ACTES DU SEMINAIRE SUR LA RESILIENCE

co-organisé par :

Le Groupe-Forum de Reims §

La CGCF (Coordination générale des Centrafricains de France).



Samedi 1er Novembre

L’Espace des Matières Grises

4, Rue Olivier Métra

75020 Paris





















Sommaire :



































Historique du projet de séminaire.

Le principe d’organisation d’un séminaire a été retenu le 30 Août 2014 à l’issu d’une rencontre entre la CGCF et les membres du Forum de Reims

Au titre de la CGCF :

-Emmanuel-Olivier Gabirault ; Président de la Coordination Générale des Centrafricains de France ;

- Poisson Médard ; membre de la Coordination

Au titre du Forum de Reims :

- Firmin Mackpayen

- Léon ODOUDOU

- Orphée Douaclé

- Gervais Douba

En non inscrit.

- Mme Lydie NZengou

A la lumière de l’actualité brûlante en Centrafrique, notamment aux lendemains de la réunion des 22 et 23 juillet 2014 à Brazzaville et à quelques jours de la mise en œuvre de la Résolution 2149 du 21 Avril 2014 des Nations unies, les participants à la réunion ont mandaté Gervais Douba de proposer un thème de séminaire et d’en assurer ; en concertation avec les autres, la direction scientifique.

























Le comité scientifique :

Le coordonnateur du comité scientifique dont la composition figure ci-dessous a proposé une plate –forme de travail en 3 axes :

Les membres du comité ont retenu la plate-forme.

  1. Un principe guide de travail : Repérer les compétences dans la diaspora Centrafricaine et faire émerger une expertise centrafricaine dans le champ dominant et transversal du séminaire : la psychologie 

  2. Une exigence : Porter un regard sur les réalités centrafricaines de l’heure à l’aune de concepts et notions, avec pour principale préoccupation, leur faisabilité en contexte Centrafricain.

  3. Une méthodologie : Impulser une dynamique et une logique de construction et de transmission des connaissances issues de l’éducation populaire et des universités populaires. Se fixer comme objectif de susciter l’intérêt des participants, d’aiguiser leur curiosité et les amener à faire sortir de l’angle mort de leur réflexion scientifique, les problématiques et questionnements. Ne pas réduire à la compilation ou à la juxtaposition mais favoriser le repérage des intrications et des imbrications des problèmes ; lequel catalysera l’esquisse des schémas initiaux des politiques publiques à mettre en œuvre.

En définitive, conjuguer la résilience en Centrafrique en trois verbes : Voir/observer, Comprendre par l’analyse et Agir en suggérant des modes opératoires.

Composition du comité scientifique.

Gervais Douba : Coordonnateur

Orphée Douaclé : Communication et contact médias

Alain Lamessi et Jean-Bosco Péléket ;

Léon ODOUDOU, David Koulayom et Firmin Mackpayen.









Voir – Comprendre - et Agir ; 3 verbes « dissolvant » pour gommer les différends et rebâtir le pacte Républicain sur les différences. Note d’orientation du séminaire …

Face à la béante fracture que connaît la République Centrafricaine, les choix de l’orientation politique post conflit s’appuient majoritairement sur deux axes. Pour certains les années post conflit doivent être construites uniquement sur des arguments économiques. D’autres, en revanche privilégient la nécessité de refonder le système de sécurité. Ces choix, malgré leur légitimité font le pari d’un retour mécanique de la paix ainsi que la démocratie, une fois le système de sécurité ré-établi sans s’interroger sur les causes de son anomie...

La direction scientifique prend le contre- pied de cette orientation et part du postulat qu’il faut refonder un pacte républicain, si tant est qu’on est tenté de croire qu’il en existe un, naguère.

Un tel pacte suppose la récusation de toute démarche de sacerdoce de quelques illuminés et l’implication de toutes les communautés Centrafricaines dans la recherche des leviers de reconstruction de la paix. Le comité scientifique part du postulat que l’un des outils idoines de la réconciliation nationale et de la reconstruction des liens politiques et socio-économique est la mise en œuvre du concept de « résilience » : Refonder la Centrafrique post conflit sur un socle qu’est la « résilience ».

Cet instrument doit avoir la vocation d’être mis à la hauteur de toutes les composantes des organisations et communautés humaines en Centrafrique notamment par la dissémination et le travail d’imprégnation de tous les acteurs, aussi bien politiques que de l’ensemble de la société civile. Loin d’idolâtrer la résilience comme une sorte de « panacée » ayant des vertus de « sésame ouvre-toi » de vertu, sa judicieuse expérimentation pourrait en faire le ciment pour la reconstruction des murailles en ruine du berceau des bantous. L’enjeu pour le comité scientifique est de souhaiter que le berceau des bantous devienne le berceau en Afrique de la « résilience » .

Partant du postulat que l’implication des populations suppose leur reconnaître la capacité d’être des agents de catalyse des transformations sociales et communautaires, que toutes les communautés sont dotées de ressources thérapeutiques et d’une intelligence situationnelle en sommeil malgré le polytraumatisme, le comité scientifique entend initier, impulser l’action. Agir revient à mettre en mouvement ces deux mécanismes de rebond pour que toutes ces communautés, tous les genres, les enfants et toutes les professions par catégories sociales, contribuent, chacune en proportion de ses capacités à une réinvention de la dignité et de l’unité, mises à mal.

Impulser une telle dynamique suppose que l’analyse et l’adoption d’une posture méthodologique d’un genre nouveau, à savoir repenser la pratique traditionnelle de résolution de conflit et refonder les liens en période post conflit. La nouvelle logique et la nouvelle dynamique signifient que la réconciliation entre les communautés et la reconstruction nationale ne sauraient continuer à demeurer le privilège d’un public restreint, soit parce que les citoyens lambda ne sont pas qualifiés pour percevoir les enjeux politiques à venir.

La réconciliation et la reconstruction ne sauraient être l’apanage de la technolâtrie seule, voire des discours des différents clergés. La crise a révélé les limites et les fragilités des approches de nos instruments , particulièrement le culte de la coercition et de l’injonction paradoxale.

Le séminaire sur la « Résilience » suggère d’ouvrir le processus de reconstruction et de réconciliation à toutes les composantes des communautés de la nation Centrafricaine comme « modus opérandis ». L’architecture globale et l’édification de la République Centrafricaine des années à venir appellent et requièrent l’implication de tous et non l’œuvre d’un petit cercle d’experts et/ou d’initiés.

C’est en vue de mettre en perspective cette République Centrafricaine meurtrie que le comité scientifique et les deux mouvements organisateurs ont retenu le principe d’une seule table ronde et construite autour de l’intervention d’un spécialiste en psychologie et en psychanalyse ; Alain Lamessi.

L’orateur a su conjuguer la résilience en trois verbes : Voir- Comprendre et Agir pour impulser un nouveau paradigme, refonder le socle de la République et de l'Etat. On relèvera également la tonalité du message d’ouverture de M. Emmanuel-Olivier- Gabirault;le ton qui convient pour nommer la pathologie sinon il y aurait erreur de diagnostic ; bien nommer, qualifier le mal [ Albert Camus]. Quant au modérateur de la table-ronde, il invite la diaspora Centrafricaine à s'approprier cette pensée du célébre homme d'Afrique ; Nelson Mandela ; notre icône : Aucun de nous, en agissant seul ne peut atteindre le succès. Tout seul on va plus vite, ensemble, on va plus loin » e. Tous les trois ont mis l’accent sur ces trois verbes pour que la résilience ne se réduise ni au prisme d'analyse ni à la mise en œuvre par mimétisme ou par analogie mais à une reconstruction des colonnes sur lesquelles reposera désormais la République Centrafricaine post conflit.

L’invitation lancée par la table ronde aux séminaristes à une approche holistique du dialogue nationale par le prisme de la « Résilience » , d’abord par Jean-Bosco Péléket, ensuite par le Président de la coordination générale des Centrafricains de France et de Alain Lamessi , a été déclinée dans les deux ateliers de l’après-midi. La mise en œuvre de ce concept suggère que chaque acteur et chaque participant au dialogue s’approprie individuellement et collectivement le concept dans toute sa complexité. Appréhender sans approximation les contours et les enjeux tout en prenant en compte le contexte socio-culturel  pour ce qui relève de la mise en œuvre.

Les souhaits notoires des participants au séminaire et particulièrement aux deux ateliers animés respectivement par Léon ODOUDOU et David Koulayom d’une part et Gervais Douba et Firmin Mackpayen d’autre part, visent à ce que les oubliés, les frustrés de la période post-coloniale deviennent désormais des co-contractants du nouveau pacte social et que les « Morts sans sépulture » ne soient pas morts en vain.

En dehors du Groupe de Reims et de la CGCF, le séminaire a regroupé de nombreux représentants des mouvements composant la diaspora de Centrafrique en France dont l’association AS de Cœur, les Amis de Centrafrique, le Fondateur du site « Sangonet » ; Victor Bisseguet et le comité ad hoc « des conversations centrafricaines  pour la paix » ; Adolphe Pakoua.

A l’aune d’autres nations dans le monde et sur le continent africain, qui l’ont expérimentée, la résilience n’est ni le pardon à l’esbroufe, ni la refondation du pays sur le règne de l’impunité. Comme le fait remarquer pertinemment Orphée Douaclek du comité scientifique, la résilience ne sacralise pas - non plus une opération « mains propres » à l’esbroufe, a fortiori un simulacre et/ou une parodie « d’opération Vérité et Réconciliation ». La résilience ne confine pas au déni et ne consiste pas à pontifier les poncifs rajoutera Jean-Pierre Mara  

Les enjeux actuels et futurs visent à faire entrer ce concept dans les mœurs et pratiques politiques. L’objectif étant d’outiller les communautés composant les 4.5000 000 Centrafricains de repères et de référentiels de démocratie, pour l’émancipation de toutes les communautés.

La République Centrafricaine des années à venir ne se renouvellera qu’à ce prix, particulièrement l’accès aux droits civiques de tous et la gouvernance territoriale au profit du plus grand nombre et non au détriment du plus grand nombre.

Le Coordonnateur du Comité scientifique :

Gervais Douba













































Mot d’ouverture du séminaire

MOT D’OUVERTURE DU SEMINAIRE

Par EMMANUEL -OLIVIER GABIRAULT

PRESIDENT DE LA COORDINATION GENERALE DES CENTRAFRICAINS DE FRANCE

(PARIS 01 NOVEMBRE 2014)

Distingués invités, Mesdames, Messieurs Chers compatriotes,

Nous sommes ici dans ce beau cadre pour échanger sur un sujet concernant la République centrafricaine, traversée depuis plus d’un an par une crise politique aux conséquences multidimensionnelles sans précédent.

Permettez-moi tout d’abord de saluer la présence de chacun de vous, certains étant venus de loin, notamment de divers pays de l’Union Européenne pour apporter leurs contributions à ce séminaire dont le thème est « LA RESILIENCE, L’INELUCTABLE CHEMINEMENT POUR REUSSIR LA RECONCILIATION EN CENTRAFRIQUE ».

Je tiens également à remercier tous ceux qui ont contribué, de près ou de loin, à sa tenue, sans oublier bien évidemment tous les intervenants qui ont usé du temps et de l’énergie, en dépit de leurs innombrables contraintes, pour préparer les thématiques qui feront l’objet de réflexions et de travaux en ateliers.

Mes pensées vont surtout à toutes les victimes de la crise centrafricaine, parmi lesquelles la photojournaliste CAMILLE LEPAGE tombée en reportage pour témoigner de l’horreur de la tragédie de notre pays, ainsi qu’à leurs familles respectives qui méritent une grande solidarité, et pour lesquelles nous devons nous déterminer à lutter, sans relâche afin que justice leur soit rendue.

En effet, tant qu’il y aura l’impunité en Centrafrique par l’absence d’enquêtes et de poursuites, de mesures d’amnistie, de grâce et d’immunité, les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité, à travers les violences sexuelles sur les femmes et les jeunes filles, l’utilisation d’enfants soldats, les tortures, mutilations, enlèvements devenus monnaie courante contre rançons vont se perpétrer, se perpétuer.

Il est donc impérieux d’y mettre énergiquement fin.

La crise politique que connaît actuellement la République centrafricaine a engendré des conséquences dramatiques cumulatives d’ordre : humanitaire, social, économique, psychologique, etc., touchant presque toutes les couches, toutes les composantes de la société.

Lampleur de ce quon peut appeler la « Tragédie centrafricaine » nous impose de nous arrêter un instant pour réfléchir aux solutions pouvant permettre au peuple centrafricain, complètement anéanti, de se relever afin de reprendre son destin en main.

C’est ce qui justifie d’ailleurs le thème de ce séminaire, à savoir la Résilience.

En effet, le génie d’un pays réside dans la capacité de son peuple à puiser au fond de la réserve patriotique l’énergie nécessaire pour surmonter les difficultés auxquelles il est confronté.

Toutes les grandes nations ont connu, au cours leur histoire, des moments de crise parfois plus difficiles comparativement à celle de la République Centrafricaine.

Cependant elles en sont sorties grandies par leur capacité à rompre avec une trajectoire négative, et surtout leur détermination à se projeter vers l’avenir en s’appuyant sur leur propre ressource individuelle et collective.



Comme j’ai eu à le dire dans mon message du 03 septembre 2014 aux centrafricains de France et par extension à tous les autres, ne nous faisons pas d’illusions : c’est par notre propre volonté que nous relèverons ensemble les nombreux défis qui s’opposent à nous maintenant et demain.

Nous avons plus que jamais besoin de ne pas tomber dans la résignation, mais au contraire de trouver les voies et moyens pour contrer la vulnérabilité psychologique liée à l’histoire traumatique de notre pays.

C’est là tout le sens des réflexions qui doivent caractériser ce séminaire. Chers amis de Centrafrique,

Chers compatriotes,

Nous avons le devoir, au cours de ces assises, de répondre aux différentes interrogations suivantes :

Je souhaite vivement qu’à l’issue de ce séminaire, nous puissions murir suffisamment nos réflexions sur le sujet afin de pouvoir dégager la substantifique moelle qui pourrait aider nos concitoyens vivant en Centrafrique et toutes les communautés à un dépassement de soi, essentiel pour l’avenir de notre pays.

Sans plus tarder, je laisse la parole aux différents intervenants pour présenter leurs thématiques.

Je vous remercie.



































Mot d'introduction de Jean-Bosco Peleket ; Président de séance.

  "Depuis quatre décennies, j'appelle de mes vœux la jeunesse centrafricaine à se rassembler pour non seulement débattre de leur avenir et du pays mais à écrire, à publier sur ce pays merveilleux comme il y en a peu au monde et qui croupit malheureusement dans la misère et à la honte par la faute des munzu-vucko et mercenaires des temps nouveaux.

 Parler, écrire et publier en français, langue de communication internationale, pour se faire entendre et comprendre hors de Centrafrique mais parler, écrire et publier en sango, notre langue nationale, comme le faisait Barthélemy BOGANDA, père fondateur de la République, pour être reçu, entendu et compris de notre peuple.

 

Je suis en effet profondément convaincu et je voudrais le partager avec vous toutes et tous ici réunis, que le jour où l'élite épousera la cause de notre peuple, pas comme elle l'a faite depuis 55 ans pour la flouer mais pour construire un destin commun, oui, le jour où l'élite fera corps avec son peuple, alors tout sera permis.  Un soleil d'une volupté exceptionnelle s'élèvera dans une atmosphère douce, exquise et éveillera les Centrafricaines et les Centrafricains à la vie. Nous nous apercevrons alors que "la vie n'est pas un spectacle" (Aimé CESAIRE). Nous apprendrons enfin à devenir maîtres de notre destin et il ne fait pas de doute que le monde s'ouvrira autrement à nous et fera la place qu'il faut à nos enfants et descendances.

 

Je veux saluer Gervais DOUBA, initiateur, Olivier GABIRAULT, président du CGCF et les organisateurs de ce séminaire, lequel entend faire débattre les enfants de la RCA de leur du pays.

Le sujet retenu peut prêter à d'âpres discussions en raison de la connaissance que nous avons des turpitudes nées de la post-colonie et de la tsunami qui a tout ravagé sur son passage en 2013. Mais ceux qui ont une bonne culture centrafricaine savent que celle-ci est pétrie de résilience, elle est faite de résilience.

 Aussi, sans plus tarder, je donne la parole à Alain LAMESSI pour présenter le sujet avant le débat auquel je vous convie tous.


Jean-Bosco PELEKET,

Ancien Directeur d'Hôpital

Essayiste

 



















DE LA RESILIENCE POUR REBONDIR APRES LES CRISES A REPETITION

EN REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

Intervention de Alain Lamessi ; Psychologue § Psychanalyste

Le coup de force de la Seléka du 24 mars 2013 a eu pour conséquence immédiate la chute du régime de Bangui et la fuite du Général Président Bozizé qui a trouvé refuge au Cameroun. L’Etat centrafricain s’est effondré comme un château de sable et les institutions de la République volées en éclats. C’est la descente aux enfers. Les observateurs avertis se livrent à de la surenchère d’épithètes pour qualifier la situation qui prévaut au cœur de l’Afrique. Pour certains, la République centrafricaine est un Etat zéro. Pour d’autres, c’est un Etat fantôme. Pour beaucoup d’autres encore, c’est un trou noir, un Etat en faillite, un Etat fragile, etc. Peu importe l’épithète retenue par les uns et les autres, la réalité est plus dramatique et se traduit en des chiffres effroyables : 30.000 personnes assassinées, 1 million de déplacés internes, 65000 réfugiés dans les pays voisins, des infrastructures détruites, des biens pillés, des archives détruites, des villas de particuliers réquisitionnées, etc…Cette descente aux enfers se poursuit allègrement encore aujourd’hui avec l’entrée en puissance des Anti-Balaka depuis le 5 décembre 2013. La souffrance du peuple centrafricain est loin de finir. Bien au contraire, elle ne fait qu’empirer.

Depuis l’indépendance formelle proclamée le 13 août 1960 et même un peu avant avec la mort accidentelle de Barthélémy Boganda, jusqu’aujourd’hui, la République centrafricaine a cessé de marcher en avant. Ivre de ses propres turpitudes, elle a continué de tourner en rond et très souvent de reculer, déviant de la trajectoire du progrès. Un parcours chaotique fait de violence, de coups d’Etat, de mutineries, de rebellions armées a définitivement sapé les fondements de l’Etat, aggravé la paupérisation du peuple et contribué à semer le doute au sein de la population qui ne croit plus à rien, ni à personne. Pire elle ne croit plus à elle-même.

Au regard de cet environnement d’apocalypse, une seule question vient à l’esprit : comment un Etat comme la République centrafricaine peut-il s’effondrer si rapidement et si facilement ?

En réponse à cette interrogation, certains préfèrent parler de « la malédiction des dix ans » pour signifier qu’à intervalles réguliers apparaît comme par hasard une crise violente qui remet tout à plat. Cette explication tout faite n’est pas satisfaisante car basée sur une approche superficielle et forcément simplificatrice de la réalité. Elle ne va pas au-delà de l’évidence.

Sans mésestimer la dimension spirituelle de la question, il nous faut étudier la loi sociologique et historique ainsi que les facteurs objectifs et subjectifs qui déterminent cette situation car on ne peut ne pas y voir un certain déterminisme.

I La République centrafricaine : un Etat en faillite, un Etat failli, un Etat fragile ou un Etat en situation de fragilité ?

Deux traumatismes majeurs ont marqué le monde et modifié le regard de la communauté internationale à partir de l’année 2000 :

L’attentat du 11 septembre 2001 qui a pulvérisé le World Trade Center à New-York et l’ouragan Katrina qui a littéralement balayé la nouvelle Orléans en 2003. Auparavant la désintégration de la Somalie en 1991, les conflits du Libéria entre 1992 et 2003 tout comme la guerre du Libéria qui a duré de mars 1991 à janvier 2002 ont fortement marqué les esprits.

L’Etat est désormais remis au centre des préoccupations car un Etat faible est une source potentielle de l’insécurité mondiale. Il peut facilement devenir un bastion du terrorisme. Cette vision stratégique de la sécurité nationale des Etats-Unis qui a prévalu en 2002 a pris le contre-pied de la politique des ajustements structurels imposés aux pays africains avec de nombreux échecs et des conséquences catastrophiques. Soit dit en passant cette politique des ajustements structurels a longtemps prévalu au niveau des institutions financières.

Cette nouvelle doctrine sécuritaire des Etats-Unis est devenue la stratégie sécuritaire de l’Europe en 2003 et s’est finalement imposée à tout le monde entier.

    1. Un pays en situation de fragilité chronique

Des appellations multiples et des concepts variés sont utilisés pour désigner un certain nombre de pays qui ont tous en commun de traverser ou de sortir de plusieurs crises, que ce soit en Afrique, en Amérique du sud ou en Asie : Etat failli, Etat en faillite, Etat fragile, Etat effondré, etc.

Ce sont des notions qui ne sont pas neutres. On ne dira jamais assez, ces qualificatifs ne sont pas neutres. Ils sont tous connotés idéologiquement et constituent le plus souvent la justification à une intervention militaire. Le concept de l’Etat fragile est un concept par trop controversé qui ne fait pas l’unanimité.

L’approche de l’Union africaine de cette problématique est la plus réaliste car moins stigmatisant. Elle se base sur une situation et non sur une catégorie des Etats. Un pays ne peut tomber en faillite tout comme un pays ne peut être fragile. Il est en situation de fragilité dont il peut sortir. La réversibilité de la situation est donc du domaine du possible. C’est une approche dynamique qui appelle au dépassement du statut quo.

Dire que la République centrafricaine est un Etat en situation de fragilité, c’est admettre l’évidence. C’est depuis plus cinquante ans qu’elle elle est entrée dans un cycle sans fin de crises protéiformes dont elle ne sort plus. Cela fait belle lurette qu’elle n’est plus à mesure d’assumer les missions régaliennes. L’Etat n’existe plus que de nom et n’a aucune espèce d’autorité, l’administration n’existe pas ou plus sur une grande partie du territoire. La justice n’est pas exercée tandis que la justice populaire se développe. Des bandes armées écument les quartiers et les villages. Elles pillent et tuent impunément. Elles érigent des barrières et empêchent la libre circulation des citoyens. Elles perçoivent même les frais des douanes et font du trafic du diamant et de l’or. L’Etat n’a pas les moyens ni d’assurer la sécurité et la protection des citoyens, ni de payer les salaires et les bourses. Les écoles et les hôpitaux fonctionnent à minima. On pourrait multiplier à l’infini les domaines où l’Etat centrafricain est défaillant.





    1. Les facteurs de fragilité de la République centrafricaine

La situation de fragilité où croupit la République centrafricaine n’est pas le fruit du hasard. Loin s’en faut. Elle n’est pas non plus le résultat d’une génération spontanée. Elle découle de la conjonction de plusieurs facteurs dont certains plongent leurs racines dans la période coloniale et qui ont laissé des stigmates profondes : traite négrière, travaux forcés, compagnies concessionnaires, impôts indigènes, etc.

Bien sûr que nous n’allons pas continuellement évoquer le passé pour justifier nos multiples et autres échecs successifs. Les mêmes faiblesses qui ont justifié le coup d’Etat de la Saint Sylvestre en 1966 ont grossi pour atteindre aujourd’hui des proportions considérables 50 années plus tard : mauvaise gouvernance, banditisme d’Etat, faiblesse de l’Etat, non-respect des droits de l’homme, détournements des deniers publics, corruption, concussion, clientélisme, tribalisme, impunité, etc.

II : Résilience versus fragilités pour mieux rebondir

Les politiques d’ajustement structurelles préconisées par les institutions de Bretton Woods dans les années 1990 n’ont pas toujours abouti aux résultats escomptés dans les pays où elles ont été imposées. Bien au contraire, elles ont souvent donné lieu à plus d’effets pervers qui ont contribué à aggraver la pauvreté. Elles ont engendré plus tard, c’est à dire en 2007 et 2008 des mouvements de révolte de la faim dans de nombreux pays notamment africains : Mauritanie, Guinée Conakry, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Egypte.

Ce schéma est désormais délaissé par les bailleurs de fonds et autres organisations spécialisées dans les aides bilatérales. L’objectif visé est justement de favoriser l’émergence des Etats résilients capables de réaliser les objectifs millénaires du développement.

Aujourd’hui contre les vulnérabilités ou les situations de fragilités est opposée la résilience comme antidote. Mais que peut bien dire le mot résilience que l’on voit fleurir dans tous les discours ? La résilience est mangée à toutes les sauces sans que l’on ne sache jamais de quoi il s’agit.

2.1. La résilience : un concept fourre-tout mais pourtant très opérationnel

La résilience est une notion que l’on retrouve partout dans les documents officiels des organismes comme l’OCDE, l’UE, l’UA, la Banque mondiale, le FMI, la BAD, l’AFD, etc. et dans les discours des décideurs tant au niveau multilatéral que bilatéral. Elle est aussi l’objet d’étude dans des domaines divers et variés. Plus qu’un effet de mode, la résilience s’impose comme une réalité incontournable en situation de crise.

Empruntée à la physique, la résilience désigne tout d’abord l’aptitude d’un corps à résister à un choc.

C’est « la capacité d’emmagasiner de l’énergie et de se mouvoir élastiquement sous une charge sans se briser ou se perdre » (Gordon, 1978). De la physique, elle a étendu son influence dans presque tous les domaines : psychiatrie, psychologie, économie, écologie, urbanisme, sciences sociales, gestion des risques, climatologie, etc.

Elle s’impose désormais comme un concept fourre-tout. Etant donné qu’elle ratisse si large, la résilience reste une notion polysémique (G. Djament-Tran, 2012) en même temps qu’elle apparaît comme une notion très équivoque.

Considérée à la fois comme un processus ou comme un état, la résilience renvoie à l’idée d’une capacité intrinsèque. Par conséquent, elle admet des acceptions différentes. Nous l’avons déjà remarqué que la résilience, si l’on se place du point de vue de la physique, est la capacité d’emmagasiner un choc sans se briser.

En dehors de la physique, la résilience est tout simplement la capacité de se reconstruire après un drame ou une crise par exemple. Dans une perspective écologique, Holling (1973) propose de la résilience, une définition qui n’est simple qu’en apparence: la capacité d’un système à maintenir son intégrité, à revenir à l’état antérieur, à l’état d’équilibre, c’est-à-dire à l’état normal après avoir été soumis à de fortes perturbations.

Selon le département britannique pour le développement international, la résilience « est la capacité des pays, des collectivités et des familles à faire face au changement tout en maintenant ou en modifiant leur niveau de vie à la suite de chocs ou de stress sans pour autant compromettre leurs perspectives à long terme ».

De son côté le PNUD définit la résilience comme « un processus de transformation qui repose sur la force des individus, de leur communautés et de leurs institutions de prévenir et d’atténuer les chocs et de tirer les leçons de leur expérience ou de reconstruire en mieux ».

Que pouvons-nous retenir de toutes ces définitions ? La résilience renvoie à l’idée que dans un contexte d’un environnement hostile, l’individu ou un groupe d’individus peut faire le travail sur lui-même et trouver une réponse personnelle pour mettre en valeur le positif qui est en lui. C’est toujours le résultat d’une interrelation dynamique entre l’individu et son environnement et implique une action volontariste face aux difficultés.

Rapportée à la situation de la République centrafricaine, la résilience est la capacité collective de trouver en nous-mêmes les moyens pour surmonter les multiples facteurs de fragilité qui nous ont précipités dans l’abîme et surtout pour rebondir et retrouver des lendemains meilleurs.

2.2 La résilience implique au préalable un changement de paradigme

A la défaillance, à la vulnérabilité ou à la fragilité avérée de nombreux états de l’Afrique, de l’Amérique du sud et de l’Asie du Sud-Est, la communauté internationale oppose désormais volontiers l’obligation de mettre en œuvre un programme ambitieux avec pour objectif de se hisser à la stature d’un Etat résilient. C’est surtout le cas de ces pays comme la République centrafricaine qui sont confrontés à des situations de crise récurrente : ces pays en en conflit, en transition ou en situation de post-conflit. Ces pays qui traversent des situations d’incertitude marquées par la rupture de l’ordre ancien avec l’éventuelle émergence d’un ordre nouveau.

Nous ne le répéterons jamais assez : la résilience comme capacité de rebond ou comme capacité à absorber un choc est le crédo de la communauté internationale.

C’est le nouveau paradigme qui oriente son action. Hier, c’était l’injonction des ajustements structurels. Aujourd’hui, le discours des partenaires au développement tourne autour de la question de la résilience.

Plus qu’un effet de langage ou un effet de mode, il s’agit de toute une philosophie d’action qui vise à mettre en œuvre une stratégie endogène pour surmonter les difficultés conjoncturelles ou les vacuités structurelles comme conséquence des crises qui sévissent dans notre environnement. Cette nouvelle stratégie procède d’un postulat simple qui n’est pas dénué de bon sens : un Etat en situation de fragilité ne peut guère disposer des moyens nécessaires et suffisants pour mener à bien les objectifs millénaires du développement.

2.3 Le Rwanda, un Etat résilient comme modèle pour la République centrafricaine

Certains pays africains ont connu des situations aussi catastrophiques sinon pires que celles qui ont précipité la République centrafricaine dans le chaos. Ils s’en sont sortis avec beaucoup de détermination. Leur réussite devrait nous inspirer. Au nombre de ces pays nous pouvons citer : l’Ethiopie, le Rwanda, l’Ouganda, l’Angola, le Mozambique pour ne citer que les plus significatifs.

De tous ces pays, le Rwanda et l’Ethiopie méritent une mention spéciale. Et le Rwanda n’a plus cessé de récolter des félicitations sur félicitations de la part de tous les partenaires et surtout de la part des organisations internationales et surtout de la part des institutions financières internationales tellement son rebond est spectaculaire et ses réussites éclatantes. Il est souvent cité comme le meilleur exemple d’un Etat résilient.

Pour bien mesurer le chemin parcouru, il n’est pas vain de rappeler qu’en 1994, suite à l’assassinat du Président Juvénal Habyarimana, la guerre civile a fait entre 800.000 et 1.000.000 de morts parmi les tutsis en à peine 90 jours. A titre de comparaison c’est comme si toute la population de Bangui, de l’Ombella M’Poko et de la Lobaye réunies est assassinée à la fois en seulement trois mois. Face à de drames si épouvantables, au lieu de déprimer et de se lamenter sur son sort, le Rwanda a su faire face à son destin. Il a rebondi de façon spectaculaire et à l’admiration de tout le monde. Au lieu de sombrer et de disparaître, le Rwanda renait de ses cendres. Et de quelle manière ! Les chiffres parlent d’eux-mêmes :

En seulement vingt ans, le Rwanda a réussi là où beaucoup d’autres ont trébuché ou trébuchent encore. En effet, il a réussi à :

A ce niveau de réflexion une précision mérite d’être apportée. Le Rwanda n’est ni un producteur du pétrole, ni un exportateur du diamant ou de l’uranium. C’est une précision qui n’est pas superflue.

Comment le Rwanda a pu obtenir de tels résultats ? Là encore, il est intéressant de noter qu’il ne s’agit pas d’un miracle mais d’une volonté politique forte qui a fixé des objectifs clairs et élaboré une stratégie basée sur des points suivants :

III : La République centrafricaine peut-elle devenir un Etat résilient ?

Lorsque vous voyagez et que l’autocar vient à être embourbé, tous les passagers descendent. Accompagnés du chauffeur et des apprentis, ils retroussent les manches et, dans un effort collectif, poussent le véhicule pour le sortir de la boue. C’est la condition de la poursuite du voyage pour espérer arriver à destination.

Aujourd’hui notre maison commune, la République centrafricaine, est embourbée. Pire elle est même déjà tombée au fond du trou de l’histoire. Il faut, par conséquent, la sortir de la mauvaise passe et la mettre debout pour qu’elle continue la marche en avant. Il y va de la survie de tout un peuple.

La situation de fragilité de la République centrafricaine que nous avons maintes fois évoquée nous convoque à l’action dont l’unique objectif est sinon d’éradiquer du moins de réduire les nombreux facteurs de fragilité par le renforcement de nos capacités. La résilience interroge de notre capacité collective à rebondir après de si graves crises à répétition qui ont de multiples conséquences sur la pérennité de la nation et sur le niveau de vie de la population.

3-1 Quelques conditions minimales à satisfaire pour une résilience effective en RCA

La République centrafricaine, un Etat résilient dans 10 ou 20 ans ? C’est possible à condition de remplir quelques conditions minimales.

Plutôt qu’un catalogue de bonnes intentions, ces différents points mis en œuvre permettront de redonner confiance au peuple.

3-2 : Quel rôle peut jouer la diaspora centrafricaine ?

Cette question n’est pas si saugrenue que cela. Elle est d’autant plus importante qu’elle soulève en creux la problématique de la légitimité de la contribution des centrafricains établis à l’étranger à l’émergence d’un Etat résilient. Soit dit en passant, cette diaspora est aussi malade des lignes de fracture qui sont observables au niveau de population centrafricaine en général. C’est pourquoi il faut d’abord s’évertuer à minimiser le poids de ces pesanteurs. Ensuite, il faut changer notre regard et nos priorités.

Les communiqués de presse ne suffisent plus parce que personne ne lit ou parce que ceux qui le lisent ne les prennent pas au sérieux car ils pensent immédiatement que les auteurs sont soit en quête d’un poste politique, soit en train de se livrer à des critiques systématiques.

La diaspora, c’est avant tout des compétences humaines avec de très hautes qualifications et peut-être même pourquoi pas la puissance financière. La première démarche consistera à recenser toutes les potentialités en termes de compétences disponibles et ensuite à bien cibler les besoins de la population et à y répondre de façon efficiente.

Au Libéria et au Soudan du Sud par exemple la diaspora a beaucoup contribué à l’amélioration de la santé de la population. On peut imaginer que des médecins, infirmiers, sages-femmes, etc. de la diaspora prennent quelques jours sur le temps de vacances pour aller se mettre au service de la population centrafricaine. Il faut alors négocier le financement d’une telle opération pour le contrat soit gagnant-gagnant.

L’ONU sera présente en République pour une période d’au moins dix années. Beaucoup de milliards de francs CFA seront injectés en appui aux différents projets. Or nous savons que de plus en plus les bailleurs de fonds ou les organismes d’aide au développement sont plus réticents à confier de l’argent à l’Etat qui s’est révélé plus d’une fois mauvais gestionnaire si ce n’est un bon pilleur. Pourquoi, avec toutes les compétences que nous avons, ne pas créer une agence qui proposera son service pour gérer le DDR ?

Les pistes ne manquent pas. Une autre journée de réflexion spécialement consacrée à cette thématique est nécessaire.

En guise de conclusion

La résilience, c’est le refus de la fatalité. C’est aussi le refus de baisser les bras face aux difficultés aussi grandes soient-elles. C’est un réflexe de survie dans un contexte où l’on ne peut et l’on ne doit compter que sur soi-même. De la crise qui nous assaille de toutes parts et qui nous a précipités au fond de l’abîme, nous devons non seulement sortir mais rebondir.

Si un pays comme le Rwanda a pu s’en sortir 20 ans après le génocide, c’est par il y a eu leadership fort avec une vision claire de l’avenir du pays qui a mis en place un programme de redressement dans la rigueur et la transparence en incluant tout le monde. C’est un modèle qui peut nous inspirer. L’avenir de la République centrafricaine ainsi que l’intérêt de son peuple l’obligent à rebondir pour devenir à terme un Etat résilient.

Atelier 1 :

La Résilience, inéluctable cheminement pour réussir la réconciliation et la reconstruction : opportunités et limites.

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Modérateur : Léon ODOUDOU IGNABODE

Rapporteur : David KOULAYOM

A- La caractérisation de la résilience pour construire la boîte à outils

I : Chez la Femme :

Principale victime de toutes les crises centrafricaines : groupe extrêmement fragilisé, toujours exposé, depuis l’envahissement des baniamoulengués. Elles constituent pourtant le fondement de la société centrafricaine. Elles sont un lien important entre les hommes dispersés, ceux qui sont restés, et les enfants dont elles continuent de s’occuper. Victimes de viols et souvent témoins de massacres de leur famille, la femme centrafricaine est polytraumatisée.

L’atelier 1 préconise :

Le pays doit penser à former différents spécialistes (psychologues, psychiatres, assistantes sociales …) et ne pas compter exclusivement sur l’intervention des ONG étrangères. Le but est d’aider à surmonter efficacement et définitivement les traumatismes. Il faut quitter le statut de victimes pour devenir acteur.

II : Chez l’enfant

Près de 10 millions d'enfants Centrafricains des deux sexes sont enrôlés par des groupes armés selon un rapport d'une ONG ; en l'occurrence Véronique Aubert de Save The Children. Les enfants dont certains sont âgés de moins de 8 ans sont forcés de combattre, de transporter des provisions et de servir d'esclaves sexuels.

Autant que la femme qui est souvent sa mère ou un très proche membre de la famille, l’enfant est aussi polytraumatisé ; il a subit les mêmes violences physiques et psychologiques que les adultes.

Déscolarisé par plusieurs années blanches, il constitue un réservoir de recrutement pour les groupes armés. L’enfant centrafricain a perdu le socle de valeurs et ne se donne plus de perspectives d’avenir. C’est une jeunesse sacrifiée, pour laquelle il faudra construire des projets d’éducation et de formation spécifiques.

L’atelier 1 préconise :

III : Les communautés religieuses

Chaque centrafricain appartient à une communauté, qui joue un rôle déterminant dans sa vie ; mais la RCA doit être et demeurer un Etat laïc. Il faut donc dénoncer le lien incestueux entre le politique et le religieux trop souvent utilisé pour semer, propager l’obscurantisme et déposséder le peuple voire confisquer ses intérêts fondamentaux à commencer par la gouvernance de son esprit.

L’atelier 1 préconise :

B Au lendemain du conflit…………..

I : Se résigner ?

II : Reconstruire, recréer sa propre image, réinventer sa propre dignité,

III : Reconquérir les ressources thérapeutiques inter communautaires ou intracommunautaires de guérison

C : Le travail de cicatrisation

- Il faut provoquer une mobilisation générale de la communauté nationale. Il s’agit de reconstruire à l’échelle d’un peuple

- appeler les partis politiques, les syndicats, les associations et autres composantes de la société civile à jouer, leur rôle d’éducation et de formation du citoyen et de leurs militants.

Les limites…………

D Être porteur d’un tel projet c’est……………

C’est identifier les leviers d’action et proposer leur mise en œuvre ?

Encourager l’urgence humanitaire ?

Elaborer un plan d’action stratégique et tactique avec la collaboration des vecteurs locaux de propagation et ou dissémination ?

Conclusions :

Les 6 points qui font consensus pour entrer dans la boîte à outils

1 - recenser et identifier les victimes

2 - permettre aux victimes de s’exprimer (cadres, structures…..liberté)

3 - Refonder l’école

4 – Rompre les liens incestueux entre le politique et le religieux

5 - Agir pour que les victimes deviennent acteurs et témoins

6 – Créer un cadre institutionnel pour la coordination et la synergie des ONG















Atelier 2 :

Les communautés résilientes ; un tremplin pour la gouvernance et la démocratie en Centrafrique.

Modérateur : Gervais Douba

Rapporteur : Firmin Mackpayen

Survol de la genèse du concept par Firmin Mackpayen

A l'origine, en physique des matériaux, on dit d'un métal qu'il est résilient lorsqu'il est capable de reprendre son état initial après avoir été soumis à un étirement ou une pression. Notion qui désigne à l'origine une qualité des matériaux qui tient à la fois de leur élasticité et de leur fragilité et qui se manifeste par leur capacité à retrouver leur état initial à la suite d'un choc ou d'une pression continue.

Se référant à l'auteur de la Résilience ; Boris Cyrulnik selon lequel, la souffrance est un merveilleux, Firmin Makpayen considère que le conflit a crée les conditions qui devraient favoriser l'éclosion des aptitudes des individus et communautés en Centrafrique afin qu'ils inventent des systèmes et mécanismes désormais capables de vaincre l'adversité ou une situation à risque. Dans ce sens la résilience est un véritable dissolvant. :

Les échanges dans l'Atelier en vue de collecter les arguments qui font consensus et susceptibles de faire œuvre d'outils :

Question : notre communauté déjà tant déchirée, notre nation en miettes aujourd'hui a- t-elle la capacité, les ressources, pour surmonter et dépasser ce traumatisme ?

L'atelier a identifié au moins trois causes de la crise multifactorielle de l'Etat postcolonial : incapacité à assumer ses prestations de souveraineté dont l'organisation d'une armée nationale, incapacité à assurer la protection sur l'ensemble du territoire, l'incapacité à impulser des dynamiques territoriales génératrices d'ancrage des populations et le placement de la République sur un terrain miné est le résultat de l'accumulation des frustrations et des dénis de tout type et de toute forme que les populations n'admettent plus. Il faut refonder la Nation, la République et l'Etat sur d'autres socles et la résilience est un des outils et sa mise en œuvre ; une des solution idoine.

Programme : Des orientations, des ressources humaines interdisciplinaires, un état d’esprit à élaborer dans une charte et/ou une plateforme et un budget conséquent, le tout étalé sur une voire deux législatures.

Nous devons nous inspirés d'autres pays qui ont connu un parcours aussi chaotique que celui de la RCA et contribuer à la création d’un environnement propice à l’encrage de la résilience.

La CVR a placé au centre de son action les notions de compassion, de responsabilité et de pardon. Le leadership de Mandela a facilité ce processus. Rôle influent des leaders religieux.

Défi de la réconciliation post-génocide.

  1. Au cours des années qui ont suivi le génocide, plus de 120000 personnes furent enfermées et accusées de responsabilité criminelle pour leur participation au massacre. Le système judiciaire rwandais a fonctionné sur 3 niveaux :

  2. Le TIPR

  3. Les tribunaux nationaux

Les juridictions populaires, dites "Gacaca" avec 2 notions clés à cette procédure: l'aveu et le pardon.


La sortie de crise est un moment particulièrement sensible dans le cycle de la vie d'un conflit.

Desmond TUTU.

Gouvernance légitime (pouvoir issu des élections). Mais combattant toutes les formes d’anomies au nom de l’incapacité à agir pour défaut de moyens.

Conditions pour réussir cette résilience :

Préconisations de l’atelier 2

1- Identifier les facteurs de résilience et les compétences requises.


Proposition pour la création d'une agence de médiation pour promouvoir un "standard moral" dans la gestion du bien commun.

  1. Repérer les facteurs de conflit latent :

3 - Facteurs de résilience:

Un Etat et une administration civile et militaire promouvant :


3 - Plateforme politique de collaboration entre entités

Appel est lancé aux partis politiques et aux organisations de la société civile pour construire des plateformes minimum de collaboration. L'objectif est de faire changer totalement nos principes de fonctionnement.

4 La résilience se construit davantage qu’elle ne se décrète. Elle porte en elle les germes d’émancipation

Distinguer les différents niveaux et les différentes étapes de la résilience:


Conclusion de l’atelier:

L'approche de la résilience permet de concilier « aide humanitaire et développement local. L'enjeu est de soutenir les populations en situation de fragilité et de vulnérabilité, en leur offrant des possibilités non seulement de prévenir des chocs futurs mais également d'assurer par là-même la continuité et de conduire l'indispensable transition entre les phases d'aides humanitaires et l'appui au développement.

Les partis politiques et les organisations se revendiquant de la société civile doivent trouver dans la mise en œuvre de la résilience davantage un outil de reconstruction de la citoyenneté et d'éducation au développement.

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Conclusion générale des travaux du séminaire



Pour le séminaire, poser le regard sur les voies de sortie de la crise en Centrafrique par le prisme de la résilience, c’est prendre à bras le corps l’ampleur et la gravité de cette crise en dégâts humains et matériels et surtout la menace de l’amnésie généralisée. Le séminaire invite les Centrafricains ; toute opinion politique et toute confession religieuse confondues, des deux genres à résister à la tentation de réduire cette crise à un phénomène éphémère et évanescent.

Mettre en œuvre la résilience comme instrument et approche politique avec un « modus operandi » signifie qu’au titre des outils thérapeutiques :

Pour le comité scientifique

Le Coordonnateur.

Gervais Douba