D. N. avec AFP et François-Xavier
Ménage | Florian Brunet - Le 07/12/2013 à 0:14
L'armée française a
déclenché son opération en Centrafrique avec un renforcement
dans un premier temps vendredi des patrouilles à Bangui. La capitale vit dans la
psychose de nouvelles tueries, après les massacres et les violences qui ont fait
au moins 300 morts depuis jeudi.
Si aucune violence de
grande ampleur n'a été signalée vendredi, plusieurs milliers d'habitants de
Bangui étaient rassemblés aux abords de son aéroport, où l'armée française et la
force africaine ont leurs bases, de crainte d'exactions dans leurs quartiers
voisins de Boeing et de Boy-Rabe.
Au moins 300 morts selon la
Croix-Rouge
Dans le quartier de
l'Assemblée nationale, la Croix-rouge centrafricaine ramassait des dizaines de
cadavres abandonnés depuis les violents affrontements de la veille, suivis de
tueries, à l'arme à feu ou à la machette.
Ces violences ont fait au moins
300 morts, a déclaré vendredi soir un responsable de la Croix-rouge
centrafricaine ayant requis l'anonymat.
En
comptabilisant les corps déposés dans les morgues des structures hospitalières,
dans des lieux de culte et ceux ramassés dans les rues par les équipes de la
Croix-rouge, le bilan provisoire s'élevait à 281 morts, a ajouté ce responsable,
soulignant que les secouristes n'avaient pu accéder vendredi à tous les
quartiers où la présence de cadavres a été signalée : "il y a des quartiers, où
il y a encore des corps à ramasser".
Le Drian confirme que "l'opération
a commencé"
"L'opération a commencé" et
les forces françaises présentes en Centrafrique ont déployé des patrouilles dans
Bangui, a affirmé vendredi le ministre français de la Défense, Jean-Yves
Le Drian, sur la radio RFI.
Vendredi soir, un
millier de soldats français étaient présents dans le pays, a précisé
l'état-major des armées. Au total, les effectifs militaires français en
Centrafrique doivent rapidement atteindre 1.200 hommes.
A l'aéroport, d'où les patrouilles de blindés sortent dans Bangui,
l'armée française continuait de renforcer son dispositif. Venu de la ville
portuaire de Douala au Cameroun, un convoi terrestre s'apprêtait également à
entrer en Centrafrique. De son côté, Londres a mis à la disposition de
l'opération un avion militaire gros porteur C17.
A la nuit tombante,
quelques minutes avant le couvre-feu, deux avions de combat français Rafale ont
longuement survolé la ville pour impressionner les belligérants. Excepté aux
abords immédiats de l'aéroport, les rues sont encore restées désertes toute la
journée.
Liberation.fr 6
décembre 2013 à 12:03 (Mis à jour : 6 décembre 2013 à
23:02)
LE
RÉCIT DE LA JOURNÉE.
Après le déclenchement jeudi de
l'opération militaire française, des troupes sont en route vers Bangui.
Objectif : mettre fin au chaos qui touche le pays, notamment la
capitale.
L’essentiel
•
L’armée française a lancé ce vendredi l'opération
«Sangaris» en Centrafrique avec un renforcement dans un premier
temps des patrouilles dans Bangui et le survol de Rafale. La capitale vit
dans la psychose de nouvelles tueries, après les massacres de la veille veille.
Selon plusieurs témoins, les exactions se poursuivent.
• Le président de la
République François Hollande a annoncé que les effectifs militaires français,
650 soldats actuellement, seront «doublés
d’ici quelques jours, pour ne pas dire quelques heures». 350 hommes
sont en route depuis le Cameroun.
• Médecins sans
frontières a recensé dans un hôpital de Bangui 92 morts et 155 blessés en deux
jours.
23
heures. Washington a
salué le «leadership» de
l’armée française en Centrafrique, où elle vient de renforcer la force
panafricaine pour tenter de rétablir la sécurité dans le pays, en proie à
l’anarchie et aux violences inter-religieuses. «Nous sommes certains que le puissant leadership de
la France qui a envoyé 800 soldats supplémentaires sur le terrain et son soutien
à la force panafricaine présente en Centrafrique (Misca) envoient à toutes les
parties le message clair que la violence doit cesser», a déclaré la
porte-parole adjointe du département d’Etat Marie
Harf.
«Nous sommes
profondément inquiets par la montée en puissance des violences en Centrafrique,
qui entraîne une crise humanitaire de plus en plus grave et augmente le risque
de massacres de masse», a prévenu Marie Harf
dans un communiqué. Les Etats-Unis ont promis de fournir près de 40
millions de dollars d’aide en équipements, entraînements et soutien logistique à
la Misca.
22h20. Les violences
qui ont éclaté jeudi matin à Bangui, dégénérant en tueries, ont
fait au moins 300
morts, a indiqué un responsable de la Croix-Rouge centrafricaine,
sous couvert d’anonymat. En comptabilisant les corps déposés dans les
morgues des hôpitaux, dans des lieux de culte et ceux ramassés dans les rues de
la ville par les équipes de la Croix-Rouge, le bilan provisoire s’élève à 281
tués, a ajouté ce responsable, en soulignant que les secouristes n’avaient pu
accéder vendredi avant le couvre-feu à tous les quartiers touchés par les
violences où de nombreux corps restent à ramasser selon les témoignages
d’habitants.
19h30. Le secrétaire général
de l’ONU Ban ki-moon lance un «appel
urgent» à protéger les civils. Le Bureau intégré des Nations unies
pour la consolidation de la paix en RCA (Binuca) «a signalé que les tueries avaient continué pendant
la nuit (de jeudi à vendredi) faisant augmenter le bilan» des
victimes.
18h45. Selon l’état-major des
armées à Paris, deux Rafale
français décollant de N’Djamena, au Tchad, ont effectué deux
«passages de dissuasion»
au-dessus de Bangui, vers 10 heures et 18 heures, où la situation
demeure «tendue». Trois
hélicoptères Puma en provenance du Cameroun ont rallié Bangui après plusieurs
heures de vol. Paris est en train de mettre en place un groupement aéroterrestre
à Bangui. D’autres hélicoptères pourraient venir renforcer ce dispositif dans
les prochaines heures.
18
heures. Joanna Mariner, membre
de l'équipe d'Amnesty international à Bangui, interrogée par l'agence Reuters,
cite des témoignages qui semblent attester d'exactions en cours à Bangui. Dans
le quartier PK12, des hommes de la Séléka ont tué plusieurs personnes lors de
raids dans des maisons, dit-elle. Un témoin raconte également que la Séléka fait
des raids «maison par maison». «Ils tuent
les gens. Ils traitent tout le monde d'anti-balaka [les milices de
défense].»
De jeunes membres de la Séléka, a
Bangui ce vendredi. (Photo Emmanuel Braun. Reuters)
17h30. L'Etat-major des
armées relate dans un communiqué publié sur Internet un
accrochage survenu jeudi entre les soldats français et des hommes armés :
«Dans la journée du 5 décembre, alors
qu’elles sécurisaient l’accès à l’aéroport de M’Poko sur lequel se sont réfugiés
près de 2000 Centrafricains pour fuir les combats, les forces françaises ont été
prises à partie à trois reprises par un pick-up armé. Au troisième tir, les
militaires français ont riposté détruisant le véhicule. Cette prise à partie n’a
fait aucun blessé du côté des militaires français, ni des civils venus chercher
leur protection.»
16h30. Marie-Elisabeth
Ingres, chef de mission adjointe de Médecins sans frontières (MSF) à Bangui,
travaille à l’hôpital communautaire de la capitale centrafricaine. Elle raconte
la tension des deux derniers
jours : «Depuis jeudi
matin, on a soigné plus de 170 blessés. Une bonne soixantaine de cas graves
demandaient une intervention chirurgicale. Souvent, il s’agit de plaies aux bras
et aux jambes, causées par des armes à feu ou des armes blanches. Quand on est
venu à l’hôpital ce matin, les rues de la ville étaient complètement vides, et
des soldats français étaient postés devant le bâtiment. J’ai aussi cru
comprendre que plusieurs milliers de personnes se sont regroupées à l’aéroport
[occupé par des soldats français, ndlr], surtout des femmes et des enfants. Cela demande une
confirmation plus précise, mais nos collègues de MSF sont là-bas pour apporter
leur aide.»
16
heures. La présidence
centrafricaine a demandé vendredi à toutes les forces de défense et de sécurité
de regagner leurs casernes,
autorisant seules les forces panafricaine, française et la sécurité
présidentielle à patrouiller dans Bangui. Les 1 200 soldats français
présents à terme auront à leur côté les hommes de la Misca (Cameroun, Congo,
Gabon, Tchad). Cette force, qui doit compter jusqu’à 3 600 hommes, n’en
rassemble pour l’instant qu’environ 3 000, mal équipés et mal
entraînés.
14h30. Dans une interview
au site Internet du Monde, Nicolas Tiangaye, Premier
ministre de la République centrafricaine, estime que la priorité de l’opération
menée par la France est de «sécuriser
Bangui, les grands axes économiques que sont le corridor Bangui-Douala et
Beloko-Bangui et d’autres corridors
secondaires».
14h15. Ce reportage
d’Al-Jezira montre les rues de
Bangui jeudi, alors que la capitale centrafricaine était agitée par
de violents affrontements. Attention, certaines de ces images peuvent
choquer.
14
heures.
Médecins
sans frontières (MSF) recense 92
morts et 155 blessés en deux jours dans un hôpital de Bangui.
«Hôpital communautaire : 155 blessés
en deux jours, 92 morts à la morgue», indique un bref message de MSF
transmis à l’AFP. L’ONG, qui a une antenne médicale et chirurgicale dans cet
établissement, ne peut préciser si les corps déposés vendredi matin à la morgue
étaient des victimes tuées dans la nuit, ou ceux de cadavres abandonnés dans les
rues jeudi après les massacres.
12h30. Selon notre
journaliste Thomas Hofnung, citant une source bien informée, des exactions se sont poursuivies la nuit
dernière dans plusieurs quartiers de Bangui, où des tirs ont été
entendus. Ces violences auraient été commises par des hommes de la Séléka, le
mouvement qui a pris le pouvoir en mars, en représailles aux attaques de jeudi.
Ce matin sur RFI, le ministre de la Défense Jean-Yves le Drian avait assuré que
les soldats français patrouillent dans Bangui et que la nuit avait été
calme.
12
heures. D’après France 2,
«des ex-rebelles de la Séléka ont tenté,
jeudi, de pénétrer sur l’aéroport défendu par les soldats français»
à Bangui. Les militaires ont détruit le pick-up et tué ses occupants.
L’information a été confirmée officiellement par l’état-major. Jeudi, «à l’aube, un pick-up armé a ouvert le feu à trois
reprises en direction de ces civils et des troupes françaises. A la troisième
ouverture du feu, on a riposté et on a détruit le véhicule». Par
ailleurs, RFI relate qu’une colonne de 350 soldats
français stationnés au Cameroun est sur le point de passer la
frontière de la république centrafricaine.
11h45. L’Union européenne a
décidé de débloquer 50 millions
d’euros supplémentaires pour la Centrafrique, après le lancement de
l’opération française dans ce pays, a annoncé le président de la Commission
européenne, José Manuel Barroso. Il a précisé que cette contribution s’ajoutait
aux 225 millions d’euros versés au titre de l’aide au développement et à 20
millions d’euros d’aide humanitaire.
11
heures. Europe Ecologie-les
Verts demande un vote au
parlement sur l’action militaire française en Centrafrique,
soulignant que l’intervention doit être «européenne et non uniquement française».
Un débat sur l’intervention en Centrafrique aura lieu mardi après-midi,
simultanément à l’Assemblée nationale et au Sénat, après une réunion entre le
Premier ministre Jean-Marc Ayrault et les principaux responsables du
Parlement.
10h30. Différents témoins
font état d’un survol de
Bangui par des avions de chasse français. La situation reste
néanmoins très tendue dans les rues de la capitale.
Centrafrique : « Il faut en priorité
sécuriser Bangui et les grands axes économiques »
Le Monde.fr | 06.12.2013 à 12h36 •
Mis à jour le 06.12.2013 à 14h18 | Propos
recueillis par Charlotte Bozonnet
Le premier ministre centrafricain,
Nicolas Tiangaye, à Paris, jeudi 5 décembre. | Christophe ENA/AP