Crise du Darfour: Paris au secours du Tchad et de la Centrafrique

Par Christophe de ROQUEFEUIL

PARIS (AFP), mardi 14 novembre 2006 - De plus en plus inquiète du risque de débordement du conflit du Darfour, la France apporte un soutien militaire accru aux régimes fragilisés du Tchad et de la Centrafrique, confrontés à des rébellions accusées de trouver appui dans la province soudanaise en proie à la guerre civile.

Paris prône le déploiement d'une force internationale à la frontière entre ces deux ex-colonies et le Soudan, mais peine à convaincre Khartoum d'autoriser un tel déploiement.

Le ministère des Affaires étrangères a annoncé lundi que la France allait apporter un soutien logistique et dans le domaine du renseignement aérien à l'armée centrafricaine face à l'avancée de rebelles dans le nord-est du pays, qui jouxte le Soudan. Cette action se fera "en étroite liaison avec les organisations régionales africaines", notamment la Fomuc, la force multinationale de la Communauté économique des Etats de l'Afrique centrale (Cémac), a tenu à préciser Paris.

"Nous sommes préoccupés par l'évolution de la situation dans le nord-est de la République centrafricaine (RCA)", a déclaré le porte-parole du Quai d'Orsay, Jean-Baptiste Mattéi. Le gouvernement du président François Bozizé, fidèle soutien de son voisin tchadien Idriss Deby Itno qui l'avait aidé à prendre le pouvoir en 2003, fait face aux rebelles de l'Union démocratique des forces pour le rassemblement (UDFR), qui ont poursuivi dimanche leur avancée vers l'ouest, menaçant la ville minière de Bria, après s'être emparés de Birao et Ouadda Djallé, dans l'extrême nord-est du pays.

L'inquiétude française n'est toutefois pas nouvelle. En juillet déjà, Paris avait fait état d'un "soutien logistique" et d'une "aide tactique" pour aider Bangui face à des troubles dans le nord. Cette assistance comprenait notamment un avion militaire de transport C-130 pour acheminer la logistique lourde, ainsi que des missions d'observation aériennes de la part d'autres appareils militaires. Paris assure aussi le transport par hélicoptères de soldats de la petite armée centrafricaine, sous-équipée.

Le ministère français de la Défense a confirmé lundi que ce dispositif, comprenant également 200 militaires, était encore en place pour aider les forces centrafricaines. Le regain de tension en Centrafrique survient peu après une aggravation de la situation au Tchad, où l'état d'urgence vient d'être décrété après de sanglants affrontements entre Arabes et non-Arabes dans l'est, et où le président Deby est menacé par une rébellion accusée elle aussi de trouver appui au Soudan voisin.

Le tir d'un missile sol-air le 24 octobre contre un avion de reconnaissance français Breguet Atlantique dans l'est du Tchad avait ravivé les craintes de Paris sur le niveau d'armement de la rébellion et sa détermination à prendre le pouvoir.

Paris et N'Djamena sont liés par un accord de coopération militaire et la France maintient dans ce pays 1.100 hommes appuyés par des Mirage F1, le dispositif Epervier, en place depuis 1986.

En avril déjà, une précédente offensive rebelle au Tchad avait amené la France à intensifier ses activités de soutien logistique et de renseignement aérien au profit des forces gouvernementales.

Le risque de voir le conflit du Darfour prendre une dimension régionale a été au centre d'une visite, de samedi à lundi, du chef de la diplomatie Philipe-Douste Blazy, en Egypte puis au Soudan.


Birao (République Centrafricaine) : bilan meurtrier

icicemac.com (Afriquecentrale), 4 novembre 2006

Les combats pour la prise de Birao, ville du nord-est de la Centrafrique tombée lundi aux mains de rebelles, ont fait dix morts dans les rangs de l’armée et deux parmi les assaillants, a affirmé mardi un porte-parole du groupe qui assure contrôler cette localité.

 

"Les combats ont duré en tout 45 mn, il n’y a pas eu de résistance. Les forces régulières ont été mises en débandade", a déclaré par téléphone satellitaire le capitaine Abakar Sabone, porte-parole de l’Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR), qu’il a présenté comme une alliance de rebelles centrafricains.

 "Nous avons dénombré 10 morts parmi les forces gouvernementales et 2 dans nos rangs", a-t-il ajouté, assurant que les rebelles ne s’étaient pas "attaqués aux civils".

 Selon le capitaine Sabone, les rebelles ont récupéré onze véhicules des Forces armées centrafricaines (Faca), "dont deux équipés et bourrés d’armes".

La présidence centrafricaine a reconnu lundi soir que Birao, à plus de 800 km au nord-est de Bangui, près des frontières tchadienne et soudanaise, avait été "investie" par des "assaillants non identifiés" venus selon elle du Soudan voisin, qu’elle a accusé d’"agression barbare".


Sans fournir de bilan précis, la présidence a évoqué "des pertes en vies humaines au sein des forces armées nationales" et "de la population civile".


Le capitaine Sabone a présenté l’UFDR comme une coalition créée en septembre au Rwanda et réunissant trois groupuscules centrafricains dont la prise de Birao est le premier fait d’armes d’envergure. Son chef est Michel Am-Non Droko Djotodia, inconnu sur la scène centrafricaine.

L’attaque de Birao avait dans un premier temps été attribuée à une autre petite rébellion, l’Union des forces républicaines (UFR) du lieutenant Florian Ndjadder-Bédaya, mais le porte-parole de l’UFDR a assuré que les deux mouvements n’étaient pas liés.

La nouvelle alliance rebelle "s’engage à mener des actions militaires contre le pouvoir anti-démocratique, mafieux et ethnique du président François Bozizé, qui s’oppose au dialogue", a expliqué son porte-parole.


Toujours selon le capitaine Sabone, le chef d’état-major de l’UFDR est "le général Moustapha Maloum", nom de guerre d’Abdoulaye Miskine, un ancien homme de main du président déchu Ange-Félix Patassé, renversé en mars 2003 par le général Bozizé et aujourd’hui exilé au Togo.


Quant au capitaine Sabone, il faisait partie des "libérateurs" qui ont accompagné François Bozizé dans sa conquête du pouvoir. Il a pris la tête en 2004 d’un mouvement d’"ex-libérateurs" qui se jugeaient mal récompensés.

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