Centrafrique : Une
réaction plus que tardive de la communauté internationale
23 novembre 2013 -
lecentrafricain.wordpress.com
Depuis des mois nous sommes témoins
des appels répétés envers les chancelleries et le gouvernement Français de la
situation génocidaire qui s’est développée en République
centrafricaine.
Le but de la France aujourd’hui est
de mobiliser la communauté internationale. Jeudi, les Nations unies ont adopté à
l’unanimité une résolution décidant de renforcer la Misca (Mission
internationale de soutien en Centrafrique). En cas d’échec, le texte onusien
prévoit le déploiement éventuel d’une mission de l’ONU d’ici le printemps
prochain. Entre-temps, Paris va augmenter le nombre de ses soldats sur place –
410 aujourd’hui – pour arriver à terme à un contingent de 750 à 1 200
combattants.
Une réaction plus que tardive
raconte le Dr Ludwig Soldner, chercheur spécialiste de l’Afrique subsaharienne :
"la Centrafrique est ignorée par le monde entier alors que ce qui s’y passe
est terrible et inacceptable".
Indépendante depuis 1960, la
République centrafricaine est l’un des États les plus pauvres au monde. Depuis
20 ans en proie à de multiples crises tant politiques qu’humanitaires, le pays a
littéralement sombré dans le chaos en mars 2013, lorsque les rebelles de la
Séléka (l’Alliance), une coalition de mouvements politiques opposés au président
François Bozizé, ont déposé le chef de l’État.
Mr Chairman, représentant du congrès
des Etats Unis, a repris presque mot pour mot la déclaration de la LIPAC (Ligue
des patriotes de Centrafrique) d’avril 2013 et Mr Hollande confirme depuis 24h
les mêmes dires. Il faut avoir le courage d’écarter les magouilleurs, les
corrompus, ceux qui se sont fourvoyés avec l’envahisseur, ceux qui ont trafiqué,
ainsi que les formations politiques qui se sont enrichies au fil des
gouvernements fantoches des 20 dernières années.
Dans un discours devant la séance
plénière de l’Assemblée Nationale centrafricaine réunie en session
extraordinaire du 05 au 12 août 2005, monsieur Jean-Claude ESMIEU représentant de l’union européenne
en Centrafrique, séance plénière assemblée nationale
relevait :
« Des études récentes dans
certains Ministères clés ont montré que l’expertise technique spécifique à ces
Ministères avait été transférée ailleurs ou profit de personnes le plus souvent
inaptes aux fonctions qui leur était assignées. L’objectif de ces gens reste
visiblement un enrichissement rapide et personnel. »
En août 2013, dans son discours
d’adieu, son successeur au même poste, monsieur Guy SAMZUN, 5 30 /08
/a/20:10
« Faudra-t-il inlassablement
répéter que ceux qui sont aujourd’hui aux commandes de ce pays doivent agir pour
le bien de la population et non pour leurs propres intérêts personnels?
Devra-t-on attendre que l’Etat soit déclaré en faillite pour que l’on arrête de
dépenser l’argent qu’on n’a pas? Il y a quand même dans ce pays des
personnalités intègres, compétentes et dont la probité ne fait aucun doute, j’ai
eu la chance de les rencontrer et beaucoup sont devenus des
amis.
Ce sont ces hommes et ces femmes sur
lesquels la RCA doit s’appuyer et non sur quelques baroudeurs, politiciens de
petit calibre, épris de pouvoir et uniquement guidés par leur intérêt
personnel »
Les grandes questions restent en
suspens et il serait illusoire de croire qu’on peut faire du neuf avec du vieux
car les gouvernements d’union nationale se sont révélés tout autant
inefficaces.
En tant qu’observateur étranger et
spécialiste, le Dr Ludwig Soldner confirme que les options sont restreintes et
que les scénarios d’intervention doivent être établis avec les bonnes
personnes.
Tout repose dans le choix des
chancelleries.
Dr. Max
Schroeder.
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Discours d'adieu de Guy Samzun, ambassadeur de l'Union
Européenne
Excellence Monsieur le
Chef de l'Etat de la transition
Excellence Monsieur le
Premier ministre, Chef du gouvernement de la transition
Excellence Madame la
Vice-Présidente du Conseil national de la transition,
Excellence, Monsieur
le Président de la Commission de la CEMAC
Excellence Mesdames et
Messieurs les Ministres,
Excellence Messieurs
les Ambassadeurs et Représentants des Organisations
internationales,
Mesdames et
Messieurs,
Distingués invités en
vos rang, grade et qualité.
En octobre 2009 j'ai
débarqué à Bangui, conscient que ce ne serait pas une sinécure au vu de
l'histoire de ce pays. En effet, j'avais déjà visité le Centrafrique au cours de
quelques missions ponctuelles dans le domaine des finances publiques et j'avais
remarqué que des problèmes simples n'engendraient pas nécessairement des
solutions simples.
Mon mandat était
clair, précis et à posteriori terriblement ambitieux: "aider les autorités à
créer un Etat de droit digne de ce nom". Imaginez ma surprise d'avoir été
nommé Ambassadeur dans un Etat qui se cherche.
C'est pourtant avec
beaucoup d'enthousiasme que je me suis attelé à la tâche, aidé en cela par mon
collègue Vidon, Ambassadeur de France à l'époque, fin connaisseur du pays et de
certaines personnalités attachantes qui m'ont apporté un soutien sans faille.
Qu'ils en soient ici remerciés.
L'euphorie que procure
l'arrivée dans un nouveau poste n'a malheureusement été que de courte durée. Le
processus électoral démarrait ainsi que le DDR. Le dialogue politique inter
centrafricain quasi inexistant. Il n'y avait pas de dialogue politique structuré
entre l'Union européenne et les autorités.
Ce sont les questions
sur lesquelles il m'a fallu porter toute mon attention sans oublier notre
coopération au développement.
Sur les élections tout
le monde se souvient qu'elles ne furent pas vraiment transparentes
malheureusement menant à la réélection du Président et à la mise en place d'une
Assemblée nationale presque monocolore. L'image du pays, déjà brouillée, venait
de prendre un coup dur et d'aucun pourrait penser que c'était là les signes
avant-coureur de la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui. Tout
au long de ce processus l'UE n'a eu de cesse de dénoncer les mauvaises pratiques
et les risques politiques qu'ils impliqueraient inévitablement. Rien n'y a
fait.
Durant les dix-huit
mois qu'a duré le processus électoral, le dialogue politique inter centrafricain
a été purement et simplement saboté malgré tous les efforts que la communauté
internationale a déployés. De réunions au Palais de la Renaissance en réunions,
nous avons tous assisté à un monologue, chacun campant sur ses positions, qui ne
pouvait permettre d'envisager une sortie de crise.
Parallèlement nous
mettions tout en œuvre pour faire aboutir le processus DDR dans le Nord-ouest du
pays et force est de constater que nous y sommes finalement, non sans mal,
parvenus et je m'en félicite. La préparation du DDR dans le Nord-est a dès lors
été entamée et l'UE a pris ses responsabilités en mettant les fonds à
disposition. D'autres fonds sont toujours disponibles mais la perspective
d'un DDR s'est éloignée avec les récents événements et je le
regrette.
S'agissant du dialogue
politique UE-RCA, il nous aura fallu près de dix-mois, là aussi, pour obtenir
l'accord de BOZIZE pour qu'il puisse démarrer et, après une période de
tâtonnement et de méfiance, cet exercice nous a permis d'aborder tous les
sujets, même les plus sensibles comme les droits de l'Homme, les détentions
arbitraires, les violences faites aux femmes, la sorcellerie, l'abolition de la
peine de mort, l'impunité, les tribunaux militaires mais également les grands
problèmes économiques et sociaux, la coopération au développement et
l'intégration régionale pour ne citer que ceux-là. Aujourd'hui, après quelques
mois d'interruption, le dialogue entre l'UE et la RCA a repris sans tabou. Ce
dialogue politique renforcé a notamment pour objet d'appuyer toutes les
démarches qui sont aujourd'hui effectuées par la Communauté internationale, le
Comité de suivi des Accords de Libreville et de N'Djamena et par le Groupe
international de contact.
Excellence Monsieur le
Chef de l'Etat de la transition,
Excellence Monsieur le
Premier Ministre,
Distingués
invités,
En matière de
coopération au développement, malgré tous les écueils que je viens de rappeler,
et surtout grâce à tous mes collaborateurs et ceux de l'Ordonnateur national du
Fonds européen de développement, nous avons pu engager 87% du programme
indicatif du 10ème Fonds européen de développement soit 158 M€ et le
solde sera engagé avant la fin de cette année. Toutes ces décisions de
financement ont engendré la contractualisation de 130 à 140 M€ avec bon nombre
d'opérateurs économiques centrafricains et des décaissements à peu de chose près
de même niveau. Tout cet argent injecté dans l'économie a directement servi au
développement du pays et à la réduction de la pauvreté. A ces sommes déjà très
considérables, il convient d'ajouter les fonds mis à disposition directement par
le budget européen et l'aide humanitaire ce qui représente encore près de 16 M€
par an. Ainsi l'Union européenne est-elle le premier bailleur de fonds de ce
pays, encore plus si l'on y ajoute l'aide au développement de la France, seul
Etat membre encore présent en RCA. Je ne saurai omettre de signaler que
concomitamment la Délégation a également eu à gérer, en étroite collaboration
avec la Commission de la CEMAC, le volet intégration économique de notre
programme régional soit quelques 97 M€. Je vous laisse imaginer le défi que cela
représente pour les 20 professionnels qui ont eu et auront à mettre en œuvre un
portefeuille aussi important dans des circonstances difficiles et sachant les
problèmes de capacités des administrations nationales.
Excellence Monsieur le
Chef de l'Etat de la transition,
Excellence Monsieur le
Premier Ministre,
Distingués
invités,
Le non-respect des
engagements pris par le passé et dans le cadre des Accords de Libreville,
Accords qui auraient permis à BOZIZE d'assurer son maintien jusqu'au terme de
son mandat , la rupture du dialogue politique inclusif, les mauvaises pratiques
en matière de droits de l'Homme, le renoncement aux valeurs d'un Etat de droit
nous ont conduit dans la situation dans laquelle nous nous trouvons
aujourd'hui.
Nous ne pouvons bien
évidemment pas cautionner ni de près ni de loin la prise de pouvoir par la force
pas plus que nous ne pouvons cautionner toutes les exactions qui ont été
commises et qui, aujourd'hui encore, terrorisent les populations. Il faut que
cela cesse sur toute l'étendue du territoire. Les centrafricaines et les
centrafricains sont à bout. Il faut rétablir la sécurité et l'ordre public au
plus vite. Il en va de la responsabilité première des autorités de la
transition, pour la plupart installées aujourd'hui.
Nous avons déjà perdu
trop de temps à mettre en place les institutions de la transition alors même que
c'était en réalité la phase la plus facile à réaliser. Faudra-t-il encore et
toujours recourir à la médiation du Président Sassou Nguesso et l'appui du
Président Deby, Président en exercice de la CEEAC, pour que les choses
progressent dans la bonne direction. Faudra-t-il inlassablement répéter que ceux
qui sont aujourd'hui aux commandes de ce pays doivent agir pour le bien de la
population et non pour leurs propres intérêts personnels? Devra-t-on attendre
que l'Etat soit déclaré en faillite pour que l'on arrête de dépenser l'argent
qu'on n'a pas? Il y a quand même dans ce pays des personnalités intègres,
compétentes et dont la probité ne fait aucun doute, j'ai eu la chance de les
rencontrer et beaucoup sont devenus des amis.
Excellence
Monsieur le Chef de l'Etat de la transition,
Excellence Monsieur le
Premier Ministre,
Distingués
invités,
Ce sont ces hommes et
ces femmes sur lesquels la RCA doit s'appuyer et non sur quelques baroudeurs,
politiciens de petit calibre, épris de pouvoir et uniquement guidés par leur
intérêt personnel. Ne répétez pas ce qui a fait la marque de fabrique du pouvoir
sortant, on sait où cela a conduit le pays. Il faut se ressaisir sinon il sera
trop tard et ce seront une fois encore les centrafricains qui paieront le
plus lourd tribu.
Excellence Monsieur le
Chef de l'Etat de la transition,
Excellence Monsieur le
Premier Ministre,
Distingués
invités,
Je quitte le pays avec
le cœur serré car mes espoirs initiaux sont déçus. Le cœur serré aussi car je
laisse derrière moi un peuple attachant mais qui souffre, le cœur serré car je
ne suis pas sûr que l'on verra rapidement le bout du tunnel si chacun n'y met
pas du sien. Mais je pars aussi confiant dans les hommes et les femmes de ce
beau pays dont les richesses sont inestimables.
Dans un premier temps
je serai affecté auprès du Directeur général Afrique du Service européen
d'action extérieure, ce qui me permettra de continuer à œuvrer à sensibiliser ma
hiérarchie sur la situation de la RCA.
Excellence Monsieur le
Chef de l'Etat de la transition,
Excellence Monsieur le
Premier Ministre,
Distingués
invités,
Je vous demande de
faire preuve de courage et d'abnégation pour sauver ce beau pays et sa
population.
Excellence Monsieur le
Chef de l'Etat de la transition,
Excellence Monsieur le
Premier Ministre,
Comme il est de
coutume en Afrique de l'ouest, je vous demande de bien vouloir me donner la
route. Comme le veut la tradition, je l'ai déjà demandée deux fois, à mes
collaborateurs, à mes amis, il vous appartient maintenant au terme de cette
troisième demande de me permettre de partir le cœur
tranquille.
Je vous remercie.
Bonne chance.