Les
groupes armés en RCA
Photo: UN
Photo/Catianne Tijerina
Cérémonie,
le 15 septembre 2014, de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations
Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA), chargée de
la Mission internationale de soutien à la Centrafrique (MISCA), sous conduite
africaine.
BANGUI,
18 septembre 2014 (IRIN) -
Le lancement officiel de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations
Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA)
a eu lieu cette semaine. La MINUSCA a pris le commandement des 6 000 soldats
déployés par la Mission internationale de soutien à la Centrafrique (MISCA) de
l’Union africaine.
Le
déploiement des forces de maintien de la paix suit l’accord de cessation des
hostilités signé en juillet par plusieurs groupes armés agissants dans ce pays
en proie à des insurgés de tout poil et frappé depuis une vingtaine d’années par
une série de coups d’État.
Cette
instabilité chronique était censée prendre fin en 2008 grâce à un « dialogue
politique inclusif ». Cependant, les engagements pris lors de cette initiative
historique n’ont pas été appliqués conformément aux attentes des principaux
groupes armés ou d’autres groupes qui ont depuis pris les armes par
frustration.
Au
cours des deux dernières années, certains de ces groupes ont été neutralisés
militairement ou dissouts, d’autres sont en passe d’être dissouts et d’autres
encore sont toujours actifs.
Voici
un aperçu de ces groupes.
Les Forces armées
centrafricaines (FACA)
Ces
dernières décennies, les 7 000 à 8 000 membres des FACA ont davantage constitué
une menace envers la population qu’une garantie de leur sécurité. Les FACA sont
craintes pour leur brutalité et les violations graves des droits de l’homme
qu’elles ont commises en toute impunité. Elles ne s’éloignent jamais vraiment de
la capitale, Bangui.
C’est
là que l’armée, sous-financée, ethniquement déséquilibrée, mal administrée, à
peine entraînée et mal payée a été vaincue par la rébellion de la Seleka, qui a
pris le pouvoir en mars 2013, pillant toutes les armes trouvées dans les
casernes. Michel Djotodia, leader du coup d’État, a ensuite annoncé la
dissolution des FACA.
Actuellement,
l’armée est à peine fonctionnelle et, grâce à un embargo des Nations Unies sur
les armes, elle n’est même presque plus armée.
Reconstruire
une armée reflétant la diversité de groupes ethniques du pays et capable de
contribuer à la sécurité nationale est l’une des tâches les plus importantes et
difficiles auxquelles la RCA doit faire face.
La Seleka
CPSK-CPJP-UFDR
La
Seleka (« alliance » en sango, la langue nationale) était une coalition de
mouvements rebelles formée dans le but de destituer le président, M. Bozizé.
Créée en septembre 2012, elle comprenait la Convention Patriotique du Salut du
Kodro (CPSK), la Convention des patriotes pour la justice et la paix
fondamentale (CPJP-Fondamentale – faction dissidente de la CPJP) et l’Union des
forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR), fondée en 2006 par le futur
leader du coup d’État, Michel Djotodia, revenu de son exil au Bénin pour prendre
les commandes du groupe.
Dans
sa déclaration inaugurale, la Seleka appelait à ce que les termes d’un accord
entre le gouvernement et l’UFDR soient respectés et à l’application des
conclusions du dialogue national.
La
Seleka a brièvement participé à un gouvernement d’union nationale décrété par M.
Bozizé, avant de se retirer puis de renverser le président le 24 mars 2013. Une
fois au pouvoir, la Seleka, qui a dirigé le pays pendant 10 mois, a rapidement
été marquée du sceau de l’infamie pour ses violences envers les civils dans les
villes qu’elle occupait. Selon l’analyste en sécurité, Yves Golo Gatien, la
Seleka comptait d’ailleurs dans ses rangs des « délinquants, des criminels, des
bandits de grands chemins, des fugitifs recherchés par la justice et des
mercenaires soudanais et tchadiens ».
M.
Djotodia a annoncé la dissolution de la Seleka le 14 septembre 2013. Depuis, le
groupe porte le préfixe « ex », même si les combattants de l’alliance demeurent
actifs, sous le commandement de Joseph Zoundeko, et n’ont pas été
désarmés.
Après
la démission de M. Djotodia en janvier 2014, la plupart des anciens rebelles ont
quitté Bangui. Quelques milliers sont restés, avec leurs armes, dans trois camps
militaires de la capitale. Ils ont maintenant le contrôle de facto de la
majorité du territoire centrafricain du centre au nord.
La présidente de
transition, Catherine Samba Panza, a supervisé un cessez-le-feu entre les
ex-Seleka et les anti-balaka (voir ci-dessous), mais certaines factions ne
reconnaissent ni cette trêve, ni le gouvernement de transition formé en mars.
Des groupes d’ex-Seleka rivaux se sont affrontés à plusieurs
occasions.
La milice
anti-balaka
Fin
2013, monseigneur Nestor Désiré Nongo Aziabgia, évêque de Bossangoa, écrivait :
« Les nombreuses atrocités et violations des droits de l’homme perpétrées par la
Seleka ont créé un sentiment de rébellion et poussé des hommes, incités par la
violence, à organiser leur propre défense et leur propre justice [...] Les
troubles au sein de différents segments de la population ont conduit à
l’émergence de groupes d’autodéfense, dont les anti-balaka.
»
Cette
déclaration explique en partie la recrudescence du mouvement
anti-balaka, mais pas sa véritable origine. Cette dernière date du
début des années 1990. L’absence de toute institution de sécurité nationale
avait alors entraîné l’apparition d’unités d’autodéfense dans le nord-ouest pour
protéger les villages des bandits.
Si
une grande partie des violences en RCA a été présentée de manière simplifiée
comme un conflit entre musulmans et chrétiens et bien que de nombreux civils
musulmans aient été tués ou attaqués parce qu’ils étaient soupçonnés de soutenir
la Seleka (dont la majorité vient du nord-est, une région marginalisée
majoritairement musulmane), les anti-balaka ne se considèrent pas comme une
organisation chrétienne. Nombre d’entre eux portent d’ailleurs des accessoires
propres aux animistes.
Un
diplomate de Bangui a décrit les anti-balaka comme un ensemble hétéroclite de «
paysans sans terres désoeuvrés, de bandits sans emploi [et] d’enfants des rues
déscolarisés rejoints par d’anciens membres des FACA et de sympathisants de
l’ancien président Bozizé. »
«
Tout aussi désorganisés que les ex-Seleka, mais répartis en petits groupes de
quelques individus, [les anti-balaka] ont été abandonnés à eux-mêmes, forcés de
saisir les propriétés d’autrui – souvent avec une extrême violence – pour
survivre », a-t-il ajouté.
Les
anti-balaka contrôlent maintenant près de la moitié de la RCA, sous les ordres
d’une douzaine de commandants répartie en différents secteurs et dont certains
ont été arrêtés.
Un
membre éminent des anti-Balaka, Patrice Edouard Ngaissona, a été ministre du
gouvernement de M. Bozizé.
Révolution Justice
(RJ)
Brièvement
appelée Union des forces armées centrafricaines pour la restauration de la
démocratie, RJ a été créée officiellement en 2013 par d’anciens membres de
l’Armée populaire pour la restauration de la démocratie fondée par Jean Jacques
Demafouth en 2006 et démantelée en 2011. Dirigée par le commandant Armel Sayo,
RJ est active dans le nord du pays, plus précisément dans les préfectures
d’Ouham et Ouham-Pende, près de la frontière tchadienne. Nombre de ses membres
ont servi dans la garde présidentielle de l’ancien président Ange Felix Patassé.
Son chef actuel a été commandant de la garde
présidentielle.
D’autres
membres appartiennent à des groupes d’autodéfense du nord-ouest et la plupart
sont de l’ethnie Sara-Kaba. Le mouvement possède peu d’armes, de véhicules ou
d’autres équipements. La plupart de leurs armes à feu sont
artisanales.
À
l’origine, l’objectif du groupe était de renverser M. Djotodia. Après le départ
de ce dernier, RJ a annoncé que son but était d’assurer « la stabilité de tous
les Centrafricains, quelle que soit leur communauté » et de lutter « contre tout
ce qui va compromettre à la tranquillité des Centrafricains », comme les
ex-Seleka et Baba Laddé, le chef des rebelles tchadiens actifs dans cette
région.
Le Front
démocratique du peuple centrafricain
(FDPC)
Le
FDPC a été créé début 2006 par Martin Koumtamadji (plus connu sous le nom
d’Abdoulaye Miskine), un associé de l’ancien président Ange-Félix Patassé. En
décembre de la même année, M. Miskine a signé un accord de cessez-le-feu avec le
gouvernement de M. Bozizé, mais l’accord a été violé plusieurs fois. Composé à
l’origine d’un petit nombre de combattants, le FDPC ne contrôlait qu’un étroit
secteur près de la frontière tchadienne. Le mouvement s’est développé fin 2008
et a alors lancé des attaques contre l’armée. En février 2009, le FDPC, soutenu
par le MLCJ (voir plus bas), a menacé de redoubler de violence, accusant M.
Bozizé de rompre avec ses engagements passés dans le cadre du traité de paix et
de faire acte de mauvaise foi.
En
2012, le FDCP s’est rapproché de la Seleka lors de son avancée vers Bangui,
avant de prendre des distances avec la coalition. En juin 2013, le groupe a
affronté la Seleka à une centaine de kilomètres de Baboua, dans l’ouest de la
RCA, essuyant de lourdes pertes. Le FDPC avait quitté sa base le long de la
frontière tchadienne pour s’installer dans l’ouest de la RCA, plus précisément
dans la région de Baboua, près de la frontière camerounaise. De là, les hommes
de M. Miskine ont attaqué des villages et des camps peuls dans les deux pays,
prenant des enfants en otage pour exiger des rançons. Leur chef a été arrêté au
Cameroun, où il demeure incarcéré.
La Convention des
patriotes pour la justice et la paix
(CPJP)
La
CPJP a été créée fin 2008 dans le nord-est du pays (dans la région de Ndélé plus
précisément). Le groupe a signé un accord de cessez-le-feu avec le gouvernement
en juin 2011 et a rallié la Seleka après la destitution de M. Bozizé. Après
avoir passé un autre pacte avec Bangui, le mouvement a été dissout en septembre
2013.
Le Mouvement des
libérateurs centrafricains pour la justice
(MLCJ)
Créé
par Abakar Sabone, le MLCJ est un groupe issu d’une scission au sein de l’UFDR
en août 2008. Son chef a signé un accord de paix en décembre 2008 avant
d’annoncer avec le FDPC, en février 2009, qu’il reprenait les armes. M. Sabone a
accusé M. Bozizé de faire preuve de mauvaise foi, lui reprochant d’avoir exclu
ses hommes du processus de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR). Il
s’est ensuite rapproché de ce dernier, qui l’a nommé en 2010 commissaire au sein
de la Commission électorale mixte et indépendante (CEMI). Après l’accord de
Libreville signé en janvier 2013 par le gouvernement, les anciens rebelles de la
Seleka et des politiciens, il a rejoint le gouvernement d’union nationale. Mais
il a vite changé d’allégeance après la chute de M. Bozizé pour rejoindre la
Seleka. Il est même devenu conseiller spécial de Michel Djotodia, son ancien
compagnon de l’UFDR.
L’Union des forces
républicaines (UFR)
L’UFR
a été fondée et est dirigée par le lieutenant-colonel Florian Ndjadder, fils
d’un général de police tué dans une tentative de coup d’État contre l’ancien
président Ange-Félix Patassé. Le groupe opérait dans le nord-ouest, mais est
inactif depuis plusieurs années. Le mouvement s’est divisé en deux en 2010,
donnant naissance à l’UFR-Fondamentale, dirigée par Askin Nzenge Landa. Les deux
groupes ont signé l’accord de cessation des hostilités à
Brazzaville.
Le Front populaire
pour le redressement (FPR)
Le
FPR a été créé début 2011 par Baba Laddé, ancien officier de la gendarmerie
tchadienne, pour « défendre les communautés peules ». M. Laddé est lui-même
peul.
Le
FRP a été considérablement affaibli début 2012 après une attaque par hélicoptère
et forces terrestres des FACA et de l’armée tchadienne. L’attaque a entraîné la
destruction des bases d’opérations du FPR.
Un
accord de paix passé en 2012 avec le gouvernement centrafricain appelait les
combattants du groupe à rentrer au Tchad, mais nombre d’entre eux sont restés
dans les régions frontalières et certains ont combattu contre des unités de RJ
et des ex-Seleka.
L’Armée de
résistance du Seigneur (LRA)
Créée
en Ouganda au milieu des années 1980 dans le but de destituer le président
Yoweri Museveni, la LRA, connue pour ses monstrueuses violations des droits de
l’homme, est présente en RCA depuis 2008 avec environ 200 combattants, malgré
les efforts combinés des FACA, de l’armée ougandaise et des conseillers de
l’armée américaine.
Les
Bandits
Des
bandits, connus localement sous le nom de zaraguina, opèrent en bandes
organisées et bien armées qui tuent, enlèvent en vue de demander des rançons,
pillent et incendient des maisons. En l’absence de forces de sécurité nationale
efficaces, ils agissent en toute impunité. Les éleveurs peuls sont leur
principale cible en raison de la valeur de leur bétail. Leurs attaques ont
conduit des dizaines de milliers de personnes à fuir leur village pour mener une
vie précaire dans la brousse, sans accès à leurs champs ni aux marchés. Les
importations par les principales voies commerciales ont été coupées, notamment
en provenance du Cameroun. Le rapatriement des réfugiés de RCA au Tchad a
également été entravé par leurs activités.