Des signes encourageants se font
jour en Centrafrique, mais les obstacles retardant la résolution de la crise
actuelle ne manquent pas.
Par Jacques
Duplessy -
© Laurence Geai / NurPhoto/AFP
Situation
sécuritaire
La situation sécuritaire s'est
améliorée, mais les groupes armés règnent encore en maître dans de nombreuses
régions. Certains ont basculé dans le banditisme. Et ils ne se laisseront pas
facilement désarmer. La Mission Eufor RCA s'achèvera le 15 mars. Les 700
militaires (dont 260 français) avaient pour but de sécuriser l'aéroport de
Bangui et deux arrondissements de la ville afin de permettre aux soldats
français de Sangaris de se déployer en province. Eufor RCA va être remplacé par
la Minusca, la force des Nations unies composée essentiellement de soldats
africains qui monte actuellement en puissance. En province, la Minusca aidée par
la force Sangaris commence à arrêter les bandits et à chasser les rebelles des
sièges de l'administration préfectorale.
Accord de
Nairobi
Sous l'égide du président
congolais Denis Sassou-NGuesso, un premier accord avait été signé dans la
capitale kényane le 28 janvier. Accord rejeté par la communauté internationale,
puis par Sassou lui-même. Signé par Nourredine Adam pour les anciens Seleka et
Joachim Kokaté pour les anti-Balaka, il prévoyait entre autres une amnistie, un
changement de gouvernement et une nouvelle transition politique pour le pays,
écartant la présidente actuelle Catherine Samba-Panza. Finalement, une nouvelle
version a été signée le 21 février pour acter de la cessation des hostilités
entre ex-Seleka et anti-Balaka.Un proche de Bozizé commente : "L’amnistie
prévue dans les accords de Nairobi n'était pas possible. Il n'était pas possible
de sauter à pieds joints sur tout ce qui s'est passé et les exactions. Mais il
fallait que cet accord soit reconnu par la communauté internationale. C'est un
document technique, pour tenter de régler les problèmes de sécurité, on a enlevé
tous les aspects politiques." Mais beaucoup d'observateurs doutent de l'impact
de cet accord sur le terrain.
Sant'Egidio
La communauté Sant'Egidio, une
communauté chrétienne très impliquée dans la résolution des conflits, a permis à
des hommes politiques centrafricains, dont l'ancien Premier ministre Martin
Ziguélé, de signer une déclaration le 27 février en vue d'un bon déroulement des
élections afin de "remettre le processus électoral au centre". Là encore,
difficile d'évaluer le concret de cette médiation.
Forum de
Bangui
Il devrait s'ouvrir ce mois-ci
après des consultations populaires dans le pays et auprès des Centrafricains de
l'étranger. Il devrait durer plusieurs semaines. La participation de la
population a été très forte, malgré des entraves dans certaines zones tenues par
les ex-Seleka. Il s'agit de réconcilier la société et de refonder les bases de
l’État centrafricain dans tous les domaines : éducation, place des
communautés religieuses, armée, finance, administration du pays…Les
Centrafricains en attendent beaucoup, mais il y a beaucoup de non-dits sur les
événements récents et la place de la communauté musulmane.
Élections
Les élections présidentielles
et législatives prévues d'ici le mois d'août auront toutes les peines à se tenir
à la date prévue, selon une source militaire française et un membre de
l'entourage de l'ancien président Bozizé. Le pouvoir en place peine à remettre
en place l'administration dans les provinces. À l'insécurité s'ajoutent les
problèmes matériels, avec des bâtiments délabrés et pillés, et un manque de
fonds pour l'organisation de la consultation. Les 420 000 réfugiés dans les pays
voisins et les 1 200 000 déplacés dans le pays rendent difficile la mise en
place de listes électorales fiables dans un délai rapide. Pour le moment, il y a
pléthore de candidats, une vingtaine. Mais beaucoup ne se présentent que pour
faire parler d'eux et négocier des places dans le prochain gouvernement.
L'ancien Premier ministre Martin Ziguélé est l'un des favoris. L'ancien
président Bozizé ne se représenterait pas, selon un de ses proches, mais on lui
prête le désir de mettre son fils, Jean-Francis, dans la course. "Ça ne peut pas
marcher, admet ce haut fonctionnaire centrafricain. Il a été dix années ministre
de la Défense, il a sa part de responsabilité dans le désastre qui est
arrivé."