Quand la Centrafrique devient la vache à lait des hommes politiques

Depuis la parution de l’article de Léopold Bara le 14 courant sur le site de Sangonet, article intitulé Centrafrique aux enchères pour quatre milliards de CFA, nous nous attendions à lire des réactions et n’en avions observé aucune, de la part des internautes centrafricains ou encore des représentants des partis politiques qui avaient participé à cette fameuse réunion.quadripartite. Au moment ou nous rédigions le présent article, un article du journal Le Monde, daté du 19 courant, intitulé Le Cahier de Charge du général Kolingba, soutenait les allégations de Léopold Bara et traitait Kolingba d’homme gourmand. Depuis, il n’y avait eu de démenti d’aucune part. Est-ce que les allégations contenues dans les articles en question étaient valides? Est-ce qu’il n’y avait eu aucune réaction des lecteurs à cause de l’embarras général que ces révélations avaient créé et de l’incrédulité qu’elles avaient suscitée? Ces deux dernières questions étaient simplement destinées à satisfaire notre curiosité à propos de ces révélations génantes et sur la persistence d’un silence démocratique des partis politiques centrafricains, qui pourrait être complice de la malfaisance.

L’on avait toujours dit qu’il n’y avait pas de fumée sans feu; c’est à dire que Léopold Bara n’aurait pas monté son histoire de toutes pièces, s’il n’en avait pas eu les preuves. La raison pourrait nous dicter la retenue et indiquer de prendre ses propos avec des pincettes. Disons le tout de suite, cela aurait été merveilleux si seulement l’un d’entre ces dirigeants nous avait apporté la preuve par neuf du contraire des propos de Léopold Bara et de ceux du journal Le Monde. A cause du silence lourd qui avait pesé sur l’annonce de la nouvelle de ces enchères, nous avions décidé sans hesitation d’accorder du crédit au premier article. Et si ces allégations se révélaient être fondées sur des informations de bonnes sources, l’on se demanderait alors quelles conséquences des accords probables entre Bozizé, Kolingba, Ngoupandé et Massi auraient sur le fonctionnement de l’administration de l’état après elections? Quels effets ces accords auraient sur l’autorité de l’état? Quels obstacles ils auraient sur la relance de l’économie du pays? Si donc cet article de Léopold Bara était la fumée qui s’était levée vers le ciel, nous nous demanderons où se cacherait donc le feu qui pourrait brûler ce que tout le monde essaie de bâtir inlassablement? Le feu etait simplement ces hommes politiques centrafricains peu scrupuleux.

Cependant, avant d’aller plus loin dans notre pensée, à propos de ces allégations, nous voudrions clarifier le point qui suit. Dans toute société, comme en politique, il y aurait selon nous aucun inconvénient pour tout groupe d’individus de participer à des débats autour des problèmes chauds de l’heure ou autour de préoccupations communes, ni à chercher ou non un consensus autour des stratégies de choix, ni à s’accorder sur un point particulier, ni à concilier des points de vue, ni à créer des alliances pour donner du poids à une décision. Selon nous, tout ce processus serait de bon aloi et avait parfaitement court dans les grandes assemblées nationales de pays se réclamant d’une forme ou d’une autre de démocratie. Ce serait donc ces modèles d’activités que le peuple centrafricain attendrait que la nouvelle assemblée nationale suive pour la conduite des affaires du pays dans l’unité, la dignité et le travail. Ce serait dans ce contexte de prescriptions décentes que se produiraient les débats parlementaires et que naitraient des projets de lois pour renforcer une gestion saine et efficace de affaires du pays. Ces mêmes débats pourraient être conduits de la même manière au sein des partis politiques, des associations nationales, et des syndicats, en faveur d’une véritable renaissance de la démocratie et qui conduisrait indubitablement vers le progrès.

A la fin de tout ces grands débats, longs et houleux autour des élections présidentielles et législatives en Centrafrique, certaines positions politiques de partis sortiraient renforcées et d’autres seraient diluées pour arriver à un consensus qui serait un faciès de l’expression de la démocratie; l’autre pouvant être dicté par la règle d’une forme ou d’une autre de majorité ( ¾ ou absolue par exemple). Toute action contraire serait une dictature. Mais tout cela serait de bonnes prescriptions si tout ce processus prenait en compte la protection des intérêts suprêmes du pays et de tous ses enfants.

Mais que ce processus soit étendu à des réunions de chefs de partis politiques qui échangeraient les voix de leurs électeurs contre des espèces, des biens, des services et des postes au sein du gouvernement ou à la tête des prefectures administratives, cela ressemblerait comme deux goûttes d’eau à ce mercantilisme du régime Kolingba qui avait placé les siens à des postes publiques importants et stratégiques, afin uniquement d’en tirer des profits financiers. Selon sa philosophie, il importait peu si celui-ci ou celle-ci oeuvrait ou non dans le sens des intérêts du pays, l’essentiel avait été de profiter de la position pour détourner à leur profit les biens appartenant à l’état et se laisser corrompre par de vils marchands de grands chemins. Kolingba avait oublié que c’était sa pratique du népotisme complaisant et la cupidité des siens qui avaient entraîné la fin de son régime. Devrions-nous être surpris que le PUN dont son président était secrétaire général du RDC, suive le pas dans cette combine mesquine qui remettraient en scène des hommes et des femmes du même acabit que les anciens RDCistes qui avaient brillé par leur médiocrité et une absence du véritable patriotisme dans leurs gestions des affaires de l’etat? L’article fait mention des enchères d’un montant de 4 milliards de CFA. Regardez cette mascarade d’un peu plus près. Avez-vous remarqué que ni Kolingba, ni Ngoupandé, ni Massi dans ce marché avec Bozizé, n’avait songé, un seul instant, à demander que cette somme d’argent soit utilisée aux fins d’éponger une partie des arriérés des salaires des fonctionnaires? Aucun n’avait songé aux pensions et bourses impayées; aucun ne s’était demandé d’où Bozizé tirerait une telle somme d’argent; aucun ne s’était demandé si toutes ces ressources qu’ils demandaient en contrepartie des voix, n’appartenaient pas en réalité au peuple centrafricain; aucun ne s’était demandé quelles nouvelles stratégies devraient être adoptées pour engager à fond la lutte contre le sida, le paludisme et autres maladies endémiques dans le pays; aucun n’avait mis sur la table le gros problème de l’insécurité à Bangui et dans l’arrière pays; aucun n’avait soulevé le problème de la mauvaise santé économique du pays. Lorsque les problèmes chauds devraient être débattus, ces chefs de partis ne pensaient qu’à eux seuls et aux gains qu’ils tireraient, malgré leurs échecs politiques personnels. Qu’étaient donc devenues les professions de foi avant et pendant les campagnes électorales? Pourquoi donc voudraient-ils tous être au pouvoir s’ils sont incapables d’être les avocats, défenseurs des intérêts du peuple centrafricain? Dans leurs esprits, ils pensent que le peuple et les autres n’avaient qu’à se débrouiller! Voilà donc pour ce qui serait de ces hommes qui s’acharnent pour gouverner absolument la Centrafrique! Est-ce là un autre exemple de ce que les fils du pays attendraient de leurs dirigeants?

Nous espérons que les militants de tous les partis politiques comprendront le véritable sens de ce qui est en jeu. Ce n’est ni Kolingba et le RDC, ni Ngoupandé et le PUN, ni Massi et le FODEM, ni Bozizé et je ne sais plus quel parti. Ce qui est en jeu c’est la paix dans le pays, c’est le développement économique pour tous et surtout ceux sont des hommes politiques intègres qui insuffleraient par leurs conduites les bons modèles de la gestion des affaires d’un état digne de ce nom. Est-ce qu’il faut davantage de preuves pour comprendre que tous les militants des partis politiques seraient manipulés par leurs chefs qui ne recherchent que le pouvoir personnel au détriment des intérêts du peuple? Si tous les militants des partis regardaient d’un peu plus près les faits et gestes du leurs dirigeants, ils seraient bien capables de se rendre compte que ceux qu’ils adoraient creuseraient aussi la tombe pour enterer tous les espoirs des fils de ce pays.

Jean-Didier Gaïna
Virginie, Etats-Unis d’Amérique.(19 avril 2005)

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