La diplomatie centrafricaine et comment jeter la poudre aux yeux pourrait faire très mal

 

En Afrique, les démons du fratricide, de l’épuration ethnique, du pouvoir personnel, de l’égoïsme, de la religion ou de la division avaient été partout présents et, avaient été particulièrement actifs dans des pays comme le Cameroun, le Nigéria, le Soudan, l’Ouganda, le Tchad, le Rwanda, le Burundi, le Congo Brazzaville, le Congo Démocratique, la Centrafrique, selon les époques et pour ne citer que quelques exemples.  Des leaders politiques qui avaient prétendu être les portes-paroles de groupes avec des révendications légitimes ou pas, avaient lâché ces démons dont les manifestations avaient été l’intolérance, la haine, la vengeance, l’intimidation, l’exil, la torture et la mort.  Et une fois que ces démons avaient été lâchés, leurs maîtres n’avaient jamais sû contenir ni limiter l’étendu des effets ou des dégats.  Aujourd’hui, plusieurs de ces leaders qui se reconnaitraient certainement ici, attendraient un jour de rendre compte de leurs actes devant tout ceux et toute celles à qui ils avaient directement ou indirectment causé du tort et devant l’histoire.

 

Il y aurait toujours ces démons dans le Darfour, au Soudan.  Et l’on se demanderait bien pourquoi un groupe s’acharnerait à infliger autant de mal à leurs frères, à leurs soeurs et aux enfants, pendant aussi longtemps, sans se rendre compte de la monstruosité de leurs actes et sans éprouver aucun remords?   Dieu seul aurait la réponse à cette question et que nous aurions du mal à comprendre.  De même, l’on pourrait se demander pourquoi l’histoire des différentes rébellions tchadiennes n’avait toujours pas appris à ces frères ennemis l’obligation de rétablir définitivement une paix des braves dans ce pays, puis la nécessité de faire profiter à toute la population les bénéfices inattendues de la manne pétrolière?  Là aussi, nous pensons que seuls les tchadiens pourraient nous convaincre de la réponse appropriée. En Centrafrique, des militaires, certains généraux et Bozizé avaient donné les mauvais exemples de la mission véritable d’une armée nationale en donnant à leurs hommes une nouvelle définition des règles de la discipline et de l’honneur, en semant les mauvais grains de la rébellion par la pratique des mutineries et des coups d’état, en prêchant l’anarchie et la destruction, et, en instituant la règle de l’impunité ou celle de l’amnistie pour leurs sbires et ceux-là qui seraient proches du pouvoir. 

 

Aujourd’hui, ces mêmes militaires centrafricains qui avaient donné les exemples de l’anarchie feraient semblant de désapprouver cette pratique par d’autres groupes.  Les mauvais grains qu’ils avaient semés, avaient fini de germer, et les arbres étaient devenus grands.  Et l’on constaterait enfin avec beaucoup d’amertume que ces mêmes militaires et Bozizé seraient aujourd’hui, incapables à eux seuls de règler le compte à ces zaraguinas, à ces bandits ou à ces prétendus rébelles qui pillent, volent et tuent sans discernement.  Bozizé et les férus des partis politiques qui avaient rallié son régime seraient incapables aujourd’hui de véritablement rétablir l’ordre, la sécurité et la paix sur tout le territoire centrafricain, en ramenant rapidement à la raison leurs compagnons d’armes, mercenaires et autres ou en offrant par exemple des opportunités de travail productif à ces désoeuvrés.

 

L’on pourrait soutenir avec certitude que l’insécurité dans le pays, les arriérés des salaires et pensions, l’irrégularité des payes, et la présence des réfugiés centrafricains au Tchad seraient les priorités du gouvernement de Bozizé. Malheureusement tous ces problèmes seraient fermement occultés.  Et Bozizé voudrait faire croire aux centrafricains que les raisons de l’insécurité sur le territoire seraient les manigances de Patassé ou de Démafouth dans leurs exils.  Celui-ci voudrait faire également croire que l’absence de progrès sociaux et économiques, toujours persistente sous sa gouvernance, serait dûe à la réticence de la communauté financière internationale à octroyer beaucoup d’argent frais à son gouvernement pour des projets de développement. A note humble avis, il n’en serait rien et les raisons avancées ne seraient en réalité que les fruits de l’imagination de Bozizé ou de ceux dont il écoute les conseils.  Et nous serions persuadés que la majorité des centrafricains objectifs serait de cet avis, quelle que soit leur affinité politique.

 

Malgré la gravité des problèmes d’insécurité et du retard persistent dans le lancement effectif des projets sociaux et économiques, et, malgré l’urgence de la recherche de solutions adéquats aux maux centrafricains, on lirait sur certains sites Internet que Bozizé chercherait querelle au gouvernement soudanais et qu’il aurait pris la décision de fermer les frontières avec ce pays.  Et nous soupçonnerions que le véritable mobile de cette décision avait été de témoigner de sa solidarité à l’endroit de son ami Idriss Déby, envers lequel il aurait certaines dettes morales et financières.  Mais enfin, est-ce que Bozizé ne s’était jamais demandé, en tant que Ministre de la Défense, si la Centrafrique avait le fouet de la guerre ou d’où son gouvernement tirerait les ressources financières, les armes et les moyens logistiques pour mener une offensive quelconque contre le Soudan?  S’était-il jamais demandé quelles troupes il enverrait au front pour soutenir son ami Déby, si à l’évidence les hommes de son armée nationale éprouvent depuis, d’énormes difficultés à donner le change aux petits groupes de malfaiteurs qui sillonnent le territoire national en causant du tort à une population innocente?  Bozizé se souvient-il qu’il y avait eu des braconniers étrangers dans la Vakaga, le Bamingui-Bangoran, la Haute Kotto, le Haut Mbomou et que Bangui n’avait jamais réussi à les chasser définitivement hors des limites territoriales centrafricaines?  L’insécurité en Centrafrique serait causée par des zaghawas, par d’anciens rebelles tchadiens, puis par des nationaux et autres étrangers qui étaient venus gonfler leurs effectifs.  Est-ce que Bozizé estimerait que ces effectifs ne donnant pas assez de mal au peuple centrafricain, il faudrait donner l’occasion au gouvernement de Khartoum d’y adjoindre ses janjaweeds ou son armée?

 

Enfin, soyons sérieux et conséquent!  Mais essayons encore cette autre hypothèse, est-ce que Bozizé aurait estimé que cette stratégie de fermeture des frontières correspondrait à une bonne diplomatie, susceptible d’apporter une résolution rapide et satisfaisante aux graves problèmes humains du Darfour?  Est-ce que des solutions au génocide dans le Darfour, à la nouvelle rébellion tchadienne ou encore au conflit entre Déby et le gouvernement de Khartoum, arriveraient par la fermeture savamment imaginée par Bozizé et son gouvernement des frontières entre la Centrafrique et le Soudan?   Mieux encore, est-ce que le peuple centrafricain avait élu Bozizé à la tête de l’état centrafricain pour que celui-ci engage éventuellement un conflit armé quelconque contre un pays voisin dans la sous-région?  Si Bozizé avait des instincts belliqueux, celui-ci devrait bien choisir la guerre à laquelle il voudrait faire participer le peuple centrafricain.  Le peuple centrafricain réclamerait depuis la satisfaction de ses besoins de paix, de sécurité, de travail et de prospérité.  Après plus d’une année de gouvernance démocratique de Bozizé les résultats attendus par le peuple centrafricain tardent à se manifester.  Et selon nous, si Bozizé et la majorité des députés et des partis politiques qui le soutient à l’Assemblée Nationale pense que la priorité nationale serait de soutenir Idriss Déby dans son conflit avec sa rébellion ou avec le gouvernement de Khartoum, nous pensons que rien, absolument rien, ne les empêche de démissionner et de réaliser individuellement leurs rêves en se mettant à la disposition de leur frère Déby à Ndjamena.  Ou est-ce que cette fois encore Bozizé chercherait à faire croire au monde qu’en fermant les frontières avec le Soudan, cela résoudrait le gros problème de l’insécurité dans le pays?  Mais ce problème d’insécurité en Centrafrique n’était-il pas plutôt arrivé du côté tchadien?  Enfin, quelqu’un nous rétorquerait que la décision de Bozizé, de son gouvernement et de l’Assemblée Nationale avait été prise dans le contexte souverain de protection des intérêts de la Centrafrique.  De quels intérêts parlez-vous donc?  La paix avec tous les pays voisins de la région n’est-elle pas un de ces intérêts et qui serait d’importance? 

 

S’il vous plaît, Monsieur le Président de la République et Honorables Députés, est-ce que vous pourriez vous soucier de vous occuper d’abord de règler les problèmes urgents des centrafricains avant de vous mêler des affaires de Déby et du Soudan et des querelles entre les tchadiens?

 

Jean-Didier Gaïna

Virginie, Etats-Unis d’Amérique (1er mai 25006)