Centrafrique,
Martin Ziguelé : "restaurer l’espérance !"
lundi
16 novembre 2015 / par Adrien Seyes – afrik.com
Président
du Mouvement de libération du peuple centrafricain (MLPC), leader de
l’opposition depuis des années en Centrafrique, Martin Ziguélé, qui a aussi été
le Premier ministre de l’ancien chef de l’Etat Ange Félix Patassé, est
aujourd’hui annoncé comme le candidat le mieux placé pour l’élection
présidentielle qui devrait se dérouler avant la fin de l’année.
- Interview recueillie par Adrien Seyes.
AFRIK.COM :
Le dernier calendrier électoral vient d’être officiellement entériné.
Celui-ci vous semble-t-il tenable ? Ou bien y a-t-il un risque de nouveau
report compte tenu de la situation sécuritaire ?
Martin
ZIGUELE :
Le calendrier électoral est tenable. Et toute la population centrafricaine tient
désormais à aller au vote le plus tôt possible. Six premières candidatures aux
élections présidentielles, dont la mienne, ont d’ailleurs été déposées ce samedi
auprès de l’Autorité Nationale des Elections (ANE). Les listes des électeurs
enrôlés ont, elles, commencé à être publiées dans certains centres d’inscription
de Bangui, conformément au chronogramme rendu public. L’hypothèque principale,
qu’il faut absolument régler pour permettre aux populations de se mobiliser au
maximum et de prendre part aussi bien aux meetings politiques qu’aux scrutins,
concerne la sécurité. Les violences qui visent les populations civiles, tant à
Bangui que dans certaines villes de l’intérieur du pays comme Bambari, sont
susceptibles en effet de compromettre le bon déroulement du processus électoral
si des actions vigoureuses ne sont pas entreprises pour les
juguler.
AFRIK.COM :
Comment expliquez-vous qu’avec autant de troupes onusiennes en RCA, dont le
mandat est clair qui plus est, la spirale de la violence ne soit toujours pas
enrayée ? Et qu’en est-il du tribunal spécial un temps évoqué pour juger
les fauteurs de troubles ?
Martin
ZIGUELE :
Les forces internationales en RCA ont fait un travail énorme pour que le pays
soit plus sûr qu’en décembre 2013. Personne ne peut en douter. Elles ont perdu
et continuent de perdre des hommes sur le champ de bataille, et je ne peux que
leur en rendre hommage. C’est depuis septembre 2015 que les formes de violence
ont changé, et nécessitent une réadaptation des stratégies mises en œuvre par
ces forces internationales. Les actions doivent être plus vigoureuses. Il y a
urgence à cela car tous ceux qui ont intérêt au statu quo sont déterminés à
perturber le processus électoral. Il faut les mettre hors d’état de nuire. Quant
à la Cour Pénale Spéciale pour la RCA, celle-ci a déjà été créée par la loi mais
son démarrage effectif est encore attendu. Sur ce plan aussi, il faut faire vite
car il n’y a pas de paix durable sans justice véritable.
AFRIK.COM :
Vous êtes considéré par la plupart des observateurs comme le grand favori du
prochain scrutin présidentiel dans votre pays. Comment
l’expliquez-vous ?
Martin
ZIGUELE :
(Sourire) Cela s’explique par plusieurs raisons. Tout d’abord, je ne suis pas un
inconnu puisque je vais à ces élections pour la troisième fois et j’avais déjà
mis en ballotage le Président candidat lors de mon premier engagement en 2005.
Ensuite, il est à noter que c’est la première fois qu’il n’y a pas de chef
d’état candidat en lice, ce qui rend le jeu ouvert. Par ailleurs, je connais le
pays pour l’avoir parcouru commune par commune, et village par village dans le
cadre de mes anciennes fonctions de Premier Ministre et ensuite comme Président
du MLPC, qui demeure le principal parti politique centrafricain. Enfin, nous
sommes implantés comme parti dans tout le pays, et ce maillage complet du pays
est bien sûr un atout. Il faut aussi noter que nous avons noué et continuons de
nouer des alliances pour maximiser ce maillage. Nous restons vigilants mais
sommes confiants pour les élections à venir, législatives comme
présidentielle.
AFRIK.
COM :
Si vous êtes élu président de la RCA, quelles sont les trois mesures
prioritaires que vous prendrez ?
Martin ZIGUELE : Mon projet politique est présenté en détail dans le livre que je viens de publier (NDLR : "Des crises à l’espérance. Ma vision pour la Centrafrique", Editions Dagan). Mon programme est basé sur le triptyque "Réconciliation, Rassemblement et Reconstruction". Les trois premières mesures à mettre en œuvre seront les suivantes : réformer le secteur de la sécurité et le DDRR (Désarmement- Démobilisation-Réinsertion-Rapatriement), redéployer l’administration partout sur le territoire national afin de réhabiliter l’État et relancer l’économie pour, en particulier, garantir un avenir digne à notre jeunesse.