05/02/2014

La partition de la Centrafrique n’est pas négociable.

Franck SARAGBAPour des raisons historiques, politiques et de droit, la partition de la république centrafricaine n’est pas négociable.

L’appartenance au peuple de Centrafrique  en ce moment particulier, d’une période si singulière  qui touche à la pérennité de la nation doit se percevoir et s’entendre haut et fort en chacun de nous. Le lion «Bamara » ne renie pas son appartenance à la famille des félidés. Il est félin. De même, le centrafricain est centrafricain dès lors qu’il en manifeste d’une manière spontanée son indéfectible attachement à la République, à la nation, aux valeurs intrinsèques, à la culture proto-bantou et nilotique. Ainsi, les rites funéraires que nous consacrons à nos morts, l’adoration que nous vouons à nos divinités, le respect que nous donnons à la vie humaine et aux anciens, le sens de l’hospitalité en sont les quelques manifestations perceptibles.

Que l’on essaie d’opposer ou de monter à tort les centrafricains les uns contre les autres au nom de la religion est un non sens qui ne cadre pas avec la réalité. En vérité,  nous savons à présent que ce montage artificiel est concocté par les ennemis de notre peuple avec la complicité de quelques hommes politiques locaux assoiffés de pouvoir, lesquels sont soutenus par le « grand guerrier conquérant africain » des temps modernes Idriss Déby, grand fossoyeur du principe de cordialité et de bonne entente que le peuple centrafricain et le peuple tchadien ont toujours entretenu entres-eux. L’ultime but recherché par ce géant au pied d’argile est de satisfaire ses ambitions personnelles, sa soif de conquête et de domination par la partition de notre beau et riche pays afin d’installer une colonie de peuplement. Si pétrole il y’a sous l’écorce terrestre tchado-centrafricaine et pour éviter des conflits inutiles, meurtriers pour nos deux peuples frères, pourquoi ne pas l’exploiter en commun et redistribuer les dividendes dans une sorte de péréquation ? Pourquoi ne pas revendiquer  tout simplement l’affectation des ressources nécessaires aux régions sinistrées des deux pays au lieu de brandir la partition du territoire au profit d’un autre qui risquerait de faire jurisprudence ?  Cela ne participe t-il pas de la construction de l’union africaine que nous rêvons de réaliser ?  Accepter la partition de la république centrafricaine, c’est entamer tout simplement le morcellement de toute la région.

L’heure n’est plus aux tergiversations et autres hésitations politiciennes mais à l’union sacrée pour mettre  hors de la patrie ces ennemis de notre peuple.

Bien que nous ayons  d’innombrables observations et critiques qui sont fondées à faire, d’une part, sur la composition de l’actuel gouvernement et d’autre part, sur le  comportement irresponsable de l’opposition démocratique. L’urgence nous recommande aujourd’hui de taire nos dissensions, nos critiques  par pur patriotisme et de faire bloc dans une union sacrée pour sauver d’abord notre pays. Nous avons une responsabilité historique. Plus-tard nous aurons le temps de régler nos petites querelles qui nous semblent êtres dérisoires à côté du danger qui guette la terre de nos aïeux et l’avenir de nos enfants.

Messieurs les hommes politiques, alliés ou non de l’ex coalition séléka, vous êtes ressortissants de la région de la vakaga ou du Bamingui bangoran, de confession musulmane, chrétienne ou animiste, centrafricain de naissance ou d’adoption, sachez que vous êtes d’abord et avant tout centrafricain. Ni les raisons identitaires, ni les revendications d’ordre économiques ou sociales avancées à tort  ne peuvent justifier la partition du pays. Ce n’est pas seulement la vakaga et le » bamingui bangoran, ni seulement la communauté musulmane de notre pays mais l’ensemble du territoire national ainsi que toute la population qui a été abandonnée à elle-même depuis plus de cinquante années par une politique hasardeuse des différents régimes qui se sont succédés dans notre pays. Que diront alors les pygmées et d’autres ethnies minoritaires qui foisonnent dans notre pays. Ne nous laissons pas entrainer par ceux qui n’ont ni foi, ni patrie où par ceux qui sont à l’origine de la situation qui prévaut aujourd’hui.

La Vakaga  et le Bamingui Bangoran font parti des 16 préfectures que compte notre pays. La première couvre une superficie de 46 500 km2 pour 52 255 habitants avec une densité d’un habitant au km2, tandis que la deuxième  a une superficie de 43 229 km2 pour 38 437 habitants soit 0,7 habitant au km2. Elles font partis des régions les moins peuplées du pays.  Devrait-on rappeler à ceux qui l’auraient oublié que la région de la vakaga et du Bamingui bangoran ont bénéficié autrefois qu’aucune autre région d’un pôle de développement touristique respectable, que nombres de ressortissants de ces régions ont occupés de hautes fonctions aussi bien  dans l’administration que dans divers gouvernements.  

Chers concitoyens, l’heure est venue, ici et maintenant de prouver votre » centrafricanité ». Faites entendre vos voix. Votre mutisme face à la situation qui prévaut dans notre pays est insupportable, désolidarisez-vous officiellement des ces partenaires combien encombrants qui veulent à présent la partition de notre pays. Demandez des sanctions immédiates à l’encontre de ceux qui veulent la partition du pays car il y’a des symboles de la république qui ne sont pas négociables.

Nous avons encore quelque part dans ce subconscient collectif, cette mémoire en sommeil  dont nous nous faisons l’obligation et le devoir de rappeler ici les profondes empruntes. Elle nous ramène indubitablement à la razzia islamique et esclavagiste du XVIIIe et XIXe siècle. Elle a fait de nous un peuple de refuge en territoire oubanguien puis centrafricain. Aujourd’hui, l’histoire de notre peuple semble se répéter. Il parait que l’histoire n’est que perpétuelle recommencement, ne l’oublions jamais. En une quarantaine d’années, le rempart à l’islamisme dont le curseur a été autrefois fixé au nord du Tchad s’est déplacé en Centrafrique. La stratégie de conquête de l’Afrique équatoriale qui doit passer nécessairement par la Centrafrique, élaborée au lendemain des indépendances fait son bonhomme de chemin. Doit-on laisser ce projet de conquête et de peuplement se réaliser ?

Enfin, rappelons également que le « jus soli » ou le droit du sol est une loi du 20 avril 1961 portant code de la nationalité qui accorde la nationalité à toute personne physique née sur le territoire centrafricain ou qui peut en acquérir la nationalité. Autrement dit, sont centrafricains tous ceux qui y sont nés en Centrafrique indépendamment de la nationalité de leurs parents, les étrangers qui en font la demande. Par conséquent, il n’y a pas de catégorie de centrafricain, il n’y a que des centrafricains. Et, c’est l’occasion de prouver que vous êtes bien centrafricain et rien d’autre.

 

Franck SARAGBA