«Les Défis de la République
Centrafricaine»
Par Louis Michel, Commissaire
européen au Développement et à l'Aide
humanitaire.
"Table ronde des partenaires au développement de la République
Centrafricaine"
Bruxelles, le 26 octobre
2007
Monsieur le Président,
Monsieur le Premier ministre,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs les représentants des partenaires au
développement de la
République centrafricaine,
Chers amis,
C’est un grand plaisir pour moi d’ouvrir cette Table Ronde des
partenaires au développement de la République
Centrafricaine aux côtés du Président Bozizé. Un plaisir
d’autant plus grand que nous sommes les parrains officiels de cet évènement et
que nous avons l’honneur d’accueillir cette Conférence dans nos
murs.
Je me réjouis de l'ampleur de la participation à cette Table Ronde.
Elle témoigne de la volonté de tous les partenaires d'œuvrer ensemble aux côtés
du Président Bozizé et d'apporter leur contribution aux efforts de
la
République de Centrafrique, qui est confrontée simultanément à
deux défis majeurs.
Le premier de ces défis constitue une exigence partagée :
atteindre les Objectifs de Millénaire pour le Développement d'ici 2015.
Respecter cette échéance sera certes difficile, puisque la République
centrafricaine doit relever plusieurs défis.
Premièrement, elle doit œuvrer à sa reconstruction. Et j'inclus aussi
dans cette reconstruction le "dialogue politique inclusif" entre l'Etat et tous
ses citoyens - un dialogue où le Conseil National de Médiation est appelé à
jouer un grand rôle;
Deuxièmement, elle doit offrir un niveau de vie digne aux
populations. C'est un objectif réaliste dans une République centrafricaine
réconciliée avec elle-même, où la gestion des finances publiques comme celle des
ressources naturelles se ferait de façon transparente et au bénéfice de chaque
citoyen de la
Centrafrique;
Enfin, elle doit assurer, par là même, la stabilité du pays au moment
où sa situation géographique l'expose.
Cette Table Ronde témoigne de la mobilisation de la communauté
internationale à vos côtés dans ces trois directions - et en premier lieu de
la
Commission européenne qui a été votre premier bailleur de fonds
en 2007. Tous les participants à cette Table Ronde sont prêts à accompagner
la
République centrafricaine dans cette entreprise. D'autant que
vous avez su trouver en vous-mêmes les ressorts à ce nouvel élan :
1/ avec le retour à l'ordre constitutionnel en 2005 ;
2/ avec la tenue ce mois-ci des Etats
Généraux de la
Justice, organisés avec le plein appui de la Commission ;
3/ enfin, avec la devise mobilisatrice
du Président Bozizé : « Kwa na Kwa » = « le travail, rien
que le travail".
Je pense que cette devise doit tous nous inspirer pour faire en sorte
que la
République centrafricaine ne soit plus "un orphelin de l’aide".
A cet égard, j'aimerais rappeler que l'Union européenne est toujours restée aux
côtés de la
Centrafrique dans les moments les plus difficiles. Même en
2003, lorsque les événements politiques nous ont contraints à suspendre
partiellement notre coopération… Même à ce moment-là, nous avons maintenu tous
les projets sociaux et nous avons d'emblée engagé des contacts avec les
nouvelles autorités pour trouver une issue rapide à la crise et, à cette fin,
pour accompagner le pays dans la restauration démocratique. C'est dans les
moments difficiles que les pays, comme les individus, reconnaissent leurs vrais
amis.
Plus immédiat et - je l'espère - plus contingent, le second de ces
défis réside dans le risque d'une "darfourisation" de la région. Une telle
perspective affecterait d'évidence la République centrafricaine en raison de sa position
comme de sa dimension géographiques. Pour nécessaires qu'ils soient, les efforts
pour répondre au premier défi ne sont pas suffisants pour faire face au second.
Là encore, l'Union européenne est au premier plan pour aider la République
centrafricaine à faire face.
En effet, Monsieur le Président, depuis plusieurs mois nous n'avons
pas ménagé nos efforts pour attirer l'attention de la communauté internationale
sur la situation de votre pays dans un contexte régional troublé. D'abord, nous
avons œuvré pour que la
Conférence de Paris sur le Darfour, tenue en juin dernier,
élargisse la perspective à l'ensemble de la région. Ensuite, nous avons mis en
place un programme d'accompagnement à l'opération PESD EUFOR Tchad/République
centrafricaine, qui se déploiera prochainement dans le nord-est du pays. Doté de
3 millions d'euros, ce programme portera sur les volets "réhabilitation" et
"développement" qui soutendent cette opération.
Ces initiatives, comme ce nouveau contexte, me conduisent à rappeler
la contribution à la paix et à la stabilité intérieure de la République
centrafricaine que l'Europe a fournie. Depuis 2004, quelque 23,4 millions
d'euros ont été engagés pour couvrir la majeure partie de budget de
la FOMUC,
la Force
Multinationale en Centrafrique de la CEMAC.
Parallèlement, en 2005, nous avons appuyé financièrement
l'organisation des élections, en particulier avec l'Organisation Internationale
de la
Francophonie.
En effet, tout se tient désormais. Sécurité intérieure et sécurité
extérieure, développement économique au bénéfice du plus grand nombre, et
stabilité. C'est pour cette raison que nous lions notre soutien à une
prolongation de la
FOMUC pour une durée d'au moins deux ans à la Réforme du Secteur de
Sécurité en République centrafricaine. Ce lien n'est pas une condition : il
relève d'une exigence de cohérence au service de la sécurité de tous et pour
tous.
La pacification de la région passe par un esprit de dialogue et de
coopération entre tous les pays de la région pour trouver une solution durable
aux conflits qui y sévissent. Mais cette pacification passe "aussi", et j'aurais
tendance à dire "avant tout", par un développement économique et social au
profit de tous - sans exclusive - au sein de chacun de ces
pays.
Puisque cette Table Ronde éveille l'espoir d'une nation
centrafricaine enfin retrouvée, enfin réconciliée avec elle-même, je saisie
cette occasion pour renouveler mon appel.
Un appel à tous les partenaires de la République
centrafricaine pour qu'ils aident ce pays à se relever avec le concours de la
communauté internationale.
Celle-ci a déjà commencé à répondre à cet appel. A cet égard, je
tiens à saluer particulièrement l'initiative prise la semaine passée par l'Union
africaine d'organiser une Conférence de Solidarité africaine spécialement
consacrée à la
Centrafrique. Dès que nous en connaîtrons les conclusions, nous
en tiendrons bien évidemment compte.
Cet appel s'adresse aussi aux autorités de la République
centrafricaine. Elles ont assorti d'un Document de Stratégie de Réduction de
la Pauvreté,
les initiatives qu'elles ont déjà prises sur le plan politique, des initiatives
que je suis heureux de saluer de nouveau. Complété par une liste d'environ 300
projets à financer par des partenaires au développement, cet ensemble de mesures
et d'engagements constitue une invitation forte à examiner de près chacun de ces
projets, et - pour chacun d'entre nous, avec les moyens dont nous disposons - à
apporter notre contribution, votre contribution, à la reconstruction de
la
République centrafricaine.
Premier bailleur de fonds en République centrafricaine, en 2007,
la
Commission souhaite en effet encourager la présence d'autres
partenaires au développement. Le bilan de son action comme partenaire de
la
République centrafricaine donne un certain crédit à son appel.
Qu'on en juge par ces quelques chiffres.
Tous les fonds du 9ème Fonds européen de développement
(FED) prévus pour la
République centrafricaine ont été engagés avec quelque
118,5 millions d'euros concentrés pour l'essentiel sur deux secteurs :
les transports et l'appui institutionnel, d'une part, l'appui macro-économique
et la bonne gouvernance, d'autre part. Qu'il s'agisse d'aide humanitaire (avec
8 millions d'euros), de sécurité alimentaire (avec 5 millions d'euros)
et d'actions de réhabilitation dans le nord-est de la République
centrafricaine (avec 3 millions d'euros), la Commission a été
également très présente sur le terrain en 2007.
Mais ce qui compte avant tout, c'est de poursuivre notre action de
solidarité active dans un esprit de partenariat. Le désenclavement de
la
République centrafricaine et son intégration régionale sont
indispensable pour assurer son développement à long terme. C'est pourquoi nous
poursuivons notre coopération en matière d'infrastructures de transport dans le
cadre du 10ème FED. J'en profite pour souligner l'effort particulier
que la
Commission prévoit de fournir en faveur de la Centrafrique pour les
années à venir : 137 millions d'euros pour la période 2008-2013, soit
une augmentation de 35% par rapport au FED précédent. Et encore ! Ce
chiffre ne couvre pas les financements susceptibles d'être accordés au titre
d'autres lignes budgétaires.
Nous avons choisi de parier sur l'avenir de la République
centrafricaine. Nous appelons les autres bailleurs de fond à miser avec nous, en
partenariat avec ce pays. Lutter contre la pauvreté, appuyer ses efforts pour
une plus grande stabilité : voilà ce à quoi nous devons œuvrer. Tous
ensemble.
Les fils et les filles de Centrafrique sont en train de se rassembler
à travers le dialogue politique inclusif. Respectons leurs efforts en donnant le
coup de main qui fera de ce rassemblement une réconciliation durable et un
avenir apaisé.
Je vous remercie de votre attention.
Source : Union européenne, Reference:
SPEECH/07/669 Date: 26/10/2007
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