UN PEUPLE A LA RECHERCHE DU TRESOR CACHE
Par Jean-Pierre REDJEKRA
Conseiller Principal dEducation
CENTRAFRIQUE-EMERGENCE XXI
INITIATIVES ECONOMIQUES CENTRAFRICAINES - IECAF
METZ , le 31 juillet 2005.
En parcourant un numéro de lhebdomadaire Jeune Afrique lIntelligent de juillet 2005, il est rapporté trois faits ; le premier, le président de la république participe au sommet de la CEMAC à MALABO et sollicite une enveloppe financière durgence ; le deuxième, le chef de létat rencontre à Syrte la presse lors du sommet de lUnion Africaine UA et explique la banqueroute financière de notre pays. Durant la rencontre de Syrte la RCA figure au nombre des pays qui ont des arriérés de contribution ; et enfin, troisième fait, le locataire du palais de la renaissance doit venir en visite officielle en France, à la fin du mois de juillet, pour sûrement demander une assistance financière conséquente de la France, pour assurer les salaires, les dépenses de souveraineté et même les dépenses courantes. De plus, le journal satirique français le canard enchaîné du 13 juillet 2005 ironise : " le président centrafricain dépend pour ses déplacements à létranger de la bienveillance de ses pairs africains plus riches et mieux dotés que lui et dire que le G8 (sommet annuel des pays les plus riches) sest séparé sans soccuper de cette cause humanitaire ; un avion pour BOZIZE ". Ce décor devient apocalyptique lorsquon se rend compte que de nombreux mois de salaires nont pas été honorés et surtout que les caisses du trésor public sont chroniquement vides. Tout un pays semble ralentir puis sarrêter, sans savoir quand on sera au bout du tunnel. De mémoire, aucun pays na connu une telle faillite, politique, économique et avant tout budgétaire pour le moins quon puisse dire ! Les travailleurs, les paysans, les jeunes sont toutes ces couches socio-économiques essentielles qui pâtissent de cette crise aigue. Lobservateur ne peut envisager trois choses : étayer les raisons de la faillite, amorcer les réponses adaptées et appeler à la vigilance et à la solidarité. A vrai dire, nous sommes " un peuple à la recherche du trésor caché ".
Il y a dabord ce quon a déjà dit, écrit, et répété à maintes occasions.
Tous ces maux ont été à la base de laffaiblissement de léconomie nationale initialement rentière. Le ministre des finances expliquait récemment les grandes caractéristiques des ressources nationales, essentiellement fiscalo-douanières. Bien entendu, il y a sûrement dautres facteurs mais là réside bien, les principales causes de la crise économique et budgétaire centrafricaine.
Il y a ensuite, ce quon ose pas affirmer tout haut ou reconnaître publiquement.
Notre faillite financière était prévisible. Depuis avril 1996, lactivité économique na jamais vraiment repris durablement ses droits. 2/3 des entreprises nont pas survécu aux conflits militaro-politiques, dont le dernier a été le " mouvement patriotique et armé " qui a aboutit à la prise du pouvoir du 15 mars. Il a eu en tout cas un impact économique et social périlleux. Seuls ceux dentre nous qui veulent nier la réalité ou se voiler la face par esprit partisan, ne ladmettront pas.
Notre situation économique est tributaire de notre stabilité politique et institutionnelle, or nous sommes installés dans linstabilité chronique depuis plus de 10 ans. Il faut ajouter à cela, le défi de lenclavement, le poids de la dette, les changements structurels opérés dans la sous région (le pétrole équato-guinéen et tchadien) nous on relégué au rang de dernier en Afrique centrale, sans quon puisse véritablement sinterroger. En voici quelques preuves :
Les campagnes électorales législatives et présidentielles avaient un contenu davantage folklorique et centré sur le culte de la personnalité. Les enjeux financiers, économiques, tout ce qui touche à la création des richesses indispensables au combat contre la pauvreté et le sous équipement du pays nont pas été abordés avec sérieux. Etrange est la réaction des citoyens qui ont participé directement ou indirectement à cette déclinaison pauvre du débat politique durant la campagne. Il ne faut donc pas sétonner de limpuissance politique qui fait quaujourdhui les caisses sont désespérément vides!
Nous semblons toujours navoir pas compris que lEurope et notamment la France, actuellement en grande difficulté pour résoudre ses propres problèmes budgétaires, économiques et sociaux, à dautres chats à fouetter, que le sort de quelque trois millions de centrafricains. Ceci au milieu dune cinquantaine dEtats africains, dont la majorité est en panne. Le temps des aides, des rallonges budgétaires conséquentes, de lépoque du conflit est-ouest est bel et bien révolu. Cest vers les pays dEurope de lest candidat à lUnion Européenne, que les subventions destinées aux investissements vont être dirigés en priorité. Il ne nous reste plus quà voir ailleurs et à nous appuyer sur nos propres atouts qui existent.
Enfin, devant une telle situation, le gouvernement attend le " salut" qui viendrait du FMI et de la Banque Mondiale. Fausse piste à priori, car ce que nous vivons aujourdhui est le témoignage de léchec des politiques dajustement structurel menées depuis le milieu des années 1980. Le sacro saint principe de meilleure gestion des ressources, qui signifie en fait réduction des dépenses, nest pas la seule voie de sortie de crise. Il en faut dautres, car lutilisation rationnelle des ressources est une chose, et leur rareté en est une autre. Cest pourquoi il convient didentifier les réponses politiques et économiques adaptées. Les politiques, ont la charge dénoncer et de conduire notre peuple vers le chemin du " trésor caché ", au profit de la collectivité nationale. Au contraire, le peuple des travailleurs, des paysans et des jeunes arrachera ses droits par dautres moyens. Cest moins vers létranger que nous trouverons les réponses à la problématique économique nationale et davantage au travers de mesures et orientations courageuses et audacieuses en interne.
II. QUELQUES VOIES DE SORTIE DE LA CRISE POLITICO-ECONOMIQUE
Il faut que les plus hautes institutions de lEtat déclarent publiquement quil y a bien crise et montée du péril économique et social. Cest un état durgence quil convient de traiter en profondeur. Humilité oblige, il devient préoccupant de taire les clivages, car la contradiction financière, économique et politique actuelle, à laquelle est confrontée le pouvoir, aurait pu se produire quelque soit le vainqueur de lélection du 8 mai 2005. Quelques pistes de solutions qui ne sont pas hiérarchisées :
*Il faut suspendre le paiement de la dette et négocier son annulation totale, tant au plan multilatérale que bilatéral. Cela permettra à lEtat de souffler et dans la foulée de réduire les souffrances prolongées de nos populations qui sont dans dextrêmes conditions de pauvreté. Celles qui travaillent et celles qui ne travaillent pas, étant dans une situation de paupérisation comparable.
*Lassemblée nationale doit mettre en place une commission dévaluation de notre économie en terme réel. Elle bénéficiera de la totale transparence et collaboration du gouvernement et examinera secteur par secteur, la régularité des autorisations dexploitations des ressources précieuses dune part et dautre part les licences délivrées au titre de la libéralisation des secteurs dactivités telles que la téléphonie. Il ne faudra sur ces questions, ni démagogie, ni complaisance, ni intervention " den haut " pour couvrir les évasions de ressources indispensables pour la nation. Par ailleurs veiller à la complicité active ou passive des agents de lEtat dépositaire de pouvoir. Le caractère public et transparent de cette démarche permettra au citoyen de savoir ce qui se passe, éclairera les uns et les autres sur ce qui est possible dans lintérêt de tous. Cest une entreprise de courage politique, patriotique et intellectuelle quil sagit et qui peut se traduire par dautres orientations pragmatiques telles que les nationalisations.
*Nous pensons quil y a de sérieux avantages à nationaliser lexploitation du diamant, depuis lextraction jusquà la vente sur les marchés internationaux, pour en assurer un bénéfice optimal à lensemble de nos populations. De même avec notre bois qui par ailleurs doit être exporté de façon contrôler, rationnelle Les ressources ainsi mobilisées seront affectées aux infrastructures dintérêt général (routes, hôpitaux, écoles, électricité et eau potable), et dans une certaine mesure aux dépenses de souveraineté. Une épargne peut être envisagée par rapport aux évolutions futures de notre pays qui est appelé à sinscrire dans la modernité.
*Il devient urgent de redéfinir notre carte et nos orientations de politique extérieure. Elles doivent sefforcer dintégrer la priorité du développement économique en tenant compte des évolutions rapides et radicales de la géo-politique mondiale. En effet, des efforts diplomatiques intenses et considérables sont à mener avec les pays émergeants dAsie du sud, plus enclin à appuyer nos efforts. Bien entendu la légendaire solidarité africaine qui en temps de crise est fort limitée, ainsi que toutes les coopérations renforcées sud-sud, ne sont pas à occulter.
*Enfin, la diaspora centrafricaine à laquelle jappartiens et notamment le cadre de Initiatives Economiques Centrafricaines IECAF regroupant nombre de centrafricains désireux dinvestir le champ des affaires, doit remettre au goût du jour ses projets : société immobilière, dexport de produits du crûs, dexploitations agricoles modernes et diversifiées.
Lobjectif véritable est de doter les travailleurs dun pouvoir dachat, aux entreprises existantes de passer de la survie à une autre étape plus dynamisante, afin enfin de matérialiser les droits des citoyens, des retraités, des étudiants
*Le gouvernement doit faire adopter dans un court terme, une loi programme validée par lassemblée nationale avec des objectifs dans le temps. Il est tout a fait inadmissible de sattacher à une gestion rigoureuse et lisible uniquement, lorsque les " prétendues missions salvatrices " du FMI et de la Banque Mondiale sapprêtent à venir à BANGUI. Cette loi reprendra et formalisera lensemble des propositions réalistes et significatives qui émergent du dialogue national, des débats parlementaires et dexperts, des exigences exprimées par les masses laborieuses des travailleurs et des paysans notamment jeunes. Tout un peuple on le sait est en quête dun " trésor caché " dont la découverte est probable vu les atouts de notre pays. Il appartiendra au gouvernement de rendre compte étape après étape de lexécution des principaux axes de ce cadre législatif : nationalisations des ressources stratégiques (bois et diamants), identification et développement dincitations en vue dinvestissement dans les " secteurs porteurs " de léconomie nationale et qui est intégrée aux économies des états voisins et de lespace CEMAC, augmentation des performances des administrations en charge de la bourse de lEtat, priorités daffection des ressources mobilisées pour réaliser les droits des travailleurs, des paysans et des jeunes centrafricaines et centrafricains.
Cest seulement de cette manière que les élections, la paix,ppuyer n ne peuvent s'l'mmun des compatriotes.ation nationale.ricaines et centrafricains.s notalmires et d' la démocratie, la réconciliation nationale deviendront des concepts chargés de sens pour le commun des compatriotes. Ils sappuyent sur des résultats immédiats palpables par les masses dune part et dautre part sur le sentiment que cette partie de lAfrique a pris conscience quelle doit compter sur ses propres atouts et potentialités. Tout ceci sinscrit dans un contexte international défavorable et inéquitable que nous allons justement analyser dans notre prochaine réflexion. Elle portera sur les défis de la RCA après le 11 juin 2005, date de la fin de la transition amorcée le 15 mars 2003.
Actualité Centrafrique de sangonet