Adoption par le parlement d'une amnistie générale des crimes depuis 1999. Jean-Jacques Demafouth juge "inacceptable"


Adoption en Centrafrique d'une amnistie des crimes depuis 1999

Par Paul-Marin Ngoupana

BANGUI (Reuters),  Mardi 30 septembre, 19h16 - Le parlement centrafricain a adopté une loi d'amnistie visant à mettre un terme aux rebellions que connaît le nord du pays, malgré le boycottage de l'opposition qui juge son champ d'application trop limité.

Le président François Bozizé, qui a pris le pouvoir lors d'un coup d'Etat en 2003 avant de remporter les élections deux ans plus tard, cherche à mener à bien des pourparlers avec à la fois les insurgés et les opposants politiques.

Il s'agit de stabiliser durablement la situation dans l'ancienne colonie française relativement peu peuplée dont l'histoire est émaillée de coups d'Etat, mutineries et rébellions.

Le pays, riche en diamants mais possesseur aussi de réserves d'uranium qu'une compagnie française commencera à exploiter à partir de 2010, a attiré récemment l'attention à l'étranger en raison du débordement sur son territoire de conflits comme ceux du Tchad, du Soudan et de l'Ouganda.

L'amnistie proposée aux combattants gouvernementaux et rebelles depuis janvier 1999 a été adoptée lundi soir par 72 députés sur 104 avec une abstention. Trente et un députés d'opposition ont refusé de participer au vote pour protester contre le refus du gouvernement d'étendre le champ de l'amnistie à toutes les affrontements depuis l'indépendance, en 1960.

"Nous sommes dans une assemblée nationale démocratique et nous comprenons mal que des amendements proposés par l'opposition soient balayés à chaque fois du revers de la main sans débat, alors qu'il s'agit de la vie de la nation", s'est insurgée la députée d'opposition Rosalie Pouzéré.

Le ministre de la Justice, Thierry Maleyombo, a accusé pour sa part les parlementaires de l'opposition d'entraver les efforts du gouvernement pour ramener la paix dans le pays.

L'amnistie votée couvrira les actes des partisans de l'ancien président Ange-Félix Patassé, que Bozizé avait renversé, et des dirigeants rebelles comme Jean-Jacques Demafouth et Abdoulaye Miskine, dont les mouvements ont été actifs ces dernières années dans le nord.

"UN PAYS EN ETAT PERMANENT DE REBELLION"

La Cour pénale internationale a annoncé qu'elle enquêtait sur les assassinats, viols massifs, actes de torture et autres crimes de guerre jugés imprescriptibles commis en République centrafricaine en 2002 et 2003. En mai, elle a arrêté le chef de guerre congolais Jean-Pierre Bemba dans le cadre de cette enquête.

Un observateur européen souhaitant conserver l'anonymat et qui suit de près le processus de paix en Centrafrique souligne l'importance d'amener l'opposition politique et les rebelles armés à la même table des négociations "faute de quoi il n'y aura pas de dialogue".

Le processus de paix a été lancé à la faveur d'un accord de cessez-le-feu global signé en juin par les groupes rebelles avec le gouvernement de François Bozizé mais il a semblé dérailler le mois dernier lorsque rebelles et opposants ont quitté la table de négociations.

Le même mois, l'armée a signalé de nouveaux combats dans la zone nord-ouest du pays où est active l'Armée populaire pour le rétablissement de la république et de la démocratie (APRD), qui avait pris les armes après le renversement de Patasse par Bozizé.

L'autre groupe rebelle, l'Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR), opère dans le nord-est, où le contingent français stationné en Centrafrique est intervenu en 2006 pour stopper sa progression.

Selon un journaliste de radio local, une faction de l'UFDR a encore attaqué jeudi dernier la ville d'Am Dafork, à la frontière soudanaise, pillant les commerces.

"C'est un pays en état permanent de rébellion, aussi est-ce difficile de briser ce cercle", a estimé l'observateur européen.

Pascal Fletcher, version française Marc Delteil

 


 

Centrafrique : le parlement vote l'amnistie générale pour tous

YAOUNDE, 30 septembre 2008 (Xinhua) - Les députés du parlement centrafricain ont voté lundi à une large majorité la loi d'amnistie générale pour toutes les parties en conflit, une action favorable aux négociations dans le processus du dialogue de paix en préparation entre le gouvernement et les rebelles, a rapporté mardi la radio Africa N°1.

Les rebelles de l'Armée populaire pour la restauration de la Démocratie(APRD) de Jean Jacques Demafout avaient décidé au mois d'août dernier de ne plus participer au dialogue de paix à cause du refus des parlementaires à appliquer l'amnistie générale pour tous.

Demafout, l'ancien ministre de la défense d'Ange Félix Patassé est poursuivi pour l'assassinat de 5 proches de l'ancien président André Kolingba en 1999.

 


 

Demafouth rejette la loi d’amnistie

Jean-Jacques Demafouth, président de l'Armée populaire pour la restauration de la démocratie (APRD), un des principaux mouvements rebelles en Centrafrique, a affirmé mercredi que la loi d'amnistie votée lundi par le Parlement était "inacceptable". "C'est inacceptable. Je vais essayer de relancer le comité de suivi à Libreville pour qu'on explique une nouvelle fois notre position au gouvernement. Nous ne fermons pas la porte", a affirmé M. Demafouth, interrogé depuis Libreville à Paris, où il vit en exil en raison de poursuites judiciaires et d'accusations d'assassinat en Centrafrique."Les conditionnalités afin de bénéficier de l'amnistie ne sont pas acceptables et risquent de provoquer des réactions contraires à la volonté de paix manifestée par l'APRD", estime M. Demafouth.

La loi d'amnistie était considérée comme un préalable au "dialogue politique inclusif" devant rassembler pouvoir, opposition, société civile et rébellions.

"L'APRD est d'accord sur le principe du cantonnement (des combattants des rébellions dans le nord) mais cela ne peut se faire en deux mois comme c'est prévu par la loi (sous peine de perdre les bénéfices de l'amnistie). Ce n'est pas réalisable. Deux mois c'est beaucoup trop court", a affirmé mercredi M. Demafouth.

"Face à la nouvelle crise provoquée par les amendements non consensuels dans la loi", le chef de l'APRD a appelé le Gabon et les Nations unies, qui ont servi de médiateurs par le passé, à intercéder auprès du président centrafricain François Bozizé pour que le texte soit remanié.

La Centrafrique, pays enclavé figurant parmi les plus pauvres de la planète, fait notamment face à l'insécurité dans le nord, en proie depuis 2005, année de l'élection de M. Bozizé, aux exactions de groupes rebelles, de "coupeurs de routes" et de l'armée gouvernementale.

http://www.afriquecentrale.info/central.php?o=1&s=117&d=3&i=1793 - Publié le 1 octobre 2008.

 


 

Polémique sur la loi d’amnistie générale

Le texte a été adopté lundi par le Parlement et doit permettre d'ouvrir la voie au dialogue politique entre le pouvoir, l'opposition, la société civile et la rébellion. Un projet de loi avait été présenté en commission mais lors du vote des amendements ont été ajoutés qui font grincer des dents.

Article premier : Sont amnistiées toutes les infractions commises par les éléments des forces armées, à compter du 15 mars 2003, date de l'arrivée au pouvoir du général Bozizé. Les responsables et les membres des groupes rebelles sont également amnistiés.

Le texte de loi cite même nommément l'ancien président Ange-Félix Patassé condamné à 20 ans de prison pour crimes économiques par la justice centrafricaine ; Jean-Jacques Demafouth, le patron des rebelles de l'APRD, poursuivis dans l'affaire des assassinats de Kembé en 1999, et aussi Abdoulaye Miskine, le chef du FDPC qui se trouve actuellement en Libye.

Comme le gouvernement s'y était engagé, tous les crimes passibles de la Cour pénale internationale sont exclus de l'amnistie. En revanche, la loi prévoit aussi que l'amnistie sera annulée si dans un délai de 60 jours, les troupes rebelles ne sont pas entièrement désarmées, et cantonnées.

L'opposition politico-militaire affirme que ce sont là des conditions inacceptables car impossibles à remplir, d'autant que l'article 8 prévoit que « les bénéficiaires de l'amnistie qui continueront à être en intelligence avec une rébellion seront interdits de l'exercice de toutes activités politiques pendant 10 ans. »

Le gouvernement explique qu'il fallait trouver des garanties pour éviter tout risque de récidive. L'opposition civile non armée, fait du vote d'une nouvelle loi d'amnistie sa condition pour réintégrer le processus du dialogue politique.

RFI - Article publié le 01/10/2008

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