En
Centrafrique, «Sangaris» a écarté le pire
Par
Alain Barluet - Mis à jour le 04/12/2014
http://www.lefigaro.fr/international/2014/12/04/01003-20141204ARTFIG00457-en-centrafrique-sangaris-a-ecarte-le-pire.php
Des soldats français
de «Sangaris» en patrouille. Aujourd'hui encore, dans les zones les plus
sensibles, «la variation des rapports de force est permanente. En une semaine,
tout peut s'inverser», prévient une source militaire. Crédits photo :
ECPAD
Déployé
il y a un an, le dispositif militaire français a enrayé la spirale des violences
même si l'insécurité demeure.
«La
mission a été accomplie. Un palier sécuritaire a été atteint. Des pics de
violences subsistent mais la solution n'est plus seulement militaire.» Ainsi
résumée à l'état-major des armées, la situation en République centrafricaine
(RCA) traduit un bilan en demi-teinte où le pire, toutefois, a été évité. Le
5 décembre 2013, lorsque la force militaire française «Sangaris»,
mandatée le jour même par l'ONU, intervient en urgence en RCA, le pays est en
train de glisser vers le chaos. La spirale des violences intercommunautaires est
en marche, née du renversement du régime de François Bozizé, en mars 2013,
par une coalition rebelle à dominante musulmane, la Séléka, dirigée par Michel
Djotodia. Au fil des mois, les exactions des combattants Séléka contre la
population majoritairement chrétienne ont suscité la formation de milices
d'autodéfense, les Anti-Balaka, qui s'en sont pris aux civils musulmans. À Paris
et à Washington, on parle d'une «situation prégénocidaire». Un désastre
humanitaire se profile. Plus de 120.000 déplacés campent sur l'aéroport M'Poko à
Bangui.
À Paris, on évoque alors une opération «coup de poing» permettant de rétablir rapidement un niveau de sécurité minimal. Il s'agit aussi de favoriser la montée en puissance d'une force africaine, la Misca, puis d'une mission de l'ONU, la Minusca, qui a pris le relais en septembre dernier. De fait, le processus s'est avéré plus difficile et plus long que prévu initialement. Éruptions subites de violence, manifestations de «civils» évoluant, en un rien de temps, en prises à partie de haute intensité, avec des armes de guerre, provocations, instrumentalisations par des meneurs radicaux: les 1600 soldats français de «Sangaris» (renforcés à 2000 en février) sont confrontés à une palette sécuritaire extrême et volatile. Aujourd'hui encore, dans les zones les plus sensibles, «la variation des rapports de force est permanente. En une semaine, tout peut s'inverser», relève une source militaire.
Stabilisation
D'abord
centrée sur Bangui, la force «Sangaris» - qui n'échappera pas, un temps, aux
accusations de parti pris en faveur de l'un ou l'autre camp -, oriente ensuite
ses opérations en direction de l'ouest. De février à septembre, elle concentre
ses efforts sur la sécurisation de l'axe routier vital reliant la capitale à la
frontière du Cameroun. Entre-temps, depuis avril, elle se déploie vers l'Est,
fief des ex-Séléka, où surviennent régulièrement des vagues de violences,
notamment à Bambari. Outre la capitale, c'est dans cette région Est que
l'instabilité subsiste et que «Sangaris» concentre son action, à la fois dans le
«couloir central» du pays (Bangui-Bouca-Batangafo) et dans un triangle formé par
les villes de Dékoa, Sibut et Bambari.
Au
ministère de la Défense, on met en avant cette stabilisation et «l'émergence de
signaux faibles de reprise» dans le pays. De nombreuses armes ont été saisies et
14 tonnes de munitions détruites. Le nombre de déplacés se serait réduit de
moitié. Un redéploiement de l'administration s'esquisse dans un pays où l'État
avait déserté. Mais le mouvement reste ténu. Le retour à une certaine forme -
précaire - de stabilité s'est fait au prix d'une partition de facto du pays.
Plus encore, les lignes de fractures, loin d'être binaires, fragmentent chaque
camp en une multitude de groupes et de clans, politisés, communautaires ou
parfois simplement criminels. «Il n'y a pas une Centrafrique mais des
Centrafrique», disait le général Francisco Soriano, l'ex-patron de
«Sangaris».
Le
général Éric Bellot des Minières, qui lui a succédé en juin dernier, a confirmé
jeudi la perspective d'un désengagement des forces françaises, estimant que le
pays est en voie de «normalisation». Les étapes de ce retrait n'auraient
toutefois pas encore été décidées. Le mouvement se fera parallèlement au plein
déploiement de la Minusca (7500 soldats actuellement sur les 10.000 prévus).
L'Union européenne maintient également une force de 700 hommes (dont 260
militaires et gendarmes français). Tout en
diminuant ses effectifs, la France va «densifier ses
capacités» pour réagir très rapidement, si besoin. Des blindés dernière
génération, les VBCI, et des hélicoptères d'attaque Tigre, doivent bientôt faire
leur apparition sur le «théâtre» centrafricain.
Le
budget de la Défense rejeté par le Sénat
Le Sénat a rejeté le
budget de la Défense pour 2015, nombre d'orateurs de l'opposition jugeant les
crédits insuffisants au regard des missions de l'armée. Au total, 195 sénateurs
ont voté mercredi soir contre les crédits de la mission Défense - soit
29,1 milliards d'euros pour 2015 - et 125 pour. Ce budget prévoit notamment
des recettes exceptionnelles (2,3 milliards d'euros), jugées irréalistes
par certains sénateurs. «Nous ne pouvons croire à l'équation budgétaire qui nous
est présentée», a déclaré le président de la commission des affaires étrangères
et de la défense, Jean-Pierre Raffarin. L'Assemblée nationale aura le dernier
mot.