que les
ex-Séléka ont vu qu'il y avait un effritement de leur structure de
commandement", poursuit-il. "Ce que l'on ne veut pas, c'est qu'ils se répandent
en ville et qu'ils puissent menacer la population, quelle qu'elle soit,
chrétienne ou musulmane. On contrôle l'affaire".
De fait, l'évacuation des deux camps
par les Séléka fragilise encore plus le rapport de force dans Bangui entre
chrétiens, déjà majoritaires, et musulmans, harcelés par les milices
anti-balaka.
Ce cantonnement ne va pas sans
problèmes. Ainsi, selon le lieutenant-colonel Mollard, des hommes de Sangaris
ont été "pris à partie" mardi matin par des individus armés non identifiés et
"ont dû riposter" aux abords du camp RDOT.
Des habitants expliquent que des
Séléka, sortis se ravitailler, ont d'abord été attaqués par des anti-balaka,
avant l'intervention des Français.
Avec le soutien mais aussi sous la
pression de la communauté internationale, une nouvelle équipe dirigeante s'est
très rapidement mise en place après la démission de M. Djotodia. Le nouveau
gouvernement a été formé lundi, une semaine après l'élection de Mme Samba Panza,
avec l'entrée au gouvernement de trois Séléka.
La présidente et le Premier ministre
ont fait du retour à la paix leur première priorité.
Le Conseil de sécurité de l'ONU a également rappelé que des élections présidentielle et législatives devront être organisées "au plus tard en février 2015 et de préférence au second semestre 2014", comme le souhaite Paris.
Des soldats français de l’opération
Sangaris et des soldats burundais au Camp de Roux à Bangui le 27 janvier
2014.
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Bangui : l’aide militaire de l’UE
autorisée
Luc MATHIEU 28
janvier 2014 à 20:06
La force européenne
qui interviendra en République centrafricaine n’est pas encore concrètement
constituée mais le Conseil de sécurité lui a donné mandat, hier, pour aider
Africains et Français à rétablir l’ordre dans le pays. La résolution, adoptée à
l’unanimité, demande également au gouvernement centrafricain d’organiser des
élections dès le second semestre de cette année. L’Union européenne a décidé le
20 janvier de lancer en RCA sa première opération militaire depuis six ans.
Elle devrait mobiliser 500 à 600 hommes qui prêteront main-forte aux 4
000 militaires africains de la Misca (force de l’Union africaine) et aux 1
600 soldats français de l’opération Sangaris. L’Espagne, la Belgique, la
République tchèque et la Pologne devraient y prendre part. Pour l’instant, seule
l’Estonie a annoncé qu’elle participerait, à hauteur de 55 soldats. L’ONU
considère qu’il faudrait déployer à terme plus de 10 000 Casques bleus pour
sécuriser le pays. «La situation est très,
très grave et le pays immense», a expliqué l’ambassadeur français
aux Nations unies, Gérard Araud.