Nous avons
encore à l’esprit l’échec de Brazzaville. De l’argent a été distribué à des
individus n’ayant aucune emprise réelle sur le conflit, et tout le monde est
rentré content et puis l’accord de cessation des hostilités auquel les
belligérants ont souscrit de respecter, n’a jamais été respecté à ce jour.
Depuis 4 jours la ville des M’brès dans la Nana Gribizi est à sang et à
feu.
Notre préoccupation
essentielle, aujourd’hui, c’est d’aller aux élections car le retour à l’ordre
constitutionnel n’est pas négociable. Même si nous savons que les élections ne
feront pas faire disparaître pour autant ni les séléka, ni les anti-balaka, et
pourtant ils sont tous dans le gouvernement ; mais une chose est
fondamentale, la question d’auto-détermination de notre peuple car l’état de
transition s’apparente à ce que nous qualifions de chosification d’un
peuple.
Les préparatifs des
élections doivent s’accélérer. Nous remercions la communauté internationale et
la France de leur aide et il faut aussi que le gouvernement de transition donne
plus de messages de confiance à l’endroit de ceux qui nous soutiennent que nous
méritions de recevoir d’eux de l’aide.
Que d’aucuns ne
confondent le forum de Bangui à un dialogue de réconciliation. Ce forum
ne doit pas oblitérer le « Dialogue, justice, paix et
réconciliation » qui se tiendra dès la mise en place du premier
gouvernement élu. Ce dialogue à nos yeux aura une portée historique que la
transition ne pourra conduire. Il faut un gouvernement légitime, et les
élections sont la seule voie pour légitimer un gouvernement et lui confier tous
pouvoirs et toutes autorités nécessaires d’agir au nom d’un
peuple.
Le « dialogue
justice, paix et réconciliation » ne passera pas sous la transition, il
passera sous un gouvernement issu des élections démocratiques. Un gouvernement
légitime qui aura compris les paradigmes sociaux et politiques de cette crise.
Ce dialogue qui se veut de fixer la base de la création d’un nouvel
Etat-politique.
D’ailleurs, la RCA n’a
pas existé, et elle n’a jamais existé. Il nous faut maintenant un nouvel Etat et
c’est le dialogue de la réconciliation qui aura la charge de fixer la base de ce
nouveau Etat élevé au stade de la république au sens du terme. Ce dialogue sera
défini comme la rencontre de toutes les forces éclairées de notre pays pour
lotir et bâtir la fondation de l’Etat. Et ça, nous ne pouvons pas confier une
telle échéance d’importance nationale à un gouvernement transitoire sans assise
légale au risque de confondre réconciliation et pardon et l’oubli de la justice
sans laquelle la reconstruction de l’Etat ne sera pas
possible.
Nous ne pouvons plus
reconstruire notre Etat sur du sable, nous ne voulons plus marcher dans la boue,
il faut une vraie fondation, un Etat de droit. Le droit est le ciment de
l’association des peuples. La réconciliation ira plus loin pour chercher
une vraie issue de sortie de crise sur la base d’une intégration politique
et la clairvoyance. Le processus de réconciliation sera long, il ne se
déclenchera pas tout seul, sans l’appui politique de
l’Etat.
Ce forum ne doit pas
non plus nous faire perdre le temps nécessaire à consacrer aux préparatifs
des élections qui auront lieu dans six (6) mois.
Le forum de Bangui
sera un défrichassage du champ social des problèmes, c’est-à-dire la mise à nue
de notre ignorance et de notre égocentrisme dont la responsabilité incombe
totalement aux gouvernements successifs qui se sont relevés à la tête de notre
pays dont certains membres sont là et qui se sont déjà alignés pour le pouvoir,
lequel pouvoir ils ont vachement échoué à sa gestion. Cette crise relève de la
conséquence de leur gestion.
L’échec de gestion
patrimoniale d’une société est collégial même si le Directeur général de
l’entreprise porte le chapeau, il n’en demeure pas moins que la responsabilité
des autres Directeurs de département est entachée, dans le cas d’espèce de notre
pays ce sont les Premiers Ministres et les Ministres. Il est bien de noter qu’il
s’agit pour eux d’un échec politique et personnel.
Ce forum, c’est un
instant de prise de conscience et d’acceptation, éloigné de tout orgueil, de
toute rancune, de toute haine, de tout phantasme, de toute velléité, mais doté
d’un courage sans équivoque, d’un esprit libre et dégagé, une volonté
participative et créative, le rêve d’un renouveau et l’ouverture vers un pacte
moral et social. Il s’agit par ce forum de faire émerger la face cachée de
l’iceberg, de le dimensionner et prendre toutes les mesures de ses différentes
facettes.
Le forum de Bangui
consistera à établir la feuille de révélation des anomalies et des problèmes
sociaux auxquels notre pays est confronté, un prélude au dialogue national.
C’est-à-dire l’identification de l’ensemble des insatisfactions objectives et
des faits physiques défavorisant. Etablir une check-list des conséquences de nos
funestes politiques de gouvernement, un tableau synoptique, un
audit.
Ce qu’il faut
retenir par tout et prioriser à l’heure actuelle, l’arrêt des hostilités
inutiles, l’effort des cœurs à faire passer les élections absolument. La paix y
est et le sera par notre détermination et non par notre immobilisme légendaire
qui frise le manque de courage et de défi.
Fait à Bangui le
20/12/14
Le
président
Robert
ENZA