L’O. I. F. TEMOIN DU petit miracle centrafricain.

DR Félix YANDIA

 

« Je crois beaucoup à l'Afrique. Dans Le soleil des indépendances j'étais très pessimiste, je n'y croyais pas, mais aujourd'hui je crois en elle, parce que, je répète ça à chaque fois, l'Afrique a fait un progrès énorme. Il y a un siècle nous étions en esclavage, il y a 50 ans c'était les travaux forcés, le pire, il y a 25 ans nous étions sous le régime du parti unique, et maintenant nous sommes un peu libre. Il y a donc un progrès, au point de vue humanitaire, même si ce progrès ne va pas très vite et si ce progrès ne correspond pas à un progrès économique. Tout cela est lent, mais l'Afrique fait des progrès » (Ahmadou Kourouma, interview). L’Organisation Internationale de la Francophonie est bien au pied du mur … centrafricain.

 « Faire ensemble confiance à la CEMI, seul organisme habilité à donner les résultats de l’élection ». Merci au KNK de rappeler à l’ordre ces messieurs de l’Elysée, de Le Monde et de TF1 qui s’autorisent à couper l’herbe sous les pieds de la CEMI centrafricaine et des observateurs de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) qui seuls, truelle à la main, se trouvent au pied du mur centrafricain pour promouvoir la démocratie, la solidarité, la paix, la sécurité, l’Etat de droit et les droits de l’homme inscrits dans son cadre décennal (2004-20014). Les KNK qui étaient hier avec Patassé, anciens ou nouveaux convergents, comprendront que leur individualisme acrobatique a atteint ses limites et que tout le monde est coincé, dos au mur. Le Très Haut Représentant de la France, l’Ambassadeur, n’arrive plus «à fermer les yeux»,…sous Le soleil des indépendances,… En attendant les votes des bêtes sauvages (Ahmadou Kourouma). Reporters sans frontière redécouvre (après Makagbokossoto, Aboukary et autres) la même nature du régime de Bozizé… Qu’en sera-t-on après son sacre, s’il en était ainsi ? « Quant-on refuse on dit non » avait dit Ahmadou Kourouma et le peuple en convient.

En effet, à l’occasion du second tour de l’élection présidentielle et des législatives du 8 mai 2005, les Centrafricains ne se sont pas rendus massivement aux urnes pour élire leur président et leurs représentants à l’Assemblée Nationale. La convergence a fait le plein des urnes sans trop se plaindre de quoi que soit et l’OIF se tait, et la France parle par l’intermédiaire d’un conseiller à la Présidence, d’un journaliste de Le Monde ou de TF1. Les réalités centrafricaines risquent de nous démasquer et, aux yeux du monde entier, c’est une affaire de crédibilité dans cette grande famille francophone. Mais pour les Centrafricains, « Allah n’est pas obligé » (Ahmadou Kourouma).

Bien entendu, les Centrafricaines et les Centrafricains attendaient patiemment ces élections-là pour renouer avec la démocratie et chasser du pouvoir les chefs rebelles et les putschistes afin d’assurer le retour à l’ordre constitutionnel. L’issue de ces élections était donc déterminante pour cette population qui aspire à la paix et au développement après les années de rébellion meurtrière et destructrices du Général d’Armée François Bozizé et les crises militaro-politiques du Général d’Armée André Kolingba. Ce cycle de crises et de violences se poursuit depuis le sursaut patriotique du «très sage Abel Goumba» qui a contribué à installer le Général Bozizé au pouvoir.

Non content de plagier, dans le cadre d’un accord politique de circonstance avec Ngoupandé et Massi, le programme du candidat Ziguélé, non content de piquer des voix dans le fief de son frère d’arme le Général d’Armée (même aux législatifs),  François Bozizé lui ravit ses deux principaux thèmes de campagne : Paix et Rassemblement (cf. communiqué de presse KNK du 19/05/05). Que restera t-il au Général d’Armée André KOLINGBA avec son Rassemblement Démocratique Centrafricain ? Il ne restera plus à Bozizé qu’à absorber chez le Fodem et chez le PUN, la modernité et l’Unité Nationale. Et le petit miracle deviendra grand, mais vide et sans valeur pratique.  Aussi, selon ce même communiqué, en mettant «fin au défunt régime dont les Centrafricains dans leur ensemble ne souhaitent plus le retour», on comprend mieux comment le Général Bozizé a mis fin au défunt député de Bozoum II dont il a exhumé le corps pour ensuite l’abandonner aux charognards.

Le rejet de ce régime sanguinaire, exprimé par les Centrafricains, s’est traduit par le vote du 13 mars 2005 qui, malgré les fraudes massives, est contraint au deuxième tour évitant ainsi le grand miracle.

Les Centrafricains attendent maintenant la proclamation des résultats par la CEMI, sous l’œil des seuls observateurs de l’OIF qui se trouvent au pied du mur, sans même le reniflement de l’Union Africaine et de la CEMAC. Le cas centrafricain va édifier le monde entier et surtout la grande famille francophone. Et notre avenir, avenir commun en dépend. Toutefois, la réponse était déjà soufflée par un Conseiller des hauts lieux de cette politique africaine, l’Elysée : Bozizé a fait un grand miracle, la multiplication des fantômes électeurs qui pourtant manquent de pain quotidien (voir rapport du FAO avril 2005) : plus fort que le Christ, ce Général.

Les Centrafricains et la CEMI ont, pour leur part, démontré par le passé leur savoir-faire démocratique. En 1994, le Président sortant, un certain André Kolingba, est arrivé bon troisième au premier tour et définitivement écarté de la course du deuxième tour. Cet exploit centrafricain est resté gravé dans toutes les mémoires à l’exception de celles des KNK arrivistes, anciennement ou nouvellement convergents.

La RCA n’est effectivement pas le Togo. La Cour constitutionnelle de transition en Centrafrique n’est composée que de «magistrats indignes», (cf. l’Ambassadeur de France à Bangui), et épaulée par une minorité d’éléments de force de l’ordre également « indignes». Elle est déjà disqualifiée depuis Libreville pour subordination au pouvoir exécutif, perdant ainsi toute crédibilité. Personne ne lui fera confiance, et donc,…. le peuple a déjà parlé. 

La Convergence KNK France doit donc appeler toutes les Centrafricaines et tous les Centrafricains à s’unir derrière le candidat de l’Union des Forces Vives de la Nation pour barrer la route à ceux qui ont l’habitude de jeter les Centrafricains sur la route de l’exil (Sourougba au Tchad et Aboukary en France…), en mettant le pays à feu et à sang pour le plonger ensuite dans le gouffre (cf. les classements des pays par les nations Unies sur les trois dernières années). Les Centrafricains ne veulent plus des velléités guerrières de leurs Généraux et de la politique du ventre de ces KNK de l’extérieur qui fait semblant d’ignorer les réalités quotidiennes sous ces différents régimes de Bangui pour ne s’occuper que de leurs intérêts particuliers. Et là c’est « une absurdité qui nous mène au désordre » (Ahmadou Kourouma).

La probité intellectuelle voudrait que le Président Bozizé garde son sang-froid au lieu de s’affoler et de chercher à parcourir le Gabon et la France ces jours-ci, avant la proclamation des résultats par la CEMI. On comprend aisément qu’il y a péril en la demeure et personne à l’extérieur ne voudra s’en mêler. Les KNK projetaient déjà une marche de protestation dans les rues de Bangui pour dénoncer la France. Mais c’est le peuple qui a voté. Ne tournons pas en rond, mes compatriotes.

La Françafrique, les KNK n’en voient pas les contours. Mais à Abidjan, ce n’était pas des CRS entraînés pour encadrer les manifestations pacifiques, c’est bien l’armée qui a fait « le travail, rien que le travail ». Au Togo, seule la France s’est précipitée pour reconnaître le pouvoir de Faure Gnassigbé et la suite, on connaît, la Communauté Européenne a vu les choses autrement. La France doit donc se ressaisir et percevoir le monde qui change, comme le suggère la juge Eva Joly (le Parisien du 17/05/05). Ce que veulent les Centrafricains, c’est un véritable changement de mentalité, même chez le voyant qui conduit le mal voyant, car après tout c’est une histoire de famille, dans cette grande famille francophone. Et le monde nous observe, au Togo, en Côte d’Ivoire, au Congo et partout ailleurs dans cet espace francophone. Les Centrafricains ont, quant à eux, décidé de sauver nos honneurs communs. Et ce n’est ni un petit miracle, ni une révélation divine.

Un nouveau convergent, déclarait déjà que « dans la bouche du petit peuple, il est fréquent d’entendre dire : Bozizé n’est pas différent de Patassé. Rien n’a véritablement changé dans la nouvelle gestion, par rapport au régime déchu. Tous les errements du passé ont été entièrement assimilés par le nouveau pouvoir»,  celui de Bozizé (Charles Massi). Et ce n’était qu’une évidence. Mais le même a conclu son appréciation sur un constat de Machiavel qui au jour d’aujourd’hui nous édifie sur nos propres errements : «Nous savons que les alliances se concluent toujours en échange d’une promesse. Les promesses que la nécessité arrache, seule la nécessité les fait observer». Dans ce cas, mon cher ami Djento et les autres KNK anciens ne doivent pas compter pas sur un Front Républicain fictif, qui n’existe que par simple nécessité (souvenons-nous de comment certains ont quitté l’Union). Le silence observé par le Fodem et le PUN depuis leur adhésion au KNK est très révélateur du danger qui nous guette tous. Bozizé est en réalité seul et il nous faut l’aider à se démocratiser un peu. Cela peut se faire en famille, entre nous et en privé, au lieu de laisser ce sale boulot aux organismes internationaux et aux représentants des pays amis. Comme le disaient si bien certains nouveaux convergents, même si cela relève d’une autre époque, «le Président Bozizé manque d’expérience dans tous les domaines. Il aurait dû s’entourer de collaborateurs compétents et expérimentés» (Charles Massi). Les électeurs ont, pour leur part, déjà extirpé la mauvaise herbe. Certains de ses colistiers comprendront-ils enfin qu’ils en font partie et qu’ils devraient se faire discrets comme les nouveaux convergents ?

Nous espérons que le futur Président, « saura faire le tri le moment venu entre les vrais patriotes sincères, intègres, responsables, ses amis et cette bande à la composition hétéroclite de ses thuriféraires » (Sylvain Demangho). Mais, pour le moment, disons en toute décontraction, comme nos chauffeurs de taxis brousse, ex ou actuels sur le point de départ, «yallah ! djenta-djenta !».

Dr Félix YANDIA

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